Dr Dan VELEA Hôpital Marmottan Paris

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Transcription de la présentation:

Dr Dan VELEA Hôpital Marmottan Paris Identification des comportements toxicomanogènes et les facteurs de risque et vulnérabilité Dr Dan VELEA Hôpital Marmottan Paris

Comportements de consommation Expérimentateurs Usage occasionnel Usage récréatif Usage régulier Usage nocif (abusif) Dépendance

L'usage expérimental L'usage expérimental est un essai ponctuel, l'individu cherchant à explorer lui-même les effets de la substance, à titre de curiosité. C'est une consommation en général unique et sans lendemain.

L'usage occasionnel L'usage occasionnel est le recours au produit dans des circonstances particulières, usage convivial par exemple dans le cas du cannabis et ecstasy. L'individu recherche une sensation de plaisir, un état de bien-être, d'apaisement ou de désinhibition.

L’usage récréatif Certains consommateurs font un usage récréatif de la drogue. La consommation est souvent groupale, pendant les loisirs (cannabis, ecstasy, ou cocaïne). La recherche de plaisir est au premier plan des motivations des consommateurs. L’usage récréatif n'a pas dans l’immensité des cas des conséquences sur les activités socio-professionnelles. La recherche de sensation, la convivialité, l’appartenance à un groupe, la transgression des interdits, les rites d’initiation.

L'usage régulier L'usage régulier est au moins quotidien. Il implique l'existence d'une dépendance psychique. En l'absence de dépendance physique, il n'y a pas de syndrome de sevrage. L'usage quotidien perd en général son caractère convivial. L’utilisation du produit est effectuée pour lutter contre une tristesse importante, ou contre des manifestations anxieuses. Il s'agit d'une tentative d'automédication.

Utilisation nocive pour la santé (C.I.M.10) Mode de consommation d'une substance psychoactive préjudiciable à la santé ; complications être physiques ou psychiques. Le diagnostic repose sur des preuves manifestes que l'utilisation d'une ou plusieurs substances a entraîné des troubles psychologiques ou physiques. Ce mode de consommation donne souvent lieu à des critiques et a souvent des conséquences sociales négatives. La désapprobation par autrui, ou par l'environnement culturel, et les conséquences sociales négatives ne suffisent toutefois pas pour faire le diagnostic.

Selon l’OMS la dépendance se définit comme un « état psychique et parfois physique, résultant de l'interaction entre un organisme vivant et une substance psychoactive caractérisé par des réactions comportementales et autres, qui comportent toujours une compulsion à prendre la substance de façon continue ou périodique de façon à ressentir ses effets psychiques et parfois éviter le sevrage. La dépendance apparaît ainsi comme le résultat des effets pharmacologiques des produits psychoactives additifs et de l'interaction avec l'équipement neuro-biologique de l'organisme ».

Critères de la dépendance selon DSM-IV La dépendance est un mode d’utilisation inapproprié d’une substance, entraînant une détresse ou un dysfonctionnement cliniquement significatif, comme en témoignent trois (ou plus) des manifestations suivantes, survenant à n’importe quel moment sur la même période de douze mois : tolérance, définie par l’une ou l’autre des manifestations suivantes : Besoin de quantités nettement majorées des la substance pour obtenir une intoxication ou l’effet désiré ; Effet nettement diminué en cas d’usage continu de la même quantité de substance.  

sevrage, comme en témoigne l’une ou l’autre des manifestations suivantes : Syndrome de sevrage caractéristique de la substance ; La substance est prise dans le but de soulager ou d’éviter les symptômes de sevrage ; Substance souvent prise en quantité supérieure ou sur un laps de temps plus long qu’envisagé ; Désir persistant ou efforts infructueux pour réduire ou contrôler l’utilisation de la substance ; Temps considérable passé à se procurer la substance, la consommer ou récupérer de ses effets ; Les activités sociales, occupationnelles ou les loisirs sont abandonnées ou réduites en raison de l’utilisation de la substance ; Poursuite de l’utilisation de la substance malgré la connaissance de l’existence d’un problème physique ou psychologique persistant ou récurrent déterminé ou exacerbé par la substance.  

