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La légende noire des pirates

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Présentation au sujet: "La légende noire des pirates"— Transcription de la présentation:

1 La légende noire des pirates
A l'abordage ! La légende noire des pirates Fabrice Delsahut Université Inter âges

2 Conférence 3: Un monde d'océans (2ème partie)

3 I. Le chat à neuf queues et la gigue du bout de chanvre
Mutins et déserteurs dans la marine Il existe en mer trois formes de désobéissance : la plus extrême est la mutinerie, ensuite viennent la désertion (individuelle ou collective) et l’insoumission (ne pas répondre à la conscription par ex.). La mutinerie varie selon les types de trafic et intéresse toutes les formes de marine. La plus exposée est la marine marchande. Elle est bien évidemment liée aux activités commerciales. Dans la marine militaire, elle est exceptionnelle durant le XVIIIe siècle sur les vaisseaux d’Etat. On en dénombre seulement 6 avant Elle prend ensuite une ampleur inhabituelle pendant la crise révolutionnaire (avec une dimension politique à la clé). On la retrouve aussi chez certains navires pirates notamment quand un capitaine fait preuve de trop de clémence pour les membres du bateau accosté.

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5 Le système des classes et les désertions
Les armements corsaires sous Louis XIV jusqu’à la Révolution, sont le terrain permanent de révoltes et de désertions. Les raisons tiennent à la fois à la composition disparate des équipages et aux conditions spécifiques d’engagement des matelots. La désertion n’est pas uniquement liée à la marine militaire. En revanche, elle est « historiquement » liée aux conditions de la conscription imposée par le Roi. Les flottes de guerre permanentes se développent en Europe au cours du XVIIème siècle. La course aux armements navals va de pair avec la lutte pour la maîtrise des mers. La marine militaire « consomme » beaucoup d’hommes (500 en moyenne sur un bâtiment de combat vers 1670, 700 à 800 sur un « 74 canons » des années 1780 ; ¾ de matelots et d’officiers mariniers, ¼ de soldats). Les équipages des marines de guerre européennes se recrutent au moyen d’engagements volontaires et aussi de réquisitions ordonnées par le souverain dans les agglomérations portuaires. Louis XIV veut que son royaume devienne une grande puissance maritime. Outre un programme ambitieux de construction navale, l’État expérimente un nouveau système de recrutement des équipages de la marine royale, qui doit se substituer aux enrôlements forcés. Cette opération est impulsée à partir des années par Colbert, contrôleur général des finances, mais aussi patron de la marine. La presse, embarquement forcé de matelots raflés dans les ports pour la flotte de guerre, est donc remplacée par le système des classes : tous les marins et pêcheurs des côtes du royaume sont inscrits et répartis en trois ou quatre classes qui doivent servir à tour de rôle sur les vaisseaux du roi. Cela entraine une désertion particulièrement fréquente, sinon endémique aux Iles et sur les corsaires. Pour beaucoup d’historiens, elle représente une « soupape de sûreté » alternative à la mutinerie, dont elle constitue, surtout lorsqu’elle est collective, une forme atténuée. Elle est moins présente chez les pirates car c’est le milieu qui offre les meilleures conditions ou perspectives de vie.

6 Une certaine mansuétude
Les mutins et autres déserteurs encourent normalement des peines ou des châtiments importants. Les mutineries et les désertions sont des réponses à la dureté extraordinaire des conditions de vie à bord des navires, à la dureté aussi des rapports humains, des relations hiérarchiques. Cette résistance est souvent aveugle et non-productive. Il arrive cependant qu’elle soit organisée et efficace et permet ainsi d’éviter les lourdes sanctions encourues. Cette « mansuétude » faite par le pouvoir royale dans la répression de ces divers types de désobéissance est due au fait que le matelot est une denrée rare et trop nécessaire pour qu’on lui applique à la lettre, sauf dans quelques cas à titre d’exemple, les textes répressifs des ordonnances. « Ce ne sont pas les matelots mutins et insoumis qui alimenteront la chiourme des galères… » écrit Alain Cabantous.

