ALCOOL Effets physiques, biochimiques et psychiques de l’alcool Complications neuro-psychiatriques de l’alcoolo-dépendance Module Soins Infirmiers n°3
Objectifs Citer et expliquer les principaux effets physiques et biochimiques induits par l’absorption excessive et répétée d’alcool Citer et expliquer les effets psychiques recherchés et les effets indésirables induits par l’alcoolisation Citer et expliquer les signes de complications neurologiques et psychiatriques induites par une alcoolo-dépendance prolongée (délirium tremens, syndrome de korsakoff, polynévrites)
Définitions Alcool : dérivé de l’arabe “al-kohol” signifie le fard au sens propre et le menteur au sens figuré L’alcool est obtenu par fermentation de végétaux riches en sucres, de céréales, de pommes de terre et/ou par distillation
Les recommandations de l’INPES Pour les hommes : pas plus de 3 verres standarts par jour ou 21 verres standarts par semaine Pour les femmes (hors grossesse) : pas plus de 2 verres par jour ou 14 verres standarts par semaine Verre standart = 10 g d’alcool pur = une unité de boisson
Classification Usage à risque ou à problème Dépendance Usage à risque : absence de dommage mais susceptible d’en induire à court/moyen ou long terme car consommation > seuil ou situation à risque Usage à problème : existence d’au moins un dommage et absence de dépendance Dépendance Perte de la maîtrise de sa consommation Incapacité de répondre de manière adaptée aux dommages causés Dépendance psychologique : ENVIE Dépendance physique : BESOIN
Dépendance Présence de 3 (ou +) des manifestations suivantes Tolérance Sevrage (syndrome) Substance souvent prise en quantité + importante ou prolongée Essai d’arrêt ou de réduction Temps conséquent passé à des activités nécessaire pour obtenir la substance ou à récupérer de ses effets Réduction importante des activités sociales, professionnelles, ou de loisirs Persistance de la consommation avec connaissance des problèmes physiques ou psychologique liés à cette utilisation
Métabolisme de l’alcool Absorption : passive par les muqueuses de l’estomac et de l’intestin grêle Diffusion : dans la circulation sanguine, l’ensemble des organes Élimination : 95% de l’alcool ingéré est oxydé (foie) et 5% sous forme inchangée (urines, sueurs, salive, air expiré) Vitesse d’élimination : 0.15 à 0.4 g/l/h en moyenne
Effets de l’alcoolisation aigue = ivresses : ivresses simples Effets de l’alcoolisation aigue = ivresses : ivresses simples ivresses graves ou compliquées Ivresse simple : excitation psychique avec sensation de bien être et desinhibition, euphorie, ébriété avec incoordination motrice, trouble de l’élocution, baisse de la vigilance, obnubilation, asthénie avec endormissement voir coma Ivresse grave : excitomotrice, forme psychiatrique (dépressive ou maniaque, délirante, hallucinatoire, risque suicidaire), coma de courte durée
Effets de l’alcoolisation 0 à 0.15 g/l = rien à signaler 0.15 à 0.30 g/l = début des troubles visuels 0.30 à 0.50 g/l = troubles visuels 0.50 à 0.80 g/l = phase d’excitation psychomotrice > à 0.80 g/l = phase d’incoordination psychomotrice 0.8 à 1.5 g/l = début de l’ivresse et chute de la vigilance 1.5 à 3 g/l = ivresse manifeste, diplopie forte altération de la vigilance et de l’éveil 3 à 5 g/l = phase de coma éthylique > 5 g/l = coma, mort
Diagnostic différentiel Troubles de la conscience Avec température normale Troubles métaboliques (hypoglycémie) Encéphalopathie (Carences graves en Vitamines B1) Hémorragie cérébrale (hématome sous dural) Avec fièvre Infections graves (méningite) Ne jamais négliger une ivresse
Conduite à tenir devant une ivresse simple Repos au calme Surveillance +++ : état de conscience, agitation, comportement, hypoglycémie, syndrome de sevrage notamment en cas de vomissements et de somnolence PLS Ne pas laisser seul Réchauffer Pas d’ingestion alimentaire Dosage de l’alcoolémie Dextro Favoriser une rencontre ultérieure en période sobre avec un professionnel >>> Évolution favorable en quelques heures
Conduite à tenir devant une ivresse grave Installer le patient dans un endroit calme Protéger (l’entourage, soi-même et le patient contre lui-même) Protéger le patient (enlever les objets dangereux, pas de contention...) Placer le patient en PLS afin d'éviter une inhalation des vomissements Rassurer le patient, ne pas le laisser seul Surveillance +++ : état de conscience, agitation, comportement, hypoglycémie, syndrome de sevrage notamment en cas de vomissements et de somnolence Prodiguer le traitement si agitation ou agressivité selon la prescription (Neuroleptique sédatif) Avoir une attitude sereine Rester ferme avec tact et bon sens
Alcool : les risques aigus Les risques de l’ivresse Traumatismes divers Agressivité, Violence Conduites à risque : Accident de la route Accident domestique Accident du travail Conduite à risque sexuel Risque suicidaire Coma éthylique Polyconsommation
Effets de l’alcoolisation chronique Les risques chroniques
Les dommages somatiques Cancers (hépatocellulaire,voies aériennes et digestives supérieures, sein, colon) Maladie alcoolique du foie (hépatite, cirrhose) Pancréatites Digestif (ulcère, gastrite, oesophagite) Maladies cardiovasculaires (HTA, coronaropathies, insuffisance cardiaque, troubles du rythme) Système nerveux : Central (troubles cognitifs, encéphalopathies, syndrome de Korsakoff, démence) Périphérique (polynévrite, névrite optique rétrobulbaire) Dysfonctionnement sexuel
Syndrome de korsakoff Définition Il s'agit d'un syndrome clinique associant : - une amnésie essentiellement antérograde, sans démence associée. - des fabulations - des fausses reconnaissances - une anosognosie. Il est secondaire à des lésions bilatérales non nécessairement symétriques du circuit hippocampo-mamillo-thalamique ; l'étiologie la plus fréquente est l'alcoolisme chronique par le biais d'une carence en thiamine. La symptomatologie s'installe progressivement et dans 80% des cas il succède à une encéphalopathie de Wernicke traitée trop tardivement. Il existe d'autres étiologies : tumorale, ischémique, traumatique.
