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Histoire de la France Contemporaine

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1 Histoire de la France Contemporaine
Premier cours : Les débuts de la 3e République ( )

2 Premier cours : 1 – Une naissance pénible
2 – Entre république et monarchie ( ) 3 – De la république opportuniste ( ) à la république radicale ( ) 4 – Économie 5 – Société et culture

3 1 – Une naissance pénible
L’accouchement de la 3e république fut difficile. Elle n’est pas née d’une révolution, mais de l’effondrement du système précédent sous les coups extérieurs. La situation qui prévalait au pays dans les dernières années du Second Empire explique cet effondrement, le bonapartisme semblait avoir épuisé ses potentialités, comme l’illustre la défaite de Sedan. C’est « naturellement » que la France se tourne vers le modèle républicain. Le nouveau gouvernement fera rapidement face à la menace intérieure (la Commune) et extérieure (les troupes prussiennes). La république est proclamée le 4 septembre Le gouvernement provisoire dut reporter les élections et poursuivre la guerre, incapable d’obtenir une paix sans annexion.

4 Bazaine capitule à Metz le 27 octobre 1870, ouvrant la route de Paris et en janvier 1871, la capitale capitule, forçant le gouvernement à négocier. Cette décision, jumelée manque de légitimité du gouvernement à Paris, va entraîner le soulèvement de Paris et la proclamation de la commune, écrasée par les forces « versaillaises » au printemps 1871. En février, les élections générales (en conformité avec la loi électorale de 1849, très libérale et établissant le suffrage universel masculin) donne la majorité aux conservateurs (orléanistes et légitimistes). Mais les conditions des élections et leurs résultats, alors que les monarchistes obtiennent la majorité, affaiblissent la légitimité du gouvernement républicain. Les monarchistes font l’erreur de voir dans ce vote un appui à la monarchie et un rejet de la république, car leurs appuis proviennent de leur prise de position en faveur de la paix.

5 Tiers devient chef du pouvoir exécutif, son expérience et son attachement à l’ordre lui conférant la confiance des monarchistes. Thiers voulait relever le pays et maintenir la République à « titre provisoire », en espérant transformer ce provisoire en système permanent. Thiers négocie les conditions de la paix avec les Prussiens, (devenus les Allemands) ce qui permet la signature d’un traité de paix temporaire en février, qui deviendra officiel après sa ratification à Francfort en mai. Les conditions sont désastreuses (perte de l’Alsace et d’une part importante de la Lorraine et indemnité de 5 milliards de francs-or à payer dans un délai de trois ans). En attendant, l’occupation se poursuit. La France n’a pas le choix et ces conditions vont constituer un terreau fertile au revanchisme français.

6 Si l’épisode de la commune a grandement contribué à asseoir l’autorité de Thiers en France, il a fait de lui un paria dans la capitale. Mais compte tenu du système représentatif alors en place, ce n’est justement pas Paris qui gouverne, mais bien plutôt la province. Cette ambigüité originelle – une république monarchiste dirigée par un orléaniste qui a l’appui des légitimistes —va faire des premières années de la 3e république une période chaotique.

7 2 – Entre république et monarchie (1871-1877)
2.1 – Thiers administrateur « Administrateur nécessaire de l’infortune nationale », Thiers n’a pas la légitimité d’un président et jusqu’à sa chute en 1873, il tente d’obtenir de véritables pouvoirs. Tant que la menace allemande demeure concrète, il parviendra à se maintenir, jouant les deux grands blocs, monarchiste et républicain, l’un contre l’autre. Son principal succès sera l’évacuation du territoire : dès l’été 1871, par un grand emprunt national, le gouvernement obtient la plus grande partie des fonds nécessaires aux paiements des réparations et à l’automne 1873, les soldats allemands quittent la France.

8 Le 31 août 1871, Thiers parvient à faire préciser ses compétences et obtient le titre de Président de la République, dont les prérogatives sont étendues à la nomination du gouvernement. Les deux années suivantes se passent en débats stériles, mais les monarchistes reculent au profit des républicains, comme lors des élections partielles de l’été 1871, qui voient les républicains se renforcés. Les divisions des monarchistes laissent une marge de manœuvre au gouvernement, les frères ennemis (légitimistes et orléanistes) s’entredéchirant. Les légitimistes sont obtus et rejettent les changements survenus depuis un siècle : attaché au drapeau blanc, le comte de Chambord réclame un pouvoir absolu, Les orléanistes, à l’image de Louis-Philipe, comprennent très bien que le temps de l’absolutisme est révolu.

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10 Devant ces querelles, l’opportuniste qu’est Thiers se rapproche de plus en plus des républicains, provoquant un sursaut de la majorité afin d’obtenir une réduction de ses pouvoirs, ce à quoi il répond en démissionnant le 24 mai 1873. La chambre porte alors au pouvoir l’un des bouchers de la Commune, le général légitimiste de Mac-Mahon. Les premières années de sa présidence voient une tentative de restauration de l’ordre moral: le gouvernement réduit l’influence des idées républicaines, tentant ainsi une restauration en douce. La construction du symbole de cette politique de pénitence, la basilique du Sacré-Cœur, débute en 1875. Mais Mac-Mahon est lui-même peu présent sur le plan politique en , laissant au duc de Broglie, chef du gouvernement, le soin de mener cette politique de restauration nationale, idéalement sous la conduite d’un roi.

11 Considérant de Broglie responsable de l’échec des pourparlers entre légitimistes et orléanistes, les premiers le renversent dès 1874, mais pas avant que celui-ci n’ait obtenu que soit reconduit pour sept ans (la durée de vie que l’on espère que le conte d’Artois ne dépassera pas…) à son poste de président le général Mac-Mahon. Les monarchistes espèrent qu’à ce moment le clan légitimiste sera dirigé par un homme plus enclin au compromis et qu’il sera alors facile de restaurer un pouvoir monarchique en portant un roi à la tête de la république, dans une sorte de reprise du coup d’État de Louis Napoléon Bonaparte. De sorte que la vie politique française est gelée au cours des années qui suivent : en 5 années, de 1874 à 1877, la France connaîtra cinq premiers ministres.

12 2.2 – La « constitution » de 1875 La 3e république n’a pas de constitution, mais plutôt un ensemble de lois constitutionnelles, votées en et qui va constituer l’assisse légale du régime. Cela illustre le caractère hésitant du développement politique au cours de la période Malgré tout, cet ensemble finit par s’imposer et constitue la première pierre de la construction étatique de la 3e République. La période est pauvre en matière législative, la principale initiative provenant du sénat, en la personne de Louis Casimir Pierrier, républicain conservateur, qui propose de donner une structure plus concrète aux institutions : jusqu’à ce moment, la base du régime demeure la constitution de 1869, modifiée par plusieurs lois de natures constitutionnelles, comme la loi rivet de 1871.

