Jean-Paul SARTRE (1905-1980) Un écrivain engagé
Sa vie Naissance à Paris le 21 juin 1905. Représentant du courant existentialiste. Connu aussi bien pour son œuvre littéraire et philosophique que pour son engagement politique. Issu d’une famille bourgeoise. Son père est mort quand il avait un an. Eduqué par son grand-père maternel. Très choyé (narcissisme) et grand lecteur (évoqué dans Les Mots). 1917: remariage de sa mère (mal vécu). Déménagement à La Rochelle, puis retour à Paris.
Les Mots
Les études 1924: reçu au concours de l’Ecole Normale Supérieure. Il a déjà commencé à écrire. Amitiés avec ceux qui deviendront des intellectuels célèbres: Paul Nizan, Raymond Aron, Maurice Merleau-Ponty. Echec au concours d’agrégation de philosophie.
(suite et premiers postes, l’écriture) Reçu la deuxième fois, il y rencontre Simone de Beauvoir (son « castor »). Compagne de sa vie. 1930: découverte des théories de Husserl (phénoménologie, Allemagne), de Martin Heidegger plus tard. 1931: il commence à enseigner (lycée du Havre). Excellent professeur. 1938: notoriété avec le roman La Nausée (roman philosophique).
(suite) D’autres postes suivront (Picardie, Neuilly). Recueil de nouvelles Le Mur. Mobilisé à l’éclatement de la Seconde Guerre Mondiale. Il devient antimilitariste. Prisonnier pendant la débâcle (libéré grâce à Drieu La Rochelle). 1943: pièce, Les Mouches ( reprise du mythe d’Electre; il faut résister contre l’oppression).
(suite) Ce n’est pas un vrai succès (salles vides, représentations annulées pendant l’Occupation). Essai, L’Etre et le Néant (influence de Heidegger). 1944: pièce, Huis Clos (succès). Avant la Libération, recruté pour le réseau résistant Combat (par Camus). Il devient un intellectuel engagé.
(1945-1962) Le philosophe, l’écrivain engagé Période de diffusion de ses idées sur l’existentialisme (revue Les Temps modernes). Il prône la responsabilité de l’intellectuel dans son temps et une littérature engagée: « L’écrivain est en situation dans son époque. » 1945: essai, L’existentialisme est un humanisme. L’homme ne peut pas renier sa liberté, tout acte de liberté est un projet, l’individu est responsable de son projet individuel. Saint- Germain: haut lieu de l’existentialisme. Echo très large dans le public. Sartre écrit des articles sur la condition des Noirs aux USA, le racisme et les discriminations; il soutient aussi les Juifs.
(suite) Pour le marxisme (contre le capitalisme et le stalinisme). Contre aussi le gaullisme et l’impérialisme américain (il se prononce contre la guerre d’Indochine). 1952-1956: membre actif du Parti Communiste (éloignement de Camus). 1956: Insurrection de Budapest écrasée par les chars soviétiques (Sartre s’éloigne du Parti).
(suite) 1956: contre la guerre d’Algérie et pour l’indépendance du peuple algérien (il soutient le FLN). Son appartement sera plastiqué par l’OAS (organisation de l’Armée secrète qui défendait la présence française en Algérie). Plus tard (années ‘60): pour la révolution cubaine, participation active aux événements de mai 1968, contre l’intervention soviétique contre le printemps de Prague.
Sartre manifestant
(suite) Dans les années ‘70, il soutient le maoïsme. Il dénonce aussi les conditions de vie des Palestiniens vivant en Israël.
Le déclin de l’existentialisme Années ‘60: c’est le structuralisme qui occupe le devant de la scène (Lévi-Stauss, Foucault, Lacan). Il s’intéresse à Flaubert, au XIXe siècle, à l’essai littéraire en général: Baudelaire (1947), L’Idiot de la famille (1971-1972), Saint Genet, comédien et martyr (1952). Détérioration de sa santé: suractivité et surconsommation de tabac et d’alcool.
(suite) 1964: refus du Prix Nobel de littérature (« aucun homme ne mérite d’être consacré de son vivant »). Adoption d’Arlette Elkaïm. 1971: attaque cérébrale. 1973: seconde attaque. Sartre presque aveugle. Il continue à lutter, engage un secrétaire pour écrire.
