Cette série de diapositives est tirée d’une séance sur les tous derniers essais lors des 57es sessions scientifiques annuelles de l’American College of Cardiology, qui ont eu lieu du 29 mars au 1er avril 2008, à Chicago, Illinois. La présentation faite initialement par Steven E. Nissen, M.D. et publié simultanément dans le Journal of the American Medical Association (2008;299:1547-1560), est rapportée par David Fitchett, M.D., FRCPC, FACC. La réduction du risque cardiovasculaire (CV) par une approche multifacette a eu un effet important sur la réduction de la mortalité due aux maladies coronariennes et cérébro-vasculaires. Une étude récente a attribué plus de la moitié de la réduction de la mortalité CV au cours des 20 dernières années à la modification des facteurs de risque. L’étude INTERHEART a révélé que des taux lipidiques anormaux, le tabagisme, l’hypertension, le diabète, l’obésité abdominale, les facteurs psycho-sociaux, la consommation sous-optimale de fruits, de légumes, et l’alcool ainsi que l’absence d’activité physique régulière sont responsables de la plupart du risque d’infarctus du myocarde (IM) dans le monde chez les sujets des deux sexes, à tous les âges. Étant donné que l’anomalie des taux lipidiques est associée au risque le plus élevé d’IM attribuable à la population, la modification du taux de cholestérol, et la réduction du cholestérol des lipoprotéines de basse densité (C-LDL) en particulier, ont un impact important sur la diminution des événements CV. Des études de prévention primaire et secondaire chez des patients traités avec des statines pendant une période allant jusqu’à 5 ans démontrent une réduction d’environ un tiers de la morbidité et de la mortalité4. Cependant, deux tiers des patients dans ces études continuent de présenter des événements CV malgré la réduction du C-LDL. La baisse de ce risque résiduel constitue aujourd’hui l’un des plus grands défis en cardiologie préventive. L’impact de l’obésité viscérale sur les maladies CV athéro-scléreuses demeure probablement un élément important de ce risque résiduel. Le numéro de Cardiologie – Actualités scientifiques examinait le lien existant entre l’adiposité viscérale et l’athérosclérose, et analysait une étude clinique récente visant à déterminer si la réduction du risque cardiométabolique avec un inhibiteur endo-cannabinoïde, le rimonabant, se traduit par un ralentissement de la progression de l’athérosclérose.
Le mode de vie d’une grande partie de la population dans le monde, caractérisé par l’absence d’activité physique et un régime alimentaire excessivement énergétique et calorique, est responsable de l’épidémie actuelle d’obésité abdominale et de syndrome métabolique. La prévalence du surpoids (indice de masse corporelle [IMC] > 25 kg/m2) et de l’obésité (IMC > 30 kg/m2) a augmenté considérablement au cours des 10 à 20 dernières années. Environ un tiers de la population aux États-Unis (É.-U.) est en surpoids ou obèse. Des études épidémiologiques indiquent que le surpoids et l’obésité sont des facteurs de risque indépendants de dévelop-pement du diabète, de maladies CV et de mortalité future. Actuellement, l’augmentation de l’obésité est une cause majeure de la hausse rapide de la prévalence du diabète au Canada. En Ontario, la prévalence du diabète a augmenté substantiellement au cours des 10 dernières années, et en 2005, elle excédait le taux global que l’on avait prédit pour 2030. La Nurses’ Health Study (Am J Epidemiol. 1997;145:615-619) a démontré que l’IMC, le tour de taille et le rapport taille-hanche sont des prédicteurs indépendants de développement du diabète et de la coronaropathie. Le tour de taille et le rapport taille-hanche, en tant que mesures de l’obésité abdominale, permettent de mieux prédire le risque CV que l’IMC seul. L’étude INTERHEART (Lancet. 2004;364:937-952) a révélé que le rapport taille-hanche est un facteur de risque indépendant d’IM et il a été un meilleur prédicteur du risque dans toute la gamme de l’IMC, comme le montre cette diapositive.
