16 mai 2012
Mme L, 80 ans Antécédents : Rectocolite hémorragique diagnostiquée en 2002 Diverticulose colique Hémorroïdes externes Gastrite antrale et fundique (2008) Prolapsus vaginal Prothèses de hanche totales bilatérales Chondrocalcinose HTA Déficit congénital en Facteur VII
Traitement habituel: Pentasa 2g/j IPP à la demande Sotalex
Histoire de la maladie : 1. Début aout 2008 : Diarrhée 3-4 jours après traitement par oflocet pour une cystite nécessitant hospitalisation ( Caen) Coprocultures : positives à C difficile Coloscopie : aspect de colite TDM : aspect inflammatoire de l’ensemble du cadre colique prédominant au niveau du colon droit et distal avec Épanchement intra-péritonéal Traitement par Flagyl pendant 7 jours
2. Fin aout 2008 : Récidive des diarrhées une semaine après l’arrêt du traitement nécessitant hospitalisation au CHU du 24/08 au 17/09/2010 : Clinique : - Mauvais état général OMS III - Poids : 54 kg - T : 38.9 ; Pa : 120/ 60 ; FC : 54/min - Abdomen souple et indolore - TR : normal - Oedèmes bilatéraux des MI - examen CP normal
Biologie - CRP = Hb = 10,8 VGM= 94 - GB = 7400 et PNN= Albumine= 15 - Na= 133 K=2,7 creatinine=47 - Coprocultures : négatives - Hémocultures : négatives
Examens complémentaires ASP : normal rectosigmoïdoscopie : Rectocolite pseudo- membraneuse - Biopsies coliques et rectales : remaniées par des lésions cicatricielles et anciennes de RCH et lésions inflammatoires sub aigues absence d’ulcération et de fausses membranes bactério : négatives
Evolution : Amélioration des symptômes sous vancomycine 125 mg 4 fois /j ( durée totale 4 semaines) Renutrition par nutrition entérale
3. Novembre 2010 : Récidive diarrhées glaireuses et fébricule à 38 Clinique - Poids : 48 kg - Pa : 110/60 ; FC : 74/min - Abdomen souple, indolore, météorisé - Pli cutané Biologie - CMV, HSV, ECBU, Hemoc : négatif - Coprocultures positives à C.difficile
Examens complémentaires ASP : pas de syndrome occlusif Rectosigmoïdoscopie : Aspect de colite pseudo membraneuse sévère Biopsies coliques : histologie compatible avec colite pseudo-membraneuse Bactério : négatif
Evolution : Amélioration des symptômes sous antibiothérapie par Flagyl et vancomycine pendant 3 semaines, puis vanco seule en décroissance progressive sur 3 semaines Réhydratation et correction des troubles ioniques Renutrition par nutrition entérale
4. Janvier 2011 : reprise des diarrhées glaireuses Clinique : normale Biologie : - Recherche de C. difficile positive Pas d’examens complémentaires Évolution : Favorable sous vancomycine : 250 mg 4 fois/j pour une durée totale de 3 semaines puis au long cours mise sous vanco 125 mg 4fois/j et ultra levure 200mg 3fois/j
Au total : 4 épisodes de colite à C. difficile chez une patiente ayant une RCH bien contrôlée sous Pentasa, avec mise sous traitement au long cours par vancomycine et ultra-levure à la suite du 4ème épisode Diminution progressive de la vancomycine en raison de sa nephrotoxicité : mg 3 fois/j en mars mg 2 fois/j en mai mg 1 fois/ en juin Arrêt en juillet 2011 Arrêt des IPP ( favorise rechutes des infections a C.d)
5. Janvier 2012 : - Réapparition d’émissions glairo-sanglantes sans diarrhées - Pas d’amélioration malgré : Augmentation Pentasa à 3g/j Suppositoire de Rowasa 1/j Lavements de Colofoam - Coprocultures : négatives - Rectosigmoidoscopie fev 2012 :aspect compatible avec RCH en poussée modérée avec érosions et ulcérations peu profondes, plages erythémateuses étendues par Endroits, anomalies des capillaires Biopsies : histologie de RCH en poussée Décision de poursuite traitement local seulement par Colofoam et Rowasa
6. Mars 2012 : Réapparition emissions avec rectorragies (6/j) Introduction corticothérapie ( 40 Mg/j PO) permettant amélioration des symptômes, décroissance en cours…
Colite à Clostridium Difficile
