La question de l’accès aux soins aujourd’hui : éléments de repérage Chantal CASES, IRDES 30/03/2017
En guise d’introduction… Niveau d’éducation, rapport au corps, expérience passée avec le système de soins, … Interactions médecin-patient, préférences du patient, « fonction de production de santé »… Inégalité d’offre de soins locale, réseau de transport… Couverture santé Accès effectif aux soins Santé … Permettre un égal accès aux soins est une condition nécessaire, mais pas suffisante, de l’égalité en santé
Les problèmes géographiques sont rares en médecine générale Faible densité médicale, forte activité des médecins présents et faibles recours aux soins : de moins de 1% de la population à environ 4 % vit dans une zone sous-dotée, selon les types d’approches 30/03/2017
Mais l’accès ne se fait pas toujours aux tarifs opposables… 30/03/2017
Les spécialistes plus inégalement répartis que les généralistes Et parfois aussi entre la ville et l’hôpital… (psychiatres) Pour les spécialistes, le clivage existe surtout entre les départements sièges ou non de CHU, l’installation se faisant très majoritairement dans la région où les médecins se sont formés et la mobilité interrégionale postérieure à une première installation demeurant faible
Les difficultés d’accès aux soins sont surtout économiques … En 2006, 14 % de la population déclarait avoir renoncé à des soins pour des raisons financières Indices de renoncement à sexe et âge équivalents Source : IRDES, enquête ESPS 30/03/2017
…pour des raisons diverses Des tickets modérateurs parfois élevés Notamment sur les médicaments, situation renforcée par la « franchise » Ces co-paiements représentent environ la moitié du reste à charge après AMO Des biens hors paniers de soins (environ 20%) ou à des tarifs dépassant les montants opposables Sur les honoraires en ville (1,5 Md€ en 2006) et à l’hôpital (0,5Md€) Sur les dispositifs médicaux (8,8 Md€) 30/03/2017
L’absence de complémentaire contribue aux renoncements... Toutes choses égales par ailleurs, les renoncements aux soins pour raisons financières sont deux fois plus fréquemment déclarés chez les personnes sans complémentaire santé Il est difficile d’évaluer les conséquences pour la santé de ces renoncements Les personnes couvertes par une complémentaire santé ont des dépenses de soins significativement plus élevées Le renoncement aux soins pour raisons financières est u phénomène significatif (il concernait 11% des personnes enquêtées par SPS en 2002), même s’il est à la baisse sur les années récentes
…surtout aux soins bucco- dentaires, optiques et spécialisés Source : IRDES, enquête ESPS 30/03/2017
La couverture complémentaire s’est largement répandue en France Si on inclut la CMUC, environ 93% de la population disposait d’une complémentaire santé en 2006 ; 13% des dépenses de soins étaient ainsi financées en 2007 Raisons du rôle croissant des OC : la plus grande diffusion de la couverture complémentaire dans la population (en particulier, mais pas seulement, avec la mise ne place de la CMU) : en 2004, 92% des personnes déclaraient bénéficier d’une couverture complémentaire ; en 1998, elle était de 84% et de 79% en 1988 ; la modification progressive du périmètre de prise en charge des complémentaires. Si la part des soins de ville sans TM[1] s’accroît sensiblement sur les dernières années, tirée par les ALD, diminuant la charge des OCAM, en sens inverse la croissance des dépassements et les déremboursements partiels de médicaments ont accru les charges des OCAM (de 6,8% des cotisations en 2003 selon le HCAAM), ainsi que les déremboursements partiels de médicaments et la contribution de 1,75% destinée à financer une partie de la CMUC. [1] Le TM moyen sur les soins de ville est évalué à 37% en 2004 Source : IRDES, enquête ESPS
Le taux de couverture complémentaire augmente avec le revenu (Y compris CMUC) Source : Enquête ESPS 2006
La couverture complémentaire : un net gradient social (Y compris CMUC) Le plus faible taux de couverture = les chômeurs (82%) Source : Enquête ESPS 2006
Moins de complémentaires chez les jeunes adultes et chez les plus âgés (Y compris CMUC) Source : Enquête ESPS 2006
Les contrats collectifs sont peu présents chez les plus modestes Les contrats collectifs sont moins coûteux et en général ont des garanties plus étendues que les contrats individuels Revenus Source : enquête ESPS, IRDES
Contrats individuels : des taux d’effort parfois élevés, malgré les aides publiques * Source : IRDES, enquête ESPS 2006 * Calcul à partir des cotisations et revenus déclarés par les ménages, contrats individuels seulement 30/03/2017
La perte d’une complémentaire : peu de libre choix Source : Enquête ESPS 2006
Ni complémentaire, ni ALD : 5 à 6% de la population, parfois en mauvaise santé « Comment est votre état de santé en général ? » Indices à sexe et âge comparables Dans cette catégorie, sont sur représentés : -Les personnes seules et de familles monoparentales -Les personnes vivant dans l’unité urbaine de Paris, Les chômeurs, de femmes au foyer, d’ouvriers Les non diplômés … Source : Enquête ESPS 2006
Le gradient social des soins de prévention Les soins de prévention sont plus fréquents aussi pour les personnes bénéficiant d’une couverture complémentaire ; ils croissent avec le niveau d’éducation, qui révèle la préférence pour le futur et l ’attention portée au capital santé (Génier, Economie et Statistique, 1998) L’achat de pharmacie sans ordonnance augmente avec le revenu et le diplôme et chez les personnes âgées (Génier, 1998, Briand, Chambaretaud, 2001) Un exemple : l’évaluation du bilan bucco-dentaire des adolescents (IRDES, 2002) : un effet positif sur le recours aux soins préventifs des adolescents appartenant à des familles modestes ; mais les familles les plus en difficulté, et les adolescents ayant des problèmes scolaires ou n ’ayant jamais reçu de conseils bucco-dentaires en bénéficient peu malgré la gratuité des soins. Il existe de nombreux autres exemples (sevrage tabagique, dépistage des cancers…) Ceci révèle, au delà des problèmes financiers, des représentations différenciées du « capital santé » que le système de santé ne compense pas , notamment à travers les soins de prévention prodigués
Conclusions Des problèmes d’accès aux soins géographiques, surtout pour les soins spécialisés, mais en premier lieu économiques et sociales L’assurance complémentaire santé, qui s’est largement répandue depuis la mise en place de la Sécurité sociale, a un rôle important dans le financement des soins ; l’absence de complémentaire est un facteur de renoncement à des soins qui peuvent être nécessaires Le taux de couverture par une complémentaire augmente avec le niveau social, de même que les garanties couvertes ; il existe une frange non négligeable de la population sans couverture et parfois en mauvaise santé, malgré les dispositifs publics pour les plus défavorisés Les politiques visant à augmenter le reste à charge des assurés risquent alors d’aggraver la situation des non assurés ou des moins bien assurés Mais au-delà de l’accès financier aux soins, les filières et conditions de prise en charge doivent être également questionnées