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Le bonheur dans l’épicurisme antique

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Présentation au sujet: "Le bonheur dans l’épicurisme antique"— Transcription de la présentation:

1 Le bonheur dans l’épicurisme antique
Etude de la Lettre à Ménécée d’Epicure

2 INTRODUCTION  L’interrogation éthique des anciens : A quelles conditions pouvons-nous mener une vie authentiquement heureuse ? Il existent des manières de vivre qui ont plus de valeur et qui conduisent au bonheur, alors que d’autres conduisent au malheur. Suivre ses désirs de manière irréfléchie est la voie la plus sûre pour être malheureux. Pour trouver le bonheur il faut d’abord commencer par une réflexion philosophique sur le bonheur et ses conditions. C’est précisément ce que nous offre Epicure dans sa Lettre à Ménécée, une méthode du bonheur.

3 « Epicure et son école » En 323 : Service militaire à Athènes.
En 341 av. JC : Naissance d’Epicure sur l’île de Samos mais de parents Athéniens En 323 : Service militaire à Athènes. De 321 à 311 : Epicure rejoint à famille à Collophon et suit les enseignements philosophiques de Nausiphane, disciple de Démocrite. En 310 : Epicure commence à enseigner sa propre doctrine philosophique, d’abord à Mytilène puis à Lampsaque. En 306 : Epicure retourne à Athènes et s’y installe définitivement. Il y fonde son Ecole, le Jardin. En 270 : Mort d’Epicure à l’âge de 72 ans.

4 Selon Diogène Laërce (auteur du 3°siècle après JC) l’œuvre d’Epicure ne comprenait pas moins de 300 titres dont un De la Nature en 37 livres. De cette immense œuvre, il ne nous reste quasiment rien.   Les textes dont nous disposons sont ceux que Diogène Laërce restitue dans le livre 10 de ses 10 livres sur les vies et les sentences des philosophes illustres. La lettre à Hérodote qui traite de la physique. La lettre à Pytoclès qui traite des phénomènes célestes. La lettre à Ménécée qui traite de la conduite de la vie. Les maximes principales. Il s’agit de 40 sentences qui sont, sinon d’Epicure, du moins d’un disciple les ayant extraites de ses œuvres. Les sentences vaticanes. Il s’agit de 81 maximes découvertes en 1888 dans un manuscrit de la bibliothèque du Vatican.

5 Après la mort d’Epicure, l’épicurisme se diffusa dans tout le bassin méditerranéen et particulièrement à Rome où avec Lucrèce, il donna naissance à une des plus belles œuvres de la langue latine : De rerum natura.

6 « L’éthique épicurienne »
Dans cette Lettre adressée à son disciple Ménécée, Epicure rappelle les grands principes de son éthique. Comme toutes les éthiques antiques, l’épicurisme est d’abord un eudémonisme : le but suprême de l’existence humaine, c’est le bonheur.  C’est ensuite un hédonisme. Epicure identifie le bonheur au plaisir. Henri Matisse, Le bonheur de vivre

7 Mais, contrairement à une légende tenace, Epicure ne prône pas une vie de débauche.
Le bonheur réside dans un plaisir durable qui ne peut être trouvé qu’en menant une vie modérée et paisible. Tous les plaisirs ne sont donc pas à rechercher, tous les désirs ne sont pas à satisfaire. Seuls ceux en mesure de nous garantir un bonheur véritable doivent l’être. Il faut donc apprendre à distinguer les désirs nécessaires à la vie heureuse et les désirs superficiels et vide, à l’origine du malheur des hommes. Il faut donc apprendre à bien désirer.

8 « La structure de la Lettre à Ménécée »
Préambule : Différer de philosopher, c’est différer d’être heureux 1er moment : Se délivrer des craintes infondées qui troublent l’âme 1. La crainte des dieux 2. La crainte de la mort 2ème moment : Prendre soin de notre corps et de notre âme : apprendre à bien désirer 1. La classification des désirs 2. Le calcul des plaisirs 3. L’existence concrète : vie autarcique et vie modérée 4. Le sens véritable de l’éthique hédoniste 3ème moment : Philosopher pour atteindre la sagesse 1. Coïncidence de la vie vertueuse et de la vie de plaisir 2. La force du sage 3. Exhortation finale : la philosophie comme exercice spirituel

9 I. La philosophie comme médecine de l’âme
Etude du préambule (pp ) (Thème) La nécessité de philosopher (Question) Pourquoi et à quel moment de notre vie faudrait-il s’adonner à la philosophie ? (Thèse) Il faut philosopher à tous les âges de la vie, car elle est la condition préalable nécessaire au bonheur. Différer de philosopher, c’est différer d’être heureux. (Argument) La philosophie possède une fonction thérapeutique : elle est l’activité par laquelle on prend soin de son âme en vue d’être heureux. Or il n’est jamais trop tôt ni trop tard pour être heureux, donc il n’est jamais trop tôt ou trop tard pour philosopher.

