Stratégie thérapeutique basée sur les biomarqueurs du cancer bronchique Julien Mazières, Unité d’Oncologie Cervico-Thoracique Service de Pneumologie, Hôpital Larrey, CHU Toulouse
Base des traitements biologiques Oncogenése Addiction Oncogenique Mécanisme plus général Approuvé mutation EGFR (Erlotinib, Gefitinib) Angiogenèse (bevacizumab) En cours d’exploration ALK translocation HER2 mutation B-Raf mutation PI3K-AKT activation K-Ras mutation Autres… Anti-IGF1R Agents proapoptotique Inhibiteurs de la transduction du signal Inhibiteur de PARP Inhibiteur proteasome Commentaires Événement rare Fort taux de réponse attendu Monothérapie Développement de résistances Plus fréquent Bénéfice attendu plus faible Association avec d’autres molécules
Mutation EGFR : les essais Essais comparant une chimiothérapie à un EGFR-TKI en première ligne chez des patients mutés Molécule/ Population Gefitinib (vs chimio) Erlotinib Asiatique IPASS (vs Carbo-Taxol) NEJ002 (vs Carbo-Taxol) WJTOG (vs CDDP-TXT) OPTIMAL (vs Carbo-Gmz) Caucasienne En cours EURTAC (vs doublet avec CDDP)
Mutation EGFR : les essais Essais comparant une chimiothérapie à un EGFR-TKI en première ligne chez des patients mutés Molécule/ Population Gefitinib (vs chimio) PFS en mois et HR Erlotinib Asiatique IPASS (vs Carbo-Taxol) 8.4 vs 6.7 m (HR 0.48) NEJ002 (vs Carbo-Taxol) 10.8 vs 5.4 m (HR 0.36) WJTOG (vs CDDP-TXT) 9.2 vs 6.3 m (HR 0.48) OPTIMAL (vs Carbo-Gmz) 4.6 m vs 13.1 m (HR 0.16) Caucasienne En cours EURTAC (vs doublet avec CDDP) 5.2 vs 9.7 m (HR 0.37)
Mutation EGFR : les résistances Présence de résistance primaire chez 10 à 15% des patients et acquise chez 100 % des patients mutés pour l’EGFR Jänne P al, Clin Can Res 2009
Mutation EGFR : les résistances Dimérisation du récepteur EGFR Seconde mutation EGFR T790M Amplification de MET Activation de la voie de signalisation PI3K/AKT Jänne P al, Clin Can Res 2009
Mutation EGFR : les résistances Résistance aux EGFR-TKI Intérêt de la rebiopsie lors de la progression Sequist L, ScTrMed 2011
Mutation EGFR : les résistances Dimérisation du récepteur EGFR Seconde mutation EGFR T790M Amplification de MET Activation de la voie de signalisation PI3K/AKT Jänne P al, Clin Can Res 2009
Mutation EGFR : les pan-inhibiteurs BIBW2992 (afatinib). Inhibiteur irréversible de l’EGFR et Her2. Essai LUX-LUNG 1 Placebo 1/3 2 lignes de chimio Tarceva > 3 mois (maladie contrôlée) LUX-LUNG1 R BIBW2992 2/3 PFS. HR = 0.38 SG. HR = 1.01 Miller V, ESMO 2010
Mutation EGFR : les pan-inhibiteurs BIBW2992 (afatinib). Association au cetuximab. Phase Ib. Afatinib 40 mg/jr et cetuximab 250 à 500 mg/m2 x 2 / semaine T790M positive T790M negative T790M unknown No EGFR mutation Total Total treated 27 15 3 2 47 Evaluable for efficacy 26 14 45 Best response n (%) Any PR 13 (50) 8 (57) 2 (67) 23 (51) Confirmed PR 9 (35) 7 (50) 18 (40) SD 11 (42) 5 (36) 1 (33) 19 (42) Clinical response (any PR + SD) 24 (92) 13 (93) 3 (100) 2 (100) 42 (93) Progression of disease 2 (8) 1 (7) 3 (7) Les pan-inhibiteurs ne sont pas des inhibiteurs spécifiques de la T790M Intérêt de poursuivre le blocage de la voie EGFR Janjigian, ASCO 2011
Autres cibles thérapeutiques Mutation EGFR : les pan-inhibiteurs Autres cibles thérapeutiques 60 Étude randomisée de phase II comparant erlotinib en deuxième et en troisième ligne et PF299804 Pan-inhibiteur Her1, Her2, Her4 PF299804 (45 mg/j) (n = 94) CBNPC de stade IIIB-IV Deuxième-troisième ligne Tissu tumoral disponible PS 0-2 Pas d’ITK antérieur R Erlotinib (150 mg/j) (n = 188) Le PF299804 est un inhibiteur de kinase irréversible de l’EGFR. Il cible EGFR HER2, HER4. Son activité préclinique a été établie : il s’avère plus efficace que les autres inhibiteurs de l’EGFR. Cette étude randomisée de phase II compare l’erlotinib et le PF299804 dans une population de patients n’ayant jamais reçu d’inhibiteur de tyrosine kinase (ITK) de l’EGFR et en deuxième ou en troisième ligne de traitement. (n = 94) Objectif principal SSP D’après Boyer M et al., abstr. O10.07 actualisé
