Helicobacter pylori
Helicobacter pylori est une bactérie qui infecte la muqueuse gastrique. 80 % des ulcères gastro-duodénaux sont causés par des infections de H. pylori, même si chez la plupart des humains infectés, la maladie reste asymptomatique. H. pylori vit exclusivement dans l'estomac humain et est le seul organisme connu pouvant survivre dans un environnement aussi acide.
Histoire 1 En 1875, des scientifiques allemands découvrirent une bactérie hélicoïdale dans des estomacs humains. Cette bactérie fut redécouverte en 1982 par deux chercheurs australiens, J. Robin Warren et Barry J. Marshall, qui isolaient et cultivaient des organismes à partir d'estomacs humains. Dans leur publication originelle, Warren et Marshall soutinrent que la plupart des ulcères stomacaux et gastriques étaient causés par une infection de cette bactérie, et non par le stress ou la nourriture épicée, comme on le pensait auparavant. Cette découverte leur valut le prix Nobel de physiologie et de médecine 2005.
Histoire 2 Certains pensent que la communauté médicale mit du temps avant de reconnaître le rôle de cette bactérie dans les ulcères gastriques, pensant qu'aucune bactérie ne pouvait survivre bien longtemps dans l'environnement acide de l'estomac. Après que des études complémentaires eurent été réalisées, dont celle durant laquelle Marshall ingurgita un tube à essai de H. pylori, contracta un ulcère et se soigna avec des antibiotiques (satisfaisant de ce fait 3 des 4 postulats de Robert Koch), la communauté médicale commença à changer d'avis.
Histoire 3 En 1994, le National Institutes of Health publia un texte soutenant que la plupart des ulcères gastriques récurrents étaient causés par H. pylori, et recommandait que des antibiotiques soient inclus dans le traitement. Avant que soit reconnu le rôle de cette bactérie, les ulcères stomacaux étaient habituellement soignés par des médicaments qui neutralisaient l'acidité stomacale, ou diminuaient sa production. Malgré le fait que cette technique donnait de bons résultats, les ulcères réapparaissaient très souvent. Un médicament classiquement utilisé était le subsalicylate de bismuth. Il fonctionnait assez bien, mais fut finalement abandonné, son mécanisme d'action étant inconnu. De nos jours, il semble évident que le sel de bismuth fonctionnait comme un antibiotique, et la plupart des ulcères sont efficacement traités par des antibiotiques ciblant H. pylori.
Structure de la bactérie 1
Structure de la bactérie 2 Grâce à sa forme hélicoïdale et à ses flagelles, la bactérie se glisse à travers les muqueuses de l'estomac et s'ancre aux cellules épithéliales grâce à des adhésines (protéines fixatrices). Elle sécrète alors une enzyme appelée « uréase » qui transforme l'urée en ammoniac et en dioxyde de carbone. Cet ammoniac va partiellement neutraliser l'acidité gastrique (qui sert entre autre à tuer les bactéries). Malheureusement, l'ammoniac est toxique pour les cellules épithéliales, et va, de concert avec d'autres produits sécrétés par H. pylori (protéases, catalases, phospholipases, ...) endommager la surface des cellules épithéliales, enclenchant de ce fait le processus de formation d'ulcères. Des études récentes tendent à montrer que certaines souches de cette bactérie possèdent un mécanisme particulier d'injection d'agents inflammatoires dans les cellules stomacales.
Infection 1 L'infection peut être symptomatique ou asymptomatique. On estime d'ailleurs que 70% des infections sont asymptomatiques! Cette bactérie a été isolée dans des selles, de la salive et sur des plaques dentaires, ce qui laisse à supposer qu'une transmission est possible par ingestion de selles ou par voie gastro-orale.
Infection 2 On estime qu'environ 2/3 de la population mondiale sont infectés par cette bactérie ! Le taux exact d'infection varie d'un pays à l'autre : environ 25 % dans les pays occidentaux, et un taux plus élevé dans les pays du Tiers-Monde. Dans ces derniers, il est courant de rencontrer des enfants infectés, probablement à cause des mauvaises conditions sanitaires. Aux États-Unis, par contre, les personnes atteintes sont essentiellement des personnes âgées (plus de 50 % de personnes contaminées au delà de 60 ans, contre environ 20% chez les moins de 40 ans), ainsi que les personnes les plus démunies.