13 Ces lois constitutionnelles (3), votées en 1875, organisent le sénat, les pouvoirs publics et les rapports entre ces derniers. L’ensemble forme l’assise d’une république conservatrice, rejetant le principe absolutiste au profit de la souveraineté populaire, mais encadrant celle-ci dans des limites étroites. On compte quatre centres de pouvoir : le président, le gouvernement, la chambre des députés et le Sénat. Le partage des pouvoirs a fluctué dans les premières années et la puissance présidentielle est en net recul à partir de mai 1877, puis ce sera au tour du Sénat : ces deux institutions, représentant la « face conservatrice » du compromis de la 3e République, sont supplantées par la « face libérale », bourgeoise, la chambre des députés et le gouvernement. En 1875 cependant, le président de la République est le personnage le plus puissant et ses pouvoirs font de lui presque un monarque.

14 Il est élu par les membres de la chambre des députés et du sénat, qui doivent appuyer au moins à 50 % des voix un candidat pour qu’il soit nommé. En plus de ses compétences exécutives (nomination des membres du gouvernement, désignation des principaux officiers de l’État, civils et militaires), le président peut s’immiscer dans le processus législatif en proposant des lois. Son droit de grâce lui confère un rôle judiciaire. Chef des armées, il est responsable de la politique étrangère du pays, en plus de disposer du droit de dissoudre la chambre, avec l’approbation du Sénat. Il est inamovible et irresponsable devant la chambre, ses actes législatifs devant être cosignés par un ministre qui répond devant le parlement. Ce ministre désigné prendra le titre de président du conseil. Au bout de quelques années, c’est ce président du conseil qui deviendra le véritable chef de l’exécutif.

15 Le président du Conseil est généralement un député à qui le président confie le soin de former le gouvernement et de défendre la politique générale. Il joue ainsi le rôle de pont entre les pouvoirs législatifs et exécutifs. Le gouvernement est solidairement responsable et un vote de censure contre un de ses membres entraîne le renvoi de tout le gouvernement. C’est l’un des éléments qui expliquent la grande instabilité gouvernementale de la 3e République. Le Sénat est le rempart du conservatisme contre les tentations populistes et radicales que l’élection au suffrage universel ferait pesait sur le système. Il est composé de 300 membres, dont 225 sont élus par collèges électoraux régionaux, dominés pas des conseillers municipaux et 75 sont nommés à vie (à leur décès, ils sont remplacés par vote par les 225 autres membres du sénat). On les appelle les sénateurs inamovibles.

16 Le Sénat, peu représentatif, dispose de grands pouvoirs : dissolution de la chambre, destitution du président, pouvoir de se constituer en haute cour pour juger les officiers accusés de crime contre l’État. De plus, son vote est nécessaire pour la mise en application des lois et du budget. La Chambre des députés, seul organe véritablement représentatif, apparaît comme le parent pauvre. Le mode électoral sera le sujet de nombreux débats, tantôt proportionnel, tantôt représentatif, mais à l’origine, on avait opté pour un système représentatif, afin de donner plus de pouvoir à la campagne et de réduire celui des grandes villes. La chambre des députés est le socle de l’activité législative, mais les pouvoirs équivalents conférés au Sénat rognent considérablement sa marge de manœuvre.

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18 S’il lui revient de maintenir ou de faire tomber le gouvernement en octroyant ou refusant sa confiance à ce dernier, la possibilité dont dispose le président de dissoudre la chambre l’oblige à mesurer son recours à cet expédient extrême. Cette concentration des pouvoirs entre les mains des élites les plus conservatrices du pays illustre les conditions de naissance de cette république par défaut. De sorte que cette structure relativement peu démocratique porte en germe les confrontations qui surviendront à partir de la fin des années 1870.

19 2.3 – La crise de 1877 et le triomphe de la République
En 1875, il est difficile de dire si le système est « présidentiel » ou « parlementaire » : les pouvoirs exécutifs sont octroyés au président, mais le droit de regard de la chambre sur la politique du gouvernement réduit la marge de manœuvre présidentielle. À cette situation confuse s’ajoutent des problèmes circonstanciels (querelle des légitimistes et des orléanistes, difficultés économiques), qui font que la population se détourne des élites monarchistes en place depuis 1871 pour appuyer les républicains. Ce changement est perceptible dans les résultats des élections législatives de 1876, qui voient les républicains remporter deux tiers des sièges, n’en laissant que 64 entre les mains des légitimistes (24) et des orléanistes (40).

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21 En janvier, les élections sénatoriales avaient annoncé ce changement, les républicains étant presque parvenus à obtenir la majorité (149 sièges contre 151 pour les orléanistes, les bonapartistes et les légitimistes). Mac-Mahon se trouva donc en face d'une Chambre républicaine et d'un Sénat où les conservateurs disposaient d’une très faible majorité. Les conservateurs tentèrent un coup de force et le 16 mai 1877, Mac-Mahon renvoya le président du Conseil, Jules Simon, républicain modéré qui avait la confiance de la chambre et le remplaça par de Broglie. Mis en minorité, il demanda au président de dissoudre la Chambre. La tâche de trancher la question de la prédominance du président ou de la chambre fût donc confiée au corps électoral Après une campagne électorale agitée, au cours de laquelle le président Mac-Mahon s’impliqua, les républicains l'emportèrent de peu.

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23 Mais suffisamment pour entraîner une modification des rapports de force entre les institutions et faire triompher les tenants d’une république parlementaire. Mac-Mahon se maintiendra à la présidence jusqu’en 1879, mais son successeur, Jules Grévy, acceptera la nouvelle répartition des pouvoirs, s’engageant à ne pas entrer en conflit avec la chambre et à laisser à celle-ci l’initiative politique. Donc, à partir de la « constitution Grévy », le président de la République abandonne peu à peu ses pouvoirs réels au profit de la chambre, ne conservant que des fonctions protocolaires. Ainsi, même si le président peut toujours demander la dissolution de la chambre, la coutume fera en sorte qu’aucun des successeurs de Grévy ne se risquera à y recourir, tellement cette mesure sera identifiée à une conception « non-républicaine » et autoritaire de l’État.

24 3 – De la république opportuniste (1879-1899) à la république radicale (1899-1914)
3.1 – Les forces politiques La République s’est imposée au cours de ces quelques décennies et l’idée républicaine semble avoir été acceptée par la grande majorité des courants politiques. La république devait être conservatrice pour exister : le fait que les forces les plus à droites aient délaissé les courants monarchiques a assuré la victoire républicaine.

