Prise en charge du Buruli en Côte d’Ivoire en situation isolée

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Transcription de la présentation:

Prise en charge du Buruli en Côte d’Ivoire en situation isolée JP. Marchaland

INTRODUCTION Infection dermatologique par Mycobacterium ulcerans (nécrose du tissu cellulaire sous- cutané) Tuberculose > Buruli > Lèpre Poids social et économique (traitement long, cher) Traitement médical aléatoire (chirurgie +++) Prise en charge lourde en situation isolée

GENERALITES 1er cas d’ulcère de Buruli décrit par Sir Albert Cook en 1897 en Ouganda Maladie récente en Côte d'Ivoire (1ère observation en 1978, près du Lac KOSSOU chez un enfant de nationalité française) Évolution explosive et remarquable en 20 ans Recensement des cas difficile (+ de 15000 cas entre 78 et 99)

Augmentation annuelle du nombre de cas GENERALITES Distribution mondiale du Buruli Augmentation annuelle du nombre de cas entre 78 et 97

GENERALITES Marécages, lacs, cours d'eau, barrages hydro-électriques, exploitations hydro- agricoles, terrains de golf. Mode de transmission inconnu (probablement / traumatisme cutané et contact avec eau et terre) Rôle possible des punaises aquatiques carnivores (Naucoridae) Barrage électrique de Sakassou

GENERALITES Après inoculation, incubation 6 à 8 semaines puis Prolifération du Mycobacterium ulcerans Toxine Mycolactone(action immunosuppressive) Nécrose tissu graisseux sous- cutané (milieu stimulant) Thromboses vasculaires (mauvaise diffusion des antibiotiques)

GENERALITES Et puis …… « guérison spontanée » après plusieurs semaines soit arrêt de prolifération du mycobacterium ulcerans, soit neutralisation de la toxine, soit arrêt de production de la toxine.

NOTRE EXPERIENCE 87 patients successifs (52 H / 35 F) mars 2003 à juin 2004 à Kokumbo Âge moyen: 26 ans (2- 71 ans), 77% < 15 ans.

STADES D’ÉVOLUTION Phase pré- ulcéreuse ou nodulaire Phase de cellulite (oedémateuse)

STADES D’ÉVOLUTION Phase ulcéreuse Phase de cicatrisation et de séquelles

LOCALISATIONS Membre supérieur : 19 cas (21%)

LOCALISATIONS Membre inférieur : 65 cas (71%)

LOCALISATIONS Abdomen : 4 cas (4%) Scrotum et pénis: 2 cas Thorax: 2 cas dont 1 sein (2%) (2%)

DIAGNOSTIC POSITIF Sujet de moins de 15 ans vivant dans une zone d’endémie connue présentant une lésion ulcéreuse sur un membre (85% des cas, 92% à Kokumbo)  BAAR: culture sur Löwenstein- Jensen 30 à 32 °C, à pression d’oxygène < pression atmosphérique et 5,4 <pH< 7,4 mais incubation > 6 à 8 semaines Histopathologie sur biopsie, recherche d’ADN positive par PCR Pas réalisable à l’ACA ou GMC

DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL Phase pré- ulcéreuse : cellulite bactérienne Phase ulcéreuse : carcinome épidermoïde ulcéré, noma, leishmaniose ulcérée, pian, actinomycose.

COMPLICATIONS - SEQUELLES Surinfections (staphylocoques, anaérobies, tétanos) Septicémie- gangrène- Décès Ostéomyélites aiguës, chroniques (8%) soit hématogènes soit par contiguïté GRAVISSIMES Hémorragies, anémie chronique

COMPLICATIONS - SEQUELLES Rechutes: 15 à 30% (locales/ excision insuffisante, à distance/ propagation hématogène ou lymphatique

COMPLICATIONS - SEQUELLES Séquelles fonctionnelles (rétractions, déformations, ankylose articulaire, raideurs, paralysies, amputations, cécité, surdité)

COMPLICATIONS - SEQUELLES Séquelles cutanées: cicatrices chéloïdes, hypertrophiques; carcinome spinocellulaire (ulcère de Marjolin) sur cicatrice instable ou ulcère persistant après plusieurs années

TRAITEMENT Prévention Médicamenteux Éducation sanitaire: mise en garde des populations rurales au risque de contamination par le milieu hydro tellurique lors de la fréquentation des points d’eau. Difficile Détection précoce des formes nodulaires Médicamenteux Rifampicine, rifabutine, clarithromycine, azithromycine, streptomycine et l’amikacine Associations rifampicine- amikacine, rifampicine- dapsone Héparines à visée anti- thrombotique Antibiothérapie contre les surinfections (staph, strepto, pseudomonas, corynebacterium) Vaccination antitétanique- BCG Pas de protocoles validés - Observance

