Orientation diagnostique devant une céphalée S.Canaple UNV Amiens
Interrogatoire mode d’installation (aigu/progressif) et mode évolutif (continu/accès) circonstances d’apparition : trauma crânien, médicaments ou toxiques, céphalée posturale post PL, effort (hémorragie méningée) terrain : migraine < 40 ans, AVF homme jeune, Horton > 60 ans caractéristiques : intensité parfois subjective, type non spécifique topo: névralgies symptômes associés : aura migraine AEG, PPR Horton, larmoiement + œil rouge + narine bouchée AVF )
Examen clinique général : PA, température neuro : conscience, raideur méningée, FO local : artères temporales, yeux, sinus, souffle, peau (zona)
Exemples Céphalée brutale hémorragie méningée Céphalée brutale + signes neuro déficitaires AVC Céphalée brutale (ou cervicalgie) + CBH dissection carotidienne Céphalées et paralysie du III anévrysme (brutal), engagement temporal (progressif) Céphalées récentes progressives isolées HIC (tumeur, thrombophlébite cérébrale, hématome sous-dural) méningite Céphalées récentes progressives + signes neuro déficitaires et/ou crises d’épilepsie +/- syndrome méningé +/- fièvre méningo encéphalite abcès cérébral thrombophlébite cérébrale
exemples Céphalées récentes progressives ou chroniques de topographie fixe MAV, méningiome Céphalée du sujet âgé Horton Céphalées extraneurologiques : médicaments (dérivés nitrés, inhibiteurs calciques, théophyllline, anti H2 antisécrétoires, IPP…), toxiques (CO), HTA aiguë (phéochromocytome, encéphalopathie hypertensive, éclampsie), œil ( glaucome aigu), sinus (sinusite aiguë) Migraine = diagnostic d’élimination
Cas clinique Madame M ., une jeune femme de 30 ans, consulte pour des céphalées survenant par crises. Parmi ses antécédents médicaux, on retient un asthme. Ses habitudes toxiques consistent en un tabagisme à 10 cigarettes par jour depuis l’âge de 18 ans. Elle présente une surcharge pondérale avec un poids de 80 kg pour 1m60. Elle prend une contraception orale par Trinordiol® depuis son dernier accouchement il y a 4 ans.
Crises récurrentes de céphalées Intervalles libres de douleur 1/ Sur quels critères présents dans l’observation ou à rechercher à l’interrogatoire allez-vous retenir le diagnostic de migraine chez cette patiente ? Crises récurrentes de céphalées Intervalles libres de douleur Critères IHS (voir tableau) Rechercher l’existence d’auras (tableau) Principal diagnostic différentiel : céphalées de tension (tableau)
CRITERES DIAGNOSTIQUES DE LA MIGRAINE (IHS) A . Au moins 5 crises remplissant les critères B à D B . Crises de céphalées durant 4 à 72 heures (sans traitement) C . Céphalées ayant au moins deux des caractéristiques suivantes : localisation unilatérale caractère pulsatile intensité modérée ou sévère aggravation par les activités physiques de routine telles que montée ou descente des escaliers D. Durant les céphalées, au moins l’un des caractères suivants : nausées et/ou vomissemnts photophobie ou phonophobie
CRITERES DIAGNOSTIQUES DE L’ AURA TYPIQUE (IHS) A . Au moins 2 crises remplissant les critères B à D B . L’aura consiste en au moins 1 des symptômes suivants, mais sans déficit moteur : symptômes visuels entièrement réversibles, positifs (phosphènes) et/ou négatifs (scotome) symptômes sensitifs entièrement réversibles, positifs (picotements) et/ou négatifs (engourdissement) troubles du langage entièrement réversibles C . Au moins 2 des caractères suivants : symptômes visuels homonymes et/ou symptômes sensitifs unilatéraux au moins 1 symptôme d’aura se développe graduellement en ≥ 5 min et/ou les différentes auras se succèdent sur ≥ 5 min chaque symptôme de l’aura dure ≥ 5 min et ≤ 60 min Aura typique avec céphalée migraineuse : une céphalée répondant aux critères d’une migraine sans aura commence durant l’aura ou lui fait suite après un intervalle libre de 60 min.
CRITERES DIAGNOSTIQUES DE LA CEPHALEE DE TENSION Céphalées de tension épisodiques au moins 10 épisodes durant 30 minutes à 7 jours avec au moins 2 des caractéristiques suivantes : localisation bilatérale à type de pression ou de serrement intensité légère ou modérée non aggravée par les exercices physiques de routine pas de vomissements pas plus d’un caractère parmi les suivants : nausées, photophobie ou phonophobie Céphalées de tension chroniques ( 3 % de la population) : céphalée présente au moins 15 jours par mois et pendant plus de 6 mois (attention au risque d’abus médicamenteux) Association possible avec la migraine
2/ Quelles mesures (hygiène de vie et thérapeutiques )de première intention pouvez-vous proposer ? éviction des facteurs déclenchants suppression du tabagisme ttt et voie d’administration les mieux adaptés (suppo, spray ou inj si vomissements précoces) à poso suffisante, le plus tôt possible mais seulement lorsque la céphalée est présente. RESPECTER LES CONTRE-INDICATIONS PROPRES A CHAQUE MEDICAMENT.
