LA TRANSPARENCE : L’UTOPIE DU NUMÉRIQUE ? Sidonie GALLOT & Lise VERLAET LERASS-Céric – EA 827 COSSI – 17 et 18 juin 2014 IAE Poitiers
De la transparence… à la vérité Caractère quasi-immatériel, évanescent ou translucide d’une forme dont la propriété est de laisser voir ce qui se trouve derrière (CNRTL) Selon le constructivisme, la perception et interprétation relevant d’un processus de construction sociale : la transparence n’existe pas en soi mais prend des caractéristiques selon le regard, elle est relative Pourtant le terme généralisé est aujourd’hui utilisé comme synonyme de sincérité et de vérité La transparence érigée en idéal de réalité : une utopie
Utopies et dystopies du numérique : entre secret et vérité Histoire des TIC : dualité, tension entre secret et partage, opacité et transparence, technologie de guerre et technologie de l’intelligence. Internet opère une transformation nos « habitus » Le réseau devient le symbole d’un idéal démocratique, d’un idéal de transparence, un « imaginaire Internet » nourrit d’idéaux politiques, démocratiques, culturels L’ « utopie de la transparence » est une injonction de participation à la société de l’information en imposant des logiques inscrites in fine dans une « utopie du numérique » traduite en « utopie de l’info-communication », portée par l’« utopie de la technique », érigée en utopie du social et traversées par l’idéal de transparence construit dans l’imaginaire collectif.
Internet : utopie d’un espace public transparent ? Plus que les autres médias internet alimente la culture civique et participe à l’espace public donnant un support « démocratique » à la « société de l’opinion » La communication politique est associée à l’opacité (combler l’horizon d’attente du public pour être réélu), qui ne peut-être éclaircie que grâce à l'intervention des professionnels de la médiation… Pour les journalistes, la « com. politique » est une parodie d’information transparente Web social favorise une information alternative qui redessine l’espace public via une information coopérative et « citoyenne » La symétrie des relations (Palo Alto) constitue-t-elle un gage de transparence? Illusoire de penser que cette information alternative et symétrique serait détentrice de la vérité simulacre d’espace public
Internet : utopie d’une cité marchande plus transparente ? Internet leur permet d’appréhender un environnement complexe, prendre les bonnes décisions et augmenter leur compétitivité (panopticon) Contreparties : Elles sont soumises au jugement des consommateurs (e-réputation) et sont contraintes d’intégrer des logiques de proximité et d’immédiateté avec leurs clients construction d’un lien durable « basé » sur la confiance et la RSE Elles sont aussi traquées et surveillées par leurs concurrents à l’affût d’informations sensibles et donc stratégiques Le réseau est devenu à la fois un instrument et une arène du marché global La stratégie web repose sur le choix des informations à communiquer pour éviter le mensonge… sans dire toute la vérité sorte à protéger leurs propres intérêts. Internet a surtout favorisé l’émergence d’ « infomédiaires » qui maîtrisent les technologies et régissent la Toile lesquels sont devenus des « partenaires » stratégiques des entreprises
Internet : utopie de vies plus transparentes ? Les internautes ont désormais recours aux stratégies marketing pour véhiculer leur « identité publique » (extimité) en prenant soin de travailler leur image afin d’élargir leur réseau et leur « zone de visibilité ». Les internautes sont conscients que s’exposer ainsi c’est prendre le risque de « perdre la face » et que cela peut avoir des conséquences sur toutes les sphères. L’individu, n’est plus maître de ses données ni de ses publications, ses échanges sont dès qu’ils sont déposés sur la Toile considérés comme publics. La position des géants et des infomédiaires sur ces questions sont sans appel : « s’il y a des choses que nous ne voudrions pas qu’elles se sachent peut être n’aurait-il pas fallu les faire » (Dvorak, 2009)
Pour conclure… Ainsi, l’utopie de la transparence serait « dans la posture » de celui qui communique et dans l’interprétation de celui qui perçoit L’info-communication dans sa dimension digitale relève davantage d’une forme d’exploitation, d’une mise en scène Le numérique pousse à son paroxysme la métaphore du théâtre de Goffman, dès lors n’est-il pas judicieux de penser que la définition du terme « transparence » appliquée au Web social serait finalement celle du cinéma ? Soit « Un procédé consistant à projeter par derrière sur un écran transparent un plan qui sert de décor et à filmer une scène jouée devant cet écran… » (CNRTL).