TRAITEMENT Local: les pansements itératifs sans anesthésie ou sous AG Sur 87 patients: Nombre total d’actes thérapeutiques: 1316 (1119 pansements en soins externes et 197 actes chirurgicaux sous anesthésie générale), soit environ 15 actes par patient (1 à 70 par patient), 1 patient sur 3 est passé au bloc opératoire. Formes peu étendues nodulaires ulcéreuses (salle de soins)  Formes multiples ou très étendues (bloc opératoire)

TRAITEMENT But: Éradiquer le buruli, relancer le bourgeonnement pour pouvoir recouvrir par la greffe. Local: les pansements itératifs sans anesthésie ou sous AG Le décapage ou détersion manuelle Les protocoles antiseptiques et détersifs locaux La greffe de peau Autres techniques

TRAITEMENT Le décapage ou détersion manuelle brossage +/- H2O2 karscher®, curetage excision carcinologique (attention aux éléments nobles) au bistouri (zone saine)

TRAITEMENT Le décapage ou détersion manuelle

TRAITEMENT Le décapage ou détersion manuelle Amputation si: mise en jeu du pronostic vital (hémorragie incontrôlée, septicémie, gangrène) impossibilité ou échec de la chirurgie reconstructrice, destruction extensive du tissu osseux et des parties molles disparition des possibilités de fonctionnement d’un membre.

TRAITEMENT Les protocoles antiseptiques et détersifs locaux Bétadine® rouge- Sérum physiologique - bétadine® jaune Coût - Efficacité ? Dakin® - Miel sauvage local Charbon actif (Actisorb®, Carbonet®) Coût Tulles pro- inflammatoires (Gélonet®, Tulle gras®) Coût

TRAITEMENT La greffe de peau

TRAITEMENT Autres techniques possibles Effet favorable du chauffage des lésions (circulation de vapeur ou de liquide chaud à 40°C au niveau d’un membre) Caisson hyperbare? Difficile en situation isolée VAC® ? Difficile en situation isolée Coût +++

DISCUSSION Coût, encombrement, lourdeur logistique Certains patients: 70 actes chirurgicaux Nécessité de personnel, de matériel chirurgical et anesthésique important

DISCUSSION Autres problèmes: Pas de dermatome, ni d’expandeur de greffons (greffes de peau totale + limitées en taille et en possibilité de couverture) Amélioration des conditions au GMC

DISCUSSION Sous- développement, âge, compréhension, observance des dates de pansements, tradithérapie, soins apporté au pansements par les enfants, investissement financier pour la santé ? facteurs limitants.

DISCUSSION Traitement médical difficile (Pas de protocole validé, observance thérapeutique, revente MDC) Nécessité de surveillance en hospitalisation (sanatorium) Possible en dispensaire moyennent finances au profit des autorités et praticiens locaux. Pas de lits d’hospitalisation en ACA et en GMC (Notre mission ?)

DISCUSSION Quelques structures, rares (Yamoussoukro) mais: Problème financier et d’accessibilité (contrôles routiers réguliers et racket) Pas de politique réelle de prise en charge du Buruli en Côte d’Ivoire: d’autres priorités? (Lesquelles ?)

DISCUSSION Les localisations à risque: Main Pied Abdomen Faible épaisseur des masses musculaires (ostéite pour le pied, la main et atteinte péritonéale pour l’abdomen)

DISCUSSION Conséquences économiques - atteinte des zones à haut potentiel économique (zones hydro-électriques et agricoles): frein au développement - coût direct de la prise en charge très élevé : 175.000 à 200.000 FCFA par mois par malade, soit 600.000 à 1.200.000 FCFA pour le traitement d'un malade Conséquences sociales - déscolarisation - désorganisation de la structure familiale - marginalisation - Pb réinsertion

DISCUSSION   Données de l'enquête nationale sur l'ulcère de Buruli en Côte d'Ivoire - Novembre 1997 Valeurs nombre cumulatif de cas depuis 1978 10382 nombre de cas prévalents en 1997 4642 nombre moyen de cas incidents par an depuis 1996 2000 taux de séquelles 13% taux de létalité 15% proportion d'enfants parmi les cas UB 57% taux d'invalidité parmi les enfants UB 34% taux de non scolarisés ou de déscolarisés parmi les enfants UB 33%

CONCLUSIONS Ulcère de Buruli: véritable problème de santé publique Poids social et économique énorme (traitement long et cher) Traitement aléatoire si stade de la maladie évolué. Traitement reconnu: chirurgical par excision puis greffe cutanée Formes plus limitées: pansements réguliers voire quotidiens (détersion puis cicatrisation dirigée)