7 Les pirates, pour asseoir leur autorité et pour conserver leur notoriété, sont en revanche capables des plus épouvantables des sévices. L’objectif est soit de régler un différent au sein de l’équipage, soit de faire parler les prisonniers sur les possibles caches. On dit alors « donner la géhenne » ce qui signifie avoir recours à la torture. Le terme « géhenne » tiré de la bible est ici utilisé dans son sens métaphorique d’enfer. Les châtiments sont d’une rare violence et plus sadiques les uns que les autres et les chances de survivre sont minces.

8 L’île Robinson Crusoe En 1703, Alexander Selrik rejoint une expédition corsaire dans l'océan Pacifique sous le commandement du capitaine William Dampier. Le navire de Selkirk est commandé par le capitaine Thomas Stradling. En octobre 1704, après une campagne décevante contre les bateaux et les villes des Espagnols, l'expédition se sépare en plusieurs groupes. Le capitaine Stradling fait escale aux îles Juan Fernandez, au large de Valparaíso, pour approvisionner le bateau en bois et en eau avant de repartir vers l'Angleterre en octobre Le bateau ayant subi de gros dommages dans les batailles et nécessitant un carénage, Selkirk veut le réparer avant de franchir le cap Horn. Devant le refus obstiné du capitaine Stradling, Selkirk, sous le coup de la colère, refuse de poursuivre la route et exige qu'on le laisse sur l'île Mas-a-Tierra, dans l'archipel Juan Fernández, à quelque 400 milles des côtes chiliennes. Le capitaine l'abandonne, trop heureux de se débarrasser d'un marin mêlé à toutes les tentatives de mutinerie depuis le départ d'Angleterre. Selkirk vécut quatre ans et quatre mois sans la moindre compagnie humaine. Tout ce qu'il possédait sur l'île était un mousquet, de la poudre à canon, des outils de charpentier, un couteau, quelques vêtements et de la corde. Après deux années de solitude, il aperçoit un navire et se signale à lui. Cependant, ce navire est espagnol et loin de le sauver, l'équipage l'aurait pendu comme pirate s'il ne s'était enfui et caché à temps. Il doit encore patienter près de deux années et demie supplémentaires avant que William Dampier ne le secoure le 2 février 1709, au cours d'une expédition menée par le capitaine Woodes Rogers. Lorsqu'il rentre enfin à Londres en 1711, il est pauvre. Il rencontre l'écrivain Richard Steele, qui écrit son histoire et la publie dans le journal The Englishman le 3 décembre Par la suite, il retourne chez lui en Écosse, où il devient une célébrité locale. En 1966, l'île chilienne Mas-a-Tierra, en hommage conjoint à Alexandre Selkirk et au roman Robinson Crusoé inspiré par son aventure, a été rebaptisée île Robinson Crusoe. De tels cas ne sont pas rares. Philip Ashton, prisonnier des pirates réussit à s’échapper sur l’ile de Roatan (Golf du Honduras) sans armes ni d feu ni souliers. Il y survit neuf mois jusqu’à l’arrivée d’un homme en pirogue qui lui donne du feu, de la viande et des outils. Cela lui permet de tenir jusqu’à ce qu’un navire anglais, le Diamant, le ramène à Londres.

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10 La flagellation Parmi eux, la flagellation est monnaie courante. Les pirates se servent d’un fouet nommé « le chat à neuf queues », fouet traditionnel de la marine. Il se compose d’un manche de bois auquel sont fixées neuf cordes (en général les brins des trois torons d’un filin) ou lanières de cuir dont chaque extrémité mobile se termine par un nœud. Le supplicié effectue parfois lui-même les nœuds. Des objets coupants peuvent être ajoutés. Trente neufs coups de fouets sont généralement administrés. Jamais au delà de trente neufs, car selon l’Ancien Testament et la Loi de Moïse, un homme ne peut supporter plus de quarante coups de fouet sans mourir. Le fouet ne sert qu’une seule fois car les cordes ensanglantées risquent transmettre des infections. Le « cat o’nine tails » est utilisé comme sanction disciplinaire dans l’armée britannique. Supprimé en 1838 dans l’armée de terre, il est néanmoins rétabli quelques années plus tard. Il est aboli vers 1870.

