Biologie des mammifères marins: pathologie et autopsies Jauniaux T., Service de Pathologie Université de Liège
En pratique: 15 h théorie + 10 h TP (autopsie) Pour autopsie: bottes et tablier!!! Me contacter: t.jauniaux@ulg.ac.be t.jauniaux@mumm.ac.be 04/3664078 0477/252302
Introduction générale - Contexte légal et politique - Bioindicateur - Organisation du réseau MARIN - Echouage et autopsie - Principales menaces pour les mammifères marins Principales lésions et causes de mortalité des petits cétacés Principales lésions et causes de mortalité des phoques Principales lésions et causes de mortalité des grands cétacés
Mysticètes : cétacés à fanons : baleines Odontocètes : cétacés à dents : dauphins Cétacés (79 espèces) Phocidae : phoques Otariidae : otaries Odobenidae : morse Pinnipèdes (33 espèces) L ’ordre des cétacés se divise en 2 sous-ordre, à savoir les mysticètes -cétacés à fanons- incluant les baleines (rorqual, baleine grise, baleine franche) et les odontocètes - cétacés à dents- incluant les dauphins (marins et d ’eau douce) y compris l ’orque, les marsouins, les baleines blanches, les cachalots et les baleines à bec. L ’ordre des pinnipèdes est subdivisé en 3 familles, à savoir les phocidae comprenant les phoques; les otaridae comprenant les otaries et les lions de mer; et la famille des odobenidae, représentée par une espèce: le morse. Finalement, l ’ordre des siréniens avec 2 familles, les dugongidae représentées par une espèce, le dugong et les trichechidae incluant les lamantins. Certains y inclues aussi les différentes espèces de loutre de mer ainsi que l ’ours polaire Dugongidae : dugong Trichechidae : lamantins Siréniens (4 espèces) Autres
Très adaptés à leur milieu aquatique, ils s ’y sont spécialisés en plongeurs exceptionnels. Ils ont dévéloppé un véritable 6ime sens, celui de l ’écholocation, très pratique pour les espèces vivant dans des milieux estuariens ou en eau douce, où celui-ci remplace la vue. Dans les cas extrêmes; l ’oeil est atrophié. J ’y reviendrai ultérieurement De plus, hors des contraintes de la gravité, la taille de certaines espèces est devenue gigantesque. Ainsi les baleines bleues dépassent 25 m, le plus grand individu atteignant 33 mètres pour un poids de 150 tonnes Ce gigantisme, et l ’aspect caché de leur vie océanique associé aux difficultés d ’observation ont toujours interpellé l ’homme. Pendant des siècles, les hommes les ont chassé, les poursuivant sur de frêles embarcations, jusqu ’à l ’invention du canon harpon à la fin du siècle passé et des bateaux usines au milieu de celui-ci. On leur reconnait une intelligence exceptionnelle, proche de celle de l ’homme et certain n ’hésite pas à les déifier. Tout ces éléments ont été à l ’origine de beaucoup de légendes et d ’histoires, Depuis Jonas et la baleine jusqu ’à l ’époque actuelle avec Flipper le dauphin ou le grand bleu en passant par le récit d ’Hermann Melville: Moby Dick
? Il semble même que les placides lamantins soit à l ’origine de la légende des baleines. Ulysse les a rencontré après avoir franchi les colonnes d ’hercule c ’est à dire Gibraltar. Il faut savoir que les femelles lamantins lorsqu ’elles allaitent ont des mamelles pectorales, c ’est à dire au même endroit qu ’une femme, très développées et que ces animaux poussent très cris plaintifs. Alors peu-être que la nuit, dans le brouillard après des semaines de navigations sans voir de femmes, les marins ont transformé les « vaches marines » en ce superbes créatures qu ’étaient selon la mythologie, les sirènes
« … cet animal appartenait à l’embranchement des vertébrés, à la classe des mammifères, au groupe des pisciformes, et finalement à l’ordre des cétacés. Quant à la famille dans laquelle il prenait rang, baleine, cachalot ou dauphin, quant au genre dont il faisait partie, quant à l’espèce dans laquelle il convenait de le ranger, c’était une question à élucider ultérieurement. Pour la résoudre, il fallait disséquer ce monstre inconnu,… » Jules Vernes, Vingt mille lieues sous les mers
Introduction générale - Contexte légal et politique - Bioindicateur - Organisation du réseau MARIN - Echouage et autopsie - Principales menaces pour les mammifères marins Principales lésions et causes de mortalité des cétacés Principales lésions et causes de mortalité des phoques
