HEMORRAGIES DIGESTIVES HAUTES ET BASSES DR khenchoul CHIRURGIE GENERALE « A» CHU CONSTANTINE
PRESENTATION GÉNÉRALE I / GENERALITES : grande urgence en hépato-gastro-entérologie. Maladie ulcéreuse et hypertension portale sont les deux principales causes responsables des saignements les plus graves. Urgence médicochirurgicale.
II / MODES DE REVELATION : 1/ L’hématémèse : Rejet de sang par la bouche dans un effort de vomissements, sa couleur est rouge vif si le saignement est récent ou tirant vers le noir s’il est ancien. Elle signe toujours une lésion haute: oeusophage, estomac, duodénum.
2/ Le méléna : Émission de selles noires, gluantes, nauséabondes correspondant à du sang digéré. Il peut provenir d’une lésion haute ou basse (grêle, colon, rectum, anus).
3/ la rectorragie : Émission par l’anus de sang rouge vif, qu’il s’agisse de sang pur parfois accompagné de caillots, de sang enrobant des selles moulées ou d’une diarrhée sanglante. Quand elle est peu abondante et isolée elle signe une lésion basse. Quand elle est abondante elle peut provenir d’une lésion haute ou basse.
a- Signes d’anémie aigue : 4/ Autres signes révélateurs : En cas d’hémorragie non extériorisée a- Signes d’anémie aigue : Etat de choc précédent l’extériorisation de l’hémorragie. b- Signes d’anémie chronique : Anémie microcytaire, hypochrome, aregénérative, ferriprive, traduisant un saignement distillant. Dans tous les cas le T.R et la pose d’une sonde gastrique confirme le Dg d’hémorragie digestive .
III / ELIMINER CE QUI N’EST PAS HEMORRAGIE DIGESTIVE : 1-Epistaxis dégluti. 2-Hemorragies bucco pharyngées. 3-Hemoptysie. 4-Liquide de stase gastrique. 5-vomissements vineux. 6-Selles noircies par : - Médicaments : fer, bismuth, charbon. - Aliments : réglisse, bétrave.
IV/ EVALUER LA GRAVITE DE L’HEMORRAGIE : 1-Quantité de sang extériorisée : Permet une approximation grossière -Quantité inférieure à 500 cc : Hgie minime. -Quantité entre 500cc et 1000cc : Hgie de moyenne abondance. -Quantité supérieure à 1000 cc : Hgie de grande abondance.
2-Signes cliniques d’hypovolémie : Signes de choc Hypotension orthostatique tachycardie + pincmt diff. Signes de choc : PCM, marbrures, refroidissements des extrémités, polypnée, oligurie, pouls faible, hypotension de décubitus, soif, syncope. Fré.Card > 120 batt/min + Pr Sys < 10cmHg perte sanguine d’un litre ou plus.
4-Rythme de transfusion : meilleur critère 3-Micro Hématocrite : Hte < 28% Hgie digestive grave. 4-Rythme de transfusion : meilleur critère Vol concentrés globulaires transfusés / 24 premières heures pour rétablir ou maintenir un état hémodynamique correct: + Hgie minime : 500cc de sg ou moins. + Hgie moy abondance : 500cc à 1500cc. + Hgie gde abondance (GRAVES) >1500cc.
Perte sang > 1000cc/24H ou > 30% masse sg. Hgie digestive grave un ou plus des critères de KAMMOCK : Perte sang > 1000cc/24H ou > 30% masse sg. Présence de signes de choc. Hte < 28% / G.R < 2,5M/mm³ / Hb < 8g/l . Hgie nécessitant plus de 1500cc/24H de sg pour maintenir stable les csts hémodynamiques. Autres critères facteurs de gravité : Critères endoscopiques : saignt artériel en jet. Terrain particulier : - Age > 60ans. - Tare associée: Insuffisance coronaire, respiratoire ou rénale.
V / MESURES DE REANIMATION : Si l’on exclut les saignements occultes et les rectorragies de très faible abondance toute Hgie digestive doit être hospitalisée dans un centre spécialisé disposant de sang frais, d’une unité d’endoscopie digestive et à proximité d’un bloc opératoire.
