Pharmacologie Des Curares Dr. Rachid Benafitou Département d’Anesthésie Réanimation Année Universitaire 2011 – 2012 CHIS - RABAT
Historique Curares : “ourari” = la mort qui tue tout bas un nom générique donné à des substances extraites de plantes sud-américaines et utilisées comme poisons sur des pointes de flèches. Découverte: 16ème siècle par Sir Walter Raleigh 1932:Première utilisation clinique, dans le tt de la spasticité musculaire 1942: Griffith et Johnson l’utilisent pour induire un BNM 1949: Début de curarisation
Pourquoi Curariser? Faciliter l’intubation trachéale Permettre l’acte chirurgical Faciliter la ventilation contrôlée
Classification DEPOLARISANTS SUCCINYLCHOLINE (Celocurine) NON STEROIDES Pancuronium (Pavulon®) Vecuronium (Norcuron ®) Rocuronium (Esmeron ®) BENZYL ISOQUINONES Atracurium (Tracurium ®) Cisatracurium (Nimbex ®) Mivacurium
Bases Physiologiques
Neurone
Plaque Motrice
Étapes de la Transmission Synaptique Dans la terminaison présynaptique,les vésicules contiennent la substance chimique appelée Neurotransmetteur= Acetylcholine. 2. Lors de l’arrivée de l’influx nerveux, codé en PA, dans la terminaison du neurone présynaptique, celui-ci provoque la fusion des vésicules avec la membrane présynaptique (3). 4. Les neurotransmetteurs sont libérés dans la fente synaptique . 5. Ceux-ci se fixent sur les récepteurs spécifiques situés sur la mb postsynaptique. 6. Naissance de nouveaux PA. 7.Hydrolyse de l’Ach par l’enzyme Acétylcholinestérase
Schéma représentant les différentes étapes de la transmission synaptique
Acétylcholine l’Ach est synthétisée dans le cytoplasme de la terminaison nerveuse à partir de l’acétylCoA et de la choline Dès leur libération, environ la moitié des molécules d’Ach sont hydrolysées par l’enzyme acétylcholinestérase. Mais il s’en accumule bientôt une telle quantité dans la fente synaptique que l’enzyme ne peut tout dégrader et l’autre moitié atteint les récepteurs nicotiniques.
Récepteur à l’Acétylcholine Récepteurs nicotinique: protéines qui forment un canal ionique fiché dans la couche bi-lipidique de la membrane postsynaptique. L’Ach se fixe sur la partie extra-cellulaire des deux sous-unités alpha de cette protéine canal qui compte 5 sous-unités.
Récepteur à l’Acétylcholine
Mécanisme d’Action des Curares
Les curares entraînent un bocage de la transmission synaptique neuromusculaire par action sur la plaque motrice Différence entre les deux classes de curares: vitesse d’installation: Curares non dépolarisants: blocage compétitif des récepteurs nicotiniques Curare dépolarisant: dépolarisation de la membrane postsynaptique par libération d’Ach avant de la bloquer
Curares Non Dépolarisants Fixation compétitive antagoniste de l’acétylcholine sur des sous-unités α Bloque le récepteur en position fermée: Ils sont incapables de produire un changement dans la conformation des protéines et d’ouvrir le canal ionique Nécessité d’occupation d’une seule sous-unité α Au moins 75 % des récepteurs doivent être occupés par un CND pour que la paralysie s’installe
Mécanismes d’action des curares non dépolarisants
Caractéristiques du Blocage Non Dépolarisant Pas de fasciculations lors de l’installation du bloc Diminution de la réponse à une stimulation (effet curarisant proprement dit) Antagonisation du bloc par les anticholinestérasiques (bloc compétitif)
la Succinylcholine Parenté structurale avec l’acétylcholine Fixation au niveau des deux sous-unités α, avec ouverture du récepteur Sortie obligatoire de K+ de la cellule musculaire Dépolarisation initiale comme l’Ach mais prolongée dégradée par les cholinestérases plasmatiques durée plus longue que l ’AcCh plaque « inexcitable » paralysie musculaire Fasciculations : rôle présynaptique et influx rétrograde
Caractéristiques du Blocage Dépolarisant. fasciculations lors de l’installation du bloc (contractions musculaires) diminution de la réponse à une stimulation (effet curarisant proprement dit) pas d’antagonisation possible par les anticholinestérasiques (bloc non compétitif).