Accords de conservation et de protection des mammifères marins en Mer du Nord et Méditerranée : cadre légal-conventions et lois- international : Convention on International Trade in Endangered Species, Convention on Migratory Species européen: directive Habitat régional: Agreement on the Conservation of Small Cetaceans of the Baltic and North Sea (ASCOBANS), Agreement on the Conservation of Cetaceans in the Black Sea,Mediterranean Sea and contiguous Atlantic area (ACCOBAM), OSPAR national: lois ESPECES PROTEGEES
Pour la Belgique : Directive européenne Habitat (1992): cétacés Conférences Internationales de la Mer du Nord (La Haye, 1990; Esbjerg, 1995): cétacés et pinnipèdes ASCOBANS (1994): Agreement on the Conservation of Small Cetaceans of the Baltic and North Sea Arrêté Royal visant la protection des espèces menacées dans les espaces marins sous juridiction de la Belgique (14/02/02)
Approche multidisciplinaire Bioindicateurs Longue espérance de vie Mammifères (homeothermiques) Environnement pollué “Top predator” Accumulation des contaminants lipophiles dans la chaîne alimentaire et processus de bioaccumulation. Mammifères marins : premiers à exhiber les signes associés à l’exposition aux polluants - concentrations elevées en contaminants La volonté d’une approche multidisciplinaire en mettant l’accent sur les effets des polluants reposent sur le fait que ces animaux sont considérés comme de précieux bioindicateurs, c’est à dire qu’ils sont l’indice précoce de modifications de l’environnement dues à une action humaine. Les raisons de cette qualité sont qu ’il s ’agit de mammifères, à longue espérance de vie, vivant dans un milieu particulièrement contaminé et situés en sommet de chaine alimentaire. Ainsi, ils accumuleront durant toute leur vie des contaminants stables grâce au processus de bioaccumulation. Dans un premier temps, seules des analyses toxicologiques étaient effectuées sur les mammifères marins échoués et elles révélèrent des taux élevés de contaminants. En partant du postulat que si on soumet des animaux de laboratoire a des doses chroniques de ces mêmes contaminants, ils développeront des lésions, on pourrait s ’attendre à trouver les mêmes lésions chez les individus échoués. Maintenant que les analyses sont menées conjointement avec une autopsie, il apparait que certaines lésions sont liées aux contaminants. Néanmoins, comme pour l’oeuf et la poule, il est très mal aisé de savoir si ce sont les lésions qui modifient les concentrations en contaminants ou au contraire; si des concentrations élevées en contaminants favorisent des lésions. Ce manque de certitude renforce la nécessite de mener des études conjointes. Pour clore ce chapitre sur le ce rôle de bioindicateur, j ’ajouterai que l ’homme est également en sommet de chaîne alimentaire! Oeuf ou poule concentrations elevées en contaminants lesions Approche multidisciplinaire
Financé par un programme fédéral associant: Buts - Détermination des causes de mortalité des mammifères marins morts à la côte belge et dans les régions avoisinantes; - Analyses des toxiques présents dans ces espèces; - Gestion des animaux vivants Moyens Financé par un programme fédéral associant: biologistes toxicologistes pathologistes
Pour mieux illustrer notre zone detravail, voici une carte de la Mer du Nord et plus particulièrement la baie sud. Le travail a été éffectué dans le cadre d’un projet multidisplinaire intitulé MARIN pour Marine Animals Research and Intervention Network. Ce programme associe des biologistes, des toxicologues et des vétérinaires qui conjointement associent leurs efforts afin de déterminer les causes de mortalités des animaux homéothermes en sommet de chaine alimentaire marine, à savoir les oiseaux et les mammifères marins. Dans le cadre de ma thèse, je ne me suis intéressé qu’a ces derniers. La couverture de côte était initialement limitée à la côte belge, pour s ’étendre par après sur les côtes de la Manche jusqu ’à la baie de la Somme en 1995 puis jusqu ’au Havre en 2000. De manière ponctuelle, des interventions sont également menées aux Pays-Bas.
