Accompagner, punir, Instruire : quelle pédagogie pour quel partenariat

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Transcription de la présentation:

Accompagner, punir, Instruire : quelle pédagogie pour quel partenariat Accompagner, punir, Instruire : quelle pédagogie pour quel partenariat ? Quel partenariat pour quelle pédagogie ? Philippe Meirieu DU « Adolescents difficiles » Le 15 juin 2010

Plan : Introduction : une « société adolescente » qui se désinstitutionnalise face à des adolescents qui tentent de se construire I) Des institutions en recomposition et en tension II) Des acteurs en quête d’identité III) Un partenariat instituant Conclusion : un adolescent d’aujourd’hui

I) Des institutions en recomposition et en tension Les institutions policière et judiciaire, mauvaise conscience de la démocratie Des institutions nécessaires dès lors que le « pacte social » est constitutivement menacé. Des institutions qui désignent la brèche de l’idéal démocratique, par ailleurs indispensables. Des institutions qui doivent assumer leur fonction de normalisation. Des institutions qui, pour rester fidèles à l’idéal démocratique, doivent être capables d’être aussi des outils de prévention et d’éducation. Police et justice au cœur de la question de l’émergence du sujet Une tension inévitable : comprendre ou juger Une exigence fondatrice : imputer pour anticiper l’émergence d’un sujet libre

I) Des institutions en recomposition et en tension 2) L’institution thérapeutique à la rescousse d’une société en déficit de collectif et de symbolique L’inflation « psy » : « La société est malade, soignez la personne ! »… A l’opposé de la posture politique : « Le sujet est malade, soignez la société. » La « psy », pointe avancée du paradigme médical individualiste... Pour remplacer la perte d’encadrement relationnel et de repères symboliques. Mais, la « psy », nécessaire pour soigner la souffrance psychique : entendre les personnes, sauvegarder le potentiel d’humanité, créer des situations où la personne puisse prendre barre sur sa vie. L’institution thérapeutique au cœur de la question de l’émergence du sujet Une tension inévitable : étayage et désétayage Une exigence fondatrice : penser l’aide indissociablement du processus d’autonomisation

La zone proximale de développement selon Vygotsky Le sujet maîtrise un objectif, un savoir-faire, une capacité plus complexes (N2) de manière autonome. MOMENT T2 ZONE PROXIMALE DE DEVELOPPEMENT : ETAYAGE et DESETAYAGE Le sujet, à partir de ce qu’il est et sait faire (N1), peut accéder à un niveau supérieur de connaissances et de développement (N2), à condition d’être accompagné. MOMENT T1 Le sujet a des capacités identifiées dans un domaine précis, il sait faire quelque chose (N1).

ZONE PROXIMALE DE DEVELOPPEMENT ALLEGEMENT PROGRESSIF DE TOUTES LES AIDES AUTONOMISATION ACCOMPAGNEMENT PAR DES DISPOSITIFS EXPLICITES : SIUATIONS CONTRAINTES, AIDES ORGANISEES, ACCOMPAGNEMENT INDIVIDUALISE, etc…

I) Des institutions en recomposition et en tension 3) L’institution scolaire en quête d’un introuvable démocratisation Le projet de Comenius : « Omnes, omnia, omnium ». L’encyclopédisme guetté par le formalisme. La « pédagogie de la découverte », exigence et impasse ? « Tout autodidacte est un imposteur » (Ricoeur) et « On n’apprend bien que ce que l’on a appris soi-même » (Rogers). Transmettre une culture et permettre l’émancipation de la personne L’institution scolaire au cœur de la question de l’émergence du sujet Une tension inévitable : finalisation et formalisation Une exigence fondatrice : penser la transmission comme étant simultanément émancipation… Trois démarches : expérimentale, documentaire, épistémologique.

II) Des acteurs en quête d’identité 1) Le policier et le juge… Disent et mettent en œuvre « le droit » (comme condition de possibilité du collectif) Postulent le « sujet de droit » pour le faire advenir. 2) Le thérapeute… Accueille le sujet accidenté pour lui permettre de se reconstruire. Organise les conditions pour que le sujet de droit devienne sujet de fait. 3) Le professeur… Institue l’Ecole comme espace-temps spécifique où les rapports de forces laissent la place à la recherche de la précision, de la justesse, de la rigueur et de la vérité. Transmet au sujet de fait la culture qui lui permet de se penser comme sujet universel.

III) Un partenariat instituant 1) Un synchronisation illusoire… et peu souhaitable ! Les acteurs ne peuvent ni ajuster complètement leurs temporalités réciproques, ni s’articuler rigoureusement. S’ils y parvenaient, cela ne laisserait que peu de place au sujet pour émerger. 2) Une cohérence indispensable Pour que le policier, le juge, le thérapeute et le professeur travaillent ensemble à une véritable « éducation », ils doivent disposer d’un référent commun. Pour mettre en œuvre ce référent, ils doivent s’attacher à instituer des configurations éducatives associant : des contraintes fécondes, des ressources nécessaires, la possibilité de se mettre en jeu (« se mettre en je ») dans des projets unificateurs, l’assurance que l’on peut prendre des risques sans se mettre en danger, la perspective de « se faire œuvre de soi-même » en participant à un idéal qui donne sens à sa vie, par une véritable « formation à l’engagement ». Vers un véritable partenariat éducatif…

Qu’est-ce que l’éducation ? Une relation asymétrique, provisoire, médiatisée, qui crée des situations où contraintes et ressources permettent à la personne de se projeter au-delà de sa contingence et de s’instituer comme liberté réfléchie dans un collectif… Ces situations sont structurées autour de trois principes : surseoir, symboliser, s’associer pour élaborer le bien commun.

Qu’est-ce qu’un véritable partenariat éducatif ? Un partenariat éducatif va au-delà de… La simple communication d’informations, la mise en commun des « bonnes pratiques », la mise en œuvre d’une complémentarité des types d’interventions… Un partenariat éducatif est la construction collective de situations (pluri-factorielles) où la personne dispose des prises et des assurances requises pour s’engager et sortir, simultanément, de sa fragilité (en construisant ses équilibres internes) et de son errance (en construisant ses équilibres avec son environnement).

Conclusion… Un adolescent d’aujourd’hui : Perceval le Gallois, de Chrétien de Troyes (1180-1190)