CSE Comité Justice Scolaire : 20 mars 2015

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Transcription de la présentation:

CSE Comité Justice Scolaire : 20 mars 2015 Démocratisation de l’accès à l’enseignement universitaire et stratification du système d’enseignement obligatoire Pierre Canisius Kamanzi & Christian Maroy Merci de nous avoir invité La présentation que nous ferons aujourd’hui est un travail en cours Son point de départ est une réflexion sur le rôle que les marchés scolaires (j’ai été auteur d’un travail avec GF et AVZ sur les marchés scolaires, 2013 ) , la ségrégation accrue entre établissements tendent à produire sur les inégalités ; autrement dit que les inégalités dans les systèmes scolaires, la reproduction sociale dont parlait Bourdieu dans les années 70 prend de nouvelles formes aujourd’hui, qu’elle est aussi le résultat de nouvelles formes de structures scolaires, notamment le marché et la stratification croissante de la qualité des écoles et des programmes au sein de l’enseignement obligatoire. Ce qui a été largement documenté en Europe, en Belgique (cfr article de Dumay, Dupriez Maroy dans RFS, 2009), n’est-il pas aussi le cas au Québec ? l’organisation et la stratification croissante du système scolaire , de ses « offres éducatives » n’ont –elles pas des effets négatifs et contradictoires par rapport à une optique de politique scolaire, formellement affichée par de nombreux systèmes scolaires, notamment au Québec, à savoir l’égalité des chances, la « démocratisation » de l’accès (notamment à l’enseignement supérieur) Dit d’une autre façon, en partant davantage d’un questionnement quant aux politiques scolaires, ne peut-on pas dire aujourd’hui, les politiques de « réussite pour tous » , de démocratisation de l’accès de tous à l’enseignement supérieur ne sont-elles pas de plus en plus contrebalancées, contrariées par d’autres types de politiques, celles qui veulent faire droit à la diversité des besoins des élèves, à la diversité de leurs projets et aptitudes, à la diversité de leurs aspirations , à la diversité des choix scolaires de leurs parents en terme d’établissements scolaires.

Plan de l’exposé Démocratisation de l’accès à l’éducation : balises conceptuelles : quelle démocratisation? Quelles conceptions de la justice scolaire ? Quelques jalons et succès des politiques scolaires québécoises en terme de démocratisation Choix et diversification des établissements au secondaire : quels effets sur la démocratisation de l’accès à l’enseignement universitaire? Discussion : Nouvelles formes d’inégalités scolaires et promotion de la diversité et du choix scolaire : enjeux du point de vue des politiques scolaires Nous le ferons en trois temps ; D’abord présentation de quelques balises conceptuelles : qu’entend ton par démocratisation ; quelles conceptions/acceptions des objectifs de démocratisation scolaire (égalité de quoi : De l’accès ?  des acquis/résultats ? Des chances sociales d’accès à l’enseignement supérieur etc) ; Ensuite nous présenterons (rappellerons) rapidement quelques jalons des politiques scolaires et quelques succès de ces politiques en matière de justice scolaire, pour arriver à montrer d’ores et déjà que la « démocratisation quantitative » du système, son expansion/massification de son accessibilité (notamment à l’enseignement universitaire et collégial) ne va pas forcément de pair avec une démocratisation plus « qualitative » Dans un troisième temps, nous présenterons notre étude sur les effets de la diversification des structures et des offres d’enseignement sur les parcours des élèves jusqu’à l’enseignement universitaire ; les parcours scolaires suivis au secondaire (entre privé, « programmes particuliers » dans le public et programmes réguliers au public affectent clairement les chances d’accès à l’enseignement universitaire Et nous conclurons en ouvrant un débat ; par delà l’effet des caractéristiques indivividuelles, sociales et « académiques » des élèves,, la structure à nouveau stratifiée du système scoalrie (par opposition à l’idéal du tronc commun) tend à « produire » des inégalités d’accès à l’enseignement supérieur et universitaire ; Autrement dit, une question politique cruciale sera d’arbitrer entre tensions entre objectifs politiques scolaires qui ont conduit à ces structures stratifiées (égalité , mais aussi qualité et excellence, prise en compte accrue de la diversité des élèves, développement d’une relève de main-d’oeuvre qualifiée, technique et scientifique, ) dans un contexte social d’individualisation, de compétition accrue et de mondialisation ;