Hgie digestive grave réanimation avant toute recherche étiologique Elle comporte : a/ Mise en condition du malade : Décubitus latéral, tête basse. b/ Bilan d’urgence : Gpe-Rh, F.N.S, Hte, Hb, T.P, Ionogramme sg, créatinémie, glycémie. c/ Abord veineux central (sous Clavière, jugulaire interne) ou double : compenser l’hypovolémie par remplissage par des solutés macromoléculaires puis par des culots globulaires isoGpe-isoRh , s/s contrôle de la PVC.
« « « REGLE DES QUATRES SONDES » » » d/ Mise en place d’une sonde naso gastrique : Confirme l’origine haute (but dg) ; quantifie l’Hgie et permet un lavage continu au sérum glacé (but thérapeutique). e/ Mise en place d’une sonde à oxygène : Permet une oxygénation correcte des tissus. f/ Mise en place d’une sonde urinaire : Apprécie la diurèse (min 30cc/H). « « « REGLE DES QUATRES SONDES » » »
A coté de la réanimation, une surveillance stricte et régulière hémodynamique et des grandes fonctions vitales est instaurée, elle comporte : Surveillance clinique : T.A, pouls, P.V.C, diurèse, état de conscience (correction des signes de choc) . Surveillance de la sonde gastrique : persistance ou arrêt de l’Hgie. Surveillance biologique : Hte, F.N.S, Hb.
HEMORRAGIES DIGESTIVES HAUTES I / DEFINITION : C’est un saignement d’origine digestive dont la lésion responsable est située en amont de l’angle de Treitz (œsophage, estomac, duodénum) extériorisé ou non, pouvant mettre en jeu le pronostic vital. C’est un motif fréquent d’hospitalisation.
II / MODES DE REVELATION : ► Hématémèse. ► Méléna. ► Rectorragie (hgie très abondante avec signes de choc) . ► Signes d’anémie aigue. ► Signes d’anémie chronique.
III / ENQUETE ETIOLOGIQUE : A / ENQUETE ETIOLOGIQUE PROPREMENT DITE: Débutée pendent les mesures de réanimation générale, elle comporte : 1 / Interrogatoire : du patient ou de son entourage, recherchera : a- Intoxication éthylique. b- Maladie ulcéreuse connue. c- Cirrhose. d- Episodes antérieurs. e- Prise de médicaments gastrotoxiques (Aspirine ; A.I.N.S). f- Chirurgie digestive ; Aortique. g- Stress. h- Tumeur digestive.
2 / Examen clinique : - Stigmates de cirrhose : angiomes stellaires. a)- Inspection : recherchera : - Stigmates de cirrhose : angiomes stellaires. - Stigmates d’H.T.P : C.V.C abdominale. - Anomalies vasculaires héréditaires. - Cicatrice d’intervention chirurgicale abdominale. -Ictère cutanéomuqueux. b)- Palpation et Percussion : recherchera : - HPM dure à bord tranchant : cirrhose. - SPM avec Ascite : HTP.
3 / Examens biologiques : TP; Bilan hépatique ; Bilan d’hémostase (TS, TCK, TP, Plaquettes); Ag Hbs. 4 / Endoscopie digestive haute : -- Intérêt diagnostique, pronostique et thérapeutique. -- Réalisée dans les 48 heures qui suivent l’Hgie. -- Permet de : - Voir la lésion qui saigne. - Préciser la nature du saignement (artériel ou veineux). - Voir les stigmates d’un saignement antérieur (caillot). - Suivre l’évolution.
a / Maladie ulcéreuse gastroduodénale : B / ETIOLOGIES : 1 / Hémorragies digestives non liées à l’hypertension portale : a / Maladie ulcéreuse gastroduodénale : -- Mécanisme : rupture d’une artériole au fond du cratère ou saignement muqueux péri ulcéreux. -- L’endoscopie digestive haute met en évidence : - Saignement artériel en jet. - Vaisseau visible non hémorragique. - Caillot altéré. - Cratère ulcéreux mal visualisé. - Aucun signe d’hémorragie récente. -- L’hémostase est spontanée dans 2/3 des cas.
b / Lésions aigues gastro duodénales : De stress ou en rapport avec la prise d’anti-inflammatoires (aspirine) ou d’alcool. c / Syndrome de Mallory- Weiss : d / Oeusophagite peptique : e / Ulcérations sur hernie hiatale : f / Causes plus rares : - Tumeurs bénignes ou malignes de l’oeusophage. - Ulcérations anastomotiques. - Angiomes. - Hémobilies. - Wirsungorragies. - Fistules artério-digestives.