Mutation EGFR : les pan-inhibiteurs Étude randomisée de phase II comparant erlotinib en deuxième et en troisième ligne et PF299804 PF299804 Erlotinib Hommes/femmes (%) 59/41 60/40 Non fumeurs/fumeurs (%) 19/81 20/80 ADK/autres (%) 66/34 65/35 KRAS sauvage/muté/non déterminé (%) 61/17/22 68/15/17 EGFR sauvage/muté/non déterminé (%) 61/20/19 69/12/19 Tous les patients Kras sauvage PF299804 (n = 57) Médiane : 16,1 sem. IC95 : 11,1-28,4 PF299804 (n = 94) Médiane : 12,4 sem. IC95 : 8,3-16,1 100 100 Erlotinib (n = 54) Médiane : 8,3 sem. IC95 : 7,8-12,1 Le PF299804 améliore les paramètres de survie par rapport à l’erlotinib, que ce soit dans la population globale ou dans le sous-groupe des patients avec KRAS sauvage. Erlotinib (n = 94) Médiane : 8,3 sem. IC95 : 7,9-11,7 80 80 Survie SSP (%) Survie SSP (%) 60 60 HR = 0,50 ; IC95 : 0,33-0,78 p = 0,002 40 HR = 0,66 ; IC95 : 0,47-0,91 p = 0,012 40 20 20 20 40 60 80 100 120 20 40 60 80 100 120 Semaines Semaines D’après Boyer M et al., abstr. O10.07 actualisé
Mutation EGFR : les perspectives Résistance aux EGFR-TKI
Mutation EGFR : les résistances Dimérisation du récepteur EGFR Seconde mutation EGFR T790M Amplification de MET Activation de la voie de signalisation PI3K/AKT Jänne P al, Clin Can Res 2009
Mutation EGFR : les anti-Met 89 Essai de phase II ARQ 197-209 : Inhibiteur tyrosine kinase oral de c-Met Erlotinib 150 mg/j et placebo Cycles de 28 jours (n = 83) CBNPC inopérables stades 3-4 > 1 ligne de chimiothérapie antérieure Pas de TKI Jusqu’à progression R Erlotinib 150 mg/j et ARQ 197-209 360 mg x 2/j Cycles de 28 jours (n = 84) L’amplification de c-MET, le récepteur du HGF, est associée à un mauvais pronostic des CBNPC ainsi qu'à une résistance in vitro aux TKI anti-EGFR. La résistance entraînée par c-MET est médiée par l’activation de la voie PI 3K/AKT par l’HER3. Le ciblage de c-MET représente donc la possibilité de moduler la sensibilité des tumeurs à l’erlotinib. L’ARQ 197-209 est un inhibiteur sélectif de c-MET, administré par voie orale, son efficacité et son profil de tolérance sont acceptables en phase I. Son association in vitro et in vivo avec l’erlotinib montre un profil d’efficacité supérieur à celui de chacune des 2 molécules séparément. Une étude randomisée de 167 patients a comparé erlotinib (150 mg/j) + ARQ (360 mg/j) 2 fois par jour versus erlotinib + placebo, avec possibilité de cross over en cas de progression. Les critères d’inclusion étaient les suivants : CBNPC de stade 4, performance status (PS) 0-2, au moins une ligne de chimiothérapie, mais pas de traitement par TKI anti-EGFR et suffisamment de tissu conservé pour des études (recherche de mutation). L’objectif principal était la survie sans progression, les objectifs secondaires étaient la survie globale, les toxicités, la réponse, etc. Objectif principal : survie sans progression Permutation à progression ASCO 2010 - D’après Schiller JH et al., abstr. 7502 actualisé 15