Démocratisation de l’accès à l’éducation : balises conceptuelles Concept d’accès à l’éducation a été central dans les politiques scolaires du Québec Promotion de cette finalité depuis le rapport Parent Etats Généraux de l’éducation : de l’accès à « l’accès à la  réussite » : « réussite du plus grand nombre ou de tous » Enjeu de l’accès à l’enseignement universitaire reste central : voir le conflit du « printemps érable » Mais ambiguïtés : quelle accessibilité ? Par rapport à quelle conception de la justice scolaire ? Sources d’inspiration théorique : démocratisation quantitative ou qualitative (Prost, 1986) ? Travaux de Duru-Bellat (2009) et Dubet (2004) sur la justice scolaire ; Dandurand (1990)

Démocratisation quantitative = élargissement ou extension des personnes scolarisées à un niveau d’étude, résultat de l’allongement des études ou de l’élargissement des voies et critères d’accès Elle est mesurée par l’accroissement des effectifs étudiants (en termes relatifs ou absolus) à un certain niveau d’étude (ex. fin du secondaire, ou du post-secondaire) . Qu’entend-on exactement par démocratisation ? Distinction entre démocratisation « quantitative » et démocratisation « qualitative » (Prost, 1986) :

démocratisation qualitative Elle désigne l’égalisation des chances statistiques d’accès à un niveau d’étude quelles que soient les caractéristiques sociales « héritées » des individus (par ex. capital économique, culturel de la famille, genre, origine nationale) et d’en sortir avec un diplôme (égalité des chances de réussite) Elle implique une égalisation des chances entre « groupes » socialement construits (et non entre individus) Qu’entend-on exactement par démocratisation ? Distinction entre démocratisation « quantitative » et démocratisation « qualitative » (Prost, 1986) : La démocratisation quantitative renvoie à l’accroissement des effectifs d’une classe d’âges au sein d’un certain niveau d’étude. → Augmentation du nombre d’inscrits au sein de l’enseignement supérieur (ou de l’Université) La démocratisation qualitative concerne les différenciations entre groupes sociaux à chacun des niveaux scolaires. → Percevoir si chacun a une chance égale d’accéder à l’enseignement supérieur (ou à l’Université) et d’en sortir avec un diplôme.