Infection 3 Le taux d'infection est essentiellement fonction des conditions d'hygiène, ainsi que du degré d'utilisation des antibiotiques. Néanmoins, des résistances contre certains antibiotiques sont apparues chez certaines souches de H. pylori.
Infection 4 Si elle n'est pas soignée par une prise d'antibiotiques, il semblerait qu'une infection par H. pylori pourrait persister durant toute la vie de l'individu. Le système immunitaire humain ne serait donc pas capable d'éradiquer cette bactérie.
Diagnostic 1 Les méthodes invasives nécessitent l'obtention de biopsies gastriques obtenues par fibroscopie. Elles sont au nombre de 4 : Examen histologique Culture Test à l'uréase PCR
Diagnostic 2 L'examen histologique est le plus classique. Il nécessite des prélèvements de bonne qualité et un observateur expérimenté. La détection de bactéries spiralées se fait en surface après coloration par Hématéine Eosine Safran (HES) ou Giemsa, voire par réaction immunoenzymatique.
Diagnostic 3 La culture nécessite des conditions particulières de transport de la biopsie et un broyage. Elle est effectuée sur un milieu enrichi contenant des antibiotiques pour inhiber les contaminants, maintenu 7 jours à 37°C en atmosphère microaérobie. L'identification de H. pylori est basée sur des tests biochimiques (oxydase, catalase, uréase +). Elle permet l'étude de la sensibilité aux antibiotiques.
Diagnostic 4 Le test à l'uréase est un test spécial pour cette bactérie. Il est basé sur la production abondante d'uréase par H. pylori. Une biopsie où ces bactéries sont présentes mise dans un milieu contenant de l'urée, va l'hydrolyser en libérant de l'ammoniaque qui augmente le pH et fait virer un indicateur en 1 heure
Diagnostic 5 La PCR peut aussi être utilisée pour détecter H. pylori avec des amorces basées sur l'ADNr 16S ou des gènes spécifiques (vacA comme ci-dessous).
Diagnostic 6 méthodes non invasives La sérologie Des tests immunoenzymatiques dans les selles. Le test respiratoire à l'urée.
Diagnostic 7 Le test respiratoire à l'urée. Il est basé sur le fait que si H. pylori est présent dans l'estomac, l'uréase abondante qu'il produit va hydrolyser l'urée marquée ingérée en ammoniac et gaz carbonique marqué.Celui ci est absorbé dans le sang et éliminé dans l'air expiré. Le test consiste à comparer le ratio 13C/12C dans l'air expiré (recueilli en soufflant dans un tube à l'aide d'une paille) avant (T0) et 30 minutes (T30) après l'ingestion d'urée (positif si > 4 pour 1000). L'analyse de l'air expiré est réalisée à l'aide d'un spectromètre de masse ou infrarouge. Le test se pratique à jeun et est sensibilisé par la consommation d'acide citrique ou de jus d'orange.
Diagnostic 7 En pratique : Biopsie et examen histologique test respiratoire à l'urée.
Pathologie liée à cette infection Une dyspepsie non ulcéreuse Des ulcères gastriques et/ou duodénaux Des gastrites chroniques le plus souvent localisées au niveau de l'antre mais qui s'étendent parfois au niveau du fundus. Une malabsorption de la vitamine B12 Des gastrites atrophiques entraînant une hypochlorydrie voire une achlorhydrie. Des métaplasies intestinales qui traduisent un stade pré-cancéreux. Des cancers (le cancer de l'estomac - adénocarcinome - et le lymphome de Malt gastrique)
Traitement 1 Le traitement recommandé pour éradiquer H. pylori associe un agent antisécrétoire (inhibiteur de la pompe à protons à double dose) amoxicilline clarithromycine durant 7 jours. En cas d'échec, une résistance à la clarithromycine est souvent en cause et cet antibiotique peut être remplacé par le métronidazole dans la tri-thérapie donnée alors durant 14 jours (antibiogramme).
Traitement 2 La surveillance de l'efficacité du traitement est réalisée par un test respiratoire à l'urée marquée, 4 à 5 semaines après l'arrêt du traitement. Les indications majeures pour l'éradication sont: la maladie ulcéreuse gastrique et duodénale, le lymphome gastrique du MALT les lésions précancéreuses de l'estomac. L'éradication à visée prophylactique pour le carcinome gastrique est actuellement en discussion. Il n'y a pas actuellement de vaccin disponible.