Les pouvoirs et devoirs des policiers face à un état mental perturbé Du Code criminel à P-38.001 7 novembre 2016 Me Maxime Laroche
R. c. Grant, [2009] 2 R.C.S. 353, par. 133 « Si la police n’est pas tenue d’entreprendre une réflexion juridique au sujet de précédents contradictoires, elle doit cependant connaître l’état du droit ».
Le but de cette présentation : Mieux comprendre les pouvoirs et devoirs des policiers dans le contexte d’état mental perturbé… ...et comprendre les limites, les risques, les forces et faiblesses de ces moyens.
Choix de l’intervention? Lois pénales Pouvoirs de common law / Loi sur la police Consentement Loi P-38.001
Code criminel et al. Code de procédure pénale - Droit pénal statutaire - Règlementation municipale
Code criminel et al. Pour appliquer le Code criminel, il faut (normalement) qu’il y ait une infraction. Pour que les policiers puissent intervenir, ils doivent avoir un pouvoir d’arrestation. Or, les policiers n’ont pas un pouvoir d’arrestation illimité. Ils peuvent procéder à une arrestation s’ils ont un mandat d’arrestation, et parfois sans mandat.
Donc, on ne parle pas d’une intervention immédiate. Code criminel et al. Pour avoir un mandat, le policier doit d’abord faire un dossier d’enquête complet et soumettre sa « demande d’intenter des procédures » au bureau local du Directeur des poursuites criminelles et pénales. Les procureurs envisageront par la suite la possibilité d’intenter des procédures. Donc, on ne parle pas d’une intervention immédiate.
Code criminel et al. En ce qui a trait aux pouvoirs d’arrestation sans mandat, ils ne sont pas absolus. Tout dépend de la catégorie de l’infraction et des circonstances du cas.
Code criminel et al. Qui dit arrestation ne dit pas nécessairement détention et arrêt d’agir immédiat. Encore une fois, cela dépend de l’infraction en cause et des critères d’intérêts publics nécessaires s’il y a lieu.
Processus judiciaire criminel. Code criminel et al. Processus judiciaire criminel. Processus d’autorisation par le procureur Directives ACC-3 à ACC-5 Comparution et divulgation de la preuve Enquête sur remise en liberté (*) Enquête préliminaire (*) Procès Représentations sur la peine
Code criminel et al. Troubles mentaux 16 (1) La responsabilité criminelle d’une personne n’est pas engagée à l’égard d’un acte ou d’une omission de sa part survenu alors qu’elle était atteinte de troubles mentaux qui la rendaient incapable de juger de la nature et de la qualité de l’acte ou de l’omission, ou de savoir que l’acte ou l’omission était mauvais. Présomption (2) Chacun est présumé ne pas avoir été atteint de troubles mentaux de nature à ne pas engager sa responsabilité criminelle sous le régime du paragraphe (1); cette présomption peut toutefois être renversée, la preuve des troubles mentaux se faisant par prépondérance des probabilités. Charge de la preuve (3) La partie qui entend démontrer que l’accusé était affecté de troubles mentaux de nature à ne pas engager sa responsabilité criminelle a la charge de le prouver.
a) déterminer l’aptitude de l’accusé à subir son procès; Code criminel et al. Évaluation 672.11 Le tribunal qui a compétence à l’égard d’un accusé peut rendre une ordonnance portant évaluation de l’état mental de l’accusé s’il a des motifs raisonnables de croire qu’une preuve concernant son état mental est nécessaire pour : a) déterminer l’aptitude de l’accusé à subir son procès; b) déterminer si l’accusé était atteint de troubles mentaux de nature à ne pas engager sa responsabilité criminelle en application du paragraphe 16(1) au moment de la perpétration de l’infraction reprochée; […]
a) déterminer l’aptitude de l’accusé à subir son procès; Code criminel et al. Évaluation 672.11 Le tribunal qui a compétence à l’égard d’un accusé peut rendre une ordonnance portant évaluation de l’état mental de l’accusé s’il a des motifs raisonnables de croire qu’une preuve concernant son état mental est nécessaire pour : a) déterminer l’aptitude de l’accusé à subir son procès; b) déterminer si l’accusé était atteint de troubles mentaux de nature à ne pas engager sa responsabilité criminelle en application du paragraphe 16(1) au moment de la perpétration de l’infraction reprochée; […]
Code criminel et al. Traitement 672.19 L’ordonnance d’évaluation ne peut autoriser le traitement, notamment le traitement psychiatrique, de l’accusé ou ordonner que celui-ci s’y soumette, sans son consentement.
Évaluation Inaptitude à subir son procès CETM (Ré-évaluation) Code criminel et al. Évaluation Inaptitude à subir son procès CETM (Ré-évaluation) Verdict de non-responsabilité criminelle Déclaration de culpabilité (ou acquittement) Détermination de la peine
Intervention sans ordonnance judiciaire Intervention en vertu d’une ordonnance de la Cour du Québec « [26] Rappelons que la Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elle-même ou pour autrui est une loi à caractère social et de nature préventive, dont le but est essentiellement de protéger les personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui. La garde en établissement constitue une exception aux droits fondamentaux que sont certains droits de la personnalité, dont celui de l’intégrité de la personne et de la liberté.
