Co-créer, pour quoi ? Justifications et imaginaires socio-techniques sous-tendant une nouvelle vague de participation publique en sciences et technologies Hadrien Macq – Université de Liège Cinquièmes journées doctorales du GIS « Participation du public, décision et démocratie participative » Tours, 12 janvier 2018

La participation en sciences et technologies Années 1970-2000 : exercices participatifs, délibératifs. Inclusion de publics dans des processus de prise de décision. Enrichir la démocratie, prévenir les crises sociotechniques. Recherche de légitimité. Depuis les années 2010, émergence d’exercices participatifs d’inclusion de publics dans des processus de fabrique de savoir et d’innovation  « Co-création ».

Les pratiques de co-création Sciences citoyennes/participatives, innovation ouverte, design participatif, … Living Labs, Fab Labs, Hackerspaces, Makerspaces, … Analyses de la nature et qualité des savoirs et innovations produits… Qu’en est-il des constructions politiques produites ? De la nature participative de ces exercices ? Du lien à la démocratie ?

Problématique Connecter les pratiques de co-création aux espaces (institutionnels) dans lesquels elles s’inscrivent Quelle(s) valeur(s) acquièrent-elles ? Comment sont-elles justifiées par les autorités qui les promeuvent ? Analyse des discours dans deux contextes : Commission Européenne et Région Wallonne Documents (officiels et non-officiels) Entretiens semi-directifs avec personnel politique et de terrain (6/9)

Cadre conceptuel Pratiques de co-création comme « technologies de démocratie » (Laurent, 2011, 2012, 2017) Analyser la valeur des technologies de démocratie pour contribuer à l’analyse des démocraties contemporaines Influence des représentations sociales et des cultures politiques  Co- production de la participation et du contexte dans lequel elle s’insère Importance des imaginaires sociotechniques Etablissent une manière dominante de concevoir le futur et génèrent des répartitions de valeur et de pouvoir, façonnent les agendas politiques.

La co-création à la Commission Européenne Tournant 2000-2010, changement de discours sur la participation 2014: C. Moedas  Nouvelle stratégie, promotion de l’ouverture des processus de recherche et d’innovation Deux grandes justifications : La co-création permet de produire de la science et de l’innovation enrichies, meilleures. « Les grands challenges sociétaux qui sont devant nous auront bien plus de chances d’être résolus si tous les acteurs sociétaux (…) travaillent ensemble durant tout le processus de recherche et d’innovation afin de mieux aligner à la fois le processus et ses résultats avec les valeurs, les besoins et les attentes de la société européenne » (European Commission, 2012)

La co-création à la Commission Européenne Tournant 2000-2010, changement de discours sur la participation 2014: C. Moedas  Nouvelle stratégie, promotion de l’ouverture des processus de recherche et d’innovation Deux grandes justifications : La co-création permet de produire de la science et de l’innovation enrichies, meilleures. La co-création permet de relancer la croissance économique dans l’UE. « Nous devons embrasser le changement – essayer de trouver de nouvelles choses et être prêts à prendre des risques – si nous voulons que la recherche et l’innovation européennes restent au premier plan de la modernité et de la croissance économique » (Moedas, 2015)

La co-création en Région Wallonne 2010: J.-C. Marcourt, Ministre de l’Economie et des Technologies Nouvelles  Programme-cadre Creative Wallonia, promotion de la créativité et du décloisonnement des processus d’innovation Deux grandes justifications : La co-création participe d’une plus grande égalité sociale et de la démocratisation des processus d’innovation. « … donc c’est mettre les gens en capacité, cette notion d’empowerment, parce que tout le monde est créatif » (Bernard Dupuis, communication personnelle, mai 2017) « … et donc [c’est] comment tu démocratises l’innovation ? Comment tu la rends accessible à tout ce territoire pour qu’il soit à l’origine de la démarche d’innovation ? » (Marguerite François, communication personnelle, avril 2017)

La co-création en Région Wallonne 2010: J.-C. Marcourt, Ministre de l’Economie et des Technologies Nouvelles  Programme-cadre Creative Wallonia, promotion de la créativité et du décloisonnement des processus d’innovation Deux grandes justifications : La co-création participe d’une plus grande égalité sociale et de la démocratisation des processus d’innovation. La co-création permet de stimuler l’innovation, clé du succès économique de la Wallonie. « - C’est quoi la Wallonie de demain si tout le monde est créatif ?   - Elle permet d'être plus compétitive, je pense qu'on reste dans le milieu économique et donc, oui, effectivement, elle permet d'avoir un poids plus important sur la scène internationale et donc permettre à nos entreprises de mieux se développer et tout ce qui en découle, donc création d'emplois, création de valeur. » (Damien Mottet, avril 2017)

Commission Européenne Justifications de la co-création Approche comparée Commission Européenne Région Wallonne Justifications de la co-création Amélioration qualitative de la connaissance et de l’innovation produite (responsabilité, résolution des grands challenges) Établissement d’une société plus démocratique et égalitaire Augmentation quantitative de la connaissance et de l’innovation produites  Croissance économique Redynamisation de l’innovation sur le territoire  Succès économique de la région

Conclusion Les imaginaires éclairent les raisons pour lesquelles la co-création acquiert de la valeur dans un contexte donné. La co-création est sous-tendue, notamment, par d’importantes promesses économiques Comment les discours se traduisent-ils dans les pratiques ? Place pour perspectives alternatives ?