25 À l’exception de deux courants extrémistes et très marginaux, situés aux deux extrêmes, toutes les forces politiques admettent le système. Tout au plus désirent-elles des aménagements en faveur de l’ordre ou de l’équité, selon qu’elles soient à droite ou à gauche. La période qui court de 1879 jusqu’à la Première Guerre mondiale est découpée en deux, le tournant du siècle faisant office de césure chronologique : la période opportuniste et la période radicale. Le nom de la première vient de la politique qui sera menée par des conservateurs ralliés à l’ordre républicain, pratiquant une politique de main tendue envers les forces sociales qui réclament un meilleur partage des pouvoirs économiques et politiques. Le nom de Jules Ferry demeure associé à cette première phase. Quant au nom de la seconde, il lui vient du parti qui s’impose au cours de cette période, le parti radical. Les noms de Combes, Caillaux et Herriot y sont associés.

26 Difficile de synthétiser les forces politiques au cours de cette période, les changements étant nombreux, certaines organisations disparaissant, d’autres mutants, d’autres enfin cessant simplement d’exister. Aux extrémités du spectre on trouve deux forces qui cessent peu à peu de compter parmi les forces actives : monarchistes et syndicalistes révolutionnaires. Au fil du temps, on assiste à la mutation des légitimistes, orléanistes et bonapartistes, qui donnent naissance au nationalisme radical français. S’appuyant sur le revanchisme, il rejette le régime et réclame un pouvoir fort, pour préparer la revanche contre l’Allemagne. Après l’échec de la Ligue des patriotes, c’est l’Action française des Valois, Pujo et Maurras, qui reprend cette idée au début du XXe siècle. Ce « nationalisme intégral », fusion du monarchisme et du nationalisme, ne suscite qu’un intérêt très limité dans la population, en dépit d’un ralliement d’une partie des élites.

27 L’autre perdant, le syndicalisme révolutionnaire, se manifeste de façon inverse, avec un faible appui des élites, mais une grande présence chez les masses. Dominées idéologiquement par l’anarchisme et rejetant le parlementarisme, ces forces politiques se lancent au début des années 1890 dans un mouvement de « propagande par le fait », multipliant les attentats. La réaction policière les oblige à changer de tactique et à intégrer les syndicats, radicalisant ces derniers, modifiant leur tactique (recourant à des mouvements massifs de grèves) et donnant éventuellement naissance à la CGT (Confédération générale du travail), lors de l’adoption en 1906 de la Charte d’Amiens. De 1906 à 1910, la France vit au rythme de ces confrontations entre les ouvriers radicaux et l’État, qui déclenche une violente répression contre le mouvement.

28 L’échec du mouvement vient de son incapacité à élargir sa base, les ouvriers demeurant attachés au réformisme et préférant l'amélioration graduelle de leurs conditions. Dès 1910, les choses se calment et même la CGT finit par abandonner cette tactique. Premier mouvement marqué de l’opinion : l’abandon par la majorité de la population des solutions extrêmes, va de pair avec une acceptation du système républicain. À droite, se trouvent les forces conservatrices ralliées à la république, dont les forces catholiques, comme l’Action libérale populaire, qui se fera entendre lors des débats sur la laïcité, en adoptant des positions favorables à l’Église. Malgré des succès électoraux, il ne s’agit pas d’une puissance politique. Plus importants, plus centristes, mais à droite, on trouve les républicains conservateurs, rassemblés au sein de la Fédération républicaine, qui devient au début du XXe siècle le principal parti de la droite conservatrice.

29 Présente particulièrement dans l’ouest de la France, cette tendance ne participe que peu au pouvoir, suspectée d’un manque de fidélité aux institutions. Au centre droit se constitue autour d’une classe bourgeoise, modérée et dreyfusarde une tendance qui va occuper une part importante de l’espace politique avant la guerre. L’Alliance républicaine démocratique est davantage une union de personnalités fortes (comme Waldeck- Rousseau ou Poincaré) qu’un parti. Attachée au système républicain, son libéralisme la place à droite. À gauche et au centre gauche se constitue l’autre grande force politique du début du XXe siècle, le parti radical. D’abord situé très à gauche au début de la IIIe république, ce parti se centralise sous le double effet du changement de sa composition sociale et du glissement vers la gauche de la société française.

30 Son programme vise à rallier le plus de force possible et à s’imposer comme le premier parti de France et celui sans lequel aucun gouvernement ne peut tenir. Son idéologie repose sur un républicanisme convaincu, une politique sociale progressiste et une politique étrangère nationaliste modérée. C’est là où se trouve la classe moyenne française. Enfin, à l’extrême gauche on trouve le socialisme, tendance très éclatée, où cohabitent socialistes révolutionnaires ralliés à la république (comme les blanquistes), socialistes pragmatiques et réformistes et socialistes indépendants, groupe hétérogène de figures politiques solidement campées à gauche comme Jean Jaurès, René Viviani et Aristide Briand. L’assagissement d’une partie des socialistes va au début du XXe siècle donner naissance à la Section Française de l’Internationale Ouvrière (ou SFIO), plus communément appelé parti socialiste unifié.

31 3.2 – Évolution électorale
Le mode de scrutin généralement utilisé pour les élections législatives est uninominal (sauf pour l’élection de 1885), ce qui favorise les partis au détriment des individus et conduit à l’éclatement de la chambre en de multiples composantes, rendant impossible la formation d’un gouvernement d’un seul parti. En dépit du rôle minoré que lui confie la constitution, la chambre des députés constitue l’arbitre politique par excellence. Les majorités sont extrêmement fluctuantes, ce qui conduit à une grande instabilité gouvernementale : de à 1914, la France connaîtra 40 gouvernements différents, dirigés par 25 présidents du conseil. Les élections opposent très souvent des blocs de partis, plutôt que des partis, mais ces blocs se font et se défont au cours des différentes législatures.

32 Le Sénat agit comme une instance conservatrice, qui évolue peu dans le temps, même après la suppression des sénateurs inamovibles en 1884, ses membres n’étant pas élus au suffrage universel direct et ne sont renouvelés que par tiers au trois ans. Si le Sénat peut retirer sa confiance au gouvernement, il n’aura recours à cette mesure qu’en 1896. De sorte que l’étude de l’évolution des sièges au Sénat ne revêt que peu d’importance pour comprendre l’évolution des tendances politiques dans la société. Difficile de comparer les législatures au cours de la période pour deux raisons : à cause des changements qui affectent les partis, mais surtout à cause des fluctuations qui affectent les catégories habituelles que sont la « gauche » et la « droite ». En suivant l’évolution de la répartition des sièges dans les législatures entre 1881 et 1914, on peut faire certaines observations quant à l’évolution de l’opinion.

