Phénomène de Raynaud(PR)

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Transcription de la présentation:

Phénomène de Raynaud(PR) A Dadban Service de Dermatologie, CHU Amiens Dadban.ali@chu-amiens.fr Attention les diapositives sur font vert sont uniquement pour information et ne font pas partie du sujet ECN

Phénomène de Raynaud(PR)

Primitif ou secondaire? DEFINITION « trouble vasomoteur ischémique paroxystique des doigts des mains, souvent déclenché par le froid et caractérisé par une décoloration suivie de cyanose. » Maurice RAYNAUD en 1862 Primitif ou secondaire? (Syndrome ou maladie ?)

3 PHASES SUCCESSIVES: Phase syncopale: pâleur, refroidissement et impression de doigts morts.(qq mn à > 1h) Phase asphyxique: cyanose et dysesthésies. (15 à 30 mn) Phase d’hyperhémie réactionnelle : érythrose, réchauffement, picotements et brûlures (inconstante, qq mn)

Affirmer le phénomène de Raynaud(PR) Interrogatoire  reconstituer la symptomatologie clinique. Classiquement, trois phases Phase syncopale avec blanchiment distal des doigts suffisante pour le diagnostic Puis Phase asphyxique (bleue) Phase hyperhémique : rougeur douloureuse. Symptomatologie déclenchée par le froid plutôt humide ou l'émotion. A Dadban Forum Acrosyndromes JDP 8 dec 2010 5

EPIDEMIOLOGIE Prévalence élevée : pays froids 8 à 10 % des femmes et 3 à 5 % des hommes Sexe : 4 Femmes pour un Homme Age : 20 à 30 ans Facteurs déclenchants : Froid +++ Stress psychique Cycle menstruel 

SEMIOLOGIE Mains ++++, oreilles, nez, menton Atteinte bilatérale et symétrique Rythme des crises variable (saison froide) Formes incomplètes Dx clinique (interrogatoire ++++)

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL Autres acrosyndromes Gelures (action d’un froid intense, exposition en altitude, patient SDF)

DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL

Eliminer les autres acrosyndromes Erythermalgie L'acrocyanose essentielle acrosyndrome permanent bilatéral et juvénile. Les mains et parfois les pieds sont violets au froid, œdémateux et moites. Indolore mais peut être socialement invalidante. Aucun examen complémentaire. L'ischémie digitale permanente : doigt froid, algique et cyanique pendant une période prolongée, habituellement de plusieurs jours. Manœuvre d'Allen. L’engelure L'hématome spontané du doigt (apoplexie digitale idiopathique) : hématome lié à une rupture d'une veine du doigt. Début brutal, inquiétant, augmentation de volume et une douleur. Hématome visible sous la peau, va évoluer sur une dizaine de jours en passant par les teintes de la biligénie. Ni bilan ni traitement spécifique. Le syndrome de l'orteil ou du doigt bleu Les nécroses digitales

Stratégie générale La stratégie diagnostique est centrée sur la différenciation entre une maladie de Raynaud (phénomène de Raynaud primaire) et un phénomène de Raynaud secondaire. La haute prévalence de l’affection (environ 10 % de la population générale) impose un bilan simple d'autant qu’il s’agit le plus souvent d’une maladie de Raynaud qui est un spasme excessif au froid. Un recul d’au moins 2 ans voire plus peut être nécessaire pour finaliser le diagnostic Le bilan est avant tout clinique, à la recherche d'arguments permettant de douter de l'origine primitive du phénomène de Raynaud. Lorsqu’il existe des arguments cliniques permettant de suspecter un phénomène de Raynaud secondaire, les deux examens de première intention sont la capillaroscopie et le dosage des anticorps anti-noyau.

Les éléments de suspicion clinique Phénomène de Raynaud suspect: nécroses pulpaires signes cliniques évocateurs d’autres maladies (sclérose cutanée, télangiectasies, calcinose, syndrome sec, arthralgies, toux, dyspnée, râles crépitants...) unilatéral l’abolition d’un pouls manœuvre d’Allen + survenue après 40 ans ou avant 10 ans l’absence de rémission estivale l’absence d’antécédents familiaux l’atteinte des pouces le sexe masculin la grande maigreur (anorexie mentale)

Bilan PR d’apparition récente chez l’adulte  un bilan étiologique minimum pour dépister une origine hématologique ou une connectivite a minima. PR secondaires  maladies oblitérant la macro ou la microcirculation des doigts. Bilan étiologique minimum: une capillaroscopie périunguéale ; la recherche d’anticorps antinucléaires (y compris centromères et anti-Scl70) ; un examen radiologique du thorax et des mains ; un hémogramme.

