LES ÉLÈVES ISSUS DE L’IMMIGRATION : CARACTÉRISTIQUES, CHEMINEMENT, CONDITIONS GAGNANTES Marie Mc Andrew, professeure titulaire Administration et Fondements de l’éducation Faculté des sciences de l’éducation Université de Montréal Séminaire Immigration à Laval: enjeux et prospectives Montréal, 26 janvier 2015
PLAN DE LA PRÉSENTATION Le profil des familles et des élèves issus de l’immigration La réussite scolaire: tendances d’ensemble et clientèles à risque Quelques caractéristiques des écoles et des milieux « qui font une différence »
LE PROFIL DES FAMILLES ET DES ÉLÈVES ISSUS DE L’IMMIGRATION
LES FAMILLES IMMIGRANTES DES VINGT DERNIÈRES ANNÉES* Des caractéristiques globalement positives reflétant l’effet de la politique de sélection Une immigration planifiée (86 %) Une décision où les opportunités de scolarisation pour les enfants jouent un rôle central Un niveau élevé de connaissance du français (60 %) Un profil éducatif et professionnel plus favorable que celui des natifs (69 % diplôme universitaire) * Données MICC/ISQ/Statistiques Canada
Des différences marquées selon : Le statut d’immigration Le pays d’origine Une mobilité descendante liée aux difficultés d’intégration Chômage plus élevé (11,9 %) Déqualification Conditions de vie difficiles des enfants Particulièrement marquée chez les immigrants récents et les minorités visibles
LES ÉLÈVES ISSUS DE L’IMMIGRATION à l’échelle du québec LES ÉLÈVES ISSUS DE L’IMMIGRATION à l’échelle du québec* (1ère et 2e générations) Ont des origines très variées mais présence significative des élèves originaires des Antilles, de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient ainsi que de l’Amérique Centrale et du Sud Évolution récente (MELS, 2011): augmentation des groupes de l’Asie de l’Est et de l’Asie du Sud Sont plus souvent nés à l’étranger qu’au Canada (6 élèves sur 10) * Données Mc Andrew et al. (2010), cohortes des élèves ayant débuté leurs études secondaires de 1998 à 2000
Ont souvent le français comme langue maternelle ou langue d’usage (5 élèves sur 10) Évolution récente (MELS, 2011) : augmentation en ce qui concerne le français langue d’usage Ne sont pas très souvent identifiés au secondaire comme ayant besoin de soutien linguistique (1 élève sur 5) Par rapport à leurs pairs de 3e génération ou plus vivent davantage sur l’île de Montréal (7 élèves sur 10) Évolution récente (MELS, 2011) : augmentation significative de la banlieue et des autres régions du Québec Proviennent plus souvent de familles vivant en milieu défavorisé (4 élèves sur 10) Sont plus souvent entrés dans le système scolaire après le primaire (1 élève sur 4)
Ont un peu moins souvent changé d’école (près de 1 élève sur 2) Ont plus souvent commencé leur secondaire avec un an (1 élève sur 3) ou deux ans et plus (1 élève sur 10) de retard Évolution récente (MELS, 2011) : diminution du retard scolaire à l’entrée pour les deux groupes Ont été identifiés comme EHDAA dans des proportions similaires (1 élève sur 5) Ont un peu moins souvent changé d’école (près de 1 élève sur 2) Ont davantage fréquenté des écoles privées (1 élève sur 4) Ont davantage fréquenté une école de milieu défavorisé (près de 4 élèves sur 10) Ont davantage fréquenté une école où la présence des élèves issus de l’immigration est supérieure à 50 % (1 élève sur 2)
