L’unité lexicale
Le lexique désigne conventionnellement l’ensemble des mots au moyen desquels les membres d’une communauté linguistique communiquent entre eux. Cette définition du lexique oblige à donner une définition précise à l’unité lexicale, le mot, en tant que élément de base de l’ensemble. La notion traditionnelle de mot est l’une de celles qui ont tendance à solliciter le plus constamment l’attention des linguistes. Cette notion, qui semble être familière et évidente pour le grand public, constitue pour le linguiste une source de difficultés théoriques considérables.
D’après la définition du dictionnaire du J Dubois, le mot est définit comme étant « un élément linguistique significatif composé d’un ou plusieurs phonèmes […] le mot dénote un objet (substantif), une action ou un état (verbe), une qualité (adjectif), une relation (préposition), etc. ». Une telle acception rencontre divers réserves portant sur : Le fait qu’un mot possède en général non pas un seul sens mais plusieurs. Sur l’identité postulée entre graphisme et fonctionnement sémantique. Sur le fait que les mêmes notions comme la qualité ou l’action, peuvent être marquées indifféremment par des mots de diverses natures grammaticales.
Traditionnellement, le mot est une suite de lettres (unités) qui possède un emploi spécifique et un sens (un noyau sémantique et noyau grammatical). Selon le point de vue le plus trivial, un mot est une unité graphique du code écrit délimitée à droit et à gauche par un blanc, possédant un emploi spécifique et un sens.
La linguistique structurale a tendance à se servir assez peu de la notion du mot en raison de son manque de rigueur. A ce titre deux arguments sont valables : - Dans certaines langues les mots ne sont pas distingués dans la chaîne syntagmatique. Cette difficulté de délimitation est due à l’absence d’indices de démarcation entre les mots dans la chaîne parlée. - Le deuxième argument est lié aux limites du mot qui est mal taillé, il regroupe parfois plusieurs unités minuscules de signification en formant un tout solidaire : le cas des mots composés, des expressions figées, …il y a aussi la présence d’un certain nombre de traits de juxtaposition de unités : la troncation, la siglaison, le collage, etc.
Jusque là la question reste non résolue. Qu’est-ce qu’un mot Jusque là la question reste non résolue. Qu’est-ce qu’un mot ? Quelles sont ses limites ? Faut-il considérer tous les mots qui se produisent selon les formes que nous avons citées comme des mots ? De toute façon, la méfiance à l’égard de notion de mot a poussé les linguistes à proposer d’autres concepts qui répondent plus ou moins à des critères scientifiques, en partant bien sur de quelques a priori méthodologiques qui ont fortement marginalisé l’usage du « mot » du contexte linguistique.
Pour André Martinet, le mot est défini comme une unité de signification au-delà de laquelle on ne plus segmenter tout en conservant un sens autonome. Cette unité de signification ou unité de la première articulation (monème) est aussi caractérisé par la non séparabilité des unités qui la réalisent phonétiquement (ou unité de la deuxième articulation (phonème)). D’autant plus qu’elle est définie par ses possibilités de commutation dans l’unité linguistique qui lui est immédiatement supérieure, syntagme ou phrase.
Pour Martinet, l’unité minimale pourvue d’un sens, l’unité de la 1ère articulation, est le monème. Les monèmes comprennent les lexèmes et morphèmes ; d’un côté les unités du lexique, d’autre part les unités de la grammaire. Les lexèmes renvoient à un concept empirique ou abstrait comme des noms, des verbes, des adjectifs. La liste est ouverte Les morphèmes renvoient à une catégorie grammaticale exprimant : le nombre, le temps, le genre, le mode, l’aspect ou les connexions logiques... la classe est fermée (on arrive à les répertorier).
Il est important de signaler que parmi les morphèmes on distingue les morphèmes liés (ou dépendants) et les morphèmes indépendants. La bipartition entre lexème et morphème a pour rôle d’expliquer le fonctionnement de la langue.
Dans la terminologie de la grammaire distributionnelle, le terme de morphème désigne le plus petit élément significatif individualisé dans un énoncé, que l’on peut diviser en unités plus petite sans passer au niveau phonologique. C’est donc l’unité de minimale de la 1ère articulation, la 1ère unité porteuse de sens. A ce titre, il s’oppose à phonème unité de la 2ème articulation.
Pour Bernard Pottier : A la même époque Bernard Pottier oppose les lexèmes, ou morphèmes lexicaux, aux grammèmes, ou morphèmes grammaticaux. Les lexèmes sont les éléments lexicaux les plus simples, racines ou mots simples dépouillés de leurs flexions. Il exclue les formes simples qui appartiennent aux grammèmes : ces formants englobent les affixes, les marques de l’accord, etc.
La composition : peut être définie comme la juxtaposition de deux ou plusieurs éléments qui peuvent servir de base à des dérivés, les unités complexes principalement nominales, à deux termes (chou-fleur, porte-money, …) ; et les unités complexes à trois termes ( pomme de terre, chemin de fer, machine à coudre,...). Tous les faits de résultats différents et de formes plus complexes sont regroupées sous l’étiquette « locution » (à pas de loup, au fur et à mesure,…)
André Martinet : Le synthème, unité syntaxique, regroupe toutes les formes construites par dérivation, composition ou figement. Ce sont des groupements de monèmes conjoints, alors que le syntagme, appelé aussi syllème par Martinet, est une combinaison de monèmes libres. Le critère fonctionnel de non-séparabilité n’est pas obligatoire pour définir le synthème.
Bernard Pottier parle de lexies : les lexies peuvent être simples (chaise), composées (sous-chef, cheval-vapeur) ou complexes (pomme de terre, prendre la mouche). Elles ne sont jamais inférieures à l’unité empirique que constitue le mot-graphique. Emile Benveniste : Synapsie Dans des articles postérieurs de quelques années à ceux de Pottier, Benveniste (1966,1967) identifie des synapsies, qu’il définit comme des groupes de lexèmes formant une unité nouvelle à signifié unique et constant.
Références bibliographiques : Bally C. 1965 (1ère édition 1932). Linguistique générale et linguistique française, Berne, Francke. Benveniste E. 1967. “Fondements syntaxiques de la composition nominale”. BSL. Dubois J. 1973, Dictionnaire de linguistique, Paris, Larousse. Gaudin, F., Guespin L. 2000, Initiation à la lexicologie française, Bruxelles, Duculot. Lehmann A. Martin-Berthet F. 2005, Introduction à la lexicologie : Sémantique et morphologie, Paris, Armand Colin Martinet A. 1960. Elements de linguistique générale. Paris:Armand Colin. Mitterand H. 1965. Les mots français. Que-sais-je ? N° 270 Paris, PUF. Mounin G. 1964. La machine à traduire. Histoire des problèmes linguistiques. La Haye, Mouton. Niklas-Salminen A. 1997, la lexicologie, Paris Armand Colin. Picoche J. 1977, Précis de lexicologie française, Paris, Nathan. Pottier B. 1962a. “Le mot, unité de comportement”, colloque ATALA Le mot pour la Traduction Automatique et la linguistique appliquée, 8 décembre1962.