1, avenue Léon-Journault 92318 Sèvres - France Centre international d’études pédagogiques
Quelques réflexions autour du manuel de langue
Un principe fondamental : « un cours n’est pas conçu pour celui qui enseigne mais pour celui qui apprend ! »
DES CONTRAINTES ET QUESTIONS
Les contraintes auxquelles il convient de se plier peuvent être de plusieurs ordres : 1. Institutionnelles (programmes et programmations) 2. Factuelles (niveau et besoins des élèves) 3. Organisationnelles (effectifs, etc.)
4. Temporelles (durée des cours, temps à disposition…) 5. Logistiques (matériel à disposition) 6. Pédagogiques (approche, pré-requis, etc.) Les 9 principales questions à se poser seraient par conséquent :
4. Qu’est-ce que l’enseignant doit faire ? 5. Savent-ils le faire ? 6. On aura besoin de quoi ? 4. Qu’est-ce que l’enseignant doit faire ? 7. Combien de temps va-t-on y consacrer ? 3. Qu’est-ce qu’on va faire faire à l’élève ? 8. Quelles activités et quelle progression ? 2. Comment l’organiser ? 1. On doit enseigner quoi ? 9. Quelle méthodologie ? À leur tour décomposées en 20 questions :
0. A quelle(s) compétence(s) correspond l’objectif ? 1. À quel(s) objectif(s) ce cours doit-il répondre ? 2. À quel partie du programme correspond-il ? 3. À quoi fait-il suite ? 4. L’objectif correspond-il à de véritables besoins des élèves ?
5. L’objectif visé correspond-il à la ZPD des apprenants ? 6. Quels sont les pré-requis nécessaires ? 7. Les apprenants maîtrisent-ils suffisamment ces pré-requis ? 8. Combien de temps puis-je consacrer à cet objectif ?
9. Combien de temps vais-je consacrer à cet objectif ? 10. Quels sont les centres d’intérêt de mes élèves ? 11. Puis-je en tenir compte ? 12. Quel support ou thème vais-je utiliser ?
13. Quel matériel sera nécessaire ? 14. Ce matériel est-il à disposition ? 15. Quelle approche proposer ? 16. Quelle progression interne proposer ?
17. Quelle animation et organisation de classe ? 18. Quel sera le rôle des élèves ? 19. Qu’est-ce qui est véritablement attendu des élèves ? 20. Que fera-t-on après ?
DÉFINIR ET FORMULER SES OBJECTIFS
« Si tu ne sais pas où tu vas, tu risques de mettre longtemps pour y arriver… » (proverbe attribué aux Touaregs)
Une formulation complète comporte : 1. Un intitulé précis : à la fin de la séquence, les élèves devront être capables de… 2. La liste des critères de réussite 3. Le seuil d’acceptabilité : je considèrerai que l’objectif est atteint si x % des élèves réussissent x % des items proposés
LA NOTION DE PROGRESSION INTERNE
On imaginera une approche pédagogique (et progressive), qui aille De la découverte à l’exploitation 2. De la sensibilisation au perfectionnement 3. De la réception à la production 4. Des objectifs simples aux objectifs complexes (intégration)
5. Des savoirs aux compétences 6. Du global au détaillé 7. Du paratexte au texte 8. Du fond à la forme 9. Du sens au fonctionnement 10. Des outils fermés aux outils ouverts
Exemple de typologie d’activités écrites : critère retenu : activités fermées vs activités ouvertes activités « fermées » activités « ouvertes » Caractéristiques : - Pas de production - Réponse proposée - Activité attendue : choix - Réponse unique - Réponse univoque - Compétences de compréhension - Notation objective Caractéristiques : - Production - Réponse à imaginer - Activité attendue : création - Réponses multiples - Réponses parfois équivoques - Compétences de production - Notation subjective © CIEP
Exemples d’activités classées selon un axe « fermé / ouvert » - Questionnaire à choix multiple (QCM) - Tableau - Classement - Appariement - Texte lacunaire - Transformation - Questionnaire à réponse ouverte courte (QROC) - Production guidée - Synthèse - Analyse - Création Etc. (inventaire non exhaustif) © CIEP
QUELQUES PRINCIPES (16) POUR L’ELABORATION DE MANUELS ET LA GESTION DE CLASSE
1. Considérer l’apprenant dans sa globalité, tout en tenant compte des différences individuelles :
Données linguistiques, psychologiques, sociologiques, cognitives, stratégiques, pragmatiques, etc.