33 La crise constitutionnelle des années 1870 s’est soldée par l’effondrement des courants conservateurs. Le ralliement de l’écrasante majorité république est évident : en 1881, les monarchistes n’obtiennent que 42 sièges sur 545 et les bonapartistes, 46. Le président Jules Grévy alors en exercice ( ) peut ainsi nommer des chefs de gouvernement qui obtiennent la confiance de la chambre, sans pour autant parvenir nécessairement à se maintenir longtemps (12 gouvernements au cours de la période). Grâce au mode de scrutin proportionnel brièvement adopté, les monarchistes et les bonapartistes font un retour en 1885, avec 73 et 65 députés, mais les républicains demeurent majoritaires (65 %), les républicains opportunistes obtenant alors 200 sièges. À la présidence, l’Affaire des décorations entraîne la démission de Grévy en 1887, qui est alors remplacé par Sadi Carnot, un opportuniste.

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35 La présidence de Carnot connaîtra 8 gouvernements et deux élections, en 1889 et 1893.
Lors de la première, qui voit le retour au scrutin de liste, la droite gagne quelques points grâce au boulangisme, mais la majorité républicaine demeure solide. La seconde (1893) voit la disparition du bonapartisme et du boulangisme, ainsi qu’une contraction des appuis monarchistes (58 sièges), dans ce que sera leurs dernières élections. La majorité demeure républicaine, mais pour la première fois, les modérés sont dépassés sur leur gauche par les socialistes, qui obtiennent 33 sièges. Carnot est assassiné en 1894, ce qui témoigne de la grande agitation sociale, dominée par les courants anarchistes et syndicalistes-révolutionnaires, qui trouve dans les difficultés économiques que connait alors le pays un terrain favorable.

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37 Jean-Casimir Perrier (républicain modéré) le remplacera jusqu’en 1895 (deux gouvernements), avant que Félix Faure (républicain modéré) ne lui succède jusqu’en 1899 (6 gouvernements). La seule élection générale sous la présidence Faure (1898) voit la poussée à gauche se poursuivre, les socialistes obtenant 57 sièges. Grâce à l’effondrement des droites (qui ne compte plus que 44 sièges) le pouvoir demeure entre les mains des républicains, désormais campés au centre, avec près de 75 % des voix et 432 députés. Faure meurt en poste en 1899 et Émile Loubet, un républicain radical, le remplace à la tête de l’État. Sa présidence ne verra que quatre gouvernements en sept ans et une seule élection générale, en 1902, qui se déroule dans le contexte des discussions devant aboutir à la loi de la séparation de l’Église et de l’État.

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39 Le bloc des gauches obtient une faible majorité de 295 sur 589 et malgré la montée des droites qui obtiennent 251 sièges, le gouvernement pourra se maintenir grâce aux socialistes, qui ont perdu des plumes (43 députés). Armand Fallières, autre radical, verra beaucoup plus d’action : 10 gouvernements, deux élections et un contexte international extrêmement tendu. En 1906, la gauche modérée (ou centriste) récupère les positions perdues, avec 337 sièges. Il en est de même des socialistes (74 sièges), la droite reculant (174 sièges), alors que le débat politique se calme. Les élections de 1910, alors que l’agitation sociale bat son plein, verront les socialistes de Jaurès obtenir 107 sièges, alors que les républicains se maintiennent (334 sièges) et que les droites reculent (149 sièges). Le 18 février 1813, Raymond Poincaré devient président et c’est à lui que reviendra la pénible tâche de conduire le pays dans la catastrophe de

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41 Avant la guerre, il travaillera avec quatre gouvernements et connaîtra une élection générale, au printemps 1914 : les socialistes améliorent leur résultat (126 sièges), les centristes aussi (344 sièges) et la droite poursuit sa marginalisation et n’a plus que 75 sièges. Que retenir ? Un élément saute aux yeux. Parallèlement à l’érosion des courants antirépublicains, qui témoigne d’une acceptation du régime politique, on constate un glissement vers la gauche. Par exemple : occupant à l’origine des positions à gauche, les différents courants « républicains » se voient repousser vers la droite au tournant du siècle par les socialistes, en même temps que les courants monarchistes se reconstituent, de moins en moins puissants, autour de formations « conservatrices ». Que les libéraux occupent une position si à droite lors des élections de 1914 témoigne de façon éloquente de ce glissement.

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43 De toute évidence, les idéaux socialistes ont le vent en poupe à la veille de l’éclatement de la guerre. Pour saisir les raisons de cette évolution, un regard plus profond doit être porté sur certaines questions et certains problèmes qui se posent à la France au cours de cette période.

44 3.3 – Les grandes crises Les premières décennies de la 3e république sont marquées de plusieurs crises, dont certaines sont liées à des affaires de corruption, alors que d’autres voient la mise en opposition de différents points de vue concernant le développement de la république. À travers deux crises qui agitent la société française entre 1885 et 1905 environ, ce sont les fondements d’un État de droit moderne qui seront posés. La première est liée à Georges Boulanger, général de l’armée française, ministre de la Guerre, qui se taille la réputation d’un « général de la République », à une époque où les grands militaires sont encore très proches des courants monarchistes. Il devient populaire à droite, grâce à un discours revanchiste, mais aussi à gauche, par son habileté à résoudre pacifiquement différentes crises sociales.

45 Mais son discours violent à l’endroit de l’Allemagne indispose le gouvernement et le 17 mai 1887, avec la chute du gouvernement Goubet, il n’obtient aucune charge dans le cabinet, ce qui provoque l’ire des nationalistes et donne naissance au boulangisme. Tout au long de l’année suivante, à l’extérieur de toute fonction politique, il soigne sa popularité et élargit son soutien auprès de tous ceux qui rejettent le système politique : bonapartistes et monarchistes, mais aussi radicaux de gauche, trouvent dans son discours très vague des propositions qui leur plaisent. Ayant quitté l’Armée, il se présente à toutes les élections partielles à partir de l’été 1888, qu’il remporte avant de démissionner, sa campagne plébiscitaire culminant avec sa victoire de janvier 1889 à Paris. Dès l’été 1889, le mouvement boulangiste refoule lors des élections et les autorités, craignant une réédition de 18 brumaire, lancent contre lui diverses procédures.

46 Cela l’oblige à s’enfuir en Belgique où il se suicide sur la tombe de sa maîtresse le 30 septembre 1891. L’épisode aura des conséquences sur l’évolution du système politique et des mentalités : il permettra à un Sénat décrié comme étant « aristocratique » de se présenter comme le rempart des institutions contre les mouvements d’humeur de la population et marque à ce titre la « républicanisation » de l’institution. Surtout, il provoque chez les élites une violente peur du césarisme et le rejet d’un modèle politique dans lequel le pouvoir exécutif serait tout puissant. S’ajoutant à la « Constitution Grévy » de 1879, la crise boulangiste consolide le modèle parlementaire, modèle qui entraîne une grande instabilité et provoquera à terme un rejet de ce système. La seconde crise s’étend sur près d’une décennie et va littéralement couper la société française en deux camps.

