De la normalité à la pathologie… et vice versa

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Transcription de la présentation:

De la normalité à la pathologie… et vice versa Les manifestations de surface (phonétiques et linguistiques) de la disfluence et leur déterminisme sous-jacent: De la normalité à la pathologie… et vice versa Jean-Luc Nespoulous Professeur Emérite, Université de Toulouse Le Mirail Membre Senior Honoraire, Institut Universitaire de France Laboratoire de Neuropsycholinguistique Jacques-Lordat URI OCTOGONE (E.A 4156) Institut des Sciences du Cerveau de Toulouse Montpellier, 16 octobre 2014 Journées de Pausologie. Praxiling-CNRS

Pourquoi me suis-je intéressé aux disfluences Pourquoi me suis-je intéressé aux disfluences? - débit de la parole et aphasie : « fluent » vs. « non-fluents » = Broca vs. Wernicke. - mais aussitôt : « quid de la disfluence chez tout locuteur ordinaire, exempt de toute pathologie? »  Normalité vs. pathologie (G. Canguilhem)

I. Un constat: L’état stable n’existe pas! Ou « De l’insoutenable stabilité de l’être humain » Cf. résumé

Du savoir au dire Langue Compétence Savoir Parole Performance Dire Faire

II. Disfluence : définition « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément » Boileau  La norme (fluidité) est une exception!!!

Caractérisation de la fluidité et des « ruptures »: Au plan phonétique - phonétique perceptive (limites) - phonétique acoustique. Exemple : l’ « écart inter-syllabique » (Piccaluga et al., 2007; Harmegnies et al., 2011)

2. Au plan linguistique Le type linguistique de constituant; Le contexte immédiat; Le contexte syntaxique (inter- vs. intrasyntagmatique); Si intrasyntagmatique, préciser (parties du discours); Si intra-unité lexicale, préciser… Variabilité et situation extra-linguistique.

III. Déterminisme sous-jacent des manifestations de surface de la disfluence Dépasser la seule description des M de S; Dépasser également la seule étude de l’impact de diverses contraintes linguistiques; Tenter d’appréhender les causes localisables non plus dans le discours mais dans l’architecture fonctionnelle du langage (Goldman-Eisler, 1958, 1965; Nespoulous, 1973; Clark & Clark, 1977; Garrett, 1980; Levelt, 1989…)

Nespoulous (1973)

Garrett (1980)

Levelt (1989)

Clark & Clark (1977) Pause silencieuse; Pause pleine; Répétition; Faux départs; reprises, interjections; « stutters ». Cf. travail de pionnier de Maclay & Osgood (1959)

Phénomènes de rupture souvent négligés (1) La rupture entre l’article et le nom en français: « le », « la »…N (Cf. aphasie) Alternance d’Antonymes Production en séquences de synonymes ou quasi-synonymes Paraphasies sémantiques et autocorrections « N’est-ce pas? ». Français vs. anglais.

Phénomènes de rupture souvent négligés (2) Modalisations (y compris parenthétiques) - Discours référentiel et Discours modalisateur, en alternance ou entremélés. - On dit plusieurs choses en même temps : (i) on dit, (ii) on dit ce qu’on pense de ce qu’on dit (contenu), (iii) on dit ce qu’on pense de la forme du discours produit.

Phénomènes de rupture souvent négligés (3) Quid des ruptures (contraste) au plan mimogestuel? « Piétinements » en début de réponse à une question (Cf. Parkinson)

La gestion continue du flux discursif oral (écrit?) Du caractère « spasmodique » de la conception/production du discours « from intention to articulation » (Levelt, 1989) en « jonglant », de manière « incrémentale », avec les différents niveaux de représentation et les divers processus (Nespoulous, 1973; Levelt, 1989). Alternance de phases de tension et de relâchement à chaque niveau + contrôle

La gestion continue du flux discursif oral (écrit?)…suite « Bouffées cognitives »  « chunks » dans la chaîne parlée. Marqueurs de rupture chaque fois qu’il y a dysharmonie » entre les différents niveaux. A la gestion synchrone des différents niveaux psycholinguistiques et moteurs, vient s’ajouter celle du tandem « REF/MOD ».

La gestion continue du flux discursif oral (écrit?)…suite La « linéarité du signifiant » au plan linguistique (Saussure) traduit mal cet aspect pluriel, multi-couches, incrémental au plan psycholinguistique (Nespoulous, 1974). Cette gestion distribuée, partagée, est elle même facteur de « ruptures » et de « disfluences », sans parler des autocorrections et autres « réparations »

La gestion continue du flux discursif écrit Même raisonnement, au plan qualitatif, à l’écrit… (travaux à mener sur l’écriture on-line via des tablettes graphiques) MAIS l’écrit s’affranchissant habituellement de contraintes temporelles strictes gomme toutes les ruptures qui ont présidé à la conception/réalisation du message pour ne livrer au lecteur qu’un produit fini continu « immaculé ».

Moralité « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément » Boileau  Un idéal inatteignable!!!

Grand merci pour votre attention.