Critères de l’addiction GOODMAN (1990) A. Impossibilité de résister aux impulsions à réaliser ce type de comportement. B. Sensation croissante de tension précédant immédiatement le début du comportement. C. Plaisir ou soulagement pendant sa durée. D. Sensation de perte de contrôle pendant le comportement. E. Présence d’au moins cinq des neuf critères suivants :

Préoccupation fréquente au sujet du comportement ou de sa préparation. Intensité et durée des épisodes plus importantes que souhaitées à l’origine. Tentatives répétées pour réduire, contrôler ou abandonner le comportement. Temps important consacré à préparer les épisodes, à les entreprendre ou à s’en remettre. Survenue fréquente des épisodes lorsque le sujet doit accomplir des obligations professionnelles, scolaires ou universitaires, familiale ou sociales. Activités sociales, professionnelles ou récréatives majeures sacrifiées du fait du comportement. Perpétuation du comportement, bien que le sujet sache qu’il cause ou aggrave un problème persistant ou récurrent d’ordre social, financier, psychologique ou psychique.

F. Tolérance marquée: besoin d’augmenter l’intensité ou la fréquence pour obtenir l’effet désiré, ou diminution de l’effet procuré par un comportement de même intensité. G. Agitation ou irritabilité en cas d’impossibilité de s’adonner au comportement.

Le schéma trivarié des addictions

1 : Pharmacologie, prohibition... 2 : Psychanalyse, psychobiologie... 3 : Sociologie, théories de l'étiquetage... 4 : "Modèles de maladie"... 5 : Abords culturels, historiques... 6 : Intégration, déviance, systémisme...

Facteurs de risque et vulnérabilité en toxicomanie La relation entre facteurs de risque et de vulnérabilité Interaction de trois facteurs : - facteurs de risque liés aux produits (P) - facteurs individuels de vulnérabilité (I) - facteurs de risque environnementaux (E)

Risque Emprunté à l'italien « risco » référé au latin « resecum », il signifie « couper » de là écueil puis « risque que court une marchandise en mer ». Issu du latin « rixare » (qui a donné rixe), se quereller, de ce fait résister, il conduit à l'idée de danger. Le risque serait un danger potentiel, révélé ou réveillé par un acte et/ou une représentation.

Facteurs de risque liés aux produits pouvoir toxicomanogène (dépendance et tolérance) des produits risque d’apparition de complications sanitaires, psychologiques et sociales statut social du produit

PRODUIT DEPENDANCE PSYCHIQUE DEPENDANCE PHYSIQUE TOLERANCE OPIACES Opium Morphine Héroïne   ++++ STIMULANTS Cocaïne  HALLUCINOGENES LSD 25 Mescaline Psylocibine Cannabis + ++    

Facteurs individuels de vulnérabilité Emprunté au latin « vulnérabilis » « qui peut être blessé », lui-même de « vulnus. Vulneris » ‑ c'est à dire blessure‑ la vulnérabilité traduit, dans le langage commun, une faiblesse, une déficience, un manque, une grande sensibilité spécifique à partir desquels l'intégrité d'un être, d'un lieu, se trouve menacée d'être détruite, diminuée, altérée. Freud utilise la notion de « série complémentaire » (Erganzungsreihe) pour désigner une série de facteurs endogènes et exogènes. L'idée d'une multiplicité de facteurs, liés entre eux, mais de valeurs différentes selon le cas, pourrait expliquer la « vulnérabilité » à un état psychologique spécifique.

Facteurs individuels de vulnérabilité - facteurs génétiques - facteurs biologiques Les études génétiques portent sur les neurotransmetteurs, en particulier la dopamine et le système de récompense dopaminergique. D’autres voies sont explorées – opioïdes, gabaergiques, sérotoninergiques. Des altérations au niveau des gènes codant pour les récepteurs dopaminergiques D2 et D4, et sérotoninergiques 5-HTTLPR pourraient ainsi être à l’origine du « syndrome de déficience de la récompense ».

