L’orthographe française : quelques aspects historiques et structuraux

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Transcription de la présentation:

L’orthographe française : quelques aspects historiques et structuraux Chapitre 1 L’orthographe française : quelques aspects historiques et structuraux

1.1. Quelques repères historiques Moyen Âge La langue a évolué: l’alphabet latin, qui comprend 22 lettres, ne suffit plus pour écrire tous les sons nouveaux du français naissant: la lettre « u » sert à transcrire tantôt le son [y], tantôt le son [v]; la lettre « i », tantôt le son [i], tantôt le son[ʒ]. L’usure phonétique de certains mots va donner lieu à la formation de nombreux homophones monosyllabiques. Exemple: cinq(<quinque); saint (<sanctu); sein (<sinu); seing (<signu); sain (sanu); ceint (cinctu), tous mots prononcés [s ɛ̃ ].

Renaissance Le trait principal de l’orthographe française à cette époque est qu’elle s’éloigne du phonétisme pour adopter un aspect plus idéographique. Dans les textes, on constate que lettres et mots sont accolés. Les abréviations se multiplient. Les boucles et les jambages s’allongent. Le recours à d’autres signes aide à mieux distinguer des tracés trop semblables. Toute une série de consonnes (que l’on savait muettes) servent de repères diacritiques; on les puisera dans le latin. Exemples: 1. On a ajouté un « h » à « huile, huit, huitre » pour distinguer ces mots de « vile, vit, vitre », puisque la lettre « v » n’était pas encore répandue pour transcrire [v]. 2. On a eu recours à l’étymologie dans de nombreux cas (vingt > viginti) pour éviter les confusions homophoniques. Ainsi de nombreuses erreurs se produisirent (poids >pensum, mais faux rapprochement étymologique avec « pondus »).

XVIe siècle Rappel: Au XVe siècle, Gutenberg invente l’imprimerie. En 1452, la Bible est le premier livre imprimé en série. Dès le XVIe sicle, les imprimeurs vont lutter pour une fixation du français écrit. Les mots se séparent , les caractères sont nettement distincts, les abréviations disparaissent, un système normalisé de majuscules, de signes de ponctuation et d’accents se met en place, remplaçant les procédés compliqués de lettres adscrites. Exemple: L’imprimeur Tory préconise l’emploi de la cédille et de l’apostrophe. Le grammairien Estienne adopte l’accent aigu à la finale. Par ailleurs, de nombreux imprimeurs adoptent le « j » et le « v », proposés par les phonéticiens.

XVIIe siècle On voit s’opposer deux traditions: celle des modernes (grammairiens, éditeurs et écrivains) et des anciens (clercs, gens de lettres, officiers royaux, maîtres des écritures officielles). Les dictionnaires aussi sont partagés. Le dictionnaire de Richelet (1680) est le premier véritable dictionnaire qui recueille l’héritage des réformateurs: Modération des tendances étymologiques Simplification des consonnes doubles Suppression des lettres adscrites compensées par l’emploi des accents graves, aigus et circonflexes Suppression des lettres grecques (y>i) Le dictionnaire de l’Académie française (1694) préconisera une orthographe plus « étymologisante », ancienne: « La Compagnie déclare qu’elle désire suivre l’ancienne orthographe qui distingue les gens de lettres d’avec les ignorants et les simples femmes… ». Cela dit, ce dictionnaire adoptera tout de même « v » et « j » et fera également disparaître un grand nombre de consonnes adscrites (« avril » et non plus « apuril »; « ajouter » et non plus « adjouster »).

XIXe siècle Au milieu du XIXe siècle, en plein scientisme, l’Académie revient à un étymologisme outrancier dans sa sixième édition (1835). Exemple: anévrysme, aphthe, phthisie, rhythme, asyle,… (« monstres » auxquels on se contentera, en 1878, d’enlever un « h »). Le ministère de l’Instruction publique se déclare favorable, en 1893, à un projet de simplification modéré en sept points: Doubles consonnes (échèle, paysane) Lettres grecques (rinocéros, rume, analise, stile) Mots de même série à orthographe contradictoire (chariot/charrette) Alignement des adjectifs et noms en –ent, -ence sur ceux en –ant, -ance et des adverbes en –emment, écrits –ament (prudament) X final muet (bijous, chous) Mots composés (mouvement vers la soudure) Accents (croute, flute, ile, dévoument, évènement) Orthographe des mots étrangers et mots à double genre ou double orthographe Une cabale est menée contre cette tentative de simplification que l’Académie ne soutiendra pas.