47 De part et d’autre de la ligne de défense du capitaine Dreyfus se tiennent ceux qui défendent à tout prix la raison d’État et ceux qui défendent la vocation humaniste de la République. La victoire des seconds déterminera la domination du principe des droits individuels sur l’État. Dreyfus, Lorrain (et juif) est accusé et condamné le 24 décembre 1894 pour haute trahison, après avoir été reconnu coupable d’avoir transmis des informations confidentielles à l’Allemagne. L’ensemble de la société est alors convaincu de sa culpabilité et nombreux sont ceux qui regrettent la douceur de la sentence, Dreyfus n’étant pas condamné à mort, mais dégradé et exilé en Guyane. Mais l’Affaire Dreyfus commence, en 1898, après que la famille de Dreyfus soit parvenue à déterrer des documents démontrant l’innocence de Dreyfus et la culpabilité d’un autre officier, Walsin Esterhazy.

48 Le procès d’Esterhazy se déroule à huis clos en janvier et son acquittement provoque une levée de boucliers, dont la manifestation la plus célèbre est le fameux « J’accuse », de l’écrivain Émile Zola, qui devient le chef de ceux que l’on nomme les dreyfusards. Recrutés en grande partie au sein de la gauche, ils se réunissent autour de la Ligue des Droits de l’Homme pour défendre la primauté de l’individu sur l’État. Les antidreyfusards se recrutent auprès de ce qui reste des monarchistes et des légitimistes, mais aussi des républicains de droite et des nationalistes, qui voient dans le rejet du verdict une atteinte à la légitimité de l’État, mais aussi de l’armée. En 1899, la formation d’un gouvernement par Waldeck- Rousseau, s’appuyant sur une vaste coalition centriste finira par avoir gain de cause et parviendra à imposer une révision du procès de 1894 qui aboutira à la réhabilitation du capitaine Dreyfus en 1905.

49 Pour l’essentiel, le républicanisme français a trouvé ses principaux fondements théoriques au cours de ces grandes luttes épiques qui aboutissent à former une conscience politique républicaine que l’on peut définir comme un attachement aux institutions légales, mais pas au détriment de l’individu et de ses droits, considérés dès lors comme la pierre angulaire de l’édifice.

50 3.4 — Les grands travaux républicains
3.4.1 – Naissance de l’État-providence Au début de la 3e république la France retarde en matière d’intervention étatique par rapport à l’Allemagne, et l’Angleterre, patrie par excellence du libéralisme. Les crises du XIXe siècle ont contribué à braquer les élites conservatrices et à rejeter en bloc toute intervention de l’État dans le domaine social et politique, vues comme étant par essence révolutionnaires. L’État-providence naissant concentre son action sur deux axes : la protection des faibles et des démunis, et l’intervention législative visant à restreindre les « lois du marché » et à contraindre les milieux patronaux à octroyer de meilleures conditions de travail. Jusqu’en 1880, l’État français faisait confiance à la société pour venir en aide aux déshérités.

51 À partir des années 1880, l’État cesse de croire à une sorte de régulation sociale naturelle et commence à s’impliquer plus activement. Prenons le soutien à l’enfance. En 1811, Napoléon avait ordonné la création d’hospices pour recueillir les enfants abandonnés et dont le financement était privé. En 1841, on met en place des secours pour les filles- mères, toujours appuyés sur un financement privé. En 1874 la loi Roussel rompt avec cette logique en proclamant la prise en charge par l’État des enfants abandonnés jusqu’à l’âge de deux ans. Le grand changement survient en 1893, avec une loi établissant le principe de l’assistance médicale gratuite, financé par les communes et le pouvoir central. Quant au soutien aux démunis, diverses lois en établissent l’obligation, toujours sur la base d’un financement conjoint (enfants abandonnés, personnes âgées de plus de 70 ans et femmes enceintes).

52 De sorte que l’État se substitue à la bienfaisance, donnant naissance à ce que l’on nomme le droit social. Les dépenses de cet État interventionniste vont croître, mais modérément, de 1,4 % de l’ensemble du budget dans les années 1880 à 2,2 % vingt ans plus tard. En 1910, les dépenses d’assistance de l’État ne représentent que 0,2 % du PIB. Au tournant du siècle, les sommes dépensés par l’État en assistance publique ne représentent que 3 % du total des dépenses dans ce domaine : c’est encore largement la société qui assume cette responsabilité et l’État se contente surtout de réglementer. Pour les relations de travail, la rupture avec l’idéal libéral est aussi très graduelle, l’État se contentant de réglementer. Un premier pas est franchi en 1884, avec l’abolition de la loi Le Chapelier de 1790 qui interdisait les corporations professionnelles, et la légalisation des organisations syndicales (sauf pour les fonctionnaires).

53 Des revendications pour la mise en place d’un ministère du travail apparaissent au en 1886, mais il faudra attendre 1906 pour voir un tel ministère en France. Diverses réglementations visent à améliorer les conditions de travail, en encadrant particulièrement celui des enfants et des femmes : réglementation du travail des mineurs, création d’un Conseil supérieur du travail, limitation de la journée de travail à 10 heures pour les mineurs), congé de maternité, etc. Le premier fond de retraite apparait en France sous Louis XVI, mais ne concerne que quelques centaines de personnes. Sous Napoléon III, des lois encadrant la mise en place de caisses de retraite apparaissent, mais elles concernent les milieux bourgeois. En 1894, les mineurs se voient doter par une loi d’un fonds de pension approvisionné, moitié par les ouvriers, moitié par l’employeur. Les cheminots obtiendront des conditions semblables en 1911.

54 Mais il s’agit d’exceptions et on est très loin d’un régime public de retraite, ou même d’un régime général : en 1898, seuls 800 000 travailleurs sur près de 7 millions bénéficient d’un régime de retraite. Ce n’est qu’en 1910 qu’une loi générale très modeste voit le jour. En butte à l’hostilité des milieux patronaux et des syndicats, la clause d’obligation sera abandonnée. La faiblesse des cotisations rend les prestations insuffisantes pour vivre et elles ne sont versées qu’à partir de l’âge de 65 ans, à une époque où l’espérance de vie n’atteint pas 50 ans… Malgré la faiblesse des sommes dépensées par l’État, le caractère embryonnaire de ces règlementations et la survivance des réflexes libéraux chez les élites, la période voit la mise en place des bases de l’État- providence par une mutation profonde des fonctions de l’État, dont les tâches régaliennes ne constituent plus les seules responsabilités.