10 (Structure) 1er moment du texte : la fonction thérapeutique de la philosophie « Qu’on ne remette pas la philosophie à plus tard parce qu’on est jeune, et qu’on ne se lasse pas de philosopher parce qu’on se trouve être vieux. Il n’est en effet, pour personne, ni trop tôt ni trop tard lorsqu’il s’agit d’assurer la santé de l’âme. Or celui qui dit que le moment de philosopher n’est pas encore venu, ou que ce moment est passé, est semblable à celui qui dit, s’agissant du bonheur, que le moment n’est pas encore venu ou qu’il est passé ». Dire qu’il est trop tôt ou trop tard pour philosopher est une absurdité pour Epicure, c’est se condamner sans s’en rendre compte au malheur, soit en repoussant toujours un peu plus le temps du bonheur, soit en considérant qu’il est désormais derrière soi. Or il n’y a pas d’âge pour être heureux, il faut donc s’adonner à la philosophie quelque soit son âge, dès maintenant. Comme on l’a vu dans l’introduction, comme les autres philosophies éthiques de l’antiquité, Epicure part d’un double constat : (1) Nous sommes, dans toutes nos actions, orientés vers le bonheur. Le bonheur est le sens de toute notre conduite. (2) Or, de fait, celui-ci, il nous est difficile de l’obtenir. Nous repoussons le bonheur dans un temps à venir, et chacun de nous meurt accablé d’occupation et de souci. SV14 : « Nous sommes nés une fois, il n’est pas possible de naître deux fois, et il faut n’être plus pour l’éternité : toi, pourtant, qui n’est pas de demain, tu ajournes la joie ; la vie périt par le délai et chacun de nous meurt affairé ». Nous remettons toujours à plus tard ce qu’il y a de plus important, le temps de la réflexion, de la méditation et du loisir. Nous sommes continuellement embarqué dans une vaine agitation qui nous fait oublier que « le temps de cette vie n’est qu’un instant » et que « l’état de la mort est éternel ». Nous recherchons notre bonheur, de manière irréfléchie, en nous jetant dans toutes les directions, sans ordre, ni méthode. Philosopher, c’est prendre le temps de la réflexion. AU lieu d’aller au bonheur spontanément en suivant le moindre de nos désirs, commençons par nous demander si l’on a jusqu’à présent suivi le bon chemin et si ce n’est pas le cas quelle voie sera alors à suivre. Organisons nos vies de façon méthodique, en suivant des principes qui nous permettrons d’accéder au bonheur à de façon certaine et non par hasard. La philosophie, comme toute autre activité, vise au bonheur. Mais la philosophie se distingue des autres activités en ce que, au lieu d’aller de l’avant, elle fait au contraire retour, par la réflexion, sur ces autres activités. Elle est une activité qui a pour charge de réfléchir sur les autres activités et de déterminer lesquelles sont susceptibles de nous conduire au bonheur. Elle substitue à une mauvaise méthode pour aller vers le bonheur, une bonne méthode. Elle est l’activité par excellence qui « procure la vie heureuse », elle est la condition préalable sans laquelle le bonheur est laissé au hasard ou à la chance.  SI la philosophie nous donne le bonheur, il faut donc philosopher tout de suite. Urgence de la philosophie. Différer de philosopher, c’est différer d’être heureux. Enjeu vital de l’acte de philosopher, est la condition du bonheur car garantit la santé de l’âme. SV 54 : « Il ne faut pas faire le philosophe, mais philosopher réellement ; car nous n’avons pas besoin d’une apparence de santé, mais de la santé véritable ».  Analogie entre philosophie et médecine. La philosophie doit avoir une finalité essentiellement pratique. N’est pas à concevoir comme une activité de production d’un ensemble de connaissance, rejet d’une conception cumulative du savoir qui dispense de l’attention et détourne de l’essentiel : la recherche du bonheur. La physique d’Epicure subordonnée au projet éthique. La connaissance théorique n’est utile que dans la mesure où celle-ci peut nous conduite à nous défaire des opinions fausses qui engendrent des désirs vains, et qui nous rendent malheureux. Le savoir philosophique doit avoir une vertu curative avant tout. « La philosophie est une activité qui procure, par les raisonnements et les discussions, la vie heureuse ». Pour Aristote, la philosophie est à elle-même sa propre fin. Ce que rejette Epicure, n’est pas une fin en soi. Vide est le discours du philosophe qui n’a pas quelque pouvoir de guérison.  La joie profonde de philosopher est la joie du passage de la maladie à la santé. La maladie de l’âme, les opinions fausses. Action purificatrice de la philosophie. Nous nous rendons malades nous-mêmes, nous nous empêchons d’être heureux. Or, pas de médecine sans remède. Le tétrapharmakos. Les maux dont nous délivre la philosophie : la crainte des dieux, la crainte de la mort, l’illimitation du désir et l’incapacité d’endurer la douleur, c’est-à-dire les causes du trouble de l’âme, lequel une fois ôté, reste le calme du bonheur. Mais un remède qu’on ne peut que s’administrer à soi-même. Il faut que chacun devienne philosophe, devienne son propre médecin. Le bonheur ne peut venir à chacun que de lui-même, par une modification de soi, qui résulte d’un travail sur soi. Le bonheur trouve son origine non dans l’avoir, ce que nous possédons, mais dans l’être, ce que nous sommes ou pouvons devenir. La pratique curative, thérapeutique qu’est la philosophie vaut pour tous les âges de la vie, que l’on soit jeune ou vieux.  Ceci permet de mieux comprendre la réponse qu’Epicure donne à celui qui objecterait que la philosophie n’est bonne qu’à un certain âge de la vie. (1) Il n’est jamais trop tôt : urgence de philosopher, il ne faut pas attendre, ne pas croire qu’il faut attendre un âge mûr pour philosopher. (2) Il n’est jamais trop tard : ne pas penser que la philosophie est tout juste bonne pour les jeunes gens, ceux qui ont du temps, qui n’ont pas encore de rôle important à jouer dans la société, etc.

11 2ème moment du texte : la philosophie apporte le bonheur aussi bien au jeune homme qu’au vieillard
« Par conséquent, doivent philosopher aussi bien le jeune que le vieillard, celui-ci afin qu’en vieillissant il reste jeune sous l’effet des biens, par la gratitude qu’il éprouve à l’égard des événements passés, et celui-là, afin que, tout jeune qu’il soit, il soit aussi un ancien par son absence de crainte devant ce qui va arriver ». Toutefois, différence d’attitude entre le jeune homme et le vieillard. Ne sont pas complètement à égalité devant le bonheur. Le jeune homme se trouve devant un avenir incertain. Il espère et il craint. Il y a donc là une crainte dont il a à se délivrer pour atteindre l’aphobie, et que n’éprouve pas le vieillard. Réminiscence affective pour le vieillard, composante de son bonheur. Cette pratique de la ressuscitation du souvenir se fonde sur l’idée qu’avoir du plaisir, c’est se préparer à jouir pour toute la vie. Se ressouvenir d’un plaisir constitue encore un plaisir. Mémoire comme réserve de bonheur.

12 Conclusion : L’exhortation d’Epicure
3ème moment du texte : Philosopher, c’est méditer sur les moyens du bonheur. « Il faut donc consacrer ses soins à ce qui produit le bonheur, tant il est vrai que, lorsqu’il est présent nous avons tout, et que lorsqu’il est absent, nous faisons tout pour l’avoir ». Conclusion : L’exhortation d’Epicure « Les recommandations que je t’adresse continuellement, mets-les en pratique et fais-en l’objet de tes soins, reconnaissant en elles distinctement les éléments du bien vivre ».

