Comment & pourquoi soutenir les bas revenus ? Master Class 2016 Intervention de M. Clément Carbonnier Loïse Chastel, Martin Bruyelles, Sofiane El Kouch
Introduction Le constat de la pauvreté en France : 2007, 13,4% de la population sous le seuil de pauvreté (= 60% du revenu médian) 10% de chômeurs au troisième trimestre de 2015 3,3 millions d’allocataires de minima sociaux Des débats politiques houleux : Problématique de l’assistanat Des solutions différentes au problème du chômage De nombreux "échecs" : Prime pour l'emploi, RMI
Pourquoi envisager un soutien aux bas revenus ? Une problématique : De justice sociale, enjeu contemporain important De maintien de la consommation → croissance De paix sociale D'efficience et de performance des entreprises : hausse de la productivité
Quels outils ?
Salaire minimum : les débuts Années 1890 Objectif de paix sociale Sydney Webb, Journal of Political Economy, 1912, Etats-Unis : Salaires élevés → meilleure productivité du travail → hausse performance des entreprises Salaires élevés → hausse demande → hausse débouchés entreprises Exemple : le salaire de 5$/jour offert par Ford Problème : dilemme du prisonnier. Collectivement, intérêt à la hausse des salaires. Individuellement, intérêt à la baisse.
Salaire minimum : les limites Lorsque le salaire minimum est au dessus du salaire « d’équilibre » : si salaire minimum au dessus alors → baisse compétitivité des entreprises Destruction d’emplois : Marshall & marginalistes : Prix travail > capital → préférence pour le capital → baisse emploi (non qualifiés) Hausse salaires → hausse prix→ baisse demande → baisse offre→ baisse emploi Synthèse de Brown, 1982. Chez les jeunes : hausse de 10% du salaire minimum = baisse de l'emploi de 1 à 3%
La problématique du chômage
Constat : il existe une trappe à l’inactivité Pierre Cahuc, Les ennemis de l’emploi Kentucky, 1980 : hausse du plafond d’indemnité maladie de 66% → hausse de 20% de la durée des arrêts de travail des salariés les mieux payés. France, 1990 : hausse de l’allocation parentale pour les femmes ayant 2 enfants → baisse du taux d’emploi de ces individus. Constat des effets du RMI : il désincite (certains) chômeurs à retrouver un travail → Il existe une trappe à inactivité, favorisée par des transferts aux chômeurs (peut-être) trop élevés
Un chômeur gagne t-il plus qu’un smicard Un chômeur gagne t-il plus qu’un smicard ? Denis Anne et Yannick L'Horty, 2002 Un couple de chômeurs ayant deux enfants devrait travailler, en cumulé, 45 heures par semaines pour avoir le même niveau de rémunération. Donc le couple est perdant si l’un des deux conjoints trouve un emploi. Seuls le couple sans enfant et le célibataire sont gagnants à trouver un emploi.
L’expérience menée au Canada 2002 Echantillon de 6000 femmes non diplômées, ayant des problèmes de santé, étant au chômage depuis plusieurs années GROUPE TEST : 3000 femmes sont payées le double du salaire minimum si elles retrouvent un emploi GROUPE TEMOIN : 3000 femmes sont dans la situation habituelle Après un an, 15% du groupe témoin trouve un emploi. 30% du groupe test. → Nécessité d’une incitation lors du retour à l’emploi: « Le travail doit payer » (Cahuc)
Réduire les allocations chômage ? Problème : crée de l'injustice sociale, par l'augmentation de la pauvreté Solution : impôt négatif Diminuer les transferts sociaux quand les revenus du travail augmentent RSA français : possibilité de conserver une partie des transferts sociaux à mesure que le revenu d’activité augmente.
Le crédit d’impôt Prime pour l'Emploi France EITC WFTC Royaume-Uni Principe : accroître le revenu des individus retrouvant un emploi Fonctionnement : réduction ou suppression d’impôts WFTC Royaume-Uni Jusque +160% du revenu EITC Etats-Unis Jusque +40% du revenu Prime pour l'Emploi France Jusque +5% du revenu
L’outil le plus optimal ? L’impôt négatif semble être l’outil optimal pour soutenir les bas-revenus. Solution qui concilie : L’aide aux chômeurs Pas de désincitation à retrouver un travail Pas de pauvreté supplémentaire
Soutenir les bas-revenus En conclusion Soutenir les bas-revenus Impôt négatif Crédit d’impôt Salaire minimum Les mérites : Plus fort retour à l'emploi, Meilleure cohésion sociale, Plus de débouchés pour les entreprises. Les limites & risques : De favoriser la trappe à inactivité en modifiant le calcul coût/avantage de l'occupation d'un emploi, D'augmenter le coût du travail donc de réduire la compétitivité des entreprises, D'êtres coûteuses pour la société et pour les générations futures
Financement : taxer les riches ? Une perspective séduisante mais qui a ses limites : Faible apport de ressources fiscales : 0,02% du PIB seulement Risque de fuite de capitaux Risque d'impact sur la création d'entreprises → à terme (Laffer), baisse des rentrées fiscales
Sources Cahuc, Zylderberg, Le chômage, fatalité ou nécessité, Chapitre 4, Champs, 2005 Economie des politiques publiques, sous la direction de A. Bozio et J. Grenet, 2010 D'un siècle à l'autre, salaire minimum, science économique et débat public aux États- Unis, en France et au Royaume-Uni (1890-2015), Jérôme Gautié, doc. 1518 du CEPREMAP, 2015