La sclérose en plaques (SEP) Dr Roué-Jagot Service de Neurologie Hôpital Saint-Antoine - AP-HP
La sclérose en plaques (SEP) Pathologie inflammatoire et démyélinisante du Système Nerveux Central Myéline = cible du processus pathologique Respect apparent de l’axone
Définition Affection démyélinisante, multifocale, du système nerveux central, d'étiologie inconnue, touchant préférentiellement l’adulte jeune évoluant par poussées entrecoupées de rémissions
Epidémiologie Prédominance féminine 70% des cas entre 20 et 40 ans (M 30) Maladie fréquente: sujet jeune (début entre 20 et 40 ans dans 70%) première cause non traumatique de handicap sévère acquis du sujet jeune Prévalence : 50 000 patients en France (1/1000) incidence : 2 000 nouveaux cas par an. familiales dans 3% à 12% des cas. RR x 15 si un cas de SEP dans les ascendant 1er degrés. Importantes variations ethniques et géographiques: gradient Nord-Sud Prédisposition génétique (polygénique) + exposition à des facteurs exogènes à un moment propice
La carte de la SEP
Maladie de l’adulte jeune
Anatomie-pathologie Plaques de démyélinisation Intéresse les régions myélinisées: Nerfs optiques Hémisphère (région périventriculaire et périaqueducal) Tronc cérébral Moelle cervicale, dorsale, lombaire Dimension variable Dissociation myélino-axonale ++ A long terme la plaque envahie par des astrocytes = cicatrice gliale = sclérose astrocytaire Retenir que: Les lésions sont multiples, disséminées = multiloculaire La démyélinisation est +/- réversible => évolution régressive
Plaques
Physiopathologie: hypothèse multifactorielle
Physiopathologie: atteinte de la myéline de la SB
Physiopathologie: atteinte de la myéline de la SB Démyélinisation: Dissociation myélino-axonale, les gaines de myéline qui entourent l'axone sont détruites, l'axone lui-même est normal ou ne présente que des altérations moindres Inflammation: Les altérations myéliniques prédominent au sein de la plaque jeune, associées à une réaction inflammatoire: ce sont les lésions qui, en IRM, prennent le gadolinium Il existe alors des possibilités de réparation myélinique ou Remyélinisation Perte axonale: aggravation du handicap gliose réactionnelle astrocytaire, qui est probablement synonyme d'une absence de réversibilité des lésions
Polymorphisme clinique +++ Signes révélateurs Polymorphisme clinique +++ Déficit moteur d'un ou de plusieurs membres (faiblesse → plégie) 40% Névrite optique (NORB) 22% Paresthésies 21% Diplopie 12% Vertige, Sd cérébelleux 5% Troubles sphinctériens 5%
= inflammation du nerf optique NORB = inflammation du nerf optique BAV unilatérale ou bilatérale DOULOUREUSE (majoration à la mobilisation du globe oculaire) Sur quelques heures à quelques jours Parfois séquellaire FO: parfois œdème papillaire Inaugurale dans 15 à 30% des cas Évolution dans 30 à 70% des cas vers une SEP
Signes à la phase d’état L'atteinte du nerf optique (NORB): L'atteinte de la voie pyramidale 80% Les troubles oculomoteurs (l'ophtalmoplégie internucléaire +++) L'atteinte des voies sensitives 50% L'atteinte des voies cérébelleuses : dyskinésies volitionnelles d'attitudes handicap +++ Troubles vésico-sphinctérienne constants après 5 ans d'évolution Les troubles psychiques (50%) euphorie, indifférence, ou à l'inverse dépression Fatigue
Diagnostic Clinique et radiologique Dissémination des poussées (clinique) et des lésions (radiologique) Dans le temps Dans l’espace
Critère de dissémination spatiale Clinique: Les manifestations cliniques doivent pouvoir être rapportées à deux lésions distinctes du SNC Radiologique: = critères de Barkhof
Critères de Barkhof Au moins trois des quatre critères suivants une lésion prenant le gadolinium ou 9 lésions hyperintenses en T2 au moins 4 lésions périventriculaires au moins 1 lésion infratentorielle au moins 1 lésion juxta-corticale Une lésion médullaire peut se substituer à une lésion cérébrale