1990 Des rectifications de l’orthographe sont acceptées par l’Académie française après de nombreuses tentatives de réforme ayant échoué. Ces rectifications se fondent sur cinq points: L’emploi du trait d’union Le pluriel des noms composés Les accents Les corrections d’anomalie Le participe passé employé avec « avoir » Une nouvelle campagne de dénigrement se déclenche ensuite, dans le but de forcer l’Académie française à revenir sur sa décision. Ce mouvement d’opposition demande notamment qu’il n’y ait pas de circulaire impérative, en particulier dans l’enseignement. Cela étant, en 2008, la Communauté française de Belgique demandera à ses enseignants d’enseigner prioritairement la nouvelle orthographe (sans pour autant sanctionner les anciennes graphies).

1.2. Le système orthographique français Qu’est-ce que l’orthographe? « L’ensemble des fonctions que l’on donne aux lettres et aux signes écrits » (Grevisse – Goosse) Qu’est-ce qu’un phonème? Plus petite unité phonique qui permet de distinguer les mots d’une langue. Un phonème peut connaître plusieurs réalisations concrètes sons. Qu’est-ce qu’un graphème? Plus petite unité graphique à valeur distinctive. A ne pas confondre avec la lettre. En français: Un même graphème peut servir à transcrire plusieurs phonèmes. Exemple: « c » transcrit le [s] (célèbre) et le [k] (cadeau) Un même phonème peut être transcrit par plusieurs graphèmes. Exemple: [z] peut être transcrit tant par « z » (zèbre) que par « s » (case) ]

Principe phonographique vs principe idéographique Illustration avec l’exercice 4 (Une page d’amour, E. Zola) Remarque 1: Le principe de la transcription phonétique est de faire correspondre un symbole à un son (voir API). Le principe de la transcription orthographique est, quant à lui: phonologique (ce qui s’écrit est ce qui se prononce) idéographique (ce qui s’écrit est ce qui se signifie, la représentation d’un sens)

Les valeurs phonologiques Remarque 2: Les valeurs phonologiques En août, le jardin du docteur Deberlé était un véritable puits de feuillage. Contre la grille, les lilas et les faux ébéniers mêlaient leurs branches, tandis que les plantes grimpantes, les lierres, les chèvrefeuilles, les clématites, poussaient de toute part des jets sans fin, qui se glissaient, se nouaient, retombaient en pluie, allaient jusque dans les ormes du fond, après avoir couru le long des murailles ; et là, on aurait dit une tente attachée d’un arbre à l’autre, les ormes se dressaient comme les piliers puissants et touffus d’un salon de verdure. Ce jardin était si petit, que le moindre pan d’ombre le couvrait. Au milieu, le soleil à midi faisait une seule tache jaune, dessinant la rondeur de la pelouse, flanquée de ses deux corbeilles. Contre le perron, il y avait un grand rosier, des roses thé énormes qui s’épanouissaient par centaines. Le soir, quand la chaleur tombait, le parfum en devenait pénétrant, une odeur chaude de roses s’alourdissait sous les ormes. Et rien n’était plus charmant que ce coin perdu, si embaumé, où les voisins ne pouvaient voir, et qui apportait un rêve de forêt vierge, pendant que des orgues de Barbarie jouaient des polkas dans la rue Vineuse.