démocratisation qualitative 2 La démocratisation qualitative est conditionnée par plusieurs types de finalités politiques égalisatrices ou compensatoires : Égalité d’accès Égalité de traitement (= égalité de conditions de scolarisation) Équité et politiques compensatoires (rupture avec le modèle « méritocratique » d’égalité des chances) Égalité des résultats (à un niveau scolaire donné, généralement les acquis « de base », au milieu ou à la fin du secondaire) = conceptions de la « justice scolaire » L’égalité d’accès correspond au droit de tous à l’instruction. Il s’agit de supprimer ce qui freine ou empêche la scolarisation : promotion de la gratuité scolaire, combat pour l’obligation scolaire, bourses aux familles défavorisées, développement d’une offre scolaire géographiquement équilibrée Finalité Fortement présente au Québec dans les politiques de modernisation de l’école suite au rapport Parent (accès au secondaire long et post-secondaire, par une visée de gratuité, l’augmentation de l’offre et une distribution de l’offre dans tout le territoire) Question toujours d’actualité (cfr la question des « frais de scolarité » dans l’enseignement universitaire, des entorses à la « gratuité scolaire » dans les CS) Egalité de traitement consiste à donner les mêmes conditions d’apprentissage à tous, même si au départ et à l’arrivée des inégalités individuelles de capacités ou compétences existent et subsistent. = visée d’égalité des conditions de scolarisation. Des programmes, mais surtout des contenus d’apprentissage de même qualité Des conditions matérielles d’apprentissage identiques : locaux, manuels, ordinateurs, salles de sport, accès aux biens culturels Des enseignants aux qualifications et aux expériences d’enseignement équivalentes Des conditions « sociales » d’apprentissage proches (par ex. équilibre de composition académique et sociale des élèves de l’école ou de la classe) = éviter des « discriminations négatives » pour certains élèves, régions, écoles L’égalité de traitement a été conçue longtemps comme la visée d’une même école pour tous les enfants, le plus longtemps possible (école polyvalente vs les collèges classiques, après le « rapport Parent) La référence à l’équité suppose qu’on ait renoncé à atteindre l’égalité au sens strict (Voir J. Rawls, Théorie de la justice, Seuil, 1987). L’équité repose sur l’idée qu’il peut être juste de distribuer les ressources de manière inégale pour faire face à des situations inégales (de départ) sur un plan économique, culturel, ou d’un « handicap » individuel . Elle justifie les politiques de discrimination positive (ou politique compensatoire) pour les familles défavorisées ou les élèves HDAA: il s’agit d’accorder plus de ressources aux écoles qui accueillent en grand nombre des élèves issus de ces « groupes cibles » ou individus « cibles ». Pour les établissements en zone/situation de défavorisation (SIAA) Elle se différencie donc de la conception méritocratique de l’égalité des chances (conçue comme l’idée que l’égalité d’accès et l’égalité de traitement rend l’école « juste », car mettant tout le monde sur « la même ligne de départ », et dans les mêmes conditions de compétition. (pas d’avantage indu pour les uns ou de désavantage pour les autres). Dès lors les différences de performance scolaire révèleraient le mérite (l’effort et les aptitudes de chacun) ou leur goût personnel des élèves ; les inégalités de sortie du système scolaire sont légitimes. l’égalité des acquis concerne les apprentissages visés/effectivement réalisés au cours d’un cycle d’enseignement ou à la sortie de l’école (résultats égaux) Il s’agit dès lors de viser pour tous l’appropriation d’une « culture commune », d’un bagage de savoirs ou compétences jugés indispensables pour s’intégrer professionnellement et socialement (= acquis de base) Apparition d’objectifs d’acquisition pour tous : « socle de connaissances et compétences » (FR) ; « socle de compétences » (B) ; « tronc commun » d’enseignement pour tous ( QBC) (à la fin du secondaire 2 ou 3) = réussite pour tous l’égalité des acquis tolère des différences importantes entre élèves dans les résultats obtenus au-delà du socle commun.

Démocratisation quantitative et politiques d’accessibilité : un succès relatif Du point de vue de la démocratisation quantitative, les politiques scolaires québécoises d’accessibilité ont été un succès relatif Augmentation des taux d’accès (élargissement de la participation) : Au niveau collégial Au niveau universitaire

Gr. 1 Évolution du taux d’accès aux études collégiales – enseig Gr. 1 Évolution du taux d’accès aux études collégiales – enseig. ordinaire Le MELS ne tient compte que des étudiants.es inscrits pour la première fois à un programme conduisant à un diplôme d’études collégial (DEC) au niveau de l’enseignement ordinaire seulement. Le niveau de 60% d’accès au collégial est atteint dès le milieu des années 90 (léger tassement depuis, notamment en formation technique) Source : MELS Indicateurs de l’Éducation (2001 et 2011)

Gr 2 Évolution du taux d’accès aux études universitaires Le MELS ne tient compte que des programmes conduisant au baccalauréat, à la maitrise et au doctorat. Tout autre programme court tel que les certificats et les microprogrammes sont exclus du compte Cette augmentation des taux d’accès au palier universitaire, connait des fluctuations (notamment liés aux frais de scolarité voir Travaux équipe Doray ) mais est significative Elle est aussi conditionnée par la réussite et la diplomation au niveaux antérieurs, notamment au collégial et au secondaire. (De plus on sait que la part d’étudiants accédant à un diplôme d’études supérieures au Québec et au Canada est un peu plus importante, par rapport au reste de l’OCDE : % de 25-34 ans détenteurs d’un diplôme de l’enseignement tertiaire 32% au canada, 30 % dans l’OCDE, 29% pour l’UE21 (OCDE, 2014, regards sur l’éducation, diplôme tertiaire de type A) ) Source : MELS Indicateurs de l’Éducation (2001 et 2011)