Effets Biologiques des Curares 1.Paralysie des muscles striés squelettiques 2.Pas d’action sur le SNC 3.Ganglions du SNA et récepteurs muscariniques actions vagolytiques: tachycardie et hypertension (rocuronium,pancuronium). 4.Libération d’histamine stimulation directe des mastocytes. bronchospasme,hypotension et hypersécrétion salivaire et bronchique 5.Effets cardiovasculaires Ils découlent des effets consécutifs au blocage ganglionnaire ainsi qu’à la libération d’histamine
Pharmacocinétique CND Durée d’action Délai d’action Métabolisme Élimination
1.Délai et Durée d’action
2.Métabolisme et Élimination Durée d’action Métabolisme Elimination Longue Pancuronium Foie Plasmatique Urinaire+++ Biliaire+ Intermédiaire Atracurium Estérases plasmatiques Voie de Hoffmann Biliaire Urinaire (faible) Cisatracurium Rénale Vecuronium Rein Biliaire+++ Urinaire+ Rocuronium Courte Mivacurium Pseudocholinestérases plasmatiques Urinaire
3.Modifications de la Pharmacocinétique Âge Réduction de clairance plasmatique délai d’installation bref chez le nourrisson et l’enfant (DC élevé) Insuffisance hépatique et rénale Accumulation Hypothermie Diminution du métabolisme des organes excréteurs
Pharmacodynamie CND: Puissance Définition de la Dose active 95: DA95 = dose qui entraîne un bloc de 95% sur AP Dose d'intubation : la dose ayant un effet sur les muscles respiratoires et laryngés, deux fois plus résistants que les muscles du pouces. la Dose d’intubation = 2 x DA95
DA95 (mg/kg) Dose d'intubation (mg/kg) Atracurium 0,25 0,50 - 0,60 Mivacurium 0,08 > 0,20 Vécuronium 0,05 0,10 - 0,15 Rocuronium 0,30 0,60 Pancuronium 0,06 0,07 Cisatracurium 0,15 Plus le CND est puissant, plus la dose est faible à effet identique.
Modifications de la pharmacodynamie des CND 1.Âge Moins de 3 mois : immaturité de la JNM : sensibilité est augmentée. Plus d’un an : Adulte sujets âgés : ↑ du délai d’installation : ↓ du DC. Le métabolisme de l'atracurium et du cisatracurium : n'est pas perturbé chez le grand vieillard 2.Brûlures ↓ de l’action des CND selon l’importance des lésions 3.Myasthenie Potentialisation des effets (diminution du nombre de récepteurs) 4.Anomalies neuronales réponses sous-estimées du côté atteint
Interactions médicamenteuses avec les CND Halogènes Potentialisation diminution des doses d’entretien Kétamine Allongement de la durée d’action
Pharmacocinétique de la Succinylcholine Bolus: décroissance plasmatique rapide Distribution importante: faible proportion: JNM DA90: 0.26mg/kg 0.21 sous halothane Potentialisation par les anticholinestérasiques Antagonisation partielle par les CND
Pharmacodynamie de la Succinylcholine Elle n’a aucun équivalent en termes Délai d’action ( < 1 min ) Durée d’action ( < 10 min ) Qualité des conditions d’intubation ( 100% ) Les effets secondaires graves sont connus mais rares. respect strict des contre-indications absolues
Les effets secondaires de la Succinylcholine Fasciculations Tonus du masseter Douleurs musculaires Hyperkaliémie Augmentation des PIO, PIG et PIC Troubles du rythme graves responsables d’arrêts cardiaques Hyperthermie maligne Risque allergique Curarisation prolongée Feldman J.M. - Cardiac arrest after succinylcholine administration in a pregnant patient recovered from Guillain-Barre syndrome. Anesthesiology, 1990, 72, 942-944. Kovarik W.D., Morray J.P. - Hyperkaliemic cardiac arrest after succinylcholine administration in a child with purpura fulminans. Anesthesiology, 1995, 83, 211- 213.
Contre-indications de la Succinylcholine CI Formelles ATCD personnel ou familial hyperthermie maligne Allergie vraie aux curares Déficit grave en PseudoCHE Myopathie (risque d'hyperthermie maligne) Hyperkaliémie +++
Effets secondaires des CND 1.Réaction allergique responsables de 62 % des anaphylaxies survenant au cours de l’anesthésie. L’incidence est évaluée à 1 pour 5 000 anesthésies. Environ 10 % de ces chocs anaphylactiques sont de grade IV, donc gravissimes avec un arrêt cardiaque. 2.Curarisation prolongée déficit en pseudocholinestérase, soit par insuffisance rénale.
