Françoise GOUDEMEZ Conseillère pédagogique Circonscription d’Avion Stage BASSIN du 18 janvier 2012 Enseigner en maternelle LA PLACE DE LA MANIPULATION, DU JEU ET DE L’EXERCICE SENSORI-MOTEUR DANS LES APPRENTISSAGES Françoise GOUDEMEZ Conseillère pédagogique Circonscription d’Avion

La théorie de l’apprentissage: le constructivisme. La théorie de l’apprentissage que l’on appelle constructivisme, a été développée, entre autres, par Piaget (1896-1980) , dès 1923, en réaction au behaviorisme qui, d’après lui, limitait trop l’apprentissage à l’association stimulus-réponse. L'approche constructiviste de l'apprentissage met l'accent sur l'activité du sujet pour appréhender les phénomènes. La compréhension s'élabore à partir des représentations que le sujet a déjà. Il s’agit d’une restructuration des informations en regard des réseaux de concepts particuliers à chaque personne.

Piaget a placé le sujet au cœur du processus d’apprentissage Piaget a placé le sujet au cœur du processus d’apprentissage. Il fait de l’apprenant l'acteur principal. Il suppose que le sujet construit sa connaissance au fil d'interactions incessantes avec les objets ou phénomènes. Piaget insiste sur le rôle des processus d'assimilation et d'accommodation : Assimilation: Il s’agit pour l’apprenant d'assimiler les nouvelles connaissances à celles déjà en place dans les structures cognitives Accommodation: L’apprenant va opérer une transformation de ses activités cognitives afin de s'adapter aux nouvelles situations.

En outre, Piaget (1974) suppose différents niveaux de prise de conscience de la démarche cognitive que le sujet-apprenant mène ou a menée. Anticipant la prise de conscience comme une conceptualisation, il parle de la capacité de se représenter, de décrire les phénomènes ainsi que le déroulement de la démarche entreprise. Piaget a également parlé d'abstraction réfléchissante. Piaget a observé que le sujet est capable de dégager les caractéristiques de ses actions et de ses processus cognitifs (tâches en mathématique).

En parallèle à Piaget, Lev Vygotski (Pensée et langage, 1934) a développé le socioconstructivisme. Il a mis en évidence plusieurs insuffisances du constructivisme, au niveau notamment des apprentissages scolaires. Il rappelle l’importance des interactions langagières avec les pairs dans le processus d’apprentissage. Il définit en outre la zone proximale de développement où doivent se situer les apprentissages nouveaux.:

COMMENT REPOSITIONNER LE JEU COMME SUPPORT D’APPRENTISSAGES À L’ÉCOLE MATERNELLE ?

Une demande institutionnelle : - Les textes officiels :

Un constat de la DESCO (Division des Elèves et de la SCOlarité) « On constate un parallélisme entre la progression dans les sections et la disparition des coins jeux... Il serait judicieux d’engager les enseignants à s’interroger sur la finalité et l’organisation des espaces de jeu de la petite section à la grande section. Il ne suffit pas de se limiter à l’injonction de favoriser le jeu, mais d’observer sa traduction dans les classes. De plus en plus, l’organisation de la classe est centrée sur le tableau, vers lequel s’orientent les tables et les affichages. Les pratiques de jeu, très importantes pour les enfants, tendent à se perdre. La disparition des espaces de jeu est préoccupante ». A ce constat s’ajoute les remarques de Alain Kerlan maître de conférence en Sciences de l’Education à l’Université de Lyon. « La notion de compétence joue un rôle ambigu et s’avère potentiellement porteuse de dérives technocratiques. Il est nécessaire de se dresser contre cette rationalisation instrumentale qui oublie le concret et le sensible. Il est cependant parfois difficile de faire concevoir le jeu et la manipulation, indispensables à l’enfant, comme autre chose qu’un divertissement ». « Les actes de la DESCO », Enseigner aujourd’hui à l’école maternelle. CRDP Versailles.2002

Repositionner le jeu comme support d’apprentissage à l’école maternelle, c’est : D’abord définir son sens, sa signification et identifier sa place et ses fonctions dans les apprentissages et le développement de l’enfant. C’est ensuite analyser ses différentes fonctions dans les situations d’apprentissage et analyser les pratiques des enseignantes pour exploiter au mieux la valeur éducative du jeu à l’école maternelle. C’est, enfin permettre la transformation des pratiques et construire ensemble de nouveaux axes de travail en formation.