13 Commentaire du texte Epicure part d’un double constat :
(1) Nous sommes, dans toutes nos actions, orientés vers le bonheur (2) Mais il nous est difficile de l’obtenir. Pourquoi ? Nous recherchons notre bonheur de façon irréfléchie, en multipliant les désirs et les occupations. Mais en faisant cela, sous repoussons continuellement le bonheur dans un temps à venir, nous remettons à plus tard ce qu’il y a de plus important, le temps de la réflexion. « Nous sommes nés une fois, il n’est pas possible de naître deux fois, et il faut n’être plus pour l’éternité : toi, pourtant, qui n’est pas de demain, tu ajournes la joie ; la vie périt par le délai et chacun de nous meurt affairé » SV 14

14 Philosopher, c’est prendre le temps de la réflexion
Elle est l’activité par excellence qui « procure la vie heureuse » Elle est la condition préalable nécessaire sans laquelle le bonheur est laissé au hasard ou à la chance Si la philosophie nous donne le bonheur, il faut donc philosopher tout de suite « La philosophie est une activité qui procure, par les raisonnements et les discussions, la vie heureuse » SV 54

15 Son remède : le tetrapharmakos
La philosophie est une médecine de l’âme Son remède : le tetrapharmakos Les maux dont nous délivre la philosophie : la crainte des dieux, la crainte de la mort, l’illimitation du désir et l’incapacité d’endurer la douleur. Ce sont les quatre principales causes du trouble de l’âme. Une fois celui-ci dissipé, reste le calme du bonheur. Mais ce remède, on doit se l’administrer à soi-même. Il faut que chacun devienne philosophe, devienne son propre médecin.

16 Cette pratique thérapeutique ou curative qu’est la philosophie vaut pour tous les âges de la vie
Sur ce point, Epicure est en contradiction avec la plupart des philosophes de son temps : - Pour Platon, la jeunesse est une période de formation, la contemplation est réservée à l’âge mûr, passé la cinquantaine. - Pour Aristote, il est inutile d’enseigner la philosophie aux jeunes gens, car ceux-ci sont dominés par leurs passions. - Pour Épicure, il n’est jamais ni trop tôt ni trop tard pour se libérer de ce qui trouble l’âme et acquérir la sagesse pratique (phronesis).

17 « La réminiscence affective »
« Je t’écris cette lettre alors que je passe et achève en même temps le bienheureux jour de ma vie ; les douleurs liées à la rétention urinaire et à la dysenterie se sont succédé sans que s’atténue l’intensité extrême qui est la leur ; mais à tout cela a résisté la joie dans l’âme, au souvenir de nos conversations passées ; quant à toi, montre-toi digne de la disposition d’esprit que tu as manifestée auprès de moi depuis que tu es jeune, et prends soin des enfants de Métrodore ». Lettre à Idoménée

18 Conclusion sur cet extrait
Ce préambule promet beaucoup : rien de mois que la possibilité d’être heureux dans ce monde, offerte à tous ceux qui souffrent moralement et physiquement ; c’est la promesse du bonheur terrestre donné dans l’existence ici et maintenant L’éthique épicurienne : Est une éthique d’extrême urgence; Se présente comme une médecine de l’âme; Proclame l’inutilité de la longue étude des sciences, la paideia que certains philosophes (Platon, Aristote) considèrent comme nécessaire pour atteindre la sagesse.

19 II. La philosophie nous délivre des craintes infondées qui troublent l’âme
Une âme déséquilibrée, sujette à l’inquiétude ne pourrait goûter au bonheur. Elle doit préalablement être guérie de ses craintes qui naissent des opinions fausses qu’elle nourrit sur les dieux et sur la mort. Pour cela, il est nécessaire de commencer par l’étude la Nature. Il n’est pas possible de dissiper la crainte au sujet des choses qui ont le plus de pouvoir sur nous sans savoir quelle est la nature du tout, mais en vivant dans une incertitude anxieuse de ce que disent les mythes ; de sorte qu’il n’est pas possible, sans la science de la nature, d’avoir des plaisirs purs » MS 12

20 1. La physique d’Epicure Phusis en grec signifie la Nature, la physique est donc dans ce sens la science de la Nature. Sa physique est matérialiste et atomiste Epicure bâtit son système à partir de deux principes d’une sobriété remarquable : les corps et le vide