Clostridium difficile : Bacille anaérobie strict gram positif Souches :. Non pathogènes / non toxinogènes. Pathogénicité liée à la production de 2 toxines A et B Augmentation majeure : incidence sévérité mortalité
Physiopathologie :
Facteurs de risque : - Prise d’antibiotiques ( aminopénicillines, céphalosporines, cindamycine, fluoroquinolones) Bourgault AM, Lamothe F… Chimiothérapie - Hospitalisation ou vie en institution - Âge > 65 ans Carignan A, Allard C… Clin Infect Dis Chirurgie abdominale - MICI - IPP Dial S, Delaney JA… JAMA 2005
Spectre clinique : rôle principal de 2 facteurs :. Virulence de la souche : souche NAP1 /027 : - hyperproduction de toxines A et B - infections nosocomiales sévères et épidémiques, - taux de mortalité 3 fois plus élévé CMAJ 2005 Lancet Réponse immune de l’hôte : - Haut taux d’IgG anti-toxine A : protège des diarrhées induites par C.d – portage asymptomatique NEJM 2000
NEJM october 2008
Spectre clinique : % des diarrhées bénignes post-antibiotique - > 95 % des colites pseudo-membraneuses - Complications :. Déshydratation. Insuffisance rénale aigue. mégacôlon toxique. perforation digestive. colectomie. Récidive ( 15-30%) Bartlett JG Ann Int Med. 2006
Spectre clinique : Gastroenterology 2009
Traitement de l’infection initiale à C. difficile:
Clin Infect Dis 2007 Métronidazole en 1 ère intention dans infection non sévère : -Moins cher -Risque de développement résistance à la vancomycine
Récidive de l’infection à C difficile : - 15 à 30 % des patients après arrêt des antibiotiques - 40% après 1 ère récurrence - > 60% après 2 ème ou plu récurrence Am J Gastroenterology Survenue similaire après métronidazole ou vancomycine - le plus souvent 2 semaines après arrêt du traitement - Association de 3 facteurs : o réinfection avant rétablissement de la flore intestinale normale, avec défaut de son rétablissement o éradication incomplète de la souche originale o Défaut de réponse immunitaire de l’hôte
Lancet Clin Infect Dis 2007
Traitement de la récidive :
Et discuter après 2 ème récidive : en association : - Rifaximine : mg/j en 2 prises pendant 14 jours, après les 2ères semaines de vancomycine efficacité prouvée Johnson S… Clin Infect Dis Probiotiques pendant 4-6 semaines, à débuter pendant les 2 dernières semaines de vancomycine efficacité non prouvée : méta-analyse Cochrane Database Toxin-Binding resins : cholestyramine 4g 3 fois/j, 2h à distance de la vancomycine efficacité non prouvée
Fidaxomicine : NEJM 3 février 2011 : - Essai de non inferiorité controlé randomisé double aveugle patients ayant infection à C difficile confirmée Recevant fidaxomicine / 327 vancomycine - 1er critère de jugement : guérison de l’épisode - 2ème critère de jugement : récurrence dans les 4 semaines après arrêt du traitement antibiotique
Résultats :
Analyse en sous groupes : récurrence : - Souche NAP1/027 : 24,4% (11/45) chez fidaxomicine 23,6% (13/55) chez vancomycine non significatif (p=0,93) - Souches non NAP1/027 : 7,8% (8/103) chez fidaxomicine 25,5% (27/106) chez vancomycine significatif (p<0,001)
Immunothérapie : A. Injection d’Ig : - association entre le taux d’IgG anti-toxine A et la sévérité de l’infection - Etude du NEJM 21 janvier 2010 : Essai controlé randomisé en double aveugle Injection d’Ac anti toxine A et B versus placebo Chez 200 patients avec infection à C difficile Recevant antibiotiques par metronidazole ou vancomycine Critère de jugement : récurrence de l’infection 7% versus 25% de récidive IC= 7-29 p<0.001 Ccl : Ac monoclonaux anti toxine A et B réduit le risque de récurrence en association avec traitement antibiotique
Immunothérapie : B. Vaccination : Etude dans Vaccine février 2012 : Vaccin basé sur un adénovirus, qui exprime la partie C terminale, région hautement immunogène de la toxine A du C difficile Résultats : à doses modérées, induit une réponse rapide humorale et cellulaire spécifique de C difficile chez les Souris, corrélée à une protection de 100% sur la mortalité.