PR primitif ou idiopathique « Maladie de Raynaud» idiopathique, physiopathologie multifactorielle, hypersensibilité des récepteurs α 2 vasoconstricteurs et des perturbations dans la sécrétion endothéliale des médiateurs vasoactifs. C’ est le plus fréquent des PR (75 à 80 % des cas). Critères pour le PR primitif: crises au froid et l’émotion, bilatéralité, pas de gangrène, pas de cause, évolution supérieure à 2 ans.

PR idiopathique femme jeune parfois : autres manifestations d’hypersensibilité au froid (engelures, acro-cyanose) ; parfois : antécédents familiaux de PR ou des antécédents personnels de migraines. PR ancien >5 ans + bilan négatif  PR primitif. En particulier, la capillaroscopie normale ou sans microangiopathie organique.

PR secondaire

PR toxique ou médicamenteux médicaments vasoconstricteurs, les β-bloqueurs étant le plus souvent en cause bilatéral, sans signe clinique associé peut ne pas régresser après l’arrêt du traitement.

PR secondaire à une collagénose Bilatéral, acquis, souvent chez une femme de plus de 35 ans. Principalement la sclérodermie systémique (quasi constant) sclérodactylie, des doigts boudinés, des ulcérations ou des cicatrices d’ulcérations digitopulpaires. Capillaroscopiedans plus de 90 % des cas, des mégacapillaires avec le plus souvent une réduction du nombre des anses capillaires.

Capillaroscopie normale

Anomalies non spécifiques

Le mégacapillaire

PR secondaire à une artériopathie le plus souvent bilatéral, parfois asymétrique, et chez un homme fumeur  rechercher des arguments cliniques en faveur d’une artérite digitale : abolition des pouls radiaux et/ou cubitaux, peau des mains sèche et cyanique, manœuvre d’Allen positive. Homme jeune et grand fumeur  évoquer maladie de Buerger (thrombo-angéite oblitérante=PR, des troubles trophiques distaux, parfois des thromboses veineuses superficielles).

Maladie de Buerger

Maladie de Buerger

Maladie des engins vibrants Homme exposé à des microtraumatismes (vibrations) depuis plus de 6 mois PR + troubles sensitifs à type de paresthésies traduisant un syndrome canalaire (syndrome du canal carpien).

PR unilatéral  Quels que soient l’âge et le sexe  rechercher une anomalie vasculaire du membre supérieur homolatéral, rechercher un souffle sous-clavier ou l’abolition d’un pouls, pratiquer un échodoppler artériel, parfois complété par l’artériographie.

PR unilatéral Maladie du marteau paume de la main comme outil de travail ou de loisir (formation d’un anévrisme de l’artère cubitale responsable d’embolies dans les collatérales digitales) Anomalies de l’artère sous-clavière sténoses avec anévrismes poststénotiques embolies. Athérome, artérites inflammatoires ou post-traumatiques, défilé costoclaviculaire.

Traitement: résumé Hygiène de vie, quelle que soit l’étiologie : arrêt du tabac et médicaments vasoconstricteurs, protection contre le froid et l’humidité (mains et corps entier). PR primitif : si la gêne est importante, médicaments vasoactifs simples ou inhibiteurs calciques. PR secondaires, notamment la sclérodermie systémique: inhibiteurs calciques Nécroses digitales : traitement symptomatique local (pansement gras) et conservateur, éventuellement perfusions d’Iloprost (analogue de la prostacycline) en milieu hospitalier; Bosentan (prévention)

Traitement Quand et comment traiter? Quels sont les objectifs? Mesures associées: hygiène, professionnelles, psychologiques, etc. Outils de traitement: pharmacologiques, chirurgicaux Quelle efficacité? Avenir

Quand et comment traiter? Pas de traitement si < 1-2/semaine; < 15-30 min; et pas de retentissement. Pour épisodes peu fréquents: mesures d’hygiène, arrêt de tabac, etc. Episodes réguliers, gêne: Traitement médicamenteux PR sévère avec troubles trophiques: Prostacycline, sympathéctomie Certains traitements ne conviennent pas aux sujets avec TA limite/basse

Quels sont les objectifs? Diminuer la fréquence, la durée et la sévérité des épisodes Améliorer la qualité de vie Combattre le retentissement psychologique, professionnel