55 Dès le début du XXe siècle se posera la question du financement de ces interventions, l’autofinancement ne permettant pas d’offrir des programmes adaptés. D’autant qu’avec la fin de l'implication sociale des congrégations religieuses, les fonctions assumées par celles-ci devront l’être par l’État. Dès commencent les discussions sérieuses qui vont mener à l’instauration d’un impôt sur le revenu afin de financer les activités de l’État. Au sein d’une élite politique aussi attachée au credo libéral, le concept d’impôt sur le revenu passe assez mal, mais deux éléments vont concourir à la mise en place d’un système d’imposition de ce type. Il y a d’abord l’évolution d’une société qui penche vers la gauche, alors que les idées socialistes trouvent un écho au sein des classes économiquement plus aisées et que le concept de justice sociale commence à influencer les décisions politiques.

56 Que l’État doit intervenir dans certains domaines devient peu à peu admis, même au sein de la droite modérée. Cette prise de conscience, alliée au constat de l’insuffisance des moyens financiers fournis à l’État par le biais des « quatre vieilles » imposent de chercher de nouveaux modes de financement. Malgré les réticences d'une part importante des députés, le gouvernement Viviani parvient, juste avant le déclenchement de la guerre, à faire adopter par la Chambre des députés la création d’un impôt sur le revenu qui s’ajoute aux « quatre vieilles » (jusqu’en 1926, alors que l’impôt sur les portes et fenêtres sera aboli), donnant ainsi à l’État les moyens de ses politiques sociales.

57 3.4.2 – Laïcité L’autre grand front idéologique de la période se manifeste après que les questions relatives à l’organisation de la république aient été résolues, c’est- à-dire au début du XXe siècle. L’idéal républicain impliquait une société alphabétisée, afin que tous les citoyens puissent participer. Mais peu d’efforts ont été concrètement faits en ce sens, l’État laissant la société s’occuper de cette question. Il faut attendre la loi Ferry pour que l’État s’occupe de cette question. Votée le 8 mars 1882, elle rend obligatoire l’enseignement primaire, afin de scolariser quelque 600 000 enfants qui n’ont pas accès à l’école. Même si la faiblesse des moyens dont dispose l’État rend nécessaire le recours aux institutions religieuses, la loi Ferry reprend le processus de séparation de l’Église et de l’État.

58 L’affaire Dreyfus, qui voit la majorité des institutions religieuses se positionner dans le camp des antidreyfusards accélère le processus. Cela devient d’autant plus évident avec le glissement vers la gauche du parlement. En 1901, Waldeck-Rousseau fait voter une loi sur les associations qui, tout en accordant une liberté complète aux associations civiles, exige des associations religieuses une autorisation de l’État, délivrée après que celles-ci aient présenté au gouvernement un état financier (dépenses, revenus et inventaire de biens). Même si la loi est plus ou moins acceptée, elle polarise les élections de 1902, qui voient le Bloc des gauches s’imposer, dans lequel les radicaux dominent. Émile Combes doit alors tenir compte de cette pression Le « combisme », qui se manifeste entre autres par une politique de remplacement des cadres insuffisamment républicains, est avant tout une politique anticléricale.

59 Afin de développer « l’esprit républicain », Combes fait voter en 1904 une loi interdisant aux congrégations religieuses d’enseigner et leur donne une décennie pour fermer leurs écoles. Elle tend les relations entre le Vatican et Paris et en juillet, Combes rompt les relations avec le Saint- Siège, d’où l’ambassadeur de France était parti en 1903. La conclusion logique de cette passe d’armes sera présentée à l’Assemblée nationale en novembre 1904 : la loi sur la séparation de l’Église et de l’État est finalement votée en décembre 1905. La réaction de rejet du Vatican poussera ensuite le gouvernement à une application stricte du texte, qui assure la liberté de conscience et de culte, mais ne reconnait ni ne finance aucune institution religieuse. L’Église et l’État apparaissent dès lors comme des institutions totalement distinctes et la religion devient une affaire purement privée.

60 4 – Économie 4.1 – La « Grande Dépression », 1873-1896
Dans les dernières décennies du XIXe siècle, l’économie de la France est soumise à un phénomène que l’on qualifiait, avant 1929, de Grande dépression. L’expression n’est plus utilisée aujourd’hui parce qu’il ne s’agit pas d’une période de contraction économique, mais plutôt d’un affaissement des indices économiques sur une longue période. Même si l’ensemble des économies occidentales est touché, la France souffre d’une crise qui s’y manifeste plus rapidement et qui durera aussi plus longtemps.

61 Avant 1860 la France était la seconde puissance économique mondiale, mais la crise va entraîner son déclassement, particulièrement face à l’Empire allemand : en 1880, le PIB par habitant de l’Allemagne dépasse pour la première fois celui de la France. Le fléchissement de l’économie française s’amorce dans les années 1860, alors que la guerre de sécession américaine prive la France d’un important client et que les investissements dans les infrastructures ralentissent. La politique libre-échangiste menée par l’Empire n’apporte pas les effets escomptés, même si la France reste la seconde puissance exportatrice du monde. Mais entre 1850 et 1870, la balance commerciale de la France devient déficitaire, la croissance des exportations industrielles ralentit, alors que les importations triplent et que le déficit agricole s’accroît.

62 Le pays est en retard sur ces compétiteurs en matière de modernisation du secteur agricole : la population agricole demeure très importante et surtout, le nombre de petites exploitations agricoles (moins de 10 hectares) augmente entre 1850 et 1890, alors que celui des grandes et moyennes exploitations diminue… Conséquemment, les structures de production archaïques se maintiennent, la modernisation des exploitations est très lente et la productivité faible. De plus, dans un contexte d’ouverture des frontières, alors que les « nouveaux pays » commencent à exporter massivement, les prix agricoles demeurent bas, retardant les investissements nécessaires. Ainsi, la part des importations agricoles passe de 3 % à 19 % de la consommation du pays entre et 1890 et en 1880, la France devient un importateur net de vin…

63 La crise agricole exerce une double influence sur le secteur industriel, freinant les migrations de main- d’œuvre et abaissant le pouvoir d’achat de la paysannerie, entrainant une réduction de la demande Malgré tout, le secteur industriel se porte mieux que le secteur agricole. Car un nouvel acteur commence à jouer un rôle économique important : l’État français. La politique d’investissement suivi par le gouvernement, possible grâce à une bonne santé budgétaire, préfigure les politiques interventionnistes du XXe siècle. Tout au long des années 1870, les dépenses d’investissements de l’État croissent sans cesse, avant d’atteindre un plateau dans les années 80, qui se maintiendra jusqu’à la guerre. C’est vrai du secteur des transports qui est visé par cette politique et même si certains des projets sont douteux d’un point de vue de la rentabilité à long terme, ils permettent de compenser l’atonie du secteur privé.

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65 Cette politique d’investissement est rendue possible grâce à la bonne santé budgétaire de la France, en dépit des difficultés des différents secteurs de l’économie nationale. Même si en 1871, la France est contrainte de verser d’importantes réparations, sa capacité à régler rapidement cette question quelques années après la fin de la guerre témoigne de la richesse patrimoniale française. Après le remboursement de la dette extérieure, l’État français continue à engranger des recettes importantes qui lui permettent de dégager des excédents budgétaires rendant possible cette politique d’investissements.