Mutation EGFR : les anti-Met 91 Essai de phase II ARQ 197-209 : PFS (analyse en intention de traiter) HR = 0,81 ; IC95 : 0,57-1,15 (p = 0,24) HR ajusté = 0,68 ; IC95 : 0,47-0,98 (p < 0,05) 1 0,8 Erlotinib + ARQ 197 : 16,1 sem. (n = 84) 0,6 Erlotinib + placebo : 9,7 sem. (n = 83) Survie sans progression 0,4 Dans cette étude de phase II randomisée, l’ARQ 197 est bien toléré et augmente la survie sans progression, particulièrement dans un sous-groupe de patients (non épidermoïdes, mutation KRAS et EGFR non muté). Ce bénéfice peut paraître faible mais l’efficacité de cette molécule en association, en cas de mutation de KRAS, mérite des études ultérieures. 0,2 10 20 30 40 50 Temps depuis la randomisation (semaines) ASCO 2010 - D’après Schiller JH et al., abstr. 7502 actualisé 16
Mutation EGFR : les résistances Dimérisation du récepteur EGFR Seconde mutation EGFR T790M Amplification de MET Activation de la voie de signalisation PI3K/AKT
Mutation EGFR : rôle des hormones Potentialisation moléculaire Contrôle de la voie PI3K-AKT par le RE Contrôle des mécanismes de résistance des EGFR-TKI Siefgried J, Semin Onco 2009 Données in vivo Effet procarcinogéne de l’estradiol Effet synergique antitumoral de fulvestrant et gefitinib Stabile L, CR 2005
Mutation EGFR : rôle des hormones LADIE (IFCT-1003) : Intérêt de l’association d’un anti-œstrogène à un EGFR-TKI chez la femme porteuse d’un CBNPC… Gefitinib Gefitinib + Fulvestrant R EGFR Mut Femmes Stades avancés Ménopausée Adénocar-cinome Tissu disponible Chimio 1L/2L EGFR WT Erlotinib Erlotinib + Fulvestrant R
Translocation EML4-ALK 81 Activité du crizotinib chez les CBNPC positifs pour ALK en technique FISH : phase II, n = 82 Quatre vingt-deux malades ont été sélectionnés par une méthode de FISH et inclus dans la phase II. Les effets indésirables les plus fréquents étaient des troubles digestifs (~50 %) et des troubles visuels (~40 %). Il y a eu 12 % d’effets indésirables de grade 3 (essentiellement élévation des transaminases) et un seul malade a eu une élévation des transaminases de grade 4. Le taux de réponse objectif est de 57 %, avec 87 % de malades contrôlés à 8 semaines. La survie sans progression à 6 mois a été estimée à 72 % pour une durée médiane de traitement de 5,7 mois (1 à 15 mois) ; 68 % des malades (n = 13) ont interrompu le traitement du fait d’une progression. TR = 57% Contrôle de la maladie à 8 semaines : 87% SSP à 6 mois : 72% Kwak, NEJM 2010 20
Translocation EML4-ALK Comparaison de la survie en fonction de la présence d’EML4-ALK et d’un traitement par crizotinib Comparaison de la survie de 3 groupes de patients recevant 2 ou 3 lignes thérapeutiques ALK crizotinib (n = 30) ALK témoin (n = 23) WT/WT témoin (n = 125) Médiane de survie (mois) NR 6 11 Survie à 1 an (%) 70 44 47 Survie à 2 ans (%) 55 12 32 1 2 3 Années 20 40 60 80 100 Pourcentage À partir de la 1re/3e ligne de crizotinib HR = 0,49 ; p = 0,02 4 D’après Shaw AT et al., ASCO 2011 abstr. 7507 actualisé
Mutation de B-Raf 3 % des ADK Femmes > hommes 81 3 % des ADK Femmes > hommes Fumeurs +++ et non fumeur Tout âge Mauvais pronostic Marchetti, JCO 2011, Paik JCO 2011 22
Mutation de Her2 1 à 2 % des ADK Femmes > hommes +++ non fumeur 81 1 à 2 % des ADK Femmes > hommes +++ non fumeur Tout âge Marqueur de résistance aux inhibiteur de Her1/EGFR Traitement ? panHer inhibiteur : BIBW2992, PF299 Inhibiteur TRK de Her2 : lapatinib ? Ac anti-Her2 : Herceptin ? Choi YL, NEJM 2010 23
Inhibition de K-Ras muté Mutation de K-Ras 81 Inhibition de K-Ras muté 3 % des ADK Femmes > hommes Fumeurs +++ et non fumeur Tout âge Mauvais pronostic MEK inhibiteur Choi YL, NEJM 2010 24
Thérapies ciblées, stratégies Stratégie, organisation Quels marqueurs ? Quels patients ? Quelles techniques ? Comment intégrer ces biomarqueurs dans un arbre décisionnel ?