Quelques questions à se poser: Quels sont les jeux à disposition dans la classe ? Quels jeux sont régulièrement mis à disposition dans la classe ? A quels moments les jeux sont-ils mis à disposition ? Pour quel type de situation ? Quels jeux sont renouvelés, quand et pourquoi ? Quels jeux sont permanents, pourquoi ?

Une classification des jeux à l’école maternelle : jeux lecture jeux ordinateur jeux langage jeux motricité fine jeux manipulations jeux imitation jeux symboliques jeux société jeux mathématiques jeux puzzles jeux constructions

Différents types de jeux d’après Piaget : Pour Piaget, l’activité ludique de l’enfant doit se comprendre d’abord par le biais du développement intellectuel. L’enfant construit sa connaissance du monde extérieur en agissant sur celui-ci. Piaget distingue plusieurs types de jeux qui se mettent en place progressivement : les jeux sensori-moteurs grâce auxquels l’enfant construit ses représentations du monde au travers de manipulations physiques des objets. Le jeu revêt ici sa forme la plus primitive et est utilisé pour le simple plaisir fonctionnel qu’il procure. (O. 2 ans) les jeux symboliques ( « faire semblant ») au cours desquels l’enfant pratique des substitutions symboliques d’objets, de personnes assumant des rôles et créant ainsi une « réalité fictive » fondée sur des images mentales et des inventions . Cette étape est marquée par l’apparition du langage comme moyen d’expression propre. L’enfant s’y exerce dans le jeu d’imitation. (1.3 ans) les jeux de construction : ils tendent à constituer de véritables adaptations ou solutions à des problèmes et à la création intellectuelle (2. 8 ans) les jeux à règles qui supposent le respect « absolu » d’un ensemble de règles explicites. Ils parachèvent le développement affectif de l’enfant, l’intègrent dans la réalité de son environnement et aident à la socialisation (+ 5 ans)

Enseigner par le jeu, c’est pour l’enseignant, construire sa réflexivité: Repérer la progressivité des apprentissages Exprimer l’objectif de la tâche Identifier les obstacles Identifier les modèles d’intervention Réfléchir sur sa pratique Analyser l’efficacité de son action Observer son fonctionnement en classe Guider la métacognition chez l’élève Apporter les régulations

Pour construire la métacognition de l’élève, sa capacité à : Anticiper le problème à résoudre Définir le problème Se faire une représentation mentale du problème Sélectionner les données pertinentes Utiliser les actions mentales pertinentes Dégager sa méthode de travail Produire méthodiquement la réponse Expliciter ses résultats et ses démarches Vérifier sa réponse

Le jeu symbolique : quelques repères Il autorise l’enfant à intervenir sur son environnement à un moment de son développement où il lui est difficile de s’y adapter. Les étapes : le « faire semblant » la projection : l’imitation l’assimilation : l’identification

A quoi sert la fonction symbolique ? Être capable d’utiliser des symboles puis des signes pour évoquer des choses absentes permet à l’enfant de ne plus vivre systématiquement dans l’immédiateté. Le réel est transformé par des symboles, des images, du langage… L'enfant peut alors attendre parce qu'il peut : se représenter ce qui va arriver (maman va arriver) prévoir que quelque chose peut arriver (si je tape, je suis puni) anticiper ses actes (s'il appuie trop fort sur le feutre, la feuille va se déchirer), planifier ses actions (je regarde la forme du morceau de puzzle avant de le mettre à la bonne place) imaginer la suite d'une histoire contrôler sa frustration Pour Piaget, le langage émerge grâce à la fonction symbolique et les activités d’imitations différées. Ce sont les activités qui vont permettre la mise en route de la fonction symbolique. En conséquence, l’école doit laisser, en maternelle une large part aux activités symboliques (imitation, jeux symboliques, dessin).

Le rôle de l’enseignant : (1) Enrichir les coins jeux en apportant de nouveaux objets qui inciteront à d’autres découvertes, à une mise en lien avec d’autres objets. Surprendre, provoquer en impulsant de nouveaux « faire semblant ». Conduire à un travail de structuration progressive dans certains espaces – jeux : aider l’élève obliger au rangement en proposant des moyens (étiquetage, plan de rangement) aider à réguler le nombre d’enfants

Le rôle de l’enseignant : (2) Veiller à ce que les enfants n’occupent pas toujours le même espace, délaissant les autres. Intégrer dans sa mise en œuvre pédagogique (cahier journal) des informations, des explications, des régulations tenant compte des activités vécues. Les coins jeux ne sont pas des espaces oubliés des apprentissages. Réutiliser les évènements autour de ces espaces pour construire des séances de travail visant des compétences scolaires, à d’autres moments. Les apprentissages en seront renforcés et les moments de jeux libres plus construits.