Intervention sans ordonnance judiciaire POUVOIR DU POLICIER – Art. 8 Un agent de la paix peut, sans l’autorisation du tribunal, amener contre son gré une personne auprès d’un établissement visé à l’article 6: 1° à la demande d’un intervenant d’un service d’aide en situation de crise qui estime que l’état mental de cette personne présente un danger grave et immédiat pour elle-même ou pour autrui; 2° à la demande du titulaire de l’autorité parentale, du tuteur au mineur ou de l’une ou l’autre des personnes visées par l’article 15 du Code civil, lorsqu’aucun intervenant d’un service d’aide en situation de crise n’est disponible, en temps utile, pour évaluer la situation. Dans ce cas, l’agent doit avoir des motifs sérieux de croire que l’état mental de la personne concernée présente un danger grave et immédiat pour elle-même ou pour autrui. […]
Intervention sans ordonnance judiciaire CODE CIVIL DU QUÉBEC – ART.15 Lorsque l’inaptitude d’un majeur à consentir aux soins requis par son état de santé est constatée et en l’absence de directives médicales anticipées, le consentement est donné par le mandataire, le tuteur ou le curateur. Si le majeur n’est pas ainsi représenté, le consentement est donné par le conjoint, qu’il soit marié, en union civile ou en union de fait, ou, à défaut de conjoint ou en cas d’empêchement de celui-ci, par un proche parent ou par une personne qui démontre pour le majeur un intérêt particulier.
Intervention sans ordonnance judiciaire Lorsque le médecin donne son aval pour la garde préventive Durée maximale de 72 heures Aucun traitement sans le consentement de la personne
Intervention sans ordonnance judiciaire Devoirs du policier Art. 14 L’agent de la paix qui agit en vertu de l’article 8 ou la personne qui, conformément à une ordonnance du tribunal, amène une personne auprès d’un établissement pour qu’elle soit gardée afin de subir une évaluation psychiatrique doit l’informer de ce fait, du lieu où elle est amenée et de son droit de communiquer immédiatement avec ses proches et un avocat. Il demeure responsable de cette personne jusqu’à ce que celle-ci soit prise en charge par l’établissement.
Intervention en vertu d’une ordonnance de la Cour du Québec CODE CIVIL DU QUÉBEC – Art. 27 – Garde provisoire S’il a des motifs sérieux de croire qu’une personne représente un danger pour elle-même ou pour autrui en raison de son état mental, le tribunal peut, à la demande d’un médecin ou d’un intéressé, ordonner qu’elle soit, malgré l’absence de consentement, gardée provisoirement dans un établissement de santé ou de services sociaux pour y subir une évaluation psychiatrique. Le tribunal peut aussi, s’il y a lieu, autoriser tout autre examen médical rendu nécessaire par les circonstances. Si la demande est refusée, elle ne peut être présentée à nouveau que si d’autres faits sont allégués. Si le danger est grave et immédiat, la personne peut être mise sous garde préventive, sans l’autorisation du tribunal, comme il est prévu par la Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui (chapitre P-38.001). - QCCA « Il doit (…) s'agir d'un danger important ou d'un potentiel de danger élevé. Le danger ainsi appréhendé n'a peut-être pas à être imminent (comme ce serait le cas lors d'une garde préventive régie par l'article 7 de la Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour eux-mêmes ou pour autrui), mais il doit certainement être sinon probable, du moins clairement envisageable. » ([1])
Intervention en vertu d’une ordonnance de la Cour du Québec CODE CIVIL DU QUÉBEC – Art. 30 – Garde en établissement La garde en établissement à la suite d’une évaluation psychiatrique ne peut être autorisée par le tribunal que si les deux rapports d’examen psychiatrique concluent à la nécessité de cette garde. Même en ce cas, le tribunal ne peut autoriser la garde que s’il a lui-même des motifs sérieux de croire que la personne est dangereuse et que sa garde est nécessaire, quelle que soit par ailleurs la preuve qui pourrait lui être présentée et même en l’absence de toute contre-expertise. « Il doit (…) s'agir d'un danger important ou d'un potentiel de danger élevé. Le danger ainsi appréhendé n'a peut-être pas à être imminent (comme ce serait le cas lors d'une garde préventive régie par l'article 7 de la Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour eux-mêmes ou pour autrui), mais il doit certainement être sinon probable, du moins clairement envisageable. » ([1])
Intervention en vertu d’une ordonnance de la Cour du Québec Il existe cependant une certaine problématique de la délimitation des pouvoirs des policiers dans le cas des ordonnances de la Cour. M.R. c. N.M., 2016 QCCQ 6935 Centre intégré de santé et de services sociaux de la Montérégie-Est c. S.T., 2016 QCCQ 411 « Il doit (…) s'agir d'un danger important ou d'un potentiel de danger élevé. Le danger ainsi appréhendé n'a peut-être pas à être imminent (comme ce serait le cas lors d'une garde préventive régie par l'article 7 de la Loi sur la protection des personnes dont l'état mental présente un danger pour eux-mêmes ou pour autrui), mais il doit certainement être sinon probable, du moins clairement envisageable. » ([1]) J.B. c. A.B., 2015 QCCQ 15747
Mission de la police – Article 48 Pouvoirs d’intervention en vertu de la Common Law
Mission de la police – Article 48 Les corps de police, ainsi que chacun de leurs membres, ont pour mission de maintenir la paix, l’ordre et la sécurité publique, de prévenir et de réprimer le crime et, selon leur compétence respective énoncée aux articles 50, 69 et 289.6, les infractions aux lois ou aux règlements pris par les autorités municipales, et d’en rechercher les auteurs. Pour la réalisation de cette mission, ils assurent la sécurité des personnes et des biens, sauvegardent les droits et les libertés, respectent les victimes et sont attentifs à leurs besoins, coopèrent avec la communauté dans le respect du pluralisme culturel. Dans leur composition, les corps de police favorisent une représentativité adéquate du milieu qu’ils desservent.