2 / Hémorragies digestives hautes liées à l’hypertension portale : -- Il s’agit d’Hgies digestives par rupture de varices oeusophagiennes. -- L’endoscopie digestive haute met en évidence des varices oeusophagiennes saignant en jet, en nappe ou s’étant arrêtées de saigner.
IV / TRAITEMENT : A / BUTS : - Obtenir une hémostase rapide. - Rétablir un volume circulant correct. - Traiter quand cela est possible la maladie causale. B / TRAITEMENT D’URGENCE : Il s’agit des mesures de réanimation d’urgence.
1 / Les ulcères gastro-duodénaux : C / TRAITEMENT ETIOLOGIQUE : Un traitement spécifique sera instauré en fonction de l’étiologie. 1 / Les ulcères gastro-duodénaux : -Antiacides à forte dose (sonde gastrique) : 30 à 60 cc / H. -Inhibiteurs des récepteurs H2 de l’histamine : Ranitidine 150 mg x2/J en IVD. -Inhibiteurs de la pompes à protons : Oméprazole 40mg / J en IVD. -Hémostase endoscopique : photocoagulation au Laser, thermocoagulation, électrocoagulation. -Traitement chirurgical en urgence : dernier recours. 2 / Lésions aigues gastro-duodénales : -Antiacides à fortes doses. -Arrêt des médicaments gastrotoxiques. -Chirurgie : en cas d’échec du traitement médical (dernier recours). 3 / Autres lésions gastro-duodénales : Elles posent essentiellement un problème de diagnostique et leur traitement est le plus souvent envisageable à froid.
4 / Rupture de varices œsophagiennes : a / Traitement médical : Produit entraînant une baisse de la pression portale : Vasopressine, Somatostatine, Propranolol. b / Sondes de tamponnement : Sonde de Blakemore ou de Linton Nachlas. c / Sclérothérapie endoscopique : d / ligature élastique des varices œsophagiennes per endoscopique : e / Embolisation par voie transcutanée : f / Traitement chirurgical : Envisagé en dernier recours. -- Dérivation portale en urgence : Anastomose portocave terminolatérale. -- Autres procédés : - Ligature des varices œsophagiennes par abord thoracique et ouverture de l’œsophage. - Ligature totale de l’œsophage sur bouton anastomotique. - Section anastomose mécanique de l’œsophage.
HEMORRAGIES DIGESTIVES BASSES I / DEFINITION : - C’est un saignement d’origine digestive dont la lésion responsable est située en aval de l’angle de Treitz (grêle, colon, rectum, anus). - Il s’agit le plus souvent d’hémorragies modérées ne nécessitant pas de transfusion, exceptionnellement d’hémorragies de moyenne ou de grande abondance dont le diagnostic et le traitement sont effectués dans un contexte d’urgence. - Elles cessent spontanément dans 80 % des cas.
II / MODES DE REVELATION : ► Rectorragies. ► Méléna. ► Signes d’anémie aigue. ► Signes d’anémie chronique.
III / ENQUETE ETIOLOGIQUE : A / ENQUETE ETIOLOGIQUE PROPREMENT DITE : 1 / Interrogatoire : du patient ou de son entourage précisera : a- Antécédents familiaux de polypose ou de cancer colorectal. b- Circonstances de survenue : Prise de température par voie rectale ; traitement anticoagulant ou anti-inflammatoire. c- Rapport des rectorragies avec la défécation : isolées en dehors des selles ; précédent, accompagnant ou suivant les selles. d-Abondance, fréquence et ancienneté du saignement, notion de caillots. e-Signes associés : fièvre, syndrome inflammatoire, troubles du transit, amaigrissement, altération de l’état général, syndrome rectal.
2 / Examen clinique : a- Examen proctologique : examen de la marge anale, toucher rectal, anuscopie. b- Examen de l’abdomen : recherchera : une douleur provoquée, une tumeur. c- Examen général : recherchera : télangiectasies, adénopathies.
3 / Examens complémentaires : a- Examens biologiques : Gpe-Rh ; F.N.S ; bilan d’hémostase; V.S ; ionogramme sg ; urée sg ; glycémie. b- Examens morphologiques : ►Rectosigmoidoscopie complétée par une colonoscopie totale : ● Elles permettent de montrer la lésion qui saigne, les modifications muqueuses d’une colite organique. ● La performance de la colonoscopie est de 90% quand elle est pratiquée dans de bonnes conditions. ►Artériographie digestive sélective en urgence : artère mésentérique supérieure puis inférieure : ● Pratiquée en cas de rectorragies abondantes rendant la colonoscopie impossible ou en cas de colonoscopie normale (origine grelique). ● Elle visualise un saignement actif par l’extravasation du produit de contraste. ● Elle montre la nature de la lésion. ● Elle permet l’injection intra artériolaire de vasopressine (rôle thérapeutique).