Critère de dissémination temporelle Clinique: 2 épisodes neurologiques distincts séparés d’au moins 30 jours Une nouvelle poussée: ≠ Séquelles ≠ Aggravation de symptômes pré-existants Radiologique: Nouvelle lésion / IRM précédente PDC sur IRM à 3 mois (durée de la PDC de 1 mois)
Modes évolutifs ≠ (1) Poussée = Apparition de nouveaux signes neurologiques ou aggravation de signes préexistants pendant plus de 24 heures (à distance d’un épisode fébrile) Deux poussées doivent débuter à plus de 30 jours d’intervalle. Régression initiale des poussées puis au bout de quelques années: Séquelles Forme progressive = aggravation progressive continue de l’état neurologique pendant au moins 6 mois
Formes évolutives EDSS R 7 4 PP 20% P-R R-SP 20 30 40 80% débute par R IRM Début symptôme Début Phase progressive 80% débute par R
Modes évolutifs ≠
Examens complémentaires IRM cérébrale +++ Hypersignaux sur séquences T2 et Flair (periventriculaires +++) Plaques actives prise de gadolinium Hyposignaux T1 Atrophie IRM médullaire +++
Examens complémentaires Ponction lombaire ++ Augmentation oligoclonale des gammaglobuline dans le LCR Examen ophtalmo + PEV (potentiels évoqués visuels) => NORB Potentiels évoqués (visuels, auditifs, sensitifs, moteurs) Augmentation des latences de conduction nerveuses Bilan urodynamique +/- echo rénale
IRM cérébrale
IRM cérébrale
IRM cérébrale
IRM cérébrale: lésions d’âge différent
Bandes oligoclonales dans le LCR
P.E.V
Critères diagnostiques de la SEP Lésions inflammatoires de la substance blanche Disséminées dans le temps et l’espace Aucun marqueur diagnostique spécifique Arguments cliniques, paracliniques et évolutifs Absence d’une autre affection susceptible d’expliquer les signes observés Faisceaux d’arguments
Comment évaluer le patient au long cours? Score EDSS Établi à partir de l’évaluation clinique
Score EDSS
Comment évaluer l’activité de la maladie? La fréquence des poussées Progression EDSS L’imagerie
Pronostic docteur? Imprévisible!! Mais…….. Gêne à la marche après 8 ans d’évolution Canne après 15 ans Fauteuil roulant après 30 ans Formes dites « bénignes » définie comme une absence d’invalidité après 15 ans d’évolution (25%) SEP très sévères : handicap rapide (10%) Facteurs pronostiques: Forme rémittente > forme progressive NORB initiale Délai long entre les deux 1° poussées Femme Age jeune de la première poussée
INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES
Traitement Traitement de la poussée = Corticoïdes en IV (méthylprednisolone: Solumédrol) 1G /J pendant 3 à 5J Accélère la récupération après poussée Ne modifie pas le pronostic de la poussée ni les poussés suivantes Traitement de fond = Immunomodulateurs Immunosuppresseurs Diminue la fréquence des poussées Ralentit la progression du handicap
Traitement de la poussée Bolus de méthylprednisolone IV (Solumédrol) 1g/j en plus de 3 heures, pendant 3-5 jours Réduction de la durée des poussées Les poussées avec peu de symptôme ou rapidement régressives peuvent ne pas être traitées La corticothérapie per os n’est pas recommandée
Le bolus de l’infirmière Avant TA, Température BU +/- ECBU NFS, CRP, glycémie Douleurs gastriques ? Pendant Régime sans sel +/- diabétique Administration le matin Céphalées ? Insomnie, troubles psychiques ? Poids, œdèmes ? TA, température
Traitement de fond Formes rémittentes Interferon Beta Acétate de glatiramère Mitoxantrone Tysabri Formes progressives ???? Immunosupresseurs (endoxan, méthotrexate, imurel) Cures mensuelles de Solumédrol
Mode d’action des traitements de fond
Traitement dans les formes rémittentes → Interférons β ( IF β) Trois molécules l’AVONEX ( IF1a), 30 mg IM 1 fois/semaine le BETAFERON ( IF1b), 8 MUI sc. 1 j/2 le REBIF ( IF1a) 22 ou 44 mg sc. 3 fois/semaine Efficacité sur: Fréquence des poussées (30 %) ; Progression des lésions IRM (volume, nouvelles lésions) Progression du handicap Pas de modification sur le délai d’apparition de la phase secondairement progressive.
