L'enseignement de l'histoire à l'école primaire: approche épistémologique Cours No 5
La vérité historique, comme toute vérité scientifique, est relative. Chaque époque, chaque école relit et réécrit l'histoire selon ses postulats, concepts, méthodes, approches... L'historien réécrit en relisant les documents, en les interprétant. Si tous disent avoir souci d'objectivité et de vérité, rares sont ceux qui prétendent aujourd'hui détenir l'une et l'autre. (cf. numéro spécial de la revue "Sciences Humaines n° 18 – septembre 1997)
Réflexions sur les contenus enseignés: Redonner place à l'évènement, insister sur l'histoire de la vie quotidienne (alimentation, habillement, habitat, transports...), intérêt de l'étude diachronique d'une institution comme l'école...
Penser "notions essentielles" plutôt qu'accumulation de questions encyclopédiques. Par exemple, pour les deux ou trois séquences maximum à consacrer à la Préhistoire, privilégier l'essentiel, à savoir le passage du nomadisme lié à la chasse, au sédentarisme lié à l'agriculture.
Puiser dans l'histoire globale qui regroupe grands évènements chargés de sens, personnages significatifs, vie économique, vie culturelle etc. Accéder, au-delà de l’histoire locale, de l'histoire de la Suisse à l'histoire universelle.
Que faire? On doit partir de questions fondamentales d'aujourd'hui : évolution de l'environnement, des activités de production... De questions existentielles. Les évènements n'ont pas d'importance en eux-mêmes : ils sont intéressants quand ils révèlent les spécificités d'une époque, quand ils déterminent un avant et un après.
Pourquoi choisir l’étude de l’histoire locale et l’archéologie ? À l’école primaire, l’enfant quitte peu à peu son cocon pour partir à la découverte d’un monde nouveau. Alors, pour commencer, le voyage se fait dans le temps et on lui propose de découvrir près de chez lui les traces tangibles du temps qui passe et des événements mémorables du passé. Et où peut-on trouver de meilleures marques que dans l’histoire locale ? N’est-elle pas de fait plus familière et plus sécurisante ? Elle me semble en tout cas un bon marchepied vers l’Histoire.
Il est également nécessaire de confronter l’enfant au problème des sources diverses à partir desquelles s’effectue le travail de l’historien qui construit l’histoire : sources écrites, iconographiques, architecturales et archéologiques. C’est se donner les moyens d’inscrire l’histoire dans un cadre scientifique.
L’histoire locale et l’archéologie offrent l’occasion de mettre en œuvre des démarches où se croisent des activités de recherche simples, mais réelles. Elles permettent aux enfants d’être acteurs de leurs apprentissages.
Pour traiter de l’histoire locale, il faut donner comme objets d’étude des documents de qualité : ◦ des cartes postales anciennes ; ◦ des photographies aériennes; ◦ des documents issus des archives ; ◦ des gravures; ◦ des objets; ◦ des visites, des monuments; ◦ etc.
Quelle est la conception de l’enseignement de l’histoire à l’école primaire ? En général, pour les niveaux 1 à 4 H, les séquences montrent combien il est difficile de considérer l’histoire comme une discipline à part ; toutefois, en SHS, voire SNSH, l’histoire ne doit pas être oubliée et dans chaque séquence, une prise en compte des concepts intégrateurs de l’histoire est nécessaire, puisque son objectif est de traiter du temps. L'histoire doit être vue par l'enseignant comme une discipline à part entière à partir de la 5 ème année, et dès lors, elle doit être enseignée avec des méthodes et des démarches spécifiques
La fascination des enfants pour certaines périodes est, certes, une chance à saisir, mais ceci ne doit pas conduire à faire l’économie d’un certain esprit critique. L’histoire que l’on raconte passionne, mais il ne faut pas oublier que l’historien, dans sa démarche, est un scientifique.
À ce titre, son travail dépend des sciences auxiliaires de l’histoire : archéologie, numismatique, paléogéographie, toponymie, etc. Dans un monde où les informations inondent littéralement les enfants, il semble bon de leur faire sentir que la connaissance du passé ne relève pas de l’élucubration de quelques « rats de bibliothèque ». Apprendre comment s’écrit l’histoire est une attitude plus créatrice que d’accepter ce que des générations d’historiens ont démontré et qui risque d’être remis en cause par leurs successeurs.
Si l’école doit permettre à l’enfant de maîtriser l’espace et d’apprivoiser le temps, l’histoire et la géographie y contribuent. L’enfant passe progressivement du temps vécu, qui est de l’ordre de la sensation, au temps pensé et construit, qu’il n’a pas vécu mais dans lequel il est contraint de s’inscrire. Un aller-retour constant entre le vécu et le pensé, entre le ressenti et le construit est indispensable.
En quoi l’enseignement de l’histoire participe-t-il à l’éducation à la citoyenneté ? Aider l’enfant à se repérer et à s’intégrer dans un espace qui a une histoire, c’est aussi l’aider à devenir un citoyen à part entière. Apprendre à connaître le passé du lieu où l’on vit comme du lieu d’où l’on vient est une manière de s’enraciner. Chacun est originaire, à la fois de l’endroit d’où sont originaires ses parents et de l’endroit où vous fixe la vie. L’enracinement est, dans cette perspective, rassurant pour l’enfant puisqu’il se sent déjà inscrit dans une continuité spatiale et temporelle.
Apprendre à connaître le passé, c’est encore aider l’enfant à porter un regard responsable et critique. C’est lui permettre de rester vigilant sur les problèmes présents. Mais cet avenir, il ne le construira pas tout seul. Comment lui permettre de se sentir aussi bien unique que relié à un groupe par des valeurs communes ? Quelle meilleure façon d’établir une cohésion nationale que d’avoir, ensemble, écrit l’histoire d’un quartier que tous habitent et qu’ils contribuent à construire au jour le jour ?