Gr. 3 Cheminement de 100 étudiants Gr. 3 Cheminement de 100 étudiants.es dans le système scolaire québécois – comportement observé entre deux périodes Cette augmentation de l’accès au collégial et au palier universitaire, et est évidemment conditionnée par la réussite et la diplomation au niveaux antérieurs, notamment au secondaire. Dans ce graphique 3 On voit que les taux de diplômation au secondaire ont cru entre 2000 et 2010, en comptabilisant tous les éléves, qui décrochent ce diplome (voie générale et professionnelle) : de 83 à 94 % En 2000, 71 % l’obtiennent avant 20 ans (12% après 20 ans) ; en 2010, 74% l’obtiennent avant 20 ans, et 20% à 20 ans et plus. ; cible est de 85% depuis 1996 (80 % depuis début 2000) (Le taux de diplômation au secondaire des élèves de –25 ans est d’ailleurs le plus élevé au Canada. : plus de 90 % contre 85 % en moy au canada : environ) Par contre pas de progression du Taux de diplômés au collège : 39% en 2000 et en 2010 (60 pc visé) (pas de vraie progression sur ce plan) taux de diplômés au bac s’améliore aussi :32% en 2010 contre 27% en 2000 (30 pc visé) ; (Du point de vue du taux de diplômation , les objectifs des années 90 (états généraux) atteints au niveau univ, mais pas au niveau collégial ou secondaire (avant 20 ans); Plan stratégique 2005-2008 Les orientations et les objectifs de cette planification triennale tiennent compte de la vision et des priorités d’action du gouvernement énoncées dans « Briller parmi les meilleurs et du Plan de modernisation de l’État 2004-2007 ». « Pour mesurer la performance globale du système d’éducation québécois, l’ensemble des partenaires ont convenu, en 1996 (états généraux ), de quatre cibles stratégiques en matière de diplomation qui sont toujours d’actualité. Ces cibles concernent la proportion d’une génération d’élèves ou d’étudiantes et d’étudiants qui obtiennent un diplôme aux différents ordres d’enseignement. Au secondaire, on vise une cible de 85 p. 100 pour les jeunes de moins de 20 ans. Pour le diplôme d’études collégiales, la cible est de 60 p. 100. Pour le baccalauréat, on vise un taux de 30 p. 100. Une cible a également été fixée pour la formation professionnelle, soit que 15 p. 100 des élèves obtiennent un diplôme de ce type de formation avant l’âge de 20 ans. L’amélioration de la diplômation au secondaire est le résultat d’une politique de « réussite pour tous » mené au secondaire depuis les états généraux et le milieu des années 90 On peut dire qu’une politique de promotion d’égalité des acquis de base a fortement été promue. Cela n’a pas pour autant entrainé une forte accentuation de l’accès au collégial (resté stable) Source : MELS Indicateurs de l’Éducation (2001 et 2011)

Politique de « réussite pour tous » au niveau de l’enseignement obligatoire (primaire et secondaire) : depuis les EGE, politique de « réussite de tous » ou du plus grand nombre » (sous formes diverses) La « lutte au décrochage » et une politique de « réussite de chaque élève » sont menées via deux moyens : des politiques de différenciation et d’efficacité pédagogique au sein des classes (pédagogie différenciée, cycles d’apprentissages, formation des enseignants, mais aussi « reddition de compte » sur la réussite (gestion axée sur les résultats) Via des politiques compensatoires (ciblées sur les établissements défavorisés (SIAA) et élèves en difficulté (EHDAA)) « la réussite pour tous » peut être rapprochée d’une nouvelle visée de justice scolaire (égalité des « acquis de base ») mais aussi d’une visée d’efficacité/efficience au sein du système La lutte au décrochage, la réussite de tous ou du plus grand nombre deviennent des objectifs des plans stratégiques du MELS depuis début des années 2000 à la suite des états généraux Ces politiques peuvent être notamment évaluées du point de vue de l’égalisation des acquis par l’Évolution du décrochage