Facteurs individuels de vulnérabilité - facteurs psychologiques - facteurs psychiatriques

COMPORTEMENTS - instabilité, impulsivité/agressivité, troubles des conduites et interactions sociales (bagarres, destruction des biens, pyromanie, violence, cruauté, conduite à risque) - troubles affectifs (humeur triste, anhédonie, faible estime de soi, auto-dépréciation, timidité, crises de larmes, repli sur soi, idées suicidaires, difficultés relationnelle et de résolution des problèmes interpersonnels) - niveau élevé de recherche de sensations (Sensation Seeking Scale -Zuckerman), de nouveauté, faible évitement du danger COMORBIDITE PSYCHIATRIQUE - troubles anxieux (attaques paniques, phobies et peurs) - troubles des conduites - TDAH - troubles du sommeil (insomnie, réveil nocturne, cauchemars) - troubles des conduites alimentaires (anorexie/boulimie) - troubles psychosomatiques (maux de tête, migraines, spasmophilie)

Le modèle psychobiologique de Clonninger Ce modèle prend en compte les dimensions de tempérament et de caractère de l’individu. Le tempérament correspond aux composantes héritables, d’expression précoce qui interviennent dans l’apprentissage par des processus inconscients. Les dimensions du tempérament sont : - Recherche de nouveauté - Évitement du danger - Dépendance à la récompense - Persévérance

Le modèle psychobiologique de Clonninger Le caractère traduit la réorganisation des concepts de l’individu en réaction au vécu de l’expérience. Les dimensions du caractère sont : - Détermination – la capacité d’un individu à contrôler et adapter son comportement afin de s’ajuster à une situation donnée. - Coopérativité – un score élevé correspond à une tendance à l’empathie, à la compassion et un score bas correspond à l’intolérance, désintérêt social, sentiment d’hostilité. - Transcendance – illustre la capacité du sujet d’appartenance à un tout.

Facteurs liés à l’environnement - facteurs sociaux (exposition précoce aux produits, marginalité) - facteurs familiaux (consommation des produits, dysfonctionnements familiaux) - le rôle de l’entourage - facteurs socio-culturels (immigration, acculturation)

FAMILIAUX - relations violentes, conflictuelles - comorbidité psychiatrique familiale - événements de vie traumatiques (deuils, séparations, abus sexuels, incestes, grossesses non-désirées) SCOLAIRE - absentéisme, retard - baisse des résultats - refus scolaire - phobie scolaire PAIRS - entourage qui consomme régulièrement - rites d’initiation - marginalisation

Facteurs de protection - niveau élevé d’intelligence - capacité de résoudre les problèmes - compétences sociales - estime de soi - soutien familial adapté - compétences scolaires

Résilience Le terme de résilience est utilisé dans le domaine de la physique pour traduire la résistance de matériaux à la pression. Fritz Redl a introduit le concept d’« ego resilience » en 1969. Au milieu des années 1980, plusieurs ouvrages consacrés à la « résilience » ont été publiés, analysant le destin réussi d’individus que leur enfance catastrophique semblait pourtant promettre à un sombre avenir Les manières de lutte contre les situations traumatiques sont nombreuses : construction d’un monde imaginaire, échappatoire de la réalité, prise de distance de l’événement traumatique ou la découverte et la construction des solutions d’adaptation.

Syndrome général de comportements à risque (Jessor, 1998) usage de substances psychoactives licites ou illicites les comportements dangereux sur la route (vitesse, alcool et drogues, non-port de la ceinture et du casque) rapports sexuels non-protégés fugues conduites ordaliques (jeu du foulard, roulette russe) et suicidaires (en 1999, 604 suicidés avaient entre 15 -24 ans) pratique des sports extrêmes  L’addiction au risque (Michel, 2003)

Ordalie (Valleur, Charles-Nicolas) L’ordalie est le terme qui désigne le jugement de Dieu et implicitement l’acceptation et la condamnation des actes. La conduite ordalique désigne le fait pour un sujet de s’engager de façon plus ou moins répétitives dans des épreuves comportant un risque, souvent mortel. Le fantasme ordalique serait le fait de se remettre à l’Autre, au hasard, à la chance, pour le maîtriser ou être l’élu, et par sa survie de prouver tout son droit à la vie, son caractère exceptionnel.

