Lycées européens : quelle autonomie pour quelle efficacité ? Olivier Rey, IFÉ-ENS Lyon Jéco Lyon, 10 novembre 2011
L'enseignement secondaire supérieur en Europe Niveau CITE 3 dans les nomenclatures européennes Pouvant durer de deux à quatre années, de 14/15 ans à 18/19 ans. Deux grandes catégories (filière d'enseignement général et filière professionnelle), parfois séparées parfois dans le même établissement Les principaux facteurs de variation sont la présence d'une scolarité commune ou séparée dans le secondaire, et la place laissée à l'enseignement professionnel L'enseignement secondaire supérieur coïncide souvent avec la fin de la scolarité obligatoire et/ou la fin de la structure de scolarité commune. Il précède l'entrée dans l'enseignement supérieur, théoriquement établie entre 18 et 19 ans, mais qui varie considérablement selon les pays et les types d'enseignement supérieur. Exemples : Belgique (CF) 14- 18 ans Danemark 17-19 ans Allemagne 16- 19 ans Espagne 16- 18 ans Italie 14- 19 UK 14-18
Les diplômes de fin d'études secondaires Obtenus entre 17 et 20 ans Donnent rarement un accès automatique à l'université (exception française) Ont des taux de réussite élevés (75% moyenne G20), égaux ou supérieurs à 90% en Finlande, UK, Japon, Portugal, Norvège... Deux grandes catégories (filière d'enseignement général et filière professionnelle), parfois séparées parfois dans le même établissement Exemples, de l'Italie (filières/établissements différents de 14 à 19 ans) au Danemark (structure commune jusqu'à 16/17 ans). Dans les pays nordiques, il est plus facile d'arrêter et de reprendre des études, ce qui explique des taux d'obtention à des âges plus elevés.
Les évaluations PISA Une enquête internationale triennale, basée sur un échantillon massif de jeunes de 15 ans (quelle que soit leur situation scolaire) Une évaluation de la maîtrise de compétences jugées nécessaires pour la vie de tous les jours et non pas des savoirs inscrits dans les programmes scolaires nationaux Trois domaines : littéracie, mathématiques et culture scientifique Un programme lancé en 2000 par l'OCDE, qui permet donc d'établir des tendances sur une dizaine d'années On peut dire que la comparaison des tendances sur plusieurs années est plus intéressante que les chiffres en valeur absolue. En particulier, on peut relativiser les chiffres absolus de PISA en expliquant que les compétences évaluées favorisent certains curricula scolaires par rapport à d'autres, ce que n'ont pas manqué de faire certains chercheurs français qui montrent qu'on évalue parfois des rapports aux études ou des façons de réfléchir différentes de celles que favorise l'école française : PISA n'est pas qu'une évaluation des acquis de l'école mais aussi des relations qu'entretient un pays avec le culture, les savoirs et les compétences. Enjeu politico-disciplinaire des domaines PISA. Exemple : controverse actuelle liée à la volonté de l'OCDE d'évaluer les compétences des jeunes en matière de culture économique et financière, qui s'oppose à une résistance française puisque cela aurait pour conséquence de faire chuter la place de la France faute d’enseignement ad-hoc en France.
Les résultats 2009 La moyenne OCDE est en général autour de 500 points. Shanghai (556) Corée (539), Finlande (536), Canada (524), Pologne (500), Espagne (481), Israël (474), Turquie (464) Brésil Mexique (425) Position absolue de la France plutôt stable, mais position relative en dégradation par rapport à nos voisins immédiats Compréhension de l'écrit : 496 (dégradation depuis 2000 mais stabilité relative ensuite) Culture mathématiques : 497 (chute régulière depuis 2003) Culture scientifique : 498 (stabilité) En mathématiques, toutefois, impossible de masquer la chute. La France descend de la 13e à la 16e place, et surtout perd 14 points depuis 2003. C'est beaucoup. Surtout quand l'Allemagne en gagne 10 en six ans, l'Italie 17 et le Portugal 21.
Les défis pour la France Augmentation préoccupante des plus bas niveaux de performance : plus de 20% des jeunes français se situent en deçà des seuils permettant de résoudre un problème élémentaire ou d'extraire les informations essentielles d'un texte Dispersion des résultats plus marqués qu'ailleurs entre les meilleurs et les moins bons (en grande partie due aux redoublements) Augmentation depuis 2000 d'environ 5% du taux d'élèves les plus faibles En mathématiques, toutefois, impossible de masquer la chute. La France descend de la 13e à la 16e place, et surtout perd 14 points depuis 2003. C'est beaucoup. Surtout quand l'Allemagne en gagne 10 en six ans, l'Italie 17 et le Portugal 21.
Quels enseignements de PISA pour penser l'enseignement secondaire ? Il n'y a pas de stricte adéquation entre le niveau économique d'un pays (PIB) et son rendement éducatif. 94% de la variance s'explique par d'autres facteurs. Plus l'enseignement secondaire est différencié entre établissements, filières et niveaux, plus il est inéquitable et inefficace La qualité des enseignants (niveau de formation par exemple) semble compte plus que le nombre d'élèves par classe L'autonomie pédagogique et curriculaire semble être corrélée entre de bons résultat das PISA pendant que l'autonomie administrative, et surtout la concurrence, ne semble pas être un facteur ni d'équité ni d'efficacité
Conclusion personnelle L'enseignement secondaire français a historiquement été conçu pour former des élites destinées à poursuivre dans les grandes écoles et les filières universitaires classiques. Il laisse aujourd'hui une part croissante de la jeunesse sur le bord du chemin sans être plus efficace que d'autres systèmes. Les systèmes qui privilégient une démarche de « tronc commun » et d'intégration individualisée au sein de la scolarité commune sont plus efficaces et plus équitables, sans être plus coûteux L'organisation du systèmes éducatif français autour des disciplines académiques traditionnelle génère des problèmes croissants pour la France dans le contexte international
Quelques éléments bibliographiques Mons Nathalie (2007). Les nouvelles politiques éducatives : La France fait- elle les bons choix ? Paris : Presses universitaires de France. Felouzis, Georges (2009). « Systèmes éducatifs et inégalités scolaires : une perspective internationale ». Sociologies. (en ligne) Forestier Christian (2007). « Égalité ou compétition ? L’impact des comparaisons internationales ». Pouvoirs, Vol.3, n° 122, p.109-123. Grenet Jean (2008). « PISA : une enquête bancale ? ». La vie des idées. (en ligne) Rochex Jean-Yves (2008). « PISA et les enquêtes internationales. Enjeux scientifiques, enjeux politiques ». Revue française de pédagogie, n° 164, p.81- 85. Rey Olivier (2011). «PISA : ce que l’on en sait et ce que l’on en fait». Dossier d’actualité Veille et Analyses, n°66, octobre. (en ligne)