Gr 4 Évolution du décrochage annuel L’évolution apparente est positive, l’écart entre fille et garçons diminue un peu ; cependant , la définition des taux de d’obtention d’un premier diplôme est très large et est sans doute aussi l’effet de l’élargissement de la gamme de diplômes et certificats (nouveaux certificats créés comme certificat de formation dans un métier semi-spécialisé en 07/08 Il y a peut être une diminution du décrochage, due à une différenciation « horizontale » accrue des diplômes au secondaire Taux de décrochage = taux de sortie sans diplômes ni qualification du système scolaire secondaire = parmi l’ensemble des sortants de la formaiton générale, au secteur jeunes, la proportion de ceux qui obtiennent durant l’année considérée ni un diplôme ni une qualification du secondaire et qui ne sont pas réinscrits l’année suivante, nulle part dans le système scolaire Diplômes et qualif retenus : DES, DEP, attestation de spécialisation professionnelle, certificat en insertion socioprofessionnelle des jeunes, (ISPJ) attestation de formation professionnelle (AFP), certificat de formation dans un métier semi-spécialisé (CFMS, depuis 2007/08) Cependant, ces taux de décrochage (abandon et non diplômation) sont très variables selon les régions du Québec, comme l’a montré Michel Perron (2013) : taux de sortie sans diplômes sont beaucoup plus forts au Nord du Québec, Côte nord, Outaouais, Laurentides, Abitibi que dans la région Capitale, Saguenay, Bas saint laurent, avec Montréal notamment entre les deux

Démocratisation qualitative au secondaire ? Peu de données sur les inégalités de chances d’obtention des diplômes entre groupes sociologiques décrocheurs = en majorité des garçons ; Inégalités territoriales importantes du décrochage (Perron, 2013) Taux d’obtention d’un diplôme secondaire, plus faible pour migrants de 1ère gén (nés à l’étranger) vs 2ème et 3ème génération (Mc Andrew & al., 2013) Pas de données sur les caractéristiques socio- culturelles des élèves, notamment leur variation selon le type de diplôme de sortie (DEP/DES, mais autres « certificats ») profils des décrocheurs : en majorité des garçons, mais ils reviennent souvent en formation d’adultes finir leur diplômation/qualification (au-delà de 20 ans) ; mais écarts filles/garçons en baisse Taux d’obtention d’un diplôme secondaire, plus faible pour migrants de 1ère gén (nés à l’étranger) vs 2ème et 3ème génération (Mc Andrew & al., 2013) ; mais avec pas mal de variation Les facteurs explicatifs sont le profil socioéconomique sensiblement défavorable, l’entrée tardive dans le système éducatif québécois avec un retard dans la scolarisation, une scolarisation dans des écoles en milieux défavorisés

La démocratisation qualitative de l’accès à l’université l’égalisation des chances d’accès est loin d’être atteinte (Chenard & Doray, 2013) ; inégalités Selon les revenus annuels des familles Selon le capital scolaire des parents (EPG/ESG) Entre garçons et filles entre francophones et anglophones/allophones Selon l’origine rurale ou urbaine (régression logistique à partir d’un échantillon EJET, en contrôlant résultats scolaires et parcours scolaire, pays d’origine ) Revenus : 3 et 4 ème quartile : 3 X plus de chances que les autres quartiles Capital scolaire universitaire des parents : 5 x plus de chances que les non universitaire Filles : 5 x plus de chances que les garçons Francophones par rapport aux Anglophones et allophones (30% de chances des anglophones/allophones ; ) Ruraux par rapport aux urbains : (80 % des chances des urbains ) Par contre, pas de différences de chances selon l’origine nationale ( 1 parent migrant ou non) ou le statut de minorité visible