NDE Near Death Experiences Dimensions supérieures des conduites ordaliques, recherche de sensations très fortes, proches de la mort clinique. Expérimentations avec des drogues de la classe kétamine, les flatliners.

Dimensions de personnalité et addictions Personnalité antisociale (incapacité de se conformer aux normes sociales, impulsivité, irritabilité, agressivité, irresponsabilité persistante, l’absence de remords et de critique de ses actes) Personnalité borderline (instabilité des relations interpersonnelles, alternance entre l’idéalisation excessive et la dévalorisation de l'image de soi, impulsivité, peur d’abandon, répétition de comportements ou de menaces suicidaires, sentiments chroniques de vide. Personnalité histrionique (réponses émotionnelles excessives, quête d'attention, les interactions avec autrui sont caractérisées par un comportement de séduction, dramatisation, théâtralisme.

Le stress, facteur vulnérabilisant Le stress apparaît comme un important facteur vulnérabilisant des addictions. Le processus de sensibilisation peut être initié mais aussi entretenu par l’usage de substances psychoactives et/ou les facteurs stressants. Ainsi, certaines drogues (cocaïne, LSD, ecstasy), peuvent accélérer le processus de sensibilisation. Dans cette situation, ces consommations créés un cercle vicieux, dans lequel la consommation initiale ayant comme objectif l’apaisement d’un état de tension interne, entraîne finalement d’autres consommations (de la même substance ou des substances réputées calmantes) qui cherchent à calmer le nouveau état de stress.

L’addiction, forme d’adaptation au stress La désorganisation sociale apparaît comme un précurseur de l'addiction. Le concept d'intégration psychosociale fait référence aux interactions entre les expériences individuelles et de groupe, et la réaction du groupe (acceptation, rejet) face aux individus. Une désorganisation oblige les personnes à lutter pour la restauration de l'intégration psychosociale ; dans certaines situations cette restauration semble impossible et nécessite la création de conduites d'adaptation, conduites qui représentent des substituts de modes de vie (addiction, marginalité, criminalité, replis sur soi, troubles anxio-dépressifs, tentatives de suicides).

L'apparition et le maintien de l'addiction représente une forme d'adaptation aux conditions difficiles de vie, aux stress et sollicitations diverses. La centration sur les substances psychoactives (héroïne, alcool, cocaïne, cannabis), ou sur les addictions « silencieuses », comportementales (jeu pathologique, addiction sexuelles, cyberdépendance, ergomanie) sont des manières adaptatives en rapport avec le culte de la performance, aux sollicitations compétitives, au syndrome de burn-out, aux épuisements et insatisfactions récurrentes

L'usage régulier de certaines substances psychoactives est souvent rencontré chez des personnes qui sont confrontées aux difficultés persistantes d'adaptation au stress. Chez ces personnes, la seule manière évidente de faire face et de s'en sortir « coping » est le recours aux drogues dites de « confort » (héroïne, cocaïne, cannabis ou médications psychoactives) ou aux comportements addictifs. On assiste ainsi à l'apparition d'un cercle fermé dans lequel plus on a recours à ces produits, plus la capacité de s'en sortir est diminuée. Dans ces conditions la capacité d'assumer des responsabilités individuelles diminue, les personnes focalisent de moins en moins sur les problèmes initiaux et les facteurs stressants qui les amènent à consommer ces produits s'accentuent de plus en plus.

Recherche des solutions : Stress quotidien : - Insuffisance – défaillance de l’intégration - Crise socio-économique - Crise familiale - Manque de l’estime de soi - Environnement hostile Adaptations : - Addiction aux substances illicites ou licites - Jeu pathologique, sexualité compulsive, cyberaddiction - Criminalité - Refuge mystique ou sectaire