21 Réflexion sur la totalité de la réalité : (1) Rien ne naît de rien ;
(2) Le Tout est identique à lui-même ; En tant que totalité de ce qui est, l’être demeure identique à lui-même d’un point de vue quantitatif (ni perte ni gain dans ce qui compose le tout), changement seulement qualitatif. (3) Le Tout = les corps et le vide. Corps composés et corps simples (atomes) « Ces corps sont insécables et immuables, s’il est vrai que toutes choses ne sont pas destinées à se détruire dans le non-être ; au contraire, ils ont la force de subsister dans les dissolutions des composés, étant pleins par leur nature, n’ayant rien par où ni par quoi ils pourraient être dissous ». Les corps sont connus de façon directe et évidente par la sensation ; le vide est ce sans quoi les propriétés les plus évidentes des corps n’existeraient pas. Ces deux principes son strictement contradictoires ; ils recouvrent dans leur extension la totalité de ce qui est. Déterminés en premier lieu par rapport à l’attribut essentiel de la matière qui est la tangibilité. Corps a comme autre propriété fondamentale de pâtir ou d’agir ; en retour, le vide ne peut être affecté et ne peut agir. Deux conséquences : le terme de corps (soma) va désigner à la fois les composants ou corps premiers que sont les atomes, mais aussi les composés formés à partir de ces atomes ; le vide correspond à la fois à l’espace inoccupé situé entre chaque corps, et au lieu occupé par un corps. Caractéristique des atomes : sont insécables, impossibles à diviser. « Ces corps sont insécables et immuables, s’il est vrai que toutes choses ne sont pas destinées à se détruire dans le non-être ; au contraire, ils ont la force de subsister dans les dissolutions des composés, étant pleins par leur nature, n’ayant rien par où ni par quoi ils pourraient être dissous ». Cette solidité est l’application d’une règle énoncée par Aristote : l’impossibilité de la régression à l’infini. « Il faut s’arrêter » : il faut un élément qui puisse jouer le rôle d’un principe. L’atome, en tant qu’il est principe d’engendrement et de conservation de toute chose, est premier en ce sens ; on ne peut remonte, on ne peut au-delà de lui, on ne peut le réduire à plus petit que lui. Leur insécabilité rend les atomes éternels, « incorruptibles », alors que les composés, dans la mesure où ils sont traversés de vide, ne peuvent l’être. Les atomes, causes premières de toutes choses, au sens où ils sont à l’origine de tout ce qui est dans la nature, « semences de toutes choses ». Leur nombre est illimité car le tout est illimité. Enfin les atomes ont certaines qualités : une forme, un poids et une grandeur. Leur poids est la condition de possibilité de leur mouvement – et par là, de leur capacité à engendrer des composés. C’est le choc des atomes entre eux qui peut éventuellement, lorsque les atomes se trouvent être compatibles, produire leur agrégation sous forme d’un composé ; composé qui, s’il est suffisamment stable, pourra par la suite donner lieu à un « monde ». Dans le vide, les atomes sont soumis à leur propre pesanteur, et « chutent » donc de façon continue, à la même vitesse et dans une même direction. Il y a des objets réels et un espace vide, dans lequel le sujet que nous sommes, les rencontre. Si nous partons de là, nous avons déjà tout ce qui est nécessaire pour fonder ce que l’on nomme le matérialisme. Que faut-il y ajouter ? L’idée que, par une combinaison qui va à l’infini, la matière est à l’origine de tout le reste, de toute existence, y compris de celle du vivant et de celle de l’esprit, qui en sont, en quelque sorte, les sous-produits. Le mot matérialisme désigne une doctrine caractérisée par le recours exclusif à la notion de matière pour expliquer la totalité des phénomènes, tant du monde physique, que du monde de l’expérience spirituelle. La déclinaison (« clinamen »), ou déviation minimale dans le mouvement des atomes donne lieu aux chocs atomiques et peut donc être considérée comme la cause mécanique de formation des agrégats d’atomes. Parmi ces agrégats, certains, instables et fragiles, vont se défaire très rapidement. D’autres, plus équilibrés, vont donner naissance à des entités susceptibles de perdurer – c’est-à-dire de gagner au moins autant d’atomes qu’elles en perdent continuellement. Ces entités stables, si elles ont suffisamment d’ampleur, vont constituer des mondes. Le monde, une entité limité au sein de l’illimité ; un monde est une configuration possible d’atomes agrégés au sein du tout, qui nécessairement abrite plusieurs mondes. >Pluralité et diversité des mondes. Le matérialisme d’Epicure impliquera une conception des dieux, de l’âme et de la mort assez particulière qui nous sera utile pour comprendre la premier moment de la Lettre à Ménécée.

22 2. Pourquoi les dieux ne sont pas à craindre
(Question) Pourquoi ne faut-il pas craindre les dieux ? (T) Les dieux ne sont pas à craindre car ils sont indifférents aux hommes. (A) Des dieux qui auraient des faiblesses et qui se préoccuperaient des hommes ne seraient ni parfaits ni heureux et ne seraient donc pas des dieux. Les dieux ne sont donc pas à craindre.

23 1er moment du texte : La nature des dieux
« En premier lieu, considérant que le dieu est un vivant incorruptible et bienheureux, ainsi que la notion commune du dieu en a tracé l’esquisse, ne lui ajoute rien d’étranger à son incorruptibilité, ni rien d’approprié à sa béatitude. En revanche, tout ce qui peut préserver en lui la béatitude qui accompagne l’incorruptibilité, juge que cela lui appartient. Car les dieux existent. Evidente est en effet la connaissance que l’on a d’eux ».

24 2ème moment du texte : Critique de la superstition
«  Mais il ne sont pas tels que la plupart des hommes les conçoivent. Ceux-ci, en effet, ne les préservent pas tels qu’ils les conçoivent. Est impie, d’autre part, non pas celui qui abolit les dieux de la foule, mais celui qui ajoute aux dieux les opinions de la foule, car les déclarations de la foule à propos des dieux ne sont pas des préconceptions, mais des suppositions fausses ».

25 3ème moment du texte : les dieux comme modèle
« Il en résulte que les dieux sont à l’origine des plus grands malheurs et des plus grands bienfaits. En effet, adonnés en touts circonstances à leurs propres vertus, ils sont favorables à ceux qui leur ressemblent et considèrent comme étranger tout ce qui n’est pas tel ».

26 Commentaire du texte Epicure n’est pas athée malgré son matérialisme : il existe selon lui des dieux, mais comme tous les autres êtres, ces dieux sont matériels, composés d’atomes. Les dieux ont la vie la plus heureuse que l’on puisse imaginer et nous fournissent un modèle du bonheur. Ils sont à imiter. La représentation que la foule se fait des dieux n’est pas conforme à la notion commune que nous en avons tous, elle attribue des propriétés incompatibles avec leur incorruptibilité ou leur bonheur.

27 La mythologie nous dépeint des dieux nourrissant les mêmes passions que les hommes, comme l’envie, la jalousie, la colère, etc. La foule croit que les dieux se mêlent et influencent les histoires des hommes et qu’il sera possible, au moyen d’offrandes, de sacrifices et de prières d’attirer leurs faveurs. C’est donc représenter les dieux comme des êtres capricieux, susceptibles, etc. ce qui est incompatible avec leur incorruptibilité et leur béatitude. C’est de la superstition : les hommes croient aux dieux par peur, afin de se rassurer.

28 - Pour Epicure, il est absurde de se préoccuper des dieux, s’ils existent, ils n’ont aucune raison de ce soucier de notre existence. - Epicure refuse toute conception finaliste de la nature. Les Dieux, comme les autres vivants ne sont que le résultat de la combinaison aléatoire des atomes et ne sont donc pas à l’origine de l’univers. « L’être bienheureux et immortel est libre de soucis et n’en cause pas à autrui, de sorte qu’il ne manifeste ni colère ni bienveillance : tout cela est le propre de la faiblesse » mc1 Comme l’écrira Lucrèce : « exempte de toute douleur, exempte de tout danger, forte d’elle-même et de ses propres ressources, n’ayant nul besoin de notre aide, [la nature des dieux] n’est ni attachée par des bienfaits, ni touchée par la colère » (DDN, I, 47-49)

29 Bruegel, Orphée aux Enfers (1594)
3. Pourquoi la mort n’est pas à craindre Bruegel, Orphée aux Enfers (1594)

30 Un obstacle au bonheur : la perspective angoissante de devoir mourir un jour, la conscience de notre condition mortelle (Cf. analyse du divertissement pascalien) A cause de la mort, nous habitons une « cité sans muraille » « Face à tout le reste, il est possible de se procurer la sécurité, mais à cause de la mort, nous tous les hommes habitons une cité sans muraille » SV31 - La crainte de la mort joint le maximum de certitude et d’incertitude : inéluctable pour le fait, nous ignorons son moment et ses circonstances.