Effets secondaires des CND Réaction allergique Curares: 78 56% ATB: 33 24% Colloïdes: 10 8% Thiopental 8 6% Latex 2 1,5% Fischer MM Br J anesth 1998
Effets secondaires des CND Réaction allergique Rocuronium 98 Succinylcholine 78 Atracurium 71 Vecuronium 59 Pancuronium 20 Mivacurium 9 Cisatracurium 1 Laxenaire Brit J anesth 2001
Critères de Choix d’un Curare
1. Patient à risque d'estomac plein 1. Succinylcholine (Célocurine®) reste le meilleur choix: Délai d'action court: 1mn Bonnes conditions d'intubation Une durée d'action brève 2. Rocuronium : alternative à la succinylcholine. 3. Précurarisation ( priming dose ): moins utilisées 4. L’ORG 9487 ou rapacuronium.
2.Durée de la Chirurgie
Le curare utilisé pour l’intubation est conservé pour la chirurgie l’adaptation du degré de relâchement musculaire à la chirurgie et au patient ne se conçoit pas sans un monitorage adapté du bloc neuromusculaire
3.Choix en fonction du Terrain Insuffisance rénale Atracurium, Cisatracurium :aucune modification de la pharmacocinétique Vecuronium: allongement de la durée d’action ne s’observe qu’en cas de multiples réinjections Rocuronium: allongement de 25% de la durée d’action après une administration unique. Insuffisance hépatique Atracurium et Cisatracurium : pharmacocinétique n'est pas modifiée. Vécuronium , Rocuronium: allongement de la durée d’action
Sujet âgé: Myasthénie: Un allongement du délai d’installation en partie lie a la diminution du débit cardiaque Myasthénie: Pas de curares Obligatoire: CND diminuer les doses 75% Monitorage
4. Faut-il Toujours un Curare pour Intuber ? 1. Bonnes et excellentes conditions d’intubation 2. Atténue la réponse hémodynamique 3. Fortes doses d’hypnotiques et de Morphiniques: retentissement hémodynamique important 4. Absence des lésions laryngées traumatiques
CONTRE Hypnotique et morphinique permet d’intuber sans curare dans 75 % des cas. Autres aletrnatives :lidocaine,halogenes. 2. Atteintes neurologiques posturales 3. Dysfonctionnement des articulations temporomandibulaires temporaires ou définitives secondaire à une subluxation articulaire facilitée par la curarisation des masséters 4. Intubation ou ventilation impossibles après curarisation 5. Complications lors de l’intubation d’un patient à l’estomac plein 6. Morbidité supplémentaire due aux effets secondaires des curares, pouvant même conduire au décès
5. L’intubation Difficile est-elle une Contre-Indication à la Curarisation ? Intubation difficile prévue Intubation difficile non prévue Fibroscope associée à une anesthésie locale ou une sédation maintenant la ventilation spontanée l’anesthésie légère sans curarisation concourt à rendre l’intubation et la ventilation plus difficiles. • l’AG et le curare sont administrés seulement lorsque le maintien de l’oxygénation est garanti. • il est nécessaire de disposer de différentes techniques adaptées d’oxygénation et le choix de celles-ci est bien plus important que le fait d’utiliser ou non un curare. Société Française d’Anesthésie et de Réanimation, expertise collective
6. Faut-il Curariser en Orthopédie en Urgence ? Lorsque l’urgence ne peut être différée pour attendre la vacuité gastrique (luxation d’épaule, par exemple) et lorsque l’ALR n’est pas indiquée, l’AG devra être induite selon un protocole de crash-induction, avec une intubation trachéale facilitée par la succinylcholine.
6. Faut-il Curariser en Orthopédie Réglée? la curarisation n’est pas toujours requise durant la phase opératoire Cela est vrai pour la chirurgie prothétique de la hanche et du genou comme pour la chirurgie du rachis L’intubation est possible mais les conditions d’intubation sont toujours moins bonnes que celles obtenues avec le soutien d’une curarisation Le choix thérapeutique peut avoir des conséquences hémodynamiques importantes, marque.es par une baisse de pression artérielle La conférence de consensus de 2002 sur l’intubation recommande de ne pas utiliser un hypnotique seul. Conférence de consensus : Prise en charge des voies aériennes en anesthésie adulte, à l’exception de l’intubation difficile. Texte court. www.sfar.org.
Dose d’entretien(mg/kg) Intervalle d’injection Posologie Dose de charge mg/kg Dose d’entretien(mg/kg) Intervalle d’injection Succinylcholine 1 - Mivacurium 0.20 0.1 10-15 Atracurium 0.5 0.1-0.2 20-40 Vécuronium 0.15 0.025 20-30 Rocuronium 0.6 15-20 Cisatracurium 0.03 45-60