Caractères cliniques : L'amnésie domine le tableau avec impossibilité d'enregistrer des faits nouveaux, un oubli à mesure caractéristique, il ne sait où il est ni quand il est : désorientation temporo-spatiale. En contraste la mémoire immédiate (répétition immédiate d'une série de chiffres) est conservée, les capacités de jugement, raisonnement sont à peu près conservés ; il ne s'agit pas d'une détérioration globale. Le patient est inconscient de son trouble, il répond aux questions en fabulant ; les fausses reconnaissances fréquentes sont du même ordre. La vigilance est normale.
Encéphalopathie de Wernicke Définition Encéphalopathie carentielle liée à un déficit en thiamine (vitamine B1), secondaire à l'éthylisme chronique à la fois par défaut d'apport (dénutrition), par défaut d'absorption lié aux troubles gastro-intestinaux, défaut de stockage hépatique ; peut être favorisée par un apport de glucose important lors d'une réhydratation sans apport en vitamine B1 dans le même temps. Les lésions siègent dans la région périaqueducale, dans le plancher du 3è et 4è ventricule et surtout on note une atteinte privilégiée des tubercules mamillaires Phase de début : aggravation des troubles digestifs (nausées vomissements), altération de l'état général avec amaigrissement souvent important, lenteur d'idéation avec tendance à la somnolence, début en quelques jours à quelques semaines, progressif, quelquefois début aigu favorisé par une surcharge glucidique.
Phase d'état : 3 ordres de signes neurologiques sont associés à des degrés variables : * des troubles psychiques : confusion mentale, quelquefois ralentissement idéomoteur avec hypersomnie. L'existence de fabulations, troubles de la mémoire, avec fausses reconnaissances évoquant un syndrome de Korsakoff est évocateur. * troubles de la marche : liés essentiellement à un syndrome cérébelleux ; peuvent être aggravés par une polyneuropathie ; marche instable avec élargissement du polygone, déséquilibre. * signes oculaires : - nystagmus : symptôme fréquent précoce. - paralysie du VI, plus rarement du III - paralysie de fonction, moins fréquent. * signes associés : - hypertonie oppositionnelle - signes végétatifs : tachycardie.
Le diagnostic positif est clinique, Traitement : vitaminothérapie B1 par voie parentérale ; 500 mg à 1 g/j. Association avec une polyvitaminothérapie (PP, B6), une réhydratation, régime équilibré. Evolution : le pronostic est lié à la précocité du traitement, régression assez rapide des troubles oculaires et ataxiques. Quand le traitement est trop tardif, risque de mort subite. Surtout on observe des séquelles à type de syndrome de Korsakoff.
Polyneuropathies Elles sont secondaires à un mécanisme mixte de toxicité lié à l'éthylisme chronique et surtout de carence nutritionnelle en particulier polyvitaminique (B1, B2, PP). Elle touche environ 10% des alcooliques. Le déficit moteur intéresse les releveurs du pied de façon bilatérale, les troubles sensitifs sont le plus souvent des douleurs à type de crampes, de brûlures; s'y associent des troubles trophiques. D'autres aspects cliniques peuvent être rencontrés avec des formes à prédominance sensitive ou à l'inverse motrice.
Neuropathies optiques Elles sont liées à une atteinte carentielle marquée polyvitaminique mais surtout B1 et à une atteinte toxique en particulier liée au tabagisme souvent associé. Sur le plan clinique on observe une baisse progressive sur quelques semaines, ou quelques mois de l'acuité visuelle. Le traitement consiste en une alimentation équilibrée associée à une vitaminothérapie et un sevrage.