1. Les phonogrammes (valeurs phonologiques) (1) a. Mots présentant une correspondance graphème/son: la transcription orthographique fonctionne presque comme une transcription phonétique. Véritable: - hormis le « e » muet final - « e » = [e] grâce à l’accent aigu appelé signe diacritique Midi: on a une correspondance stricte [midi]

En août, le jardin du docteur Deberlé était un véritable puits de feuillage. Contre la grille, les lilas et les faux ébéniers mêlaient leurs branches, tandis que les plantes grimpantes, les lierres, les chèvrefeuilles, les clématites, poussaient de toute part des jets sans fin, qui se glissaient, se nouaient, retombaient en pluie, allaient jusque dans les ormes du fond, après avoir couru le long des murailles ; et là, on aurait dit une tente attachée d’un arbre à l’autre, les ormes se dressaient comme les piliers puissants et touffus d’un salon de verdure. Ce jardin était si petit, que le moindre pan d’ombre le couvrait. Au milieu, le soleil à midi faisait une seule tache jaune, dessinant la rondeur de la pelouse, flanquée de ses deux corbeilles. Contre le perron, il y avait un grand rosier, des roses thé énormes qui s’épanouissaient par centaines. Le soir, quand la chaleur tombait, le parfum en devenait pénétrant, une odeur chaude de roses s’alourdissait sous les ormes. Et rien n’était plus charmant que ce coin perdu, si embaumé, où les voisins ne pouvaient voir, et qui apportait un rêve de forêt vierge, pendant que des orgues de Barbarie jouaient des polkas dans la rue Vineuse.

1. Les phonogrammes (valeurs phonologiques) (2) b. Valeurs de position: la valeur du graphème est déterminée par le contexte (variante combinatoire). Rosier: le graphème « s » correspond ordinairement au phonème [s]. Mais dans ce mot, puisque « s » est entre deux voyelles, il transcrit [z]. Vierge: « g » n’a pas sa valeur [g]. Comme il est devant « e », il transcrit [ʒ]. Note: Les valeurs auxiliaires: dans « jet », « t » n’est pas prononcé. Outre le fait qu’il rappelle ici un mot de la même famille (jeter), le « t » aide à prononcer, en l’absence d’un accent, « e » comme [ɛ].

En août, le jardin du docteur Deberlé était un véritable puits de feuillage. Contre la grille, les lilas et les faux ébéniers mêlaient leurs branches, tandis que les plantes grimpantes, les lierres, les chèvrefeuilles, les clématites, poussaient de toute part des jets sans fin, qui se glissaient, se nouaient, retombaient en pluie, allaient jusque dans les ormes du fond, après avoir couru le long des murailles ; et là, on aurait dit une tente attachée d’un arbre à l’autre, les ormes se dressaient comme les piliers puissants et touffus d’un salon de verdure. Ce jardin était si petit, que le moindre pan d’ombre le couvrait. Au milieu, le soleil à midi faisait une seule tache jaune, dessinant la rondeur de la pelouse, flanquée de ses deux corbeilles. Contre le perron, il y avait un grand rosier, des roses thé énormes qui s’épanouissaient par centaines. Le soir, quand la chaleur tombait, le parfum en devenait pénétrant, une odeur chaude de roses s’alourdissait sous les ormes. Et rien n’était plus charmant que ce coin perdu, si embaumé, où les voisins ne pouvaient voir, et qui apportait un rêve de forêt vierge, pendant que des orgues de Barbarie jouaient des polkas dans la rue Vineuse.

1. Les phonogrammes (valeurs phonologiques) (3) Les digrammes: combinaison de deux graphèmes qui correspond à un son unique. Exemple: - milieu (« e » + « u » transcrit [ø]) plantes, perron, embaumé: les voyelles nasales (une voyelle + une consonne nasale « n » ou « m » devant « m,b,p »). Dans d’autres langues, on utilise le tilde ~ pour indiquer une voyelle nasale Les trigrammes: combinaison de trois graphèmes qui correspond à un son unique. Exemple: « feuillages, chèvrefeuille, muraille » où « ill » transcrit [j].