L’obésité viscérale est associée au développement de l’insulinorésistance, d’anomalies lipidiques associées, du diabète et à un risque accru de maladie vasculaire athéroscléreuse, comme le montre cette diapositive.
Le système endocannabinoïde est un système physiologique endogène qui intègre l’apport, le transport, le métabolisme et le stockage de nutriments dans le cerveau, l’intestin, le foie, le tissu adipeux et le muscle, comme le montre cette diapositive. Les récepteurs cannabinoïdes (CB1) sont exprimés dans le cerveau, ainsi que dans le tissu adipeux, le foie, le tractus gastro-intestinal (GI) et les muscles squelettiques. Des taux circulants accrus des agonistes endocannabinoïdes physiologiques – le 2-arachidonylglycérol et l’anandamide – sont présents chez les sujets présentant une obésité abdominale. Une activité excessive du système endocannabinoïde entraîne une augmentation du poids corporel, une lipogenèse accrue et une dyslipidémie en résultant, et une sensibilité à l’insuline réduite. Le taux d’adiponectine est réduit, ce qui entraîne une intolérance au glucose, un profil proinflammatoire et le développement accru de l’athérosclérose.
L’utilisation du rimonabant, un agoniste des récepteurs CB1, entraîne une perte pondérale, une réduction de l’adiposité abdominale et une amélioration des facteurs de risque cardiométabolique, comme le montre cette diapositive. Les 4 études RIO (Rimonanbant in Obesity; JAMA.2006;295:761-775 ) ont évalué l’efficacité et l’innocuité du rimonabant chez > 6000 patients en surpoids et obèses recevant le rimonabant depuis 1 à 2 ans. Le traitement avec le rimonabant a non seulement entraîné une perte de poids d’environ 4 kg, mais également une diminution du risque proathérogène et proinflammatoire. On a noté une augmentation du taux de cholestérol des lipoprotéines de haute densité (C-HDL), une tendance à l’augmentation de la taille des particules de C-LDL et une diminution du marqueur inflammatoire – la protéine C-réactive (PCR). De plus, ces modifica-tions métaboliques étaient deux fois plus importantes que prévu sur la base d’une perte pondérale uniquement. Ces observations confirment un effet du rimonabant indépendant du poids sur la réduction des facteurs de risque métaboliques de développement de l’athérosclérose. On prévoit que la prévalence accrue de l’obésité abdominale et du diabète aura un impact majeur sur les maladies CV et les coûts médicaux associés. Pourtant, même une légère perte de poids (5 à 10 %) pourrait réduire les facteurs de risque cardiométabolique. Cependant, les approches comportementales et alimentaires actuelles visant à perdre du poids ont un succès limité, et de nouvelles approches permettant une perte de poids sont nécessaires. Le rimonabant entraîne non seulement une perte de poids soutenue, mais il réduit également les composantes métaboliques du risque cardiométabolique. Cependant, on n’a pas élucidé si cette stratégie se traduit par une amélioration des résultats CV. L’étude STRADIVARIUS est la première d’une série d’études visant à évaluer l’impact du rimonabant sur la progression des maladies artérielles athéroscléreuses.
STRADIVARIUS (Strategy to Reduce Atherosclerosis Development Involving Administration of Rimonabant – The Intravascular Ultrasound Study) est une étude à répartition aléatoire, à double insu et contrôlée avec placebo visant à évaluer l’effet du rimonavant, un inhibiteur du récepteur CB1, sur l’athérosclérose des artères coronaires tel qu’évalué par l’échographie intracoronarienne. Le plan de l’étude est indiqué dans cette diapositive. Cette étude a été réalisée dans 112 centres en Amérique du Nord (incluant 6 centres canadiens), en Europe et en Australie. Les patients admissibles souffraient d’obésité abdominale (tour de taille : hommes > 102 cm, femmes > 88 cm) et présentaient 2 caractéristiques additionnelles du syndrome métabolique qui pouvaient inclure : taux de triglycérides > 1,7 mmol/L, C-HDL < 1,04 mmol/L, glycémie à jeun > 6,1 mmol/L ou hypertension (patients ayant une tension artérielle ≥ 140/90 mm Hg ou recevant un traitement antihypertenseur). Les patients admissibles subissant un angiogramme coronarien diagnostique indiqué cliniquement devaient présenter au moins 1 rétrécissement de la lumière coronaire de 20 % au minimum. Les patients étaient exclus s’ils souffraient de diabète non contrôlé ou avaient subi une chirurgie de l’obésité. D’autres agents d’amaigrissement, tels que l’orlistat ou la sibutramine, n’étaient pas autorisés durant l’étude.