Traitement dans les formes rémittentes → Interférons β ( IF β) Les patients ambulatoires, (EDSS < 6) ≥ 2 poussées au cours des 2 années précédant le début du traitement
Combien de temps traiter ? Pas de limite de temps Arrêt si le patient le souhaite, ou projet de grossesse Augmentation de la posologie ou changement d’interféron Si forme agressive: Mitoxantrone
Traitement dans les formes rémittentes → Le copolymère (Copaxone) 20 mg/j par voie SC Diminution d’environ 30 % la fréquence des poussées Intolérance, échec ou relais de l’ IFβ Etat dépressif sévère Epilepsie mal contrôlée Hypersensibilité aux IFβ)
Formes secondairement progressives encore actives Bétaferon Diminution du nombre de nouvelles lésions IRM Réduction de la fréquence des poussées Ralentissement la progression Mitoxantrone cures trimestrielles de 12 mg/m² pendant 2 ans diminue la fréquence des poussées ralentit la progression du handicap Cyclophosphamide (= Endoxan): 750 mg/m 2 IV tous les 2 mois Méthotrexate (7,5 mg per os/semaine) Bolus mensuels de solumédrol
INDICATIONS THÉRAPEUTIQUES A VISÉE SYMPTOMATIQUE
Ne pas oublier le reste….. Troubles sphinctériens Dyurie Bilan urodynamique autosondages Troubles sexuels Spasticité Douleurs Fatigue Dépression PEC paramédicale: kiné+++, infirmière et aides à domicile, orthophoniste, ergothérapeute
Troubles cognitifs Fréquence des perturbations cognitives à la phase précoce de la maladie Implication de l’atteinte tissulaire globale, et responsabilité de l’atteinte de la substance grise Origine démyélinisante provenant de la déconnexion des réseaux impliqués dans les fonctions cognitives Origine corticale, envisageable devant la corrélation des troubles cognitifs à l’atrophie corticale Mécanismes de compensation grâce à la plasticité cérébrale limite partiellement l’expression clinique de ces perturbations
Précocité des troubles Fréquents: 40-60 % des patients La fréquence de ces troubles augmente avec la durée d’évolution de la maladie Troubles parfois très précoces Fréquence: 30-60% dès le premier événement démyélinisant: Mémoire de travail Troubles attentionnels Vitesse de traitement des informations Importance de la détection de ces troubles: Évaluation du handicap Mise en route d’un traitement de fond
Troubles mnésiques La mémoire épisodique comporte trois processus : l’encodage, constitution d’une trace mnésique à partir d’une information perceptive le stockage, mise en réserve de l’information la récupération, restitution des données selon différentes modalités (rappel libre, indicé ou reconnaissance) Mémoire épisodique atteinte dans la SEP chez près de 60% des patients atteinte spécifique du processus de récupération (rappel libre différé) Atteinte de l’encodage Perturbation de la vitesse de traitement de l’information = Atteinte attentionnelle et trouble de la mémoire
Substrat de ces troubles en imagerie Pas de rapport entre la charge lésionnelle et l’atteinte cognitive Atrophie et déstructuration tissulaire → corrélés à l’importance des troubles cognitifs Atteinte de la substance blanche et de la substance grise (en apparence normale) Mécanismes de réorganisation fonctionnelle mis en évidence en imagerie fonctionnelle → limitation de l’expression clinique de ces déficiences cognitives
La fatigue Symptôme fréquent, sous-estimé, parfois négligé Symptôme difficile à quantifier Indépendant du stade de la maladie Indépendant de la dépression ≠ phénomène d’Uhthoff= majoration d’un déficit focal lors de l’augmentation de la température corporelle Pas d’échelle d’évaluation validée: fréquence, intensité, retentissement fonctionnel (comme EDSS pour invalidité) Echelle MFIS (Modified Fatigue Impact Scale) Fatigabilité physique/ fatigabilité cognitive/ fatigue générale Plus grande fréquence de la fatigue au moment des poussées