Common Law Exemple d’application – Appel 911 - R. c. Godoy, [1999] 1 R.C.S. 311 Deux agents de police ont reçu un appel du répartiteur radio au sujet d’un appel d’urgence au 911 provenant de l’appartement de l’accusé et dont la communication a été coupée avant que l’auteur ait pu parler. Ils sont arrivés à l’appartement de l’accusé et ont frappé à la porte. L’accusé a entrouvert la porte et, quand on lui a demandé si tout allait bien à l’intérieur, il a répondu qu’il n’y avait pas de problème. L’un des agents a demandé s’ils pouvaient entrer pour enquêter, mais l’accusé a essayé de fermer la porte. L’agent l’en a empêché et les quatre agents de police sont entrés dans la maison. L’agent a témoigné que dès qu’ils sont entrés, il a entendu une femme pleurer. Il a trouvé la conjointe de fait de l’accusé dans la chambre à coucher, recroquevillée en position fœtale et sanglotant. L’agent de police a remarqué une tuméfaction importante au-dessus de son œil gauche. Il a témoigné qu’elle a déclaré que l’accusé l’avait frappée.
Common Law Par conséquent, j’estime que l’importance du devoir qu’ont les agents de police de protéger la vie justifie qu’ils entrent par la force dans une maison afin de s’assurer de la santé et de la sécurité de la personne qui a composé le 911. L’intérêt que présente pour le public le maintien d’un système d’intervention d’urgence efficace est évident et est suffisamment important pour que puisse être commise une atteinte au droit à la vie privée de l’occupant.
Common Law À l’égard de personnes suicidaires, il a été reconnu dans plusieurs causes que les policiers ont le devoir de préserver la vie, même si la personne qui souhaite se donner la mort ne commet aucune infraction criminelle. Par exemple : R v. Arkinstall, 2013 SKPC 170 R. v. Kanji, 2008 ABPC 218
Consentement Code civil du Québec 26. Nul ne peut être gardé dans un établissement de santé ou de services sociaux, en vue d’une évaluation psychiatrique ou à la suite d’une évaluation psychiatrique concluant à la nécessité d’une garde, sans son consentement ou sans que la loi ou le tribunal l’autorise. Le consentement peut être donné par le titulaire de l’autorité parentale ou, lorsque la personne est majeure et qu’elle ne peut manifester sa volonté, par son mandataire, son tuteur ou son curateur. Ce consentement ne peut être donné par le représentant qu’en l’absence d’opposition de la personne.
Consentement Les qualités du consentement 10. Toute personne est inviolable et a droit à son intégrité. Sauf dans les cas prévus par la loi, nul ne peut lui porter atteinte sans son consentement libre et éclairé. 11. Nul ne peut être soumis sans son consentement à des soins, quelle qu’en soit la nature, qu’il s’agisse d’examens, de prélèvements, de traitements ou de toute autre intervention. Sauf disposition contraire de la loi, le consentement n’est assujetti à aucune forme particulière et peut être révoqué à tout moment, même verbalement. […]
Choix de l’intervention? Lois pénales Pouvoirs de common law / Loi sur la police Consentement Loi P-38.001
Les corps de police, ainsi que chacun de leurs membres, ont pour mission de maintenir la paix, l’ordre et la sécurité publique, de prévenir et de réprimer le crime et, selon leur compétence respective énoncée aux articles 50, 69 et 289.6, les infractions aux lois ou aux règlements pris par les autorités municipales, et d’en rechercher les auteurs. Pour la réalisation de cette mission, ils assurent la sécurité des personnes et des biens, sauvegardent les droits et les libertés, respectent les victimes et sont attentifs à leurs besoins, coopèrent avec la communauté dans le respect du pluralisme culturel. Dans leur composition, les corps de police favorisent une représentativité adéquate du milieu qu’ils desservent.
Collaboration, la clé du succès. Quelques exemples au Québec : Tribunaux criminels spécialisés en santé mentale (projets-pilotes) Escouades mixtes (policiers/ressources spécialisées) Ex. : Escouade EMRII de Montréal