66 4.2 – Redynamisation de l’économie française (1896- 1914)
Même s’il faut attendre la fin du siècle pour constater un redressement, les conditions de ce redressement se mettent en place avant, entre autres par une adaptation aux nouvelles conditions économiques de l’Europe et aux changements territoriaux. L’embellie qui s’annonce et qui va faire des deux décennies précédents la guerre une période d’expansion économique repose sur la croissance de la puissance industrielle, mais aussi sur la richesse financière. Malgré la Grande dépression, les réserves d’or de la Banque de France n’ont cessé de croître, passant de 2,2 millions de tonnes (1878) à 4,4 millions (1914). Il en est de même de la masse monétaire, qui passe de 15 à 27 milliards de francs.

67 Le secteur bancaire multiplie ses filiales en France et à l’étranger
Le secteur bancaire multiplie ses filiales en France et à l’étranger. Le rendement de ces institutions avant la guerre est impressionnant, avec des taux annuels de profits de 11 % à 16 % pour les banques de dépôt, et de 35 % à 60 % pour les banques d’affaires. Il en est de même de la fortune nationale de la France, dont la valeur passe de 120 milliards en 1870 à 320 milliards en L’accélération économique du début du siècle est mise en évidence par la diminution dans ce total de la propriété foncière au profit de la fortune mobilière. Cette richesse est largement investie à l’étranger et dans les colonies, particulièrement en Europe de l’Est et en Russie, la France devenant au cours de la période le premier créancier de cette dernière. Quant à la croissance du PIB annuel, à 1,4 % en moyenne entre 1900 et 1913, il est comparable à celui des autres grandes puissances industrielles.

68 Cette augmentation est due à la bonne tenue de l’industrie, qui représente en  % du PIB du pays (contre 21 % au début des années 1870), le secteur connaissant des taux de croissance élevés. Mais les taux de croissance varient entre les industries « traditionnelles », dont les rendements sont convenables, sans plus, et les secteurs « dynamiques », qui portent la croissance industrielle. Dans la première catégorie, on compte l’industrie textile et l’industrie charbonnière. La concurrence explique une bonne partie de cette faiblesse, accentuée par l’épuisement relatif des gisements traditionnels et l’apparition de produits synthétiques La puissance industrielle se déploie dans de « nouveaux secteurs ». Si la fonte et l’acier ne sont pas de nouvelles industries, ces deux secteurs connaissent des changements technologiques importants qui améliorent la qualité des produits et diversifie leurs usages.

69 Grâce à l’accroissement de sa production et à son expertise, la France s’engage dans la deuxième révolution industrielle, dont l’autre pilier sont les nouvelles sources d’énergie, électricité et pétrole. La croissance de la production électrique du pays est fulgurante, portée entre autres par l’électrification des villes, la construction de tramways, etc. Entre et 1913, la puissance installée est multipliée par 8 et la consommation électrique croit de 11 % annuellement. Des industries recourant à l’électricité se développent. C’est le cas de l’aluminium, pour laquelle les entreprises françaises sont parmi les premières à recourir à l’électrolyse, permettant à la France de devenir le 2e producteur mondial. Croissance aussi dans le secteur automobile, qui voit sa production passer de 300 véhicules en 1895 à plus de 100 000 en 1914, permettent au pays d’occuper le 2e rang mondial, le premier en Europe.

70 Il en est de même de la chimie, qui voit ses applications industrielles se multiplier au cours de la période (soude, acide, engrais, soie artificielle, etc.). Mais le secteur agricole demeure peu novateur et est très certainement le parent pauvre de l’économie. Son taux de croissance, qui continue d’être plombé par les carences structurelles déjà évoquées se maintient à un peu plus de 1 % au cours de la période. Le petit exploitant qui ne parvient pas à développer une production commercialisable continue de dominer et de faire des campagnes françaises un monde peu dynamique et très conservateur. Il faut enfin évoquer la détérioration de la balance commerciale du pays. Le solde commercial était déjà négatif en 1890 (-685 millions de francs), mais la situation empire dans les premières années du XXe siècle (-1,6 milliard de francs), malgré l’accroissement des exportations de produits manufacturés.

71 5 – Société et culture 5.1 – Démographie et stratification sociale
La France est le premier pays d’Europe à avoir entamé sa transition démographique. Les changements politiques survenus au cours du XIXe siècle ont favorisé une modernisation rapide de la structure démographique du pays, entraînant des changements inquiétants. La France du tournant du XXe siècle connait un ralentissement important de sa croissance démographique. Entre 1881 et 1914, la population française augmente de deux millions d’habitants à peine, pour s’établir à 39,5 millions.

72 Rien n’illustre mieux le ralentissement de la croissance démographique française qu’une comparaison avec le Royaume-Uni : en 1800, la France est peuplée de 30 millions d’habitants et le Royaume-Uni de 12 millions. Un siècle plus tard, la population du Royaume-Uni a dépassé celle de la France, à 42 millions d’habitants… Par rapport à l’Allemagne, c’est encore plus remarquable, ce pays comptant à la veille de la guerre plus de 60 millions d’habitants. Dès le tournant du siècle, le taux de reproduction de la population tombe en bas de 1. Le taux de natalité passe ainsi de 2,5 % en 1885 à 2 % en 1911. La faible croissance démographique tient à deux facteurs : l’allongement de l’espérance de vie, difficile à préciser, mais dont rendent bien compte les statistiques sur la mortalité générale. Il en résulte un vieillissement de la population déjà notable au tournant du siècle.

73 L’autre facteur, c'est l’immigration
L’autre facteur, c'est l’immigration. En 1911, on compte en France 1,2 million d’étrangers, nombre auquel il convient d’ajouter un autre million de personnes naturalisées au cours des 3 dernières décennies. Les Italiens (36 %) forment encore le contingent le plus important, suivis des Belges (24 %), mais l’afflux des ressortissants d’Europe de l’Est s’accélère. Grâce à cet apport, la population active continue d’augmenter, pour atteindre près de 55 % de la population à la veille de la guerre. À noter que 37 % des femmes sont considérées comme actives. La France demeure une nation rurale où 56 % des habitants vivent à l’extérieur des villes. L’exode rural est lent, la population rurale n’ayant diminué que de 10 % entre 1870 et En 1911, la France ne compte que 16 villes de plus de 100 000 habitants (pour 13 % de la population), dont près de 3 millions dans la région parisienne.