Les différences intergroupes sont cependant importantes 1ère génération < 2e = 3e Langue maternelle française > langue maternelle autre Afrique du Nord et Moyen-Orient > Afrique de l’Est > Europe de l’Est > Asie du Sud-Est > Antilles et Afrique subsaharienne > Amérique Centrale et du Sud > Asie du Sud
LA SPÉCIFITÉ DE LA BANLIEUE* Banlieue > Montréal > Autres régions du Québec Les atouts les plus importants de la banlieue : une proportion plus élevée d’élèves issus de l’immigration Nés au Canada Ayant le français comme langue maternelle De statut socioéconomique fort ou moyen Ayant intégré le système scolaire au primaire Fréquentant une école de statut socioéconomique moyen ou élevé * Données Ledent et al., (2011), cohortes des élèves ayant débuté leurs études secondaires de 1998 à 2000
LA RÉUSSITE SCOLAIRE: TENDANCES D’ENSEMBLE ET CLIENTÈLES À RISQUE
LES RÉSULTATS À L’ÉCHELLE DU Québec* Diplomation plus faible 5 ans après l’entrée au secondaire Une amélioration notable 7 ans après l’entrée au secondaire, mais un écart qui persiste Décrochage net équivalent 9 ans après l’entrée au secondaire (après prise en compte des départs hors- Québec et des persévérants à la formation générale des adultes) Choix plus fréquent du cours le plus exigeant en mathématiques * Données Mc Andrew et al., (2011), cohortes des élèves ayant débuté leurs études secondaires de 1998 à 2000
Taux de diplomation 5 et 7 ans après l’entrée au secondaire (Élèves issus de l’immigration vs élèves de 3e génération et plus)
Taux de décrochage brut et net 9 ans après l’entrée au secondaire (Élèves issus de l’immigration vs élèves de 3e génération et plus) Uniquement pour les élèves arrivés en secondaire 1 en 1998-1999
Des différences intergroupes marquées Selon la génération Diplomation plus faible (15 points de pourcentage) chez les élèves nés à l’étranger Écart moindre mais persistant en ce qui concerne le décrochage net (prise en compte des départs hors-Québec) Choix similaire du cours le plus exigeant en mathématiques Selon les caractéristiques linguistiques Diplomation plus faible des élèves de langue maternelle autre, surtout lorsqu’ils ont également cette langue comme langue d’usage à la maison (9 points de pourcentage) Cependant choix plus élevé du cours le plus exigeant en mathématiques
Taux de diplomation 7 ans après l’entrée au secondaire selon la génération et les caractéristiques linguistiques Gén. 3 et +
Selon la région d’origine Les élèves originaires de 4 régions ont un taux de diplomation supérieur ou équivalent à ceux des élèves de 3e génération et plus, tandis que les élèves originaires des 3 autres régions ont un taux nettement plus faible Les écarts en matière de décrochage net sont moindres Le choix plus ou moins fréquent du cours le plus exigeant en mathématiques reflète ces différences La propension à poursuivre leurs études secondaires et à diplômer à l’éducation des adultes est particulièrement élevée chez les élèves originaires de l’Asie du Sud, des Antilles et de l’Afrique subsaharienne ainsi que de l’Amérique Centrale et du Sud
Taux de diplomation 7 ans après l’entrée au secondaire selon la région d’origine Gén. 3 et +
Les PRINCIPAUX facteurs de risque POUR L’ENSEMBLE DES ÉLÈVES Influence Caractéristiques Gén. 1 + 2 Gén. 3 et + Forte Filles vs garçons + + + + + Retard à l’arrivée - - - Retard additionnel après 2 ans Changement d’école - - École privée vs publique Moyenne Statut socioéconomique de la famille + Le nombre de signes positifs ou négatifs reflète l’importance numérique de l’impact des seules variables avérées significatives.