Une étude exploratoire, menée avec Pierre Canisius Kamanzi (UdeM, AFE) L’effet de la différenciation du secondaire sur les inégalités d’accès à l’université. Une étude exploratoire, menée avec Pierre Canisius Kamanzi (UdeM, AFE) à partir de la base de données longitudinale EJET (StatCan) ; N = 2677 Avantage de la base de données : elle permet de suivre les parcours étudiants (entre 15 et 25 ans), en contrôlant pour leurs résultats scolaires et leurs ressources sociales familiales des politiques de choix et de diversification accrue des offres scolaires au secondaire ont été menées dans les années 90 Maintien du choix entre secteur privé et public, et financement public partiel du secteur privé (décision ancienne) Assouplissement des choix scolaires au sein du public et promotion de « projets particuliers » au sein de l’école publique (dans les années 80/90) Politiques justifiées d’une double manière : réponse aux demandes sociales de « qualité éducative » des classes moyennes (inquiètes), dans un contexte d’individualisation et de compétition accrue pour l’accès aux places sur le marché du travail Concurrence supposée profitable pour l’amélioration de l’innovation et de l’efficacité éducative (idéologie néo-libérale ; institut économique de montréal ) Une menace supplémentaire pour la démocratisation qualitative ? Cependant, dans les faits, cette différenciation accrue pourrait être vecteur de nouvelles formes d’inégalités, et d’un recul de la démocratisation qualitative

Questions de recherche La fréquentation de l’école privée au secondaire ou d’un « programme enrichi » au public constitue-t-elle un « avantage » relatif au de l’accès à l’enseignement universitaire? Plus profondément, dans quelle mesure la diversification des établissements secondaires et les inégalités de « contexte de scolarisation » selon les établissements peuvent-elle conduire à un recul de la démocratisation qualitative d’accès à la réussite et à l’enseignement supérieur?

Répartition des élèves selon le type d’école et la scolarité des parents (%)

Accès à l’université et enseignement fréquenté à 20 ans (en %) Dans cette échantillon, on constate sans surprise que la proportion d’accès à l’université est plus forte si on fréquente un programme enrichi au public, ou une école privée qu’un programme régulier

Chances d’accès à l’université : effet « net » du programme d’enseignement suivi au secondaire Ce tableau montre que Les inégalités d’accès à l’ens supérieur sont partiellement le produit de la différenciation du système scolaire lui-même ; Le modèle 1 montre l’effet relatif du programme suivi (privé ou public enrichi) sur les chances d’accès à l’université par rapport à la référence du public régulier On peut lire le modèle 1 de la façon suivante : un élève du privé (public enrichi) a une proba d’accès à l’université de 45% (36%) supérieure à celle d’un élève du public régulier. (% sont des coefficients marginaux, dérivés des coef Beta de régressions logistique de 3 modèle prédisant l’accès à l’université). Le modèle 2 montre en effet l’incidence du programme suivi (privé ou public enrichi) sur les chances d’accès à l’université par rapport à la référence du public régulier , quand on contrôle 1) pour les « aptitudes scolaires » de l’élève (ou les acquisitions scolaires préalables mesurée par le test PISA en lecture à l’âge de 15 ans) 2) pour le diplôme des parents 3) le niveau d’étude de leurs enfants souhaité par les parents comme le montre le modèle 2 une partie de l’effet « brut » du programme suivi au secondaire (privé et public enrichi) sur les chances d’accès à l’univ (mesuré par le modèle 1) est liée au capital scolaire des parents de ces élèves et à leurs aspirations par rapport aux études supérieures de leurs enfants ; c’est aussi lié à l’effet des différences de compétences scolaires des élèves (Pisa lecture) à 15 ans: en effet la différence de chances d’accès passe de 45% à 23 % pour un élève ayant suivi le programme privé dans le modèle 2. Le modèle 3 ajoute comme variable de contrôle les aspirations de niveau d’études du jeune lui-même. Le modèle 3 montre que la proba diminue encore en prenant en compte les différences individuelles d’aspirations des élèves (- 3% pour un élève du privé) Le suivi d’un enseignement privé ou publi enrichi a donc un effet « net » qui se surajoute et se combine à l’effet du capital culturel des parents et à l’effet des différences individuelles entre élèves du point de vue de compétences scolaires (Pisa lecture) à 15 ans ou de leurs aspirations d’études. On peut faire l’hypothèse plausible que le programme d’enseignement suivi au secondaire, produit cet effet net en raison d’inégales conditions de scolarisation du privé et du public enrichi, par rapport au régulier : des inégalités de traitement entre élèves sont produites entre élèves selon le programme qu’ils suivent , qui pourraient être liés à des Inégalités de ressources matérielles ou pédagogiques (par ex qualité des conditions matérielles d’enseignement, de la bibliothèque etc- des Ipads etc) inégalités d’appprentissage produites par des « effets de pairs » (apprentissages entre élèves) et des « effets enseignant » (hausse de leurs attentes et exigences si le public est plus « fort ») dues à la « composition sociale et académique » des élèves dans les classes ou les établissements ; une disparité de compositions des classes (du point de vue du niveau scolaire et/ou de la composition sociale) entre classes publiques régulières et classes « enrichies » ou privées , tend à inégaliser les apprentissages Inégalités de qualité éducative, liées à la qualité des enseignants (formation, expérience, stabilité), ou de la collaboration éducative Il y aurait donc un « effet établissement », mais qui n’est pas seulement ou forcément lié à une « meilleure gestion pédagogique » , elle est aussi le produit d’une inégalité sociale et économique. Les inégalités d’accès à l’ens supérieur n’est donc pas seulement aux inégalités sociales dans la société, ou aux différences individuelles entre élèves à 15 ans (partiellement produites par le système scolaire) ; elles sont partiellement le produit de la différenciation du système scolaire lui-même