Adénocarcinomes : résultats du Lung Cancer Mutation Consortium Quels marqueurs ? Adénocarcinomes : résultats du Lung Cancer Mutation Consortium Identification des mutations oncogéniques à partir de 1 000 adénoK stade IV Recherche de 10 mutations oncogéniques chez 1 064 patients Identification d’une mutation oncogénique dans 54 % des tumeurs (280/516) complètement testées D’après Kris MG et al., ASCO 2011 abstr. CRA7506 actualisé
Epidermoïdes : résultats d’une collaboration internationale Quels marqueurs ? Epidermoïdes : résultats d’une collaboration internationale Réalisation d’un séquençage exonique pangénomique de 150 tumeurs. Dans 63 % des cancers épidermoïdes bronchiques on peut maintenant identifier une ou des cibles thérapeutiques potentielles Des inhibiteurs de FGFR1, FGFR2, PI3KCA et DDR2 sont déjà en essais cliniques de phase I ou en sont proches DDR2 mut 4 % FGFR1 ampl 20-25 % BRAF mut 3 % EGFR ampl 10 % FGFR2 mut 5 % PI3KCA mut 9 % PDGFR ampl/mut 9 % FGFR1 ampl FGFR2 mut PI3KCA mut PTEN mut/del CCND1 ampl CDKN2A del/mut PDGFRA ampl/mut EGFR amp MCL1 ampl BRAF mut D’après Hammerman P et al., WCLC 2011, abstr. PRS.1 actualisé DDR2 mut ERBB2 ampl
Quels marqueurs ? Epidermoïdes : résultats d’une collaboration internationale. Identification de mutations de la kinase DDR2 dans les épidermoïdes bronchiques aux modèles précliniques puis à l’utilisation du dasatinib en association à l’erlotinib chez l’homme Progression Solvant Dasatinib Solvant Dasatinib Réponse sous dasatinib + erlotinib D’après Hammerman P et al., WCLC 2011, abstr. PRS.1 actualisé
Mutation EGFR : chez quels patients ? Prévalence des mutations Tabac N = 2142 adénocarcinomes Tabac : - 15% anciens fumeurs - 6 % fumeurs actifs - 52% non fumeurs Sexe : - 19% hommes - 26% femmes Si on ne teste que les femmes non fumeuses on laisse passer 57% des mutations. Screening pour tous les adénocarcinomes Sexe D’Angelo, JCO 2011 29
Translocation EML4ALK : chez quels patients ? 81 Activité du crizotinib chez les CBNPC positifs pour ALK Quatre vingt-deux malades ont été sélectionnés par une méthode de FISH et inclus dans la phase II. Les effets indésirables les plus fréquents étaient des troubles digestifs (~50 %) et des troubles visuels (~40 %). Il y a eu 12 % d’effets indésirables de grade 3 (essentiellement élévation des transaminases) et un seul malade a eu une élévation des transaminases de grade 4. Le taux de réponse objectif est de 57 %, avec 87 % de malades contrôlés à 8 semaines. La survie sans progression à 6 mois a été estimée à 72 % pour une durée médiane de traitement de 5,7 mois (1 à 15 mois) ; 68 % des malades (n = 13) ont interrompu le traitement du fait d’une progression. Kwak, NEJM 2010 30
Translocation EML4ALK : chez quels patients ? Prévalence des translocations ALK N = 73 NSCLC Analyse ALK par FISH Si adénocarcinome moins de 10 PA et EGFR et Kras WT : 45% de positivité pour ALK Camidge, CCR 2011 31
Quels marqueurs ?
Intégration des biomarqueurs en 2011-12 Screening EGFR, K-Ras, PI3K, Her2, B-Raf, ALK Epidermoide Non Epidermoide EGFR, ALK, B-Raf, Her2, PI3K, KRas PI3K, B-Raf, (FGFR, DDR2) Pas de mutation motrice P + X +/- BVZ +/- maintenance Essai profile ou CDDP-Alimta ALK + EGFR + EGFR-TKI Cisplatine + X +/- maintenance 1 L FGFR, DDR2 Essai dédié Erlotinib, TXT Pas d’anomalie PI3K/ PTEN + Essai anti-PI3K-PTEN-AKT B-Raf muté Essai Braf-inhibiteur EGFR T790M + Essai anti-panHer ou inhibiteur spécifique K-Ras muté Autres cas Pemetrexed Erlotinib Docetaxel EML4-ALK 2/3L Essai MEKK inhibiteur Essai ou crizo ATU
Conclusion « S’il n’y avait pas la Science, combien d’entre nous pourraient profiter de leur cancer pendant plus de cinq ans ? » Pierre Desproges