Traitement de la fatigue Caractéristiques: Présente dès le matin au réveil Apparition rapide après effort minimal Augmentation du temps de récupération Chronique Exacerbation des autres symptômes de la maladie Aggravation à la chaleur/ amélioration après repos ou sieste Traitement: Fractionnement des activités physiques au cours d’une journée Traitement de la dépression Traitement médical: amantadine, modafinil Pas de CI à la kinésithérapie
Prise en charge de la malvoyance Troubles visuels: Secondaires à une NORB, avec séquelle Syndrome cérébelleux avec nystagmus, ataxie optique Après bilan ophtalmologique: Systèmes grossissants Prismes Rééducation des saccades et de la poursuite oculaire
Troubles psychologiques Dépression: Troubles du sommeil Réveils nocturnes fréquents Somnolence diurne excessive Troubles du comportement: savoir détecter les changements Période de projets d’existence Personnels, familiaux, professionnels risque : isolement social Le diagnostic peut rester longtemps incertain/l’évolution n’est pas prévisible La SEP fait peur ! Mener la vie la plus normale possible
La douleur Névralgie du trijumeau gabapentin lamotrigine Douleurs de type cordonal postérieur: tricycliques antiépileptiques Spasmes toniques douloureux : carbamazépine Clonazépam
Les tremblements mouvements anormaux les plus fréquents clonazépam, primidone isoniazide propanolol chirurgie (thalamotomie et stimulation cérébrale profonde du thalamus)
La spasticité Chercher l’épine irritative Fécalomes Infections urinaires Escarres Douleurs Antispastiques Baclofene Dantrolene
Kinésithérapie Indispensable en dehors des poussées pour prévenir rétractions musculaires limitations articulaires et attitudes vicieuses Mobilisation passive des membres Séances d’étirement musculaire prolongé et postures d’inhibition de la spasticité Proscrire exercices contre résistance des muscles spastiques
Troubles vésico-sphinctériens Anti cholinesterasique Alpha bloquant Autosondage En fonction de l’évaluation urodynamique et du catalogue mictionnel
SEP et état grabataire Prévention d’escarre: Massage des points d’appui Changement de position Matelas à eau Cerceau Prévention des phlébites: Mobilisation active et passive Anticoagulation préventive Attention aux infections Signes urinaires Toux Fièvre
Troubles de la sphère oro-faciale Dysarthries: Pyramidale Cérébelleuse Troubles de la déglutition: Difficultés de mastication Stases Riseque de fausses-routes → épaississement des aliments, et fractionnements, adaptation de la texture → recours à la sonde naso-gastrique → pose de gastrostomie
Diagnostic différentiel Devant toute suspicion de SEP Si atypies … penser à rechercher une autre étiologie possible
Neurosarcoïdose Granulomatose diffuse, multisystémique, d'étiologie inconnue. L'atteinte pulmonaire est la plus fréquente, mais d'autres organes sont souvent atteints, comme les yeux et la peau. Fréquence de la neurosarcoïdose: 5% L'atteinte du système nerveux central résulte de l'infiltration des espaces méningés par le processus granulomateux qui diffuse ensuite aux nerfs crâniens et rachidiens, aux vaisseaux ou au parenchyme cérébral. Celui-ci repose le plus souvent sur la démonstration d'une atteinte extraneurologique associée, avec la mise en évidence du granulome sarcoïdien dans un autre organe, Traitement :corticoïdes
Gougerot-Sjögren Syndrome sec oculaire et buccal Complications neurologiques: 8,5 à 70 % Aspect de démyélinisation Myélite Neuropathies périphériques : chez 20 % des patients
Neuro-Behcet Vascularite systémique rare, atteinte systemique (Peau, bouche, œil, système nerveux central, système nerveux périphérique, vaisseaux, tractus digestif): Evolution par poussées /atteinte surtout cutanéo-muqueuse (aphtes buccaux et génitaux, pseudo-folliculite, nodules acnéiformes, hypersensibilité aux points de ponction), Neuro-ophtalmologique (uvéite antérieure ou postérieure, méningo-encéphalite) Vasculaire (phlébites des membres, thromboses caves, thrombophlébites cérébrales, artérite).
Ne jamais évoquer un diagnostic de SEP à la « Maladie inflammatoire » première poussée Conséquences +++ « Maladie inflammatoire »
Questions ?