Remarque 3: Les valeurs idéographiques (morphogrammes, logogrammes, lettres historiques) En août, le jardin du docteur Deberlé était un véritable puits de feuillage. Contre la grille, les lilas et les faux ébéniers mêlaient leurs branches, tandis que les plantes grimpantes, les lierres, les chèvrefeuilles, les clématites, poussaient de toute part des jets sans fin, qui se glissaient, se nouaient, retombaient en pluie, allaient jusque dans les ormes du fond, après avoir couru le long des murailles ; et là, on aurait dit une tente attachée d’un arbre à l’autre, les ormes se dressaient comme les piliers puissants et touffus d’un salon de verdure. Ce jardin était si petit, que le moindre pan d’ombre le couvrait. Au milieu, le soleil à midi faisait une seule tache jaune, dessinant la rondeur de la pelouse, flanquée de ses deux corbeilles. Contre le perron, il y avait un grand rosier, des roses thé énormes qui s’épanouissaient par centaines. Le soir, quand la chaleur tombait, le parfum en devenait pénétrant, une odeur chaude de roses s’alourdissait sous les ormes. Et rien n’était plus charmant que ce coin perdu, si embaumé, où les voisins ne pouvaient voir, et qui apportait un rêve de forêt vierge, pendant que des orgues de Barbarie jouaient des polkas dans la rue Vineuse.

Remarque 3: Les valeurs idéographiques(1) Les morphogrammes Les morphogrammes véhiculent une information sur le contenu des mots ou sur le système grammatical. Le contenu des mots: le « m » de « parfum » inscrit ce mot dans une série lexicale Ce graphème est un morphogramme lexical. Le système grammatical: ° dans « mêlaient », le trigramme « ent » indique une conjugaison à la 3e p.pl. ° dans « les », le « s » indique un pluriel (+ auxiliaire pour la prononciation du [ɛ]).  Ces graphèmes sont des morphogrammes grammaticaux.

En août, le jardin du docteur Deberlé était un véritable puits de feuillage. Contre la grille, les lilas et les faux ébéniers mêlaient leurs branches, tandis que les plantes grimpantes, les lierres, les chèvrefeuilles, les clématites, poussaient de toute part des jets sans fin, qui se glissaient, se nouaient, retombaient en pluie, allaient jusque dans les ormes du fond, après avoir couru le long des murailles ; et là, on aurait dit une tente attachée d’un arbre à l’autre, les ormes se dressaient comme les piliers puissants et touffus d’un salon de verdure. Ce jardin était si petit, que le moindre pan d’ombre le couvrait. Au milieu, le soleil à midi faisait une seule tache jaune, dessinant la rondeur de la pelouse, flanquée de ses deux corbeilles. Contre le perron, il y avait un grand rosier, des roses thé énormes qui s’épanouissaient par centaines. Le soir, quand la chaleur tombait, le parfum en devenait pénétrant, une odeur chaude de roses s’alourdissait sous les ormes. Et rien n’était plus charmant que ce coin perdu, si embaumé, où les voisins ne pouvaient voir, et qui apportait un rêve de forêt vierge, pendant que des orgues de Barbarie jouaient des polkas dans la rue Vineuse.

Les lettres historiques Remarque 3: Les valeurs idéographiques(2) Les logogrammes – les lettres historiques Les logogrammes jouent également un rôle sémantique en permettant de distinguer les homophones. Exemple: Puits (différent de « puis ») – là (et non « la ») – tente (et non « tante ») – où (et non « ou ») Les lettres historiques Le « t » de « puits » s’explique par l’influence du terme francique d’origine *putti.

En résumé Dans le système orthographique français, un graphème: peut correspondre à un phonème de la langue. Il réalise ainsi un principe phonographique. PHONOGRAMME peut ne correspondre à aucun phonème, mais remplir un rôle soit grammatical soit sémantique. Il réalise ainsi un principe idéographique. MORPHOGRAMME (grammatical ou lexical) et/ou LOGOGRAMME et/ou LETTRE ETYMOLOGIQUE ou HISTORIQUE