11 La cruauté au cœur du mouvant
Toute infraction au règlement est sanctionnée par une punition. Bénigne pour les faits légers (corvées, rétention de boisson, de tabac, coups de corde…) elle peut devenir terrible pour les faits reconnus graves (pendaison, noyade ou cale). La Marine de l’Etat et parfois les pirates rivalisent de cruauté et de perfidie dans l’art d’élaborer des supplices. Le supplice de la bouline consiste à faire passer un homme entre une double haie de matelots qui le frappent avec un morceau de filin. L’expression « naviguer à la bouline » signifie naviguer au plus près du vent. Le supplice du « carénage » ou de « la grande cale » est une alternative à la pendaison. Il consiste à balancer par-dessus bord un prisonnier déshabillé et accroché à une corde par ses pieds et ses mains. Les pirates le font passer sous la coque recouverte de coquillages tranchants qui lacèrent le supplicié avant que ce dernier ne soit récupéré de l’autre côté du navire. Son sort dépend de la hardiesse des compagnons qui le halent. La manœuvre reste longue et les témoignages disent que la grande cale équivaut presque toujours à une condamnation à mort. La « petite cale » ou « cale mouillée » consiste à précipiter le condamné dans l’eau, du haut d’une vergue. Il est lié à un cordage, qui file dans une poulie au bout de la grand-vergue. On le lâche, il tombe dans la mer, où il reste aussi longtemps que le prévoit son jugement ; puis on le remonte et on recommence… Il est ainsi plongé et replongé autant de fois que l’exige la punition. Patrick Villiers évoque ainsi le sort qui est réservé aux hommes du Petit Lion de Dieppe en Ils sont « soumis à l’estrapade humide, c'est-à-dire accrochés à une drisse passée dans une vergue et précipités dans la mer, les membres disloqués. » La « cale sèche » est une variante dans laquelle on arrête le cordage à mi-course, d’un coup sec, avant que le malheureux n’atteigne l’eau. C’est la pire des petites cales car les risques de fractures sont nombreux.

12 Keelhauling in the Tudor period (1485–1603)
Keelhaul: Faire passer sous la quille

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14 The keelhauling, according to tradition, of the ship's doctor of Admiral Jan van Nes. Lieve Pietersz. Verschuier. Entre

15 Le supplice de la planche n’est attesté qu’une fois, en 1829, quand des marins néerlandais du Vhan Fredericka sont forcés d’avancer sur une planche accrochée au flanc du navire et se noient.

16 Le jugement Les risques qu’encourent les pirates, une fois capturés, dépendent de leur statut. Les corsaires, de part leur lettre de marque, ont la vie sauve. Les pirates, eux risquent au mieux la prison, au pire la potence. Cette différence est soulignée par Washington Irving quand il écrit qu’« il n’y a en effet qu’un pas du corsaire au pirate ; tous deux combattent pour l’amour du butin, seulement le dernier est le plus brave, puisqu’il affronte à la fois l’ennemi et le gibet. » En 1700, une nouvelle loi est introduite, autorisant le jugement et l’exécution rapide des pirates, où qu’ils se trouvent. Avant l’apparition de cette loi, ils doivent être ramenés à Londres pour y être jugés et exécutés à marée basse à Wapping. La Loi pour la suppression la plus efficace de la piraterie permet également de renforcer l’usage de la peine de mort et offrent des récompenses pour toute résistance aux attaques pirates, mais le plus important c’est qu’elle remplace le jugement des jurés par une cour d’officiers de la marine de guerre. Les Lois et Règlements actuellement en vigueur contre les pirates de 1720, accélèrent encore davantage les exécutions : « Si, alors qu’ils tentent un abordage, les pirates sont vaincus, les vainqueurs ont le droit de les pendre à la grande vergue sans procès en bonne et due forme. Dans le cas où l’on préfère les déférer au juge du port le plus proche, si ce magistrat décline l’honneur de les juger ou encore retarde leur procès au point de mettre les vainqueurs en danger, ceux-ci sont autorisés à se faire justice eux-mêmes. »