Concrètement : 1. L’apprenant n’est pas une « machine à apprendre » 2. Tout groupe est hétérogène 3. Le manuel doit tenir compte de cette hétérogénéité (à travers la différenciation pédagogique successive par ex.) On se dirige vers une pédagogie véritablement centrée sur l’apprenant
2. Privilégier une pédagogie active et participative : - Proposer des activités où l’élève doit « faire » - Faire participer les élèves au travail et à la gestion de la classe
« Ne rien faire, tout faire faire, ne rien laisser faire » (Louis PORCHER)
3. Ne pas passer à l’objectif suivant si l’objectif visé n’est pas atteint : Dans la perspective d’un enseignement efficace, le plus important n’est pas la couverture du programme mais les acquisitions réelles des apprenants
Le manuel doit proposer des activités de remédiation permettant une réelle acquisition des compétences à partir du moment où l’évaluation a montré et identifié des lacunes Attention : la remédiation n’est pas une simple redite
4. L’apprenant a le droit de se tromper… …et l’enseignant a le devoir de remédier (cf. principe précédent)
5. Etre clair dans ses objectifs (et sélectif dans la correction des erreurs) Vouloir tout aborder ou tout corriger se révèlera contre productif (confusion, découragement, multiplication des objectifs…)
6. Proposer une évaluation critériée et non pas normative
Les critères sont définis par un référentiel sous la forme d’attendus. La norme linguistique peut être définie comme l’ensemble des règles qui régissent le fonctionnement de la langue. L’évaluation normative cherchera à positionner l’apprenant par rapport à cette norme. Les critères sont définis par un référentiel sous la forme d’attendus. L’évaluation critériée cherchera à positionner l’apprenant par rapport à ces critères avec un principe : on ne peut évaluer (et pénaliser) que ce qu’on a enseigné. © CIEP
Écart pénalisé dans une perspective normative NORME LINGUISTIQUE Écart pénalisé dans une perspective normative Écart « toléré » dans une perspective critériée CRITÈRES Écart pénalisé dans une perspective critériée NIVEAU DU SUJET Sujet à évaluer © CIEP
7. Utiliser le niveau et le registre de langue adéquats On se sera préalablement posé la question de savoir de quel français les apprenants ont besoin
8. Ne pas exiger de faire faire toutes les activités prévues dans le manuel : de quoi mes apprenants ont-ils besoin ?
9. L’apprentissage se faisant en spirale, prévoir des retours et des révisions De plus, « rien n’est jamais acquis… »
10. Baser l’apprentissage sur le vécu et les expériences des apprenants Pour notamment leur permettre de donner du sens à leurs apprentissages
11. Proposer des activités qui rendent le cours vivant et actuel Les thèmes doivent intéresser les apprenants, pas forcément les concepteurs l’enseignant Attention cependant à ne pas tomber dans la démagogie !
12. Avoir une approche réfléchie de l’usage de la langue maternelle Le « tabou de la LM » n’existe plus mais son utilisation doit être réfléchie (Cf. activités de médiation par ex.)
13. Maintenir un dosage adéquat dans la répartition des rôles enseignant / apprenants
14. Proposer l’apprentissage des aptitudes et compétences utiles à l’apprenant Et pas forcément tout
15. Ne pas introduire (et ne pas enseigner) tout ce qu’on sait Mais ce dont l’apprenant a besoin pour progresser et ce qu’il est capable d’assimiler
16. Favoriser le décloisonnement entre les différentes composantes linguistiques De plus, on ne peut réfléchir sur une langue qu’on ne maîtrise pas. Donc, priorité à la pratique langagière et non pas à la description linguistique…
POURQUOI DES DOCUMENTS AUTHENTIQUES ?
Authentique s’oppose ici à « pédagogique », c’est-à-dire qui a été conçu pour une classe et une situation d’apprentissage
Le document authentique permet : 1. De travailler différemment et « en situation » 2. D’aborder les aspects civilisationnels 3. De travailler en contrastif
4. De « démystifier » l’entrée dans la langue authentique 5. De multiplier les ressources à disposition 6. De renforcer la motivation des élèves
7. De varier les supports et les approches 8. De donner une image plus actuelle de la langue enseignée 9. De renforcer la crédibilité de l’enseignement dispensé
10. De travailler du global au détaillé 11. De travailler l’ensemble des aspects textuels (image, typographie… 12. De renforcer l’autoformation linguistique permanente de l’enseignant.
1, avenue Léon-Journault Pierre-Yves ROUX roux@ciep.fr Alice CORRE Expert associé 1, avenue Léon-Journault 92318 Sèvres - France