Mammifères marins de la Mer du Nord …lorsque échoués! Marsouin commun Phoque commun Cetacés Pinnipèdes Phoque commun Phoque gris Marsouin commun Lagénorhynques Dauphin bleu-et-blanc Cachalot Petit rorqual Rorqual commun Odontocète Mysticète Rorqual commun Cachalot Un des fondements de la création de ce programme était les obligations que l’état belge s’était fixé par la ratification de plusieurs accords internationaux concernant la conservation et la protection des mammifères marins. En premier lieu, il s ’agit de la directive européenne habitat qui encourage les recherches scientifiques afin d ’assurer la conservation de ces espèces ainsi que la mise en place de réserve marine; en second lieu, des conférences internationales sur la Mer du Nord qui mettent l ’accent sur la nécessité d ’avoir une approche multidisciplinaire de la problématique des mortalités des mammifères marins ainsi que des infections à morbillivirus. Finalement le traité d ’ASCOBANS pour agreement qui recommande en autre l ’autopsie systématique des individus échoués en mettant l ’accent sur les effets des pêcheries et de la pollution. La plupart des personnes n ’imagine pas que des mammifères marins puissent être présents le long de notre littoral. Bien que pas très abondant par rapport à d ’autres régions de la Mer du Nord, il n ’en demeure pas moins que de nombreuses espèces sont présentes. Ordre des cétacés subdivisé en odontocète et en mysticète Les pinnipèdes (considéré comme un sou-ordre des carnivores ou comme un ordre à part entière); famille des phocidae, sous-famille des phocinae Et voici les principaux acteurs que je ferai intervenir dans mon exposé.
Petit rorqual Baleine à bosse Dauphin bleu-et-blanc Grand dauphin
Toutes espèces confondues
(autorités communales) ECHOUAGE ALARME (autorités communales) IRSNB UGMM intervention ULg
Vivants Morts autopsies Sea Life Center Blangenberghe 1 obligatoire Niveau d ’intervention autopsies Sea Life Center Blangenberghe 1 Salle d ’autopsie ULg obligatoire Delphinarium Harderwijk 1 2 (protection civile) Salle d ’autopsie ULg 3 Plage
Prise en charge par l’UGMM 2. Appel d’un vétérinaire 3. Transport vers un centre de réhabilitation Matériel adéquat
Centre de réhabilitation = Delphinarium d’Harderwijk (Hollande)
AUTOPSIES: raisons scientifiques, politiques, médiatiques et sanitaires Equipe: Pathologiste vétérinaire, accompagné d ’assistants et d ’étudiants (Céto-club) Protocole précis Matériel et infrastructure Idéalement, l ’autopsie de tous les animaux échoués, quelque soit l ’état de conservation (1 à 5) , la taille (0,8 m à 19 m)
Analyses multidisciplinaires Autopsie de mammifères marins Relevé systématique de lésions Collecte de tissus pour l ’examen toxicologique MAIS AUSSI Echantillons pour examens bactériologiques, virologiques, parasitologiques et mycologiques Analyses multidisciplinaires
prélèvement (1 cm3) à sec ou sur milieu de transport ; 4°C Histopathologie : prélèvement au formol Virologie : prélèvement à sec (1 cm3) , -80°C ou –20°C Bactériologie: prélèvement (1 cm3) à sec ou sur milieu de transport ; 4°C Parasitologie : parasite dans alcool 70 % glycériné Toxicologie: Métaux lourds (>50 g.): prélèvement à sec, en sachet plastique, –20°C Polluants organiques persistants (>50 g.): : en feuilles d'aluminium, –20°C Contenu stomacal (analyse alimentaire) Prélèvement (max.) à sec , –20°C Génétique : prélèvement (1 cm3) dans alcool 70 %
Principales menaces pour les mammifères marins en Mer du Nord Capture dans les filets Infection virale: Morbillivirus Infestations parasitaires Infections bactériennes Contaminants Divers Dans le cadre de l’introduction de mon exposé, je vais m’attarder à vous illustrer les principales menaces et causes de mortalité des mammifères marins dans la baie sud de la Mer du Nord et plus particulièrement la capture dans les filets de pêche, les infections virales et plus particulièrement la morbillivirose, les infestations parasitaires, les infections bactériennes et finalement les effets de l’exposition aux contaminants