31 Comment se libérer de la crainte de la mort?
- Dans la tradition antique, la mort apparaît comme la séparation du corps (soma) qui demeure inerte et va se décomposer, et d’un « souffle » (pneuma), qu’on va appeler aussi « âme » (psuchè), principe d’animation du corps dont on va se demander où il est passé. - Epicure ne rompt pas avec cette représentation ordinaire des Grecs. Il distingue lui aussi le corps et l’âme et la mort est bien comprise comme une dissociation de ces deux réalités. Mais l’âme, comme le corps, est matérielle, composée d’atomes plus subtiles. - Dans la perspective épicurienne, la constitution atomique de l’univers a pour conséquence directe l’omniprésence de la mort. Comment se libérer de la crainte de la mort?

32 (Question) Pourquoi ne faut-il pas craindre la mort ?
(T) La mort n'est rien pour nous. Or, on ne peut craindre ce qui n'est rien. (A) Comme le bien et le mal résident dans la sensation et que la mort est absence de sensation, la mort ne peut être un état de souffrance ni de bonheur. Elle n'est donc pas à redouter. Nous devons donc goûter aux joies de l'existence, même si elles sont éphémères, car l'immortalité heureuse que nous craignons de ne pas avoir n'existe pas.

33 Les arguments « Accoutume-toi à considérer que la mort n’est rien pour nous, puisque tout bien et tout mal sont contenus dans la sensation ». « Ainsi, le plus effroyable des maux, la mort, n’est rien pour nous, étant donné, précisément, que quand nous sommes, la mort n’est pas présente ; et que, quand la mort est présente, alors nous ne sommes pas. Elle n’est donc ni pour les vivants ni pour ceux qui sont morts, étant donné, précisément, qu’elle n’est rien pour les premiers et que les seconds ne sont plus »

34 (Problème) Mais si la sensibilité est racine de tout bien, sa suppression n’est-elle le plus grand mal? - La mort ne nous prive de rien car on ne peut être privé de quelque chose qu’à condition d’être, mais dans la mort nous ne sommes plus. Être privé est une douleur s’il y a conscience de la privation. Or ici plus de sensibilité signifie plus de conscience. - Pour Epicure, mieux vaut un bonheur limité mais présent et effectif qu’une vaine aspiration, que l’espérance d’une béatitude qui nous détourne de cette vie.

35 C’est paradoxalement en prenant conscience que nous ne sommes pas immortels que nous nous délivrons de la crainte de la mort. Pas plus que la mort, il ne faut pas craindre ce qu’il y a après la mort (les Enfers, etc.) car notre mort ne peut avoir de réalité pour nous. « Il n’y a rien de terrifiant dans le fait de vivre pour qui a réellement saisi qu’il n’y a rien de terrifiant de ne pas vivre » Craindre la mort, l’attendre dans la terreur est une sottise car il n’y a pas à avoir de terreur par anticipation de ce qui ne nous causera nulle douleur une fois arrivé. On ne fait par là que s’interdire d’être heureux dans cette vie.

36 La crainte de la mort est sans objet : rien à craindre, pas de douleur
 La crainte de la mort est vaine : inutile et même nuisible. Elle nous conduit au malheur

37 L’attitude du sage face à la vie
« Le sage, pour sa part, ne rejette pas la vie et il ne craint pas non plus de ne pas vivre, car vivre ne l’accable pas et il ne juge pas non plus que ne pas vivre soit un mal. Et de même qu’il ne choisit nullement la nourriture la plus abondante mais la plus agréable, il ne cherche pas non plus à jouir du moment le plus long, mais du plus agréable ».   Le philosophe fait apparaître la cohérence du sage. La vie ne lui est pas plus à charge qu’il ne redoute la mort. En toutes circonstances, il sait honorer la vie en sauvant le plaisir d’exister et il ne craint pas la mort car il n’y a aucun sens à croire qu’elle est un mal.

38 Choses qui dépendent de nous Choses qui ne dépendent pas de nous
Il faut apprendre à distinguer ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous Choses qui dépendent de nous Choses qui ne dépendent pas de nous Profession ; amis ; liberté ; certaines maladies ; réflexion ; etc. Temps qu’il fait ; mort ; maladie ; accident ; etc.

39 III. Prendre soin de son corps et de son âme
1. La classification des désirs (Question) Faut-il suivre tous ses désirs ? (Thèse d’Epicure) Il ne faut pas suivre tous ses désirs, Il ne faut désirer que ce qui est nécessaire au bonheur, c'est-à-dire tout ce sans quoi nous ne serons jamais vraiment heureux mais avec quoi nous ne serons jamais malheureux. (Argument) On peut distinguer les désirs de telle sorte que l‘on arrive à isoler des désirs nécessaires au bonheur (à poursuivre), des désirs naturels mais non nécessaires (à poursuivre avec prudence) et des désirs vides (à éviter).

40 Structure de l’extrait
1er moment : classification des désirs en trois groupes : désirs naturels nécessaires, non nécessaires et désirs vides. 2ème moment : pour soutenir cette classification, explication du critère qui permet de considérer un désir comme nécessaire : la fin de la vie heureuse est la santé du corps (aponie) et l’absence de troubles de l’âme (ataraxie).