Traitements de crise 1ère intention : traitements non spécifiques Antalgiques : aspirine seule ou associée au métoclopramide ( Migpriv®) ; paracétamol AINS : kétoprofène (Profenid®…) ; naproxène (Apranax®) ;ibuprofène (Advil®…) ; diclofénac (Voltarène®…)
3/ Quel traitement de seconde intention allez-vous proposer en cas d’échec ? (l’échec est défini par l’absence de soulagement significatif 2 heures après la prise médicamenteuse) 2nde intention : traitements spécifiques de la crise Dérivés de l’ergot de seigle (tartrate d’ergotamine : Gynergène®, ou DHE pernasale : Diergospray® ou DHE inj) Ou agonistes 5 HT 1B/1D : triptans (Imigrane®,Zomig®, Naramig®,Relpax®) à tester sur 3 crises ; en cas d’inefficacité,tester un autre triptan. Possibilité d’indiquer sur la même ordonnance, par exemple AINS + triptan (le triptan sera pris en l’absence de soulagement significatif 2 heures après la prise de l’AINS).
La patiente revient vous voir car ses crises deviennent plus fréquentes et invalidantes. CAS 1 : leurs caractéristiques sémiologiques ne se sont pas modifiées Qu’envisagez-vous ? Les crises migraineuses deviennent plus fréquentes et invalidantes : il faut proposer un traitement de fond dès lors que le patient prend un traitement de crise ≥ 2 fois par semaine pendant plus de 3 mois.
Règles de prescription du traitement de fond RESPECT DES C.I. Augmenter progressivement les doses Attendre 2-3 mois pour juger de l’efficacité Si efficace, poursuivre 6-12 mois puis diminuer progressivement Pas d’association de plusieurs traitements de fond.
Les différents traitements de fond 1ère intention : béta-bloquants sans ASI :propranolol (Avlocardyl®), métoprolol (Lopressor®…)… oxétorone (Nocertone®) amitryptiline (Laroxyl®) 2ème intention : pizotifène (Sanmigran®) flunarizine (Sibelium®) indoramine (Vidora®) 3ème intention : méthysergide (Désernil®) Efficacité ? DHE (Ikaran®,Seglor®…) Attention !!! pas d’association DHE +TRIPTANS ! Toujours respecter 24 heures entre prise d’un ergoté ou dérivé et triptan ! Dans ce cas clinique : il faut tenir compte du terrain : Asthme pas de bétabloquant Surpoids éviter amitryptiline Alternative : traitements non medicamenteux (relaxation, biofeedback, acupuncture…)
Cas 2 . Elle se plaint de céphalées permanentes depuis 1 mois, la réveillant la nuit, et ne sont plus soulagées par le traitement. Il faut évoquer une céphalée symptômatique car les caractéristiques des céphalées se sont modifiées, la différenciant des céphalées habituelles, notamment si : réveil nocturne baisse d’acuité visuelle anomalie de l’examen neuro céphalée brutale en coup de tonnerre
Evoquer HTIC processus expansif intracrânien thrombophlébite cérébrale (association tabac + pilule + migraine) → demander une imagerie cérébrale → attention association migraine + pilule +tabac
La patiente revient consulter un an plus tard Elle a interrompu son traitement de fond après 15 jours car il lui a semblé inefficace. Depuis une promotion professionnelle survenue il y a 6 mois, ses crises ont augmenté en fréquence sur un fond de « mal de tête permanent ». La prise de 6 cp/jour d’une association PARACETAMOL+CODEINE ne la soulage que très transitoirement. Quel diagnostic faut-il envisager ?
Céphalées chroniques quotidiennes par abus médicamenteux = « cercle vicieux » Toutes les molécules peuvent être impliquées mais surtout : Caféine (Lamaline®, Migralgine®, Propofan®, Veganine® …) opioÏdes : codéine ( Migralgine®,Codoliprane® …) dextropropoxyphène ( Antalvic®, Propofan®…) tramadol ( Contramal®, Topalgic ®…)
Traitement de l’abus médicamenteux sevrage hospitalier ou ambulatoire et amitryptiline en traitement de fond Prévention de l’abus : agenda des crises (comptabilité) traitement de fond (le mettre en route à temps, dès que ≥ 2 ttt de crise/sem pendant plus de 3 mois) éducation (pas d’automédication abusive, accepter un résultat incomplet s’il est significatif : ↓ de 50% de la fréquence , intensité ou durée des crises )