► Transit du grêle : ● Permet de rechercher une origine grelique en cas de méléna avec colonoscopie normale. ► Scintigraphie au pertechnetate : ●Détecte un diverticule de Meckel : accumulation du traceur radioactif au lieu du saignement. ► Entéroscopie per opératoire et colonoscopie per opératoire : ● Pratiquées après laparotomie exploratrice quand le bilan précédent est négatif et que l’hémorragie persiste (but diagnostic et thérapeutique).
1 / Causes rectocoliques : B / ETIOLOGIES : 1 / Causes rectocoliques : a- Diverticules coliques : ■ Les diverticules du colon sigmoïdien peuvent être responsables de rectorragies abondantes en particulier chez le sujet âgé. ■ Traitement : hémicolectomie droite ou colectomie segmentaire en cas d’hémorragies abondantes, continues ou récidivantes. b- Angiodysplasies coliques : ■ Lésions de type angiomateux siégeant surtout sur le colon droit et le coecum et pouvant donner des rectorragies très abondantes chez le sujet âgé. ■ Traitement : endoscopique (coagulation, laser) sinon chirurgical (résection colique) si le pronostic vital est en jeu.
c- Tumeurs recto-coliques : ■ Cancers : anus – rectum – colon ; tumeurs villeuses : (traitement : chirurgical). ■ Polype colorectal de plus de 1cm (traitement : exérèse endoscopique). d- Hémorroïdes : ■ Rectorragies répétées survenant après les selles ■ Une lésion sous-jacente doit toujours être recherchée (diagnostic d’élimination). ■ Traitement : médical complété par un traitement chirurgical ambulatoire (sclérose ou photocoagulation). e- Fissures anales : ■ Traitement : chirurgical f- Ulcérations thermométriques : cause très fréquente : ■ Rectorragie abondante en dehors des selles se répétant durant plusieurs heures. ■ Anuscopie : ulcération linéaire verticale sur la face antérieure de la paroi anorectale. ■ Traitement : coagulation ou tamponnement au spongel imbibé de thrombase.
g- Colites organiques : ► Colites inflammatoires : • RCUH : traitement : en cas d’inefficacité du traitement médical une colectomie chirurgicale est nécessaire. • Crohn : traitement : chirurgical. ► Colites infectieuses : amibiase, bilharziose. ► Colites ischémiques : traitement médical ou chirurgical (résection). h- Rectites radiques : traitement : photocoagulation laser YAG ou argon. i - Causes rares : ♦ Rectites : inflammatoires ; infectieuses. ♦ Ulcère solitaire du rectum. ♦ Endométriose colique. ♦ Colopathie d’hypertension portale : saigne rarement. •Traitement : shunt portocave chirurgical. ♦ Varices coliques et anorectales d’hypertension portale : saignent rarement. •Traitement : sclérothérapie ou ligature avec traitement médical betabloquant.
2 / Causes greliques : a- Ectasies vasculaires (traitement médical : acide aminocaproique) b- Tumeurs bénignes et malignes du grêle (traitement chirurgical : résection) c- Diverticule de Meckel (traitement chirurgical : résection du diverticule) d- Diverticules jéjunaux (traitement : résection chirurgicale) e- Causes rares : ● Fistules aorto-intestinales sur anévrisme et sur greffon prothétique ● Ulcères du grêle ● Endométriose ● Malformation vasculaire de Dieulafoy.
IV / TRAITEMENT : A / BUTS : - Obtenir une hémostase rapide. - Rétablir un volume circulant correct. - Traiter quand cela est possible la maladie causale. B / TRAITEMENT D’URGENCE : Il s’agit des mesures de réanimation d’urgence. C / TRAITEMENT ETIOLOGIQUE : Un traitement spécifique sera instauré en fonction de l’étiologie (voir étiologies).
CONCLUSION Les hémorragies digestives constituent une urgence médicochirurgicale pouvant mettre en jeu le pronostic vital ; elles nécessitent une étroite collaboration entre médecins réanimateurs, endoscopistes et chirurgiens.