Sextus Empiricus IIIème partie
Mais pourtant, s’il faut douter de tout, refuser toute construction de la vérité, comment agir ? Sur quoi notre action se fonde-t-elle ? Nos actes se fondent d’abord sur la relativité du jugement : un même objet peut être observé de deux façons différentes (ou davantage) qui sont également vraies. « Le miel apparaît plaisant à la langue pour certains mais désagréable pour les yeux. Il est donc impossible de dire s’il est purement et simplement agréable ou désagréable. » Esquisses pyrrhoniennes L’action
Mais encore et principalement, notre action se fonde sur les phénomènes qui se montrent à nous par leur extériorité, leur apparence. « Mais l’apparence (le phénomène) l’emporte sur tout, où qu’elle (il) aille » Sextus Empiricus Contre les logiciens. Il faut s’attacher aux choses apparentes pour construire notre vie, nos projets. Les règles morales se dévoilent à nous dans leur évidence, leur immédiateté. Il est vain de chercher à les fonder. Nous les accueillons tout de suite.
Le philosophe est appelé « Empiricus » parce que sa médecine est empirique. Elle s’intéresse aux données propres du malade : son âge, sa complexion, ses prédispositions à différentes maladies fréquentes chez lui, son environnement. Sextus Empiricus se détache de Pyrrhon puisqu’il pose qu’il convient de suivre les sens ainsi que l'intelligence, nos dispositions, les coutumes, c’est-à-dire les lois, et les connaissances qui découlent de notre expérience.
On comprend que la philosophie sceptique n’est nullement inactive. Ce n’est pas parce que la vérité est impossible à déterminer qu’il faille pour autant abandonner toute recherche. Sextus Empiricus est un scientifique. On ne doit nullement s’arrêter parce que l’on aurait une fois pour toute posé que la vérité absolue est une illusion. Ce que recherche le philosophe, c’est une ligne de conduite qui soit susceptible de nous permettre d’éviter une démarche erronée. L’ennemi du scepticisme, c’est l’erreur.