Syllabe graphique vs syllabe phonique Une syllabe = un groupe de sons que l’on prononce d’une seule émission de voix. En français, une syllabe se construit obligatoirement autour d’une voyelle, le noyau (revoir règles de découpage dans la GMF, p.66). Ne pas confondre: La syllabe phonique: elle est dite « fermée » si elle se termine à l’oral par une consonne, « ouverte », si elle se termine à l’oral par une voyelle. Exemple: le mot « empire »  [ɑ̃pir] est constitué de deux syllabes: [ɑ̃]  voyelle (nasale)  syllabe phonique ouverte [pir]  [r] est une consonne  syllabe phonique fermée La syllabe graphique: elle est dite fermée si elle se termine à l’écrit par une consonne, « ouverte », si elle se termine à l’écrit par une voyelle. Exemple: le mot « empire »  le mot écrit est constitué de trois syllabes: « em »  « m » est une consonne  syllabe graphique fermée « pi »  « i » est une voyelle  syllabe graphique ouverte « re »  « e » est une voyelle  syllabe graphique ouverte

Exercice 1 Trembler 2 syllabes phoniques: [trɑ̃] : ouverte [ble] : ouverte 2 syllabes graphiques: « trem- »: fermée « -bler »: fermée

Écriture 3 syllabes phoniques: [e] : ouverte [kri] : ouverte [tyr]: fermée 4 syllabes graphiques: « é- »: ouverte « -cri- »: ouverte « -tu- »: ouverte « -re- »: ouverte

Savoir 2 syllabes phoniques: [sa] : ouverte [vwar] : fermée 2 syllabes graphiques: « sa- »: ouverte « -voir »: fermée

Il n’y a pas de règle spéciale ici. Exercice 2 Allègement al - lè - ge - ment Il n’y a pas de règle spéciale ici. Attention: si « a » seul avait constitué la première syllabe, on n’aurait pas pu faire la coupure à cet endroit. Exemple: aper - ce - voir

Ici « x » est là pour [z], on peut donc couper avant cette consonne. Sixième Si - xième Ici « x » est là pour [z], on peut donc couper avant cette consonne. On ne peut pas couper entre « i » et « è » car « i » transcrit la semi-voyelle yod. On ne rejette pas une syllabe muette en début de ligne, donc on ne peut isoler le « -me ».

Ce mot est ici écrit en A.O. Mille-pattes Ce mot est ici écrit en A.O. Comme il s’agit ici d’un composé, on ne pourra couper qu’entre « mille » et « pattes ». Écrit en N.O., cela donne « millepatte ». Mil - le - patte On peut rajouter une coupure entre les deux « l ». On ne peut toujours pas isoler « te » en début de ligne car « e » muet.

Exercice 3 Exhausser (1) 1. Le graphème « e » correspond, dans une syllabe fermée, au son [ɛ] (valeur de position)  phonogramme 2. Le graphème « x », devant un « h », correspond aux sons [gz] (valeur de position) phonogramme 3. Le graphème « h » ne correspond à aucun son, il a donc une valeur idéographique: rapprochement avec une série lexicale (hauteur, haut, hausser,…) morphogramme lexical rôle distinctif (différent du mot « exaucer ») logogramme lettre historique (introduite tardivement)

Exhausser (2) 4. Le graphème « au » est un digramme qui correspond au son [o]  phonogramme 5. Le graphème « ss » est un digramme qui correspond au son [s] (valeur de position)  phonogramme Par ailleurs, il permet une distinction d’avec « exaucer »  logogramme 6. Le graphème « er » est un digramme qui correspond au son [e]  phonogramme Il indique également un infinitif  morphogramme grammatical

Sangsue Le graphème « s » correspond au son [s] phonogramme Le graphème « an », digramme, correspond au son [ɑ̃]  phonogramme Le graphème « g » n’est pas prononcé, il a donc une valeur idéographique: rapprochement avec une série lexicale (sang, saigner,…) morphogramme lexical lettre étymologique (sanguis) 4. Le graphème « s » correspond au son [s] phonogramme 5. Le graphème « u » correspond au son [y] phonogramme 6. Le graphème « e » est la marque du féminin  morphogramme grammatical

Seing Le graphème « s » correspond au son [s] phonogramme Le graphème « ein », trigramme, correspond au son [ɛ̃]  phonogramme Le graphème « g » n’est pas prononcé, il a donc une valeur idéographique: rapprochement avec une série lexicale (signature, signe, signer,…) morphogramme lexical rôle distinctif (différent des mots « sein, saint, ceint ») logogramme lettre étymologique (signum)