Mesures associées Hygiène: Eviter le froid et l’humidité (gants, chaussettes+++ et protéger le reste du corps) Professionnelles: retentissement professionnel chez 8% des malades. Discuter reclassement dans certaines situations (usage d’engins vibrants, exposition au froid prolongée) Psychologiques: Intervention psychologiques, relaxation, pour diminuer les situations d’anxiété et de conflit psychologique, pourvoyeurs de poussées. Arrêt de tabac : vasoconstriction cutanée Traitement des ulcères digitaux (UD): antalgiques++ (douleurvasospasm) traitement des surinfections

Outils de traitement Inhibiteurs calciques Prostaglandines Antagonistes α-adrénergiques Inhibiteurs de la phosphodiestérase Antagonistes du récepteur à l’endothéline : Bosentan(Tracleer®) Inhibiteurs de l’enzyme de conversion/ Antagonistes d’Angiotensine II Chirurgie L-arginine Fluoxétine Griséofulvine(Griséfuline®) Statines Pentoxifylline(Torental®) Toxine botulinique Antioxydants Antiagrégants/anticoagulants

Inhibiteurs calciques (1/3) Blocage des canaux calciques du muscle lisse des vaisseaux  diminution du Ca++ intracellulaire muscle lisse moins contracté augmentation du diamètre du vaisseau. Fonctionnent seulement sur les artères, et pas les veinesvasodilatation.

Inhibiteurs calciques (2/3) Trois classes: Phénylalkilamines : les plus cardio-sélectifs Verapamil (Isoptine®) Benzothazépines : cardio-sélectif intermédiaire. Diltiazem (Tildiem®, Monotildiem®) Dihydropyridines: les moins cardio-sélectifs. Nifédipine(Adalate®, Chronadalate®) Amlodipine(Amlor®) Lercandipine(Lercan®, Zanidip®)Nicardipine(Loxen®)

Inhibiteurs calciques (3/3) Les moins cardio-sélectifs sont les plus utilisés avec un bénéfice démontré Méta-analyse PR primitif: nombre d’épisodes diminué de 2.8-5/semaine; sévérité des épisodes diminuée de 33%. Méta-analyse PR secondaire: nombre diminué de 8.3/2 semaines; amélioration clinique 35%. Formes LP sont mieux tolérées, meilleure observance Initier à faible dose (Chronadalate® 30 mg 1/j) EI: céphalées, OMI, constipation, aggravation RGO, hypotension sévère si HTAP Le Raynaud « primitif » répondrait mieux (?) L’efficacité reste partielle aussi bien pour PR primitif que secondaire En pratique, l’efficacité peut être même mieux que dans les études car certains pts nécessitent des doses plus importantes Tératogènescontracéption

Prostaglandines (1/2) Pour les PR sévères avec UD évolutifs Iloprost injectable (Ilomédine®) Améliore le nombre et la sévérité des épisodes et favorise la cicatrisation des UD Inutile de mettre >0.5 ng/kg par min Formes injectables: contraintes+++ Céphalées, nausées, flush Formes PO et par inhalation: pas d’AMM dans PR (J Rheumatol. 2008 Sep;35(9):1830-7 )

Prostaglandines (2/2) Remodelage des capillaires responsable d’effet prolongé Arthritis Rheum. 2007 Jul;56(7):2243

Antagonistes α-adrénergique Les antagonistes adrénergiques classiques tels que Prazosine(Alpress®, Minipress®), n’apportent qu’une faible amélioration, transitoire, au PR; peu étudiés, et mal toléré Prazosine(Minipress® 0.5 ou 1 mg) dispose d’une AMM dans le PR Trois sous-types de récepteur alpha2-AR sont identifiés (α2A, α 2B, et α 2C) La réponse au froid serait médiée par α 2C RCT avec OPC-28326, un antagoniste sélectif de α 2C 10 et 40 mg a montré une amélioration dans le temps de rétablissement de température cutanée par rapport au placébo; bien toléré Mais aucune publication depuis 2004 ARTHRITIS & RHEUMATISM 2004: 50(12), 3994–4001 A Dadban Forum Acrosyndromes JDP 8 dec 2010 39

Points clés 1. Acrosyndrome vasculaire paroxystique déclenché par le froid. 2. Étiologies multiples avec phénomènes de Raynaud secondaires accompagnant des maladies oblitérant la macro- ou la microcirculation des extrémités ou, plus souvent, phénomène de Raynaud primitif, idiopathique. 3. L’enquête étiologique découle de l’interrogatoire et de l’examen clinique. 4. Un phénomène de Raynaud bilatéral et tardif, chez l’adulte d’âge moyen, doit faire pratiquer un bilan étiologique minimum, notamment une capillaroscopie périunguéale, pour éliminer une sclérodermie systémique.