Les dommages psychologiques et psychiatriques Anxiété Dépression Troubles du sommeil Suicide et tentative de suicide Troubles de la personnalité psychoses
Les dommages relationnels Problèmes conjugaux Maltraitance Dysfonctionnement familial
Les dommages sociaux et professionnels Arrêt de travail, perte d’emploi, précarisation Problèmes judiciaires Perte de logement désocialisation
Alcool et grossesse L’alcool passe la barrière placentaire Alcoolémie mère = alcoolémie foetus
Conséquences Avortement Enfants mort-nés Prématurité Syndrome d’alcoolisme fœtal Dysmorphie cranio-faciale Malformations Retard de développement psychomoteur
La prise en charge de l’alcoolodépendance Les prises en charge La prise en charge de l’alcoolodépendance
Étapes du traitement Accueil Prise en charge globale médicale, psychologique, sociale Projet de soins individualisé, abstinence, réduction de la consommation Réduction des risques Aide à l’arrêt : Sevrage Maintien de l’abstinence Suivi Prévention de la rechute Socialisation NB : L’abstinence n’est pas un impératif pour tous les usagers = les objectifs sont avant tout fixés avec le patient et peuvent évoluer avec le temps…
Pluridisciplinarité Prise en charge médicale Prise en charge psychiatrique Prise en charge paramédicale Prise en charge psychologique Prise en charge sociale Prise en charge de l’entourage Groupe d’entraide
Schéma des soins Pré sevrage (motiver à l’arrêt) Sevrage : obtenir l’abstinence et combattre la dépendance physique (8 jours en milieu hospitalier ou en ambulatoire) Suivi : maintenir l’abstinence ou la sobriété et agir sur la dépendance psychique et comportementale
Bilan systématique Interrogatoire Biologie (NFS, bilan hépatique, TP, bilan lipidique, sérologie VHC,VHB, VIH) Perturbations biologiques : macrocytose, augmentation des gammaGT, des transaminases, hypertryglycéridémies thrombopénies Examen ORL et stomato
Le sevrage et ses complications Sevrage : arrêt complet et brutal de la consommation de toutes boissons alcoolisées
Différents types de sevrages Sevrages programmés Sevrages imposés
Protocole de sevrage Hydratation per os ou IV Prévention des complications de sevrage par la prise d’un benzodiazépine à dose dégréssive sur une semaine Prévention de la carence en vitamine B1(vit B1B6) somnifère
Le syndrome de sevrage Tremblements Sueurs Nausées, vomissements Anxiété Insomnie agitation
Le score de sevrage : le score de cushman Intérêt: - mesurer le degré de gravité du syndrome de sevrage - prévenir un syndrome de sevrage alcoolique sévère - adapter le traitement Résultats Score < 8 = forme clinique nulle Score de 8 à 15 = formes cliniques modérées Score > 15 = formes cliniques sévères avec DT Evaluation clinique du sevrage toutes les 6 heures pendant 48 heures
1 2 3 <80 81-100 101-120 >120 <135 136-145 146-155 >155 1 2 3 pouls <80 81-100 101-120 >120 PA Syst <135 136-145 146-155 >155 FR <16 16-25 26-35 >35 Tremblements Mains Membres sup généralisés Sueurs paumes Paumes et front généralisées Agitation discrète Généralisée/ contrôlable Généralisée/incontrôlable Troubles sensoriels Gêne bruit, lumière/prurit Hallucinations critiquées Hallucinations non critiquées
Les accidents de sevrage 1. les crises comitiales de sevrage - Bilan complémentaire en urgence Les convulsions de sevrage Le traitement : traitement de la crise
2. le delirium tremens Risque de décès Troubles psychiatriques ( confusion, DTS, obnubilation, trouble de la mémoire ; délire oniriques ; anxiété, agitation) Troubles neurologiques (tremblements, dysarthrie, trouble de l’équilibre de la coordination) Signes généraux liés à une hyperactivité sympathique : gravité +++(fièvre et déshydratation, sueurs trémulations, HTA, tachycardie, hyperglycémie, hypokaliémie)
Traitement du DT Hospitalisation en urgence Réhydratation parentérale Traitement psychotrope (benzodiazépine) Administration d’un neuroleptique sédatif en cas de syndrome hallucinatoire persistant
3. Autres complications Complications psychiatriques : anxiété, dépression, troubles psychotiques Encéphalopathie de Gayet Wernicke : carence en vit B1, confusion avec DTS, nystagmus, trouble de l’équilibre (risque d’évolution vers un syndrome de korsakoff) HTA
Médicaments de l’aide au maintien de l’abstinence Médicament réducteur de l’appétence : Acamprosate (aotal®), naltrexone (revia®), Disulfirame (esperal®) Suivi médical, psychologique et social associé
BON WEEK-END !! Et consommez avec modération !