LE PROFIL SPÉCIFIQUE DE LA BANLIEUE* Tel qu’attendu, un taux de diplomation supérieur à celui qui prévaut à Montréal et surtout dans le reste du Québec (63,2 % vs 61,1 % et 58,7 %) Les mêmes variations intergroupes en ce qui concerne la génération, la langue maternelle et la langue d’usage ainsi que la région d’origine. Cependant, les élèves de 1ère génération y réussissent nettement mieux * Ledent et al. (2011), cohortes des élèves ayant débuté leurs études secondaires de 1998 à 2000
Des facteurs de risque sensiblement similaires, sauf le fait d’intégrer le système scolaire au secondaire qui a un impact beaucoup plus négatif Cependant, une fois prises en compte les caractéristiques plus favorables des élèves qui fréquentent les écoles en banlieue (analyses de régression) Une propension à diplômer équivalente à celle des autres régions Un moins grand avantage face aux élèves de 3e génération ou plus qu’à Montréal
L’IMPACT DU MILIEU SCOLAIRE Les 16 facteurs considérés expliquent autour de 50 % de la diplomation et si on exclut le retard accumulé en secondaire 3, autour de 30 % L’essentiel de la réussite scolaire ne s’explique pas par les facteurs quantifiables qu’on trouve dans les bases de données du ministère Tout n’est pas joué à l’entrée au secondaire (encore moins à l’entrée au primaire)
La variance entre les écoles en matière de diplomation secondaire est importante. Les analyses statistiques permettent d’isoler le pourcentage de différences entre les écoles qui n’est pas expliqué par la composition de leur clientèle Chez les élèves du groupe-cible, de 17 % à 20 % selon l’étude considérée Chez les élèves du groupe-contrôle, tendance beaucoup moins claire Ces résultats semblent montrer que pour les élèves issus de l’immigration les écoles «font davantage une différence» que pour leurs pairs d’implantation plus ancienne
QUELQUES CARACTÉRISTIQUES DES ÉCOLES ET DES MILIEUX « QUI FONT UNE DIFFÉRENCE »
Les dynamiques sociales (le contexte d’accueil des nouveaux arrivants et le climat des relations interethniques) et les facteurs systémiques (les encadrements, les politiques et les programmes éducatifs) ont un impact important sur la réussite scolaire des élèves issus de l’immigration Cependant, c’est l’existence de pratiques et d’interactions différentes dans les établissements qui explique, dans une large mesure, la variance constatée au sein des écoles,
On peut classer ces dynamiques scolaires en deux grands groupes* : Les caractéristiques générales des écoles qui soutiennent la réussite de l’ensemble des élèves Les dynamiques qui agissent spécifiquement sur les élèves issus de l’immigration * Mc Andrew et Audet (2013).
Les caractéristiques qui ont un impact positif pour l’ensemble des élèves Un leadership clair de la direction et le partage d’objectifs communs par une équipe-école bien intégrée Une forte croyance des enseignants en la possibilité de tous les élèves de réussir Des pratiques de gestion démocratiques et efficaces et la perception d’un climat d’équité par les élèves Un système d’encadrement et de gestion des comportements souple mais systématique Un suivi étroit des apprentissages des élèves La présence de mesures de soutien à une participation active des élèves et des parents à la vie de l’école
Les dynamiques spécifiques aux élèves issus de l’immigration L’évaluation et le classement Reconnaissance des acquis à l’arrivée Évaluation équitable durant toute la scolarité Partage de l’information Formation adéquate du personnel scolaire (deux écueils: surévaluer ou sous-évaluer les problèmes des nouveaux arrivants) Particulièrement crucial lors des transitions d’un ordre d’enseignement ou d’un établissement à l’autre
L’ouverture à la diversité et aux langues et cultures d’origine des élèves Adoption de codes de vie valorisant la diversité et tolérance zéro face à la discrimination Légitimité du multilinguisme dans les activités pédagogiques et les échanges informels à l’école Promotion de modèles de relations école-famille qui tiennent compte des besoins des parents issus de l’immigration Activités pédagogiques et parascolaires reflétant la diversité culturelle et religieuse
Les attitudes du personnel scolaire L’existence d’attentes élevées à l’égard de tous les sous-groupes d’élèves issus de l’immigration (et plus particulièrement des groupes moins valorisés) L’utilisation de systèmes variés d’explication de l’échec ou de la réussite scolaire (ne pas se limiter aux éléments sur lesquels on n’a pas de contrôle) La capacité à établir un diagnostic multidimensionnel sur le vécu social et scolaire des élèves issus de l’immigration Une préoccupation constante d’assurer le maximum d’intégration des élèves nouveaux arrivants ou issus de minorités à la vie scolaire régulière
MERCI DE VOTRE ATTENTION références Balde A. et Mc Andrew M MERCI DE VOTRE ATTENTION références Balde A. et Mc Andrew M.(2013) La réussite scolaire des jeunes Québécois issus de l’immigration au secondaire au secteur français, GRIES Mc Andrew M. et Audet G. (2013). La réussite scolaire des élèves issus de l’immigration: les écoles et les enseignants font une différence!, GRIES