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18 Les pontons Pour un homme du large, les infâmes geôles malsaines et surpeuplées représentent un véritable enfer. Les pires sont les prisons flottantes, les « pontons », amarrés dans les rivières ou dans les baies ou ancrées en rade des ports afin que toute évasion soit impossible. Inventés en 1778 par les Anglais, il s’agit de vieux bateaux suintants, incapables de prendre la mer. Les conditions de vies à bord de tels endroits réservent une mort lente aux infortunés qui ont échappé à la potence et ne peuvent soudoyer les geôliers pour un peu de nourriture et de lumière. Le corsaire français Jacques Broquant y séjourne sept ans, de 1804 à 1811, pendant lesquels il tente de s’évader à dix-neuf reprises.

19 La potence Bien que la vie maritime comporte plus de dangers mortels que la potence, cette dernière reste le châtiment traditionnel des pirates. Aux XVIIème et XVIIIème siècles, la justice pour les pirates est rendue assez sommairement, et beaucoup finissent leur vie en « dansant la gigue du bout de chanvre » ce qui signifie la danse de mort au bout du nœud coulant. Les exécutions publiques sont considérées comme des divertissements et les journaux racontent chaque détail, rapportant les derniers mots du condamné, les prières récitées par le prêtre, et les ultimes moments d’agonie sur l’échafaud. Les pirates sont « pendus haut » afin qu’ils soient vus de loin, et « pendus court » afin d’économiser la corde puisque, selon l’expression répandue, un pendu ne valait pas la corde pour le pendre. En Angleterre, la plupart de ces exécutions ont lieu au « Quai de Exécutions », en bord de Tamise, à Londres. Un échafaud est dressé à marée basse et, une fois le condamné supplicié, son corps reste pendu jusqu’à ce qu’il soit recouvert par trois marées avant d’être décroché.

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21 Au-delà de la mort: le gibet
Quelques fois l’exemple va au-delà de la mort. Les pirates les plus célèbres sont ainsi mis dans une cage de gibet puis suspendus aux avant-ports afin qu’ils servent d’exemple. C’est le cas de William Kidd dont le cadavre cerclé de fer est suspendu en 1701 au-dessus des eaux de la Tamise, à Tilbury Point, avant-port de Londres. Il est l’une des premières victimes de la nouvelle loi pour la suppression de la piraterie. Celle-ci est d’ailleurs partiellement accélérée afin de pouvoir lui être appliquée. Les corps, enduits de goudron pour ralentir la décomposition, sont enfermés dans une cage de fer faite sur mesure puis exhibés à la foule comme moyen de dissuasion. Ils sont pendus aux fourches patibulaires aux entrées des ports, laissés à se balancer dans les airs jusqu’à ce qu’ils soient réduits à l’état de squelette, ce qui peut prendre plusieurs mois. L’armature de fer est suffisamment étroite afin que les ossements soient encore maintenus, tout au moins le crâne, une fois les chairs disloquées. Les corps de Charles Vane à Port Royal (Jamaïque), William Fly à Boston (Etats-Unis) et Jack Rackham à Spanish Town (Jamaïque) sont traités de cette manière. Après 1700, la nouvelle loi accélère les exécutions et ce n’est plus un ou deux cadavres qui pendent aux gibets des lignes de marées, mais parfois vingt ou trente d’un coup. En 1722, lors d’une affaire particulièrement significative, l’Amirauté Britannique juge 169 pirates de l’équipage de Bartholomew Roberts et en exécute 52 d’entre eux à Cape Coast Castle sur la côte de Guinée. Les 72 Africains qui se trouvent à bord, qu’ils soient libres ou non, sont vendus comme esclaves, alors que certains viennent de s’affranchir peu de temps auparavant. Ce genre d’avertissement sinistre est censé décourager les futurs candidats à la piraterie et à mesurer les risques qu’ils encourent en résistant à la discipline du travail. De fait, bon nombre d’entre eux préfèrent mourir au combat plutôt que de finir ainsi.