Chances d’accès à l’université (régression log) Rapports de cotes Sign ( Z) Ens privé 3.35 .000 Ens public enrichi 2.3 Perf PISA en lecture L1 8.9 Perf PISA en lecture L2 6.1 Perf PISA en lecture L3 3.4 .001 Perf PISA en lecture L4 2.2 NS (0.06) Scolarité des parents :Univ 2.1 Scolarité des parents : Collégial 1.1 NS (0.369) Aspirat Parents université 7.5 .029 Aspirat Parents collégial 1.7 Aspirat Jeune université 14.2 Aspirat Jeune collégial 4.7 Aspirat Jeune ne sait pas 6.8

Discussion /Conclusion Démocratisation quantitative de l’accès à l’éducation évidente... mais démocratisation « qualitative » moins assurée Politiques scolaires ambigues : D’un côté, politiques de « réussite pour tous », positives et contribuant à la diminution du décrochage De l’autre, accentuation de la diversité des programmes et du choix scolaire, vecteurs de « ségrégation scolaire » menaçant l’égalité de « conditions de scolarisation » de nouvelles formes de reproduction par l’école des élites sociales se mettent en place Plus seulement, une reproduction sociale « verticale » selon la longueur des études mais une reproduction « horizontale » selon la différenciation du parcours dans l’enseignement obligatoire les politiques scolaires font place à des objectifs et à des décisions qui tendent à être en tension, voire à être contradictoires, et c’est sur un aspect de ces tensions que nous voudrions insister aujourd’hui : la tension entre la visée d’accessibilité à l’enseignement supérieur, d’égalisation des chances qui est mise en avant d’un coté , et de l’autre d’autres politiques de promotion du « choix scolaire », mais aussi de prise en compte de la diversité des besoins et aspirations des élèves et de leurs familles en matière de scolarité (politique d’assouplissement du choix des écoles publiques, et politiques (du ministère comme des CS) de diversification de l’offre de programmes. Ces politiques ont voulu tenir compte d’ évolutions de la société, ( l’individualisation croissante et la diversifications des « aspirations », projets, mais aussi des difficultés et problèmes des élèves) mais ne deviennent-elles pas génératrices de nouvelles formes d’inégalités scolaires, de nouvelles sources d’inégalités.

Discussion /Conclusion Enjeu : prendre la mesure des tensions entre les politiques qui ont voulu donner place à la diversité (des élèves, de leurs projets, aspirations, projets, aptitudes…) et les politiques d’égalisation des chances Risques de la situation actuelle : Non seulement effets sur les inégalités des chances sociales d’accès à l’enseignement universitaire Mais aussi à terme, risque de perte d’efficacité moyenne (dans les compétences/connaissances de base des citoyens… cfr exposé de G Rompré) Risques pour la cohésion sociale : diversification de l’apprentissage civique, en raison d’une diversité des « pairs » à l’école ; moindre brassage social et culturel de l’école secondaire (et primaire) Bénéfice : une meilleure « orientation » /motivation des élèves au cours de leur parcours ?

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