41 À la tranquillité du corps
1er moment : les trois types de désir Il faut en outre établir par analogie que, parmi les désirs, les uns sont naturels, les autres sans fondement et que, parmi ceux qui sont naturels, les uns sont nécessaires et les autres naturels seulement. Parmi ceux qui sont nécessaires, les uns sont nécessaires au bonheur, d’autres à l’absence de dysfonctionnements dans le corps, et d’autres à la vie elle-même ». Désirs sans fondement ou vains mais non nécessaires Désirs Au bonheur Désirs naturels À la tranquillité du corps nécessaires À la vie

42 DESIRS NATURELS ET NECESSAIRES DESIRS NATURELS NON NECESSAIRES
DESIRS VAINS À la vie : Manger, se protéger du froid (besoins vitaux) À l’absence de perturbation du corps : Nourriture équilibrée, logement sain, vêtements de bonne qualité Au bonheur : Amis, Liberté, Réflexion (sur les causes principales de l’anxiété : mort, maladie, pauvreté, superstition) désirs sexuels désirs esthétiques exemple : Superbe maison, bains privés, serviteurs, manger des langoustes plutôt que du pain, etc. Luxe Richesse Gloire Pouvoir Immortalité

43 Ce qui est nécessaire au bonheur Ce qui est nécessaire au bien-être
Ce qui est vital (besoin primaire)

44 Distinction désirs naturels/vides :
-Les désirs vides sont les désirs illimités là où les désirs naturels sont bornés. Pour nous préparer à sortir de la vie, comblés comme un vase auquel on ne pourrait plus ajouter la moindre goutte, il faut donc que nous comprenions le néant des désirs qui n’ont pas précisément de but assignable, pas d’objet nettement défini : on peut bien boire jusqu’à plus soif, manger à satiété ; mais on ne pourra jamais être riche à souhait, ou suffisamment glorieux.

45 -L’illimitation des désirs peut être due :
1) À une vaine tentative d’accroître à l’infini la satisfaction d’un désir naturel et nécessaire (ainsi les excès de table) ; 2) À une vaine tentative d’accroître à l’infini la satisfaction d’un désir naturel mais non nécessaire (ainsi l’amour-passion) ; 3) À un désir fondé sur une vaine opinion (ni l’ambition, ni la volonté de domination, ni le désir des honneurs, ni celui des richesses, ni l’appétit de gloire, ni le désir de l’immortalité n’ont le moindre objet défini).

46 Il convient donc de distinguer très rigoureusement les désirs infinis ou illimités (qui consistent à vouloir toujours plus), et les désirs conformes à la nature. Encore ces derniers doivent-ils être répartis, poursuit Epicure, en désirs naturels et nécessaires (c’est-à-dire ceux qui, comme par exemple la faim et la soif, provoquent la douleur quand ils ne sont pas satisfaits) et en désirs naturels et non nécessaires ( qui ne provoque pas de douleurs quand ils ne sont pas satisfait).

47 2ème moment : la fin de la vie heureuse est la santé du corps et l’absence de troubles de l’âme
« En effet, une étude rigoureuse des désirs permet de rapporter tout choix et tout refus à la santé du corps et à l’absence de trouble dans l’âme, puisque c’est cela la fin de la vie bienheureuse. C’est en effet en vue de cela que nous faisons tout, afin de ne pas souffrir et de ne pas éprouver de craintes. Mais une fois que cet état s’est réalisé en nous, toute la tempête de l’âme se dissipe, le vivant n’ayant pas besoin de se mettre en marche vers quelque chose qui lui manquerait, ni ç rechercher quelque autre chose, grâce à laquelle le bien de l’âme et du corps trouveraient conjointement sa plénitude. C’est en effet quand nous souffrons de l’absence du plaisir que nous avons besoin du plaisir; mais quand nous ne souffrons pas, nous n’avons plus besoin du plaisir ».

48 Ecoutons ce que crie la nature : elle ne réclame rien d’autre que, pour le corps, l’absence de douleur (aponie) et pour l’esprit, un sentiment de bien-être, dépourvu d’inquiétude et de crainte (ataraxie). Pour Epicure, nous sommes heureux si nous ne souffrons pas réellement. Parce que nous souffrons réellement si la nourriture ou les vêtements nous font défaut, nous devons avoir suffisamment d’argent pour nous les procurer mais « souffrance » est un mot trop fort pour décrire ce que nous ressentons si nous sommes obligés de porter un cardigan en laine plutôt qu’en cachemire, ou de manger un sandwich plutôt que des coquilles Saint-Jacques.

49 Le plaisir est donc à rechercher non pour lui-même mais uniquement lorsque son absence serait douloureuse, parce que le plaisir est suppression de la tension propre au manque engendré par le désir. Dès que la douleur disparaît, le plaisir n’est plus nécessaire.

50 2. Le calcul des plaisirs Le plaisir pour Epicure est le principe (commencement) et le but (fin) de la vie heureuse. Epicure identifie donc bien le bonheur au plaisir. Un plaisir ne peut différer d’un autre plaisir que par la durée ou l’intensité. Et par les conséquences, également, qui s’ensuivent. Il se borne à déconseiller certaines activités, voire la recherche de certains plaisirs, mais en arguant de ce seul fait que ces activités ou plaisirs sont le plus souvent suivis de douleur. « Tout plaisir, affirme-t-il, est un bien : tout plaisir, cependant, ne doit pas être choisi ».

51 Aussi, pour être heureux, nous devons savoir opérer une sélection parmi nos désirs. Nous n’avons besoin que d’un juste calcul relatif aux plaisirs et aux peines. Si la débauche rendait heureux, Epicure a l’audace de le proclamer, c’est sur la conduite des gens dissolus que nous devrions nous régler. Mais, parce que son intérêt bien compris lui indique que ce n’est pas ce genre de vie qui peut abolir en lui la crainte de la mort ni le rendre heureux, l’épicurien préférera une vie plus réglée, moins sujette à la tension du désir. Parce qu’il sait que, tout bien compté, le crime, les mensonges et les mauvais coups ont immanquablement pour cortège la peur d’être confondu, la culpabilité, les remords, la terreur, aussi, d’être pris, voire surpris, jusque dans son sommeil, l’épicurien préférera une vie « sage, honnête et juste ».

52 Pourquoi les plaisirs de la débauche sont-ils contraire au bonheur ?
Le plaisir commence dès que cesse la douleur. Par exemple, on éprouve du plaisir quand on apaise sa faim. Cela signifie qu’il n’y a pas d’état neutre, intermédiaire entre le plaisir ou la douleur. Dès que la douleur cesse apparaît le plaisir stable et constitutif du bonheur caractérisé par l’ataraxie et l’aponie : « La suppression de tout ce qui est souffrant est la limite de la grandeur des plaisirs. Et là où se trouve ce qui ressent du plaisir, tout le temps qu’il est, là n’est pas ce qui est souffrant, ou les deux « (MC III).