(suite) Mort à Paris le 15 avril 1980 d’un œdème pulmonaire. 50.000 personnes accompagnent son cortège.
Tombeau de Sartre (à côté de Simone de Beauvoir)
SES PIECES LES PLUS IMPORTANTES 1943, Les Mouches 1944, Huis Clos (trois personnages enfermés jugent et sont jugés sur les actes de leur existence. Pièce représentative de l’existentialisme: « L’enfer, c’est les autres ».) 1946, Morts sans sépulture 1948, Les Mains sales 1951, Le Diable et le bon Dieu (problème de l’existence de Dieu et du Diable. Réponse à la question: « Le Bien est-il possible? »). 1955, Nekrassov (critique des thèses anticommunistes de la presse française). 1959, Les Séquestrés d’Altona 1965, Les Troyennes (adaptation de la pièce d’Euripide).
Les Mains sales
Nekrassof (Από Μηχανής Θέατρο)
« Je n’essaie pas de protéger ma vie après coup par ma philosophie, ce qui est bâtard, ni de conformer ma vie à ma philosophie, ce qui est pédantesque, mais, vraiment, vie et philo ne font plus qu’un. » (Carnets de la drôle de guerre)
Idées principales de Sartre L’Existentialisme s’intéresse aux situations concrètes et aux expériences affectives de l’homme (solitude, désespoir, angoisse, sentiment de nausée existentielle). Notre réalité résulte de notre action (ma nature est ma totale liberté): « C’est en se jetant dans le monde, en y souffrant, en y luttant qu’il (l’homme) se définit peu à peu… » (La Nausée) Pas de destin ni de déterminisme. Problème de l’incommunicabilité avec les autres. Angoisse du néant (absence de transcendance pour les existentialistes athées).
LES THEMATIQUES DE SON THEATRE Il présente sur scène ses idées (il voulait toucher un grand public, exigence de la littérature engagée). Encouragé par Charles Dullin à écrire pour le théâtre. Fond de sa pensée: le pessimisme, la prise en compte de l’absurdité de la vie, il faut trouver des objectifs pour mener une vie isolée. Ses personnages doivent se révéler dans des situations (théâtre de situations-limites): « il permet à un personnage de se choisir lui-même et de construire ainsi son caractère dans une situation donnée… » (Jarrety, Lexique des termes littéraires). Situations- limites: le personnage n’a que deux choix, dont l’un implique la mort. Théâtre engagé: importance de l’engagement Théâtre d’idées (à thèse)
(suite) Dix pièces (pas toutes des succès). Surtout Huis Clos et La Putain respectueuse. SA DRAMATURGIE Pièces traditionnelles qui n’annoncent pas le renouvellement de la forme (voir le théâtre de l’absurde). Pas de rupture avec les lois du genre. Les Mouches: ton de Giraudoux, recours à l’antiquité. Les Séquestrés d’Altona: distanciation (Brecht). Les Troyennes: influence d’Euripide (dialogues).
SON ORIGINALITE Moins les formes que les thèmes (« des libertés qui se choisissent dans des situations »). Les Mouches: une conscience se découvre dans la révolte. Huis Clos: le problème des relations avec autrui et l’impossibilité d’y échapper. Le Diable et le Bon Dieu: Guerres civiles en Allemagne pendant la Réforme luthérienne. Pièges de la morale, de la sainteté et de l’absolu.
DONC Conflits sur scène (que le philosophe n’a pas pu résoudre). Personnage dans une impasse. Pas de théâtre didactique (le héros cherche une issue. Mais à la fin= mort ou meurtre). Un seul recours: l’engagement. Héros précipité dans des situations extrêmes: violence, torture, assassinat. (voir Les Mouches, Les Mains sales).
(suite) Le héros affronte son destin avec lucidité, il en prend la responsabilité (il « assume »). Dialogues: épreuves de force, argumentations passionnées. Univers aride, monde sans pardon, sans pitié, pas d’issue. Figures de l’échec qui caractérisent ce théâtre.