22 II. Le matelotage Des assauts... de galanterie ?
A la différence du monde de la boucane où quelques hommes arrivent à s’installer et à prendre femme ou compagne, celui de la piraterie condamne davantage les hommes à l’aventure…amoureuse. Après une campagne en mer, la tentation de « paillarder » est grande. Les cabarets proposent les services de nombreuses prostituées. Ce sont généralement des esclaves noires ou des Amérindiennes enlevées sur Terre Ferme qui sont les victimes. Oexmelin note le « bon accueil » réservé aux flibustiers par des femmes indiennes du Honduras. Dés 1562, les Espagnols notent que les aventuriers ont des contacts avec les femmes Caraïbes de Terre Ferme. Dans les tavernes court le bruit des belles et peu vêtues Brésiliennes et Antillaises mises « à la disposition » du voyageur isolé. Cela peut-être dans le but de favoriser les voyages transatlantiques ? Les femmes blanches sont rares. Ces dernières sont souvent amenées par la Compagnie des Indes et sont vendues comme des engagées. Au début du XVIIeme siècle, Etienne Maréchal, originaire de Honfleur et naviguant sur le Régent témoigne de l’étonnante « offre » faite à des chefs guyanais de 3 femmes blanches pour affermir les alliances nouées avec les locaux. Quelques unions temporaires débouchent sur des mariages quand le flibustier a suffisamment gagné de pièces de huit lui permettant de quitter le métier et d’acquérir une plantation.

23 Deux auteurs évoquent leur bonne fortune auprès de jeunes femmes espagnoles de la bonne société :
« Parmi tout cela j’eus aussi une aventure. Nous avions entre nos prisonnières une jeune dame nouvellement veuve du trésorier de la ville qui avait été tué dans cette action […] elle me proposa de me cacher avec elle en quelques endroits de l’île jusqu’à ce que nos gens en fussent partis, qu’ensuite elle m’emmènerait à Guayaquil pour m’épouser ; qu’elle me ferait donner la charge de son mari et qu’elle me mettrait en possession de ses grands biens dont elle jouissait. » Raveneau refuse ses avances : « je me déterminais donc à ne les point accepter, malgré la douleur et les larmes de mon agréable Espagnole. » Ravenau De Lussan, Journal d’un voyage fait à la mer du Sud avec les flibustiers en 1684 et années suivantes, Paris, 1689. « Peu à peu je gagnais l’amitié de religieux, et entre autres, celle du provincial, qui me donna connaissance d’une de ses dévotes qui était veuve, jeune et belle, nommée Juanna Accuedo, riche de 70 000 ou 80 000 cabeses et quarante esclaves qui valent chacun 500 ou 600 livres. Ce bon religieux voulait que j’épousasse cette dame… l’entrée que j’avais chez cette dame m’en fit connaître d’autres avec lesquelles je passais le temps, car l’on vit aussi librement en ce pays-là avec les femmes, comme l’on fait en France […] avant que de partir je fus prendre congé des dames pour les remercier de l’honneur qu’elles m’avaient fait de me souffrir chez elles et de leurs libéralités. Elles me témoignèrent être fâchées de mon départ. » Relation d’un voyage dans les possessions espagnoles de l’Amérique ou Expédition des flibustiers de la Plata commandée par le chevalier H. de Fontenay.