74 Les conditions de vie de la paysannerie demeurent difficiles
Les conditions de vie de la paysannerie demeurent difficiles. Les famines ne sont plus une menace, mais l’alimentation demeure sommaire et les conditions d’habitation, modestes. La structure économique des campagnes explique en bonne partie cette situation. Mais les choses changent, surtout pour la jeunesse, mise en contact, grâce à l’amélioration des moyens de transports et de communication, avec les villes. Les particularismes régionaux tendent à s’effacer au profit d’une conscience nationale, dont le nationalisme constitue une manifestation évidente. Minoritaire, la population urbaine est passée de 15 % de la population en 1815 à 44 % en Cette population urbaine connait des conditions de vie variées. La très grande majorité de la population urbaine appartient aux classes « populaires », soit environ de 10 à 12 millions de personnes, la majorité constituant une nébuleuse de salariés.

75 Ces derniers prennent conscience de leur situation et, grâce aux lois sociales, s’organisent afin d’améliorer leurs conditions de vie et de travail qui progressent lentement. Ces progrès sont évidents lorsque l'on tient compte de l’émergence d’une classe moyenne urbaine. En 1911, ils sont environ 5 millions à se distinguer non pas tant par leur revenu, mais par leur mode de vie, par lequel ils cherchent à se rapprocher de la bourgeoisie : boutiquiers et artisans, mais aussi petits rentier et migrants « fortunés » de la campagne appartiennent à cette catégorie en plein essor. Puis vient la bourgeoisie, très diverse et stratifiée. C’est elle qui a fait la révolution et c’est désormais elle qui contrôle l’appareil économique et pour l’essentiel, l’appareil politique. Depuis 1789, elle s’est hissée au sommet de la pyramide sociale, détrônant peu à peu l’ancienne élite aristocratique.

76 Cette dernière n’existe plus guère qu’en symbiose avec les nouveaux maîtres. S’il reste encore 3 000 à 4 000 « vraies » familles nobles, rares sont ses membres qui disposent encore de leviers politiques ou économiques. Ceux qui maintiennent une certaine puissance le font grâce à leur accointance avec la haute bourgeoisie. Au sommet de la pyramide sociale se trouvent ceux que l’on nomme les hauts notables (riches propriétaires fonciers) et les membres de la haute bourgeoisie (banquiers, magistrats, hauts fonctionnaires, manufacturiers, etc.). Jusque dans les années 1880, cette classe monopolise l’État et même si sa puissance politique recule à partir de ce moment, elle demeure économiquement la plus lourde. Par son mode de vie, elle copie l’existence de la noblesse de jadis, possédant de vastes terres, des châteaux en campagne et des hôtels particuliers dans les villes.

77 La classe la plus active de la période se situe en bas, économiquement, de cette bourgeoisie aristocratique, celle que l’on nomme la bonne bourgeoisie. Fonctionnaires, professeurs, rentiers et surtout membres des professions libérales ont cependant en commun avec la strate supérieure la conviction de constituer l’élite de la société française. En tout, cette élite bourgeoise compte environ 1 million de membres à la veille de la guerre. En conclusion, même si la société française demeure très inégalitaire à la veille de la guerre, la quasi- totalité de la population a pu profiter de l’expansion économique des premières années du XXe siècle, posant ainsi les prémisses de ce qui deviendra peu à peu une société de consommation

78 5.2 – La Belle Époque La Révolution française a lancé un processus de transformation culturelle qui mettra beaucoup de temps à s’installer, mais qui, au tournant du XXe siècle, prend définitivement forme. La base de celle-ci, c’est l’alphabétisation de la population, qui a fait de très grands progrès. S’il est un domaine où « l’esprit républicain » a eu un impact remarquable, c’est bien celui-là. À la veille de la révolution, environ 45 % de la population masculine et 25 % de la population féminine savent lire et écrire, au moins sommairement. À la veille de la guerre, en 1911, ces chiffres sont respectivement de 86 % et 79 %. Chez la génération issue de la loi Ferry (les ans), c’est à ce moment 96 %, hommes et femmes, qui savent lire et écrire.

79 Mais si la scolarité élémentaire est devenue la norme, l’accès aux études « supérieures » demeure le fait des classes urbaines aisées, celles-ci étant très couteuses : de 500 à 1 000 francs pour une année d’étude en externe dans un lycée, alors que les revenus des classes populaires se situent en moyenne autour de 5 000 francs. C’est encore plus vrai avec les « grandes écoles » : à l’École libre de sciences politiques, il faut compter près de 4 000 francs par année. De cette façon, les élites bourgeoises s’assurent de maintenir leur position. Au plan culturel, la tour Eiffel, construite pour l’exposition universelle de 1887, constitue un symbole de la puissance d’attraction de la France au tournant du XXe siècle. Car Paris est alors un peu le centre du monde culturel et les artistes y viennent de partout pour y travailler et s’y faire connaître, comme Modigliani ou Chagall.

80 Sur le plan scientifique et technique aussi, la France occupe une place de choix, avec les travaux de Louis Pasteur et de Marie et Pierre Curie, ou encore l’invention de l’automobile et du cinéma. Mais c’est en parallèle de cette culture d’élite que la société française connait un changement majeur : à l’ère des masses qui s’annonce, il faut une culture de masse. La société française connait un fort dynamisme culturel au cours de la période 1870 et 1914, particulièrement dans les premières années du XXe siècle, cette période ayant reçu a posteriori, après la guerre, l’appellation de Belle Époque mettant en évidence une réalité, alors que l’économie connait une forte expansion et que la France vit de mieux en mieux, malgré les disparités mentionnées. Ce n’est pas une société de consommation, ce n’est pas une société des loisirs, mais les transformations commencent.

81 Le nombre de journaux explose, grâce à un lectorat potentiel de plus en plus nombreux : en 1914, on compte 250 quotidiens en France, dont le tirage combiné s’élève à 10 millions d’exemplaires. Pour Paris seulement, ces chiffres sont respectivement de 60 et 4 millions. Grâce entre autres à ce lectorat, le feuilleton populaire s’étend et donne naissance aussi au best-seller : de à 1914, les Fantomas de Marcel Allain et Pierre Souvestre sont vendus à 5 millions d’exemplaires. Il en est de même des Arsène Lupin de Maurice Leblanc. La culture populaire se déploie en dehors des formes littéraires, dans les bals populaires, les boîtes de nuit et les boîtes à chansons, alors que les classes urbaines plus bourgeoises fréquentent les théâtres de boulevard où Sacha Guitry triomphe déjà. La plus éclatante manifestation de l’attrait de la France, de sa puissance culturelle et de cette démocratisation du divertissement, c’est assurément le cinéma.

82 À la frontière de la technique et de l’art, le « cinématographe » nait officiellement à Paris en 1895, lors d’une présentation publique. À la veille de la guerre, plus de 90 % des productions cinématographiques dans le monde sont le fait de quelques sociétés françaises, dont Gaumont et Pathé.


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