Thérapie microbiologique : restituer une flore colique normale - Etude de Gastroenterology Mars 2012 : Étude de cohorte rétrospective 70 patients avec infection récurrente à C difficile Ayant reçu transplantation fécale par coloscopie Après échec traitement conventionnel par antibiotiques Suivi sur 12 mois : efficacité : absence de symptômes : 34/34 patients (100%) avec souche non /36 patients (89%) avec souche 027 Ccl : option efficace pour traitement récurrence à C difficile infection Limites : -Étude rétropective : perdus de vue ( évolution défavorable?) -Risque de transmission d’agents contagieux via le donneur
C difficile et MICI : - MICI : Fdr d’infection à C difficile - Augmentation de l’ incidence et de la sévérité des infections avec taux plus élévés / non MICI : Hospitalisation Chirurgie Mortalité Gut 2008 Clinical Gastroenterology and hepatology Risque plus élevé chez RCH / MC, et incidence X2 American Journal of Gastroenterology 2008 Diseases of the colon and the rectum
Facteurs de risque : Similaires aux non MICI Mais cas reportés d’infections à C difficile avec décès chez patients jeunes sans comorbidités non hospitalisés Morbidity and mortality weekly report 2005 Corticoïdes ( RR=3,3 avec IC=1,88-6,10 Alim Phar Therapeutics 2009) Immunomodulateurs (azathioprine, 6-mercaptopurine, methotrexate) : non associés à un risque d’infection à C difficile Journal of Crohn’s and colitis 2010
Clinique : - Présentations atypiques possibles rectorragies sans diarrhée, sans FdR traditionnel Toujours effectuer recherche de C difficile chez patients atteints de MICI lors de symptômes digestifs.
Lésions endoscopiques / infection Cd chez MICI Journal of Crohn’s and colitis pseudo-membranes moins fréquemment retrouvées / non MICI 12 patients sur 93 soit 13% population générale : 50% Aspect non spécifique le plus souvent ( muqueuse inflammatoire oedématiée, érythémateuse, friable )
2. Facteurs prédictifs de pseudo-membranes :
3. Pas de différence sur la sévérité de l’infection liée à la présence de pseudo-membranes : Colectomie Megacolon Perforation Choc hypovolémique Echec récidive
Traitement : Clinical Gastroenterology and hepatology 2009 Etude rétrospective comparant patients atteints de MICI hospitalisés avec infection à C difficile, traités par antibiotiques avec ou sans immunomodulateurs Critères de jugement : décès ou colectomie dans les 3 mois Résultats : utilisation de 2 ou plus immunomodulateurs augmentent le risque de complications ( OR 17% IC=3,2-91)
Conclusion : infection iatrogène : limiter prescriptions des antibiotiques infection nosocomiale : mesures d’hygiène hospitalière développer thérapies non antibiotiques qui altèrent la flore intestinale et favorisent ainsi récurrences.