24 L’amatelotage Le « matelotage » est une coutume pirate rapportée dans les Mémoires d’Alexandre Olivier Oexmelin, chirurgien de la flibuste de 1666 à 1672. A bord des bateaux, l’individualisme s’efface souvent au profit de la solidarité et de la fraternité. La dure vie en mer transforme l’entraide en simple tactique de survie. La solidarité naturelle des mathurins se perpétue dans l’organisation pirate. L’équipage est divisé en deux bordées ou deux équipes qui assurent les manœuvres en continue. Une partie réalise donc le service du navire pendant que l’autre se repose. Le changement s’effectue toutes les quatre heures. De ce fait, les pirates se joignent toujours par deux et se nomment l’un et l’autre « matelot ». La marine répartit l’équipage en bâbordais et tribordais, jumelage que le bailli de Suffren encourage jusqu’aux extrêmes limites pour conserver aux escales, où une seule bordée est autorisée à descendre à terre, la plus grande partie de ses équipages à bord. L’exiguïté des lieux de couchage permet ainsi d’associer deux marins à un seul hamac. D’où le nom de matelot, du mot supposé d’origine hollandaise matenoot, qui signifie « compagnon de lit » et pourrait bien être la racine du mot anglais « mate » qui signifie compagnon.

25 Des contrats Les paires de matelot sont plus que de simples camarades de dortoir. Ils sont associés à part entière et un contrat en bonne et due forme les lie pour les expéditions et s’étend même à d’autres activités que la course. Cette pratique accompagne ainsi la signature par les membres d’équipage ou leurs représentants, de la charte-partie, sorte de contrat qui pose les règles de conduite à bord et le partage des prises. Cette association va de la simple durée d’une expédition à plusieurs années. Le matelotage possède aussi un aspect psychologique non négligeable: en cas de nécessité, dans un univers hostile et rude, un homme ne se trouve pas seul et sait qu’il a quelqu’un sur qui compter pour veiller sur lui ou ses intérêts. L’un soutient l’autre, le soignant en cas de maladie ou de blessure, le protégeant dans les coups durs. « Pour cet effet, écrit Oexmelin, ils passent un écrit sous seing privé, en forme de testament, par lequel, s’il arrive que l’un des deux meure, il laisse à l’autre le pouvoir de s’emparer de tout ce qu’il a. » Si ce dernier meurt à son tour, les biens reviennent aux pauvres ou aux églises.

26 Un sentiment amoureux Associés pour le meilleur et pour le pire, certains pirates en « matelotage » développent un véritable sentiment amoureux envers leur compagnon. En l’absence de femmes et face aux pulsions sexuelles avivées par les combats, le matelotage s’accompagne parfois d’unions homosexuelles, plus ou moins forcées. Le capitaine pirate Robert Culliford a un « grand associé », John Swann avec lequel il vit et certains pirates achètent de « beaux garçons » pour en faire leurs compagnons. Cette liberté sexuelle que la piraterie offre, contraste avec les contraintes sociales de l’époque. L’Europe du XVIIème et du XVIIIème siècle est homophobe et la Royal Navy mène, en ce sens, des campagnes contre l’homosexualité à bord des navires. La sexualité apparait incompatible avec toute forme de travail comme l’atteste l’écrit du pasteur de Dartmouth, John Flavel, au commerçant John Loverling, relatif aux marins : « La mort de leurs désirs est le meilleur moyen pour donner vie à votre commerce. »

27 Une pratique généralisée
Preuve de la forte influence des flibustiers sur la colonie de Saint-Domingue, les boucaniers et les habitants s’amatelotent à leur exemple pour la conduite de leurs affaires. Même le gouverneur suit la coutume. Un certain Galichon, notable habitant et futur membre du Conseil souverain de Saint-Domingue en 1685, hérite des terres de Jacques Neveu de Pouancey, en Il est le « matelot » de l’administrateur français. Le Gouverneur de l’Ile de la Tortue, Bertrand d’Ogeron, fait venir de France des centaines de femmes, engagées volontaires, prostituées, issues d’hôpitaux vénériens ou de prisons, dans l’espoir de détourner les boucaniers de leurs pratiques. L’objectif est de fixer les boucaniers et d’en faire des « habitants ». Malgré cela, le matelotage continue, un matelot partageant alors sa femme avec son partenaire. Le matelotage participe certainement à l’important esprit de corps des boucaniers français de Saint-Domingue et l’expression « Frères de la Côte » ne lui est certainement pas étrangère.


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