53 Mais Il existe un autre plaisir qui est lié à la mise en mouvement de notre nature et au changement : c’est le plaisir actif ou en mouvement. Les plaisirs de la débauche sont des plaisirs en mouvements violents. Ils sont à rejeter car ils mettent en danger le corps et jettent le trouble dans nos esprits en multipliant les désirs vides. Le plaisir stable que procurent l’ataraxie et l’aponie est l’optimum du bonheur : Epicure n’a jamais prôné l’abstinence sexuelle pas plus que le jeûne prolongé. Il met sur le même plan la tension qui accompagne nécessairement les pratiques ascétiques et le dérèglement des débauchés. « Il y a, même dans la restriction, une mesure : celui qui n’en tient pas compte se trouve à peu près dans la situation de celui qui s’égare par manque de limitation » (SV 63).

54

55 Etat neutre : absence de douleur et de plaisir
Plaisir en mouvement conduit à la douleur Etat neutre : absence de douleur et de plaisir Plaisir stable : aponie et ataraxie Douleur

56 Plaisir stable Bonheur Douleur Plaisir en mouvement

57 3. Vie autarcique et vie modérée
« Par ailleurs, nous considérons l’autosuffisance elle aussi comme un grand bien, non pas dans l’idée de faire peut en toutes circonstances, mais afin que, dans le cas où nous n’avons pas beaucoup, nous nous contentions de peu, parce que nous sommes légitimement convaincus que ceux qui ont le moins besoin de l’abondance sont ceux qui en tirent le plus de jouissance, et que tout ce qui est naturel est facile à acquérir, alors qu’ils est difficile d’accéder à ce qui est sans fondement »

58 (T) Une autre condition du bonheur réside dans l’indépendance relativement aux besoins
(A1) Elle permet en effet de mieux supporter l’infortune car on est mieux capable de se contenter du peu que l’on est capable de se procurer ; (A2) Elle permet de jouir davantage de la profusion car l’habitude du luxe en tue le plaisir; (A3) Elle permet d’être mieux capable de se procurer le peu de choses dont on a besoin.

59 (Objection) Mais les plaisirs qui naissent de la profusion sont bien supérieurs aux plaisirs que peut susciter un régime de vie simple ! (Réponse) « Car les saveurs simples apportent un plaisir égal à un régime d’abondance quand on a supprimé toute la souffrance qui résulte du manque, et du pain et de l’eau procurent le plaisir le plus élevé, lorsqu’on s’en procure alors qu’on en manque » (A4) C’est mal calculer que de dire ça : si l’on procède à un simple calcul qui pondère la quantité de plaisir espérée par la quantité de douleur potentielle, on s’aperçoit qu’un régime de vie sobre et simple n’entraînera aucune souffrance réelle, tandis qu’un régime de vie profus a toute chance de détruire la santé. Il y a donc plus de plaisir, au bout du compte, dans un mode de vie simple mais sain, que dans des habitudes alimentaires profuses mais malsaines.

60 (T) Le plaisir ne se trouve donc pas dans la débauche.
(A) Si la débauche rendait heureux, c’est sur la conduite des gens dissolus que nous devrions nous régler : « Si les causes qui produisent les plaisirs des gens dissolus défaisaient les craintes de la pensée, celles qui ont trait aux réalités célestes, à la mort et aux douleurs, et si en outre elles enseignaient la limite des désirs, nous n’aurions rien, jamais, à leur reprocher, eux qui seraient emplis de tout par les plaisirs, et qui d’aucun côté ne connaîtraient ce qui est souffrant ou affligé, ce qui est précisément le mal » (MC X)

61 Epicure résume ensuite à rebours les quatre arguments qu’il vient d’énoncer :
(A4) « s’accoutumer aux régimes simple et non abondants assure la plénitude de la santé  » : un régime de vie sobre est sain et donc plus agréable qu’un régime malsain qui conduit à la souffrance. (A3) « …rend l'homme actif dans les occupations nécessaires à la conduite de la vie » : l’indépendance vis-à-vis des besoins permet d’être mieux capable de se procurer le peu de choses dont on a besoin. (A2) « … nous met dans de plus fortes dispositions quand nous allons, par moment, vers l’abondance » : Elle permet de jouir davantage de la profusion car l’habitude du luxe en tue le plaisir. (A1) « … nous prépare à être sans crainte devant les aléas de la fortune » : Elle permet en effet de mieux supporter l’infortune car on est mieux capable de se contenter du peu que l’on est capable de se procurer.

62 Réponse aux accusations d’incitation à la débauche
« Quand donc nous disons que le plaisir est la fin, nous ne parlons pas des plaisirs des débauchés ni de ceux qui consistent dans les jouissances – comme le croient certains, qui, ignorant de quoi nous parlons, sont en désaccord avec nos propos ou les prennent dans un sens qu’ils n’ont pas –, mais du fait, pour le corps, de ne pas souffrir et, pour l’âme de ne pas être troublée ».

63 « En effet, ce n’est ni l’incessante succession des beuveries et des parties de plaisir, ni les jouissance que l’on trouve auprès des jeunes garçons et des femmes, ni celles que procurent les poissons et tous les autres mets qu’offre une table abondante, qui rendent la vie agréable : c’est un raisonnement sobre, qui recherche la connaissance exacte des raisons de tout choix et de tout refus, et qui rejette les opinions à partir desquelles une extrême confusion s’empare des âmes ».

64 IV. Philosopher pour atteindre la sagesse
1. Coïncidence de la vie vertueuse et de la vie de plaisir « Or le principe de tout cela et le plus grand bien, c’est la prudence. C’est pourquoi la prudence est plus respectable encore que la philosophie, car elle entraîne naturellement tout le reste des vertus, enseignant qu’il n’est pas possible de mener une vie agréable , qui ne soit pas prudente, belle et juste, pas plus que la vie ne peut être prudente, belle et juste si elle n’est pas agréable. Car les vertus sont naturellement liées à la vie agréable et la vie agréable en est inséparable ».