1. Capture dans les filets (by catch) : - Première cause de mortalié des marsouins - Taux de capture > taux de croissance de la population (2 - 4%) - Population estimée : 350.000 (2% : 7.000) 1.1. Evaluation par observateur la capture dans les filets figurent parmi les causes les plus fréquentes de mortalité des mammifères marins dans quasiment tous les océans. En Mer du Nord, elle est même en première position pour le marsouin. Dans cette espèce, le taux de capture annuel au début des années nonantes dépassait le taux de croissance de la population. On estime la population de marsouin en Mer du Nord à quelques 350000 individus, ayant un taux de croissance annuel de 2% voire 4 dans les meilleurs cas de figure, soit de 7000 individus. Par la mise en place d ’observateurs à bord des bateaux de pêche, la capture a pu être estimée et rien que les pêche danoise en 1993 atteignait ce seuil de 7000 marsouins. Depuis lors, cette estimation n ’a guère diminuée. A d ’autres endroits, comme en Grande Bretagne ou en Suède, les captures pourraient représenter une menace pour les populations locales. threat for North Sea population threat for local population
Pays-Bas (2006): 62% (idem Belgique) 1.2. Evaluation par l’autopsie des mammifères marins échoués … la plupart des animaux étant rejetés en mer!!! Les autopsies systématiques des individus échoués permets également de révéler l importance de la capture dans les filets de pêche. Comme signalé précédemment, cette incidence est très élevée parmi les marsouins, atteignant localement 50%. Cette incidence varient en fonction des région selon les pratiques halieutiques ou par l ’attribution de prime. Pays-Bas (2006): 62% (idem Belgique)
BESOIN METHODE SURE MAIS Diagnostic basé sur : Evidence de capture: lacérations cutanées, hématomes multiples Evidence de libération des filets: amputations, éventrations Etat de santé: absence de lésion, bon état d’embonpoint - Evidence d’hypoxie: congestion et oedème pulmonaire, pétéchie Lésions pas toujours présentes, non pathognomoniques et pas de test spécifique MAIS Estimation de la capture par autopsies “sous-estime” l’impact sur la population Pour effectuer ce diagnostic, plusieurs paramètres sont pris en compte, Néanmoins aucune de ces lésions n ’est pathognomonique de la capture et elles sont pas toujours présentes, si bien que malgré une incidence élevée il est vraisemblable que ces captures sont sous-estimées BESOIN METHODE SURE
2. Infection virale : Morbillivirus (aussi Carré, rougeole, peste bovine) Epidémies majeures chez 5 espèces (6épizooties) Phoque commun (Mer du Nord) 1988: 18.000/25.000 2002: 23.000/50.000 Phoque Baikal 1987: >10.000/80.000 Phoque de la Caspienne 1997 et 2000: >10.000/400.000 Dauphin bleu-et-blanc (Méditerranée): 1990: >1.000/20.000 2007: ? Grand dauphin (USA): 1987: 2500/5.000 Parmi les maladies virales, les plus importantes en terme d ’impact sur les population de mammifères marins sont celles associées aux infections par les morbillivirus. Non décrits jusqu ’en 1988 parmi ces espèces, les morbillivirus ont été responsables de 6 épizooties responsables de la mort de plusieurs milliers d ’individus. Ainsi, les 3/4 de la population de phoque commun sont mort en l ’espace de 9 mois. Depuis lors, d ’autres épizooties sont apparues parmi les pinnipèdes, la plus récente étant celle du phoque de la Caspienne. Je vous ai signalé que ce virus est décrit depuis 1988 parmi les mammifères marins mais des études rétrospectives ont démontré son implication lors d ’une mortalité massive de grand dauphin sur la côte est des Etats-Unis en 1987. Depuis l ’épidémie de 1988, aucun cas de maladie n ’a été recensé dans la population de phoque commun de la Mer du Nord. Sans prendre l ’ampleur d ’une épizootie sévère, des cas ont été recensés dans d ’autres espèces, dans quasiment tous les océans. Néanmoins, aucun morbillivirus n ’a été décrit parmi les mysticètes, c ’est à dire les baleines Cas sporadiques dans d’autres espèces, y compris baleines