L’opérateur a choisi une seule artère pour effectuer une échographie intravasculaire (IVUS). L’artère choisie était le vaisseau le plus long et le plus droit qui n’avait pas subi une revascularisation antérieure et qui ne présentait pas de sténose > 50 %. L’IVUS a été effectuée dans le segment de vaisseau le plus long possible et un laboratoire central a analysé les clichés enregistrés. Après une IVUS initiale réussie, les patients ont été répartis pour recevoir le rimonabant (20 mg par jour) ou un placebo semblable pendant une période de 18 à 20 mois. Un examen IVUS de suivi du même segment d’artère coronaire que celui étudié initialement était effectué une deuxième fois, à 18-20 mois ou moins, si le patient devait subir une angiographie coronarienne entre 12 et 18 mois. Les patients ont subi un examen IVUS de suivi sur la base du principe de l’intention de traiter, qu’ils continuent ou non de prendre les médicaments à l’étude. L’analyse de l’IVUS est indiquée dans cette diapositive. Le paramètre d’efficacité primaire était la modification du volume de l’athérome en pourcentage (VAP) entre le début de l’étude et le 18e mois. Un paramètre d’efficacité secondaire, le volume total de l’athérome normalisé, a été calculé. Tout d’abord, la surface moyenne de l’athérome par coupe transversale a été déterminée, puis normalisée en fonction du nombre médian de coupes pour chaque artère dans toutes les études.
Les caractéristiques initiales étaient bien appariées entre les groupes de traitement et placebo. Les patients étaient typiques de ceux atteints du syndrome métabolique : âge moyen 57,7 ans ; 65 % d’hommes ; tour de taille 117 cm ; IMC 35,3 kg/m2 ; incidence de l’hypertension : 87 % ; triglycérides > 1,7 mmol/L, 58 % ; C-HDL < 1,04 mmol/L, 64 % ; et glycémie à jeun > 6,1 mmol/L, 52 %. Les patients avaient recours dans une grande mesure à des médicaments pour prévenir les maladies vasculaires qui incluaient l’acide acétylsalicylique (AAS) 91 %, le clopidogrel ou la ticlopidine 60 %, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (ECA) ou les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine 69 %, les statines 82 % et les bêta-bloquants 70 %. Les hypoglycémiants oraux étaient utilisés dans 30 % des cas et 11 % des patients recevaient de l’insuline. Des antécédents de maladie psychiatrique ont été enregistrés chez 25 % des patients, 47 % prenaient une benzodiazépine et 19 % prenaient un antidépresseur. Le traitement avec le rimonabant pendant 18 mois a entraîné une amélioration impressionnante des facteurs de risque cardiométabolique. Les patients recevant le rimonabant ont perdu 4,3 kg (vs placebo – 0,5 kg) et leur tour de taille a diminué de 4,5 cm (vs placebo 1 cm ; figure 4). Le C-HDL a augmenté de 22,4 % (placebo + 6,9 %) et les triglycérides ont diminué de 20,5 % (placebo -6,2 %). Le taux d’hémoglobine A1c (HbA1c) a diminué de 0,13 % (vs placebo + 0,43 %) et le taux de PCR à haute sensibilité (hs) a diminué de 50,3 % (vs placebo -30,9 %).