65  La condition la plus nécessaire du bonheur est la possession et la mise en œuvre de la « prudence » ou « sagesse pratique » qui est la disposition qu’a le sage de bien choisir ce qu’il faut choisir pour être heureux à partir du calcul des plaisirs.  La philosophie ne doit être cultivée qu’en vue du bonheur et n’a de valeur qu’en tant qu’elle permet de développer la « sagesse pratique ». La prudence est la vertu dont sont issues toutes les autres Une vertu est une disposition à agir de façon appropriée dans un contexte déterminé. Par exemple, le courage est la vertu qui consiste à savoir persévérer dans l’adversité ; la justice est la vertu qui consiste à savoir rendre à chacun ce qui lui est du ; etc. Or, pour savoir ce qu’il faut faire dans une situation déterminée, il faut procéder à un calcul des plaisirs et avoir l’habitude de procéder ainsi : il faut être « prudent ». La prudence est donc bien la condition nécessaire et l’origine des autres vertus.

66  Poursuivre le plaisir bien entendu, c’est adopter une conduite vertueuse.
(A) De ce qui précède, on déduit que puisque c’est la prudence qui définit les vertus en fonction du calcul des plaisirs, les vertus ne peuvent que conduire au plaisir et le plaisir bien compris aux vertus : « Il n’est pas possible de vivre avec plaisir sans vivre avec prudence, et il n’est pas possible de vivre de façon bonne et juste, sans vivre avec plaisir. Qui ne dispose pas des moyens de vivre de façon prudente, ainsi que de façon bonne et juste, celui-là ne peut pas vivre avec plaisir » (MC V)

67 2. La force du Sage (Objet) la liste des remèdes spirituels au malheur et la notice d’utilisation (Question) Que faut-il retenir de la lettre ? Le sage qui aura compris la lettre d’Epicure réussira-t-il à échapper au malheur ? (Thèse) Il faut retenir de la lettre le « quadruple remède » et respecter la posologie prescrite : se soigner du malheur suppose un traitement de fond. (Argument) Celui qui connaît les remèdes au malheur et les applique consciencieusement est prêt pour le bonheur. Epicure vient de démontrer à Ménécée quels sont les principes de la vie bienheureuse en l’exhortant à mener une vie guidée par une véritable arithmétique des plaisirs. Il conclut alors que le besoin le plus naturel et le plus nécessaire au bonheur est la « prudence », c’est-à-dire la disposition qu’a le sage de savoir choisir ce qu’il faut choisir par un raisonnement sobre sur les causes du plaisir. Mais Ménécée pourrait encore reprocher à Epicure la chose suivante : « Je suis d’accord avec tout ce que tu as dit jusqu’ici mais je me trouve dans l’incapacité de bien me souvenir de chacun des nombreux arguments que tu as donnés, de sorte que je ne vois pas à quoi ta lettre pourrait bien me servir. Ton histoire de calcul des plaisirs me semble impraticable tant tout cela semble compliqué ! De plus, je ne prétends pas être un sage. Tes conseils ne me semblent donc pas faits pour moi. » Epicure va donc proposer à Ménécée un résumé de sa doctrine morale en quelques mots qu’il devra apprendre par cœur et se répéter souvent en vue d’exercer son esprit à penser et à désirer droitement. C’est donc une sorte de trousse à pharmacie de secours que propose ici Epicure pour soigner les maux de l’âme de Ménécée : un quadruple remède qui se dit « tetra pharmakon ».

68 (Structure) 1 Le tetra pharmakon a) Les dieux ne sont pas à craindre
b) La mort n’est pas à craindre c) On peut atteindre le bonheur d) La douleur est supportable 2 Compléments au tetra pharmakon e) La nécessité n’est pas à craindre f) Le hasard n’est pas à craindre

69  La nécessité n’est pas à craindre
« Il proclame d’autre part que le destin, que certains présentent comme le maître de toutes choses, ne l’est pas. Il estime pour sa part que certaines choses se produisent par nécessité, tandis que d’autres sont le fait de la fortune et que d’autres encore sont en notre pouvoir, parce que la nécessité ne peut rendre des comptes »  La nécessité n’est pas à craindre Il appartient au sage, face aux hasards et aux infortunes, de conserver, grâce à sa pensée, la mesure et la sérénité. Aussi Epicure récuse-t-il tout fatalisme et renvoie-t-il l'homme à sa propre liberté parce que (T) les événements de notre vie ne sont pas nécessités par le destin, « le maître de toutes choses », mais ont trois causes : certains sont produits par la nécessité d’autres par la fortune (ou le hasard) d’autres par nous-mêmes

70 - Si tout était déterminé, si tout était asservi à la nécessité d'un destin, alors l'action humaine serait impossible à condamner ou à louer. - Par conséquent, peu importe la chance ou ce qui provient d’une certaine nécessité, tout dépend de ce que j’en fais. Je peux gâcher une belle chance et faire beaucoup avec une mauvaise nécessité.

71 Le hasard (fortune) n’est pas à craindre
Croire que le sort s’acharne contre soi, c’est raisonner stupidement car la fortune n’est pas un dieu doué de volonté mais agit de façon désordonnée. Cela signifie qu’il ne sert à rien de désespérer : la chance « tourne » toujours. Cela signifie aussi qu’il ne faut savoir se méfier des coups du sort et se préparer comme le sage. « Je t'ai devancée, Fortune, et j'ai fait pièce à toutes tes intrusions. Et nous ne nous livrerons nous-mêmes ni à toi ni à aucune autre sorte d'embarras ; mais lorsque l'inéluctable nous fera partir, lançant un grand crachat sur la vie et sur ceux qui se collent en vain à elle, nous sortirons de la vie, clamant en un péan plein de beauté que nous avons bien vécu. » (SV 47)

72 3. L’exhortation finale : la philosophie comme exercice spirituel
« Ainsi, fais de ces choses et de celles qui s’y apparentent l’objet de tes soins, jour et nuit, pour toi-même et pour qui t’es semblable, et jamais, ni éveillé ni en songe, tu ne connaîtras de trouble profond, mais tu vivras comme un dieux parmi les hommes. Car il n’est en rien semblable à un vivant mortel l’homme qui vit au milieu de biens immortels »

73 « Il faut à la fois rire, vivre en philosophe, diriger sa propre maison, et encore nous servir de tout ce qui nous est propre, et ne jamais cesser de prononcer les formules issues de la droite philosophie ». (SV 41)


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