La modification des paramètres d’efficacité primaire (VAP) et secondaire (VAT) de l’étude est indiquée dans cette diapositive. On a noté une augmentation non significative du VAP dans le groupe recevant le rimonabant et une augmentation significative dans le groupe placebo. La différence dans le VAP entre l’examen initial et l’examen de suivi final n’était pas significativement différente entre les patients recevant le placebo et ceux recevant le rimonabant. En revanche, le paramètre d’efficacité secondaire, le VAT, a révélé des différences significatives entre les groupes placebo et de traitement au cours de la période de traitement. Dans le groupe placebo, le VAT n’a pas changé significativement (+0,88 mm ; intervalle de confiance [IC] à 95 %, -1,03 à 2,79 mm3). Pourtant, dans le groupe recevant le rimonabant, le VAT a diminué de 2,2 mm3 (IC à 95 %, -4,09 à 0,24 mm3). La différence entre le VAT dans les groupes de traitement et placebo était statistiquement significative (p = 0,03). En outre, l’analyse de l’IVUS a démontré que le rimonabant a réduit significativement l’épaisseur maximale de l’athérome, alors que l’on n’a noté aucun changement dans le groupe traité avec le placebo. Cependant, on n’a noté aucun changement dans le volume de l’athérome sur les 10 mm du segment de l’artère les plus gravement atteints pour l’un et l’autre des groupes de traitement. Les analyses effectuées en vue de déterminer si les résultats de l’étude étaient affectés par le fait qu’il n’avait pas été possible d’effectuer une IVUS de suivi chez tous les patients n’ont révélé aucun changement dans les résultats de l’IVUS primaire (VAP) ou secondaire (VAT).
L’étude STRADIVARIUS révèle que le rimonabant a entraîné une perte de poids et une amélioration du profil de risque métabolique concordant avec les résultats de la série d’études cliniques RIO. Bien que le paramètre primaire du VAP n’ait pas changé après 18 à 20 mois de traitement avec le rimonabant, le VAT a diminué significativement. La mesure du VAP représente le rapport entre le volume de l’athérome et le volume de la membrane élastique externe (MEE) et a été la mesure la plus importante dans les études sur les statines ayant recours à l’IVUS. Par opposition, le paramètre secondaire mesuré avec l’IVUS, le VAT, est uniquement une mesure du volume de l’athérome. Par conséquent, si le volume de l’athérome et le volume de la MEE diminuent, on ne peut observer que peu de changement dans le VAP, mais on note une réduction significative du VAT. Cependant, d’après les études antérieures, on ne sait pas précisé-ment pourquoi l’amélioration des facteurs de risque n’a pas entraîné une réduction plus importante du VAP. Dans des analyses de sous-groupes, on a observé que chez les patients qui ne recevaient pas de statines, la progression de l’athérosclérose était plus lente. Cela peut suggérer qu’une interaction entre le rimonabant et les statines pourrait avoir limité les bénéfices du rimonabant chez les patients (80 %) qui recevaient des statines. La progression de l’athérosclérose a été plus lente également chez les sujets recevant le rimonabant dont le taux de triglycérides était plus élevé. Cette observation peut indiquer que l’inhibition du récepteur CB1 offre un plus grand bénéfice chez les sujets souffrant du trouble métabolique le plus important. De plus, il est possible que la durée du traitement n’ait pas été suffisante pour que l’on observe une réduction de la progression de l’athérosclérose. Étant donné que l’analyse IVUS était en intention de traiter, un nombre important de patients n’a reçu aucun traitement pendant une longue période. Il est possible que cela ait réduit la puissance de l’étude pour observer une différence entre les groupes. Afin de déterminer si le rimonabant est cliniquement utile, il sera nécessaire d’effectuer d’autres études pour obtenir des données cliniques et d’imagerie. Actuelle-ment,des études cliniques examinent les effets du rimonabant sur l’athérosclérose et les paramètres d’évaluation. Seules ces études nous permettront de savoir si le rimonabant a un effet favorable sur l’athérosclérose et ainsi, s’il améliore les résultats cliniques.