Www.projucit.be La responsabilité pénale des personnes morales Questions choisies Namur, 20 octobre 2011 PROJUCIT.

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Transcription de la présentation:

La responsabilité pénale des personnes morales Questions choisies Namur, 20 octobre 2011 PROJUCIT

La responsabilité pénale des personnes morales Introduction Marc Nihoul Professeur FUNDP - Avocat PROJUCIT

2 Bienvenue Une après-midi d’étude organisée par l’AJN et le centre de recherche PROJUCIT Association des juristes namurois Protection juridique du citoyen, centre de recherche fondamentale (FUNDP)

3 Au programme La responsabilité pénale des personnes morales Questions choisies Un ouvrage collectif paru aux éditions Anthémis La suite de travaux antérieurs : - M. Nihoul (éd.), La responsabilité pénale des personnes morales en Belgique, La Charte, S. Adam, N. Colette-Basecqz et M. Nihoul (éd.), La responsabilité pénale des personnes morales en Europe, La Charte, 2008

4 Au programme La responsabilité pénale des personnes morales en 7 questions choisies 1.le champ d’application personnel de la loi 2.l’élément moral nécessaire à la condamnation pénale de la personne morale 3.expériences pratiques des auditorats en la matière 4.cas pratiques en matière d’accidents du travail

5 Au programme La responsabilité pénale des personnes morales en 7 questions choisies 5. cas pratiques en matière environnementale et économique 6. le mandataire ad hoc en pratique 7. vers une réforme ?

1 Le champ d’application personnel de la responsabilité pénale des personnes morales Marc Nihoul Professeur FUNDP - Avocat PROJUCIT

7 PLAN : deux difficultés I. La personne morale en droit pénal II. L’immunité pénale des collectivités publiques

8 I. La personne morale en droit pénal - extension Article 5, alinéa 3 du Code pénal : sont « assimilées » à des personnes morales : -les sociétés momentanées et les sociétés internes -les sociétés commerciales qui n’ont pas la personnalité juridique à défaut de dépôt de leur acte constitutif au greffe -les sociétés commerciales en formation -les sociétés de droit commun

9 I. La personne morale en droit pénal - restriction Article 5, alinéa 4 du Code pénal : ne « peuvent pas être considérées (sic) comme des personnes morales responsables pénalement pour l’application du présent article » : dans le bon ordre l’Etat fédéral, les régions, les communautés, la COCOF, la COCON, la COCOM les provinces, les communes, les CPAS, l’agglomération bruxelloise, les zones pluricommunales, les organes territoriaux intracommunaux

10 Ne sont donc pas immunisées les autres personnes morales de droit public, même lorsqu’elles dépendent ou ont été créées par une collectivité immunisée

11 Problèmes avec ce double mouvement contraire d’extension et de restriction de cohérence ou de justification (1) de praticabilité (2)

12 1.Problème de cohérence ou de justification : pourquoi ces entités-là et pas d’autres ? exemple 1 - les sociétés commerciales en formation mais pour le reste toute personne morale pour toute infraction même non économique exemple 2 - les CPAS et pas les intercommunales… les intracommunales ou les zones pluricommunales de police et pas les fabriques d’église ou les wateringues… malgré une commune représentation indirecte

13 1.Problème de cohérence ou de justification : pourquoi ces entités-là et pas d’autres ? exemple 3 – des personnes morales qui n’en sont pas sur le plan pénal le sont néanmoins sur le plan civil en manière telle qu’elles peuvent parfaitement se constituer partie civile… au pénal et donc intervenir dans une cause pénale

14 2. Problèmes de praticabilité exemple 1 - une terminologie nationale pour lutter contre une criminalité internationale… exemple 2 - l’absence de poursuite des entités assimilées en l’absence de représentation séparée des associés ou de patrimoine propre, « obstacle juridique » insurmontable (Ghislenghien)

15 2. Problèmes de praticabilité exemple 3 –une responsabilité à géométrie variable pour l’homme politique investi d’une mission de service public selon le contexte communal ou intercommunal, par exemple

16 II. L’immunité des collectivités publiques L’objectif : éviter de susciter des plaintes contre les collectivités concernées, dont l’objectif réel serait de mener, par la voie pénale, des combats qui doivent se traiter par la voie politique Le résultat : des plaintes contre les hommes politiques dont l’objectif est de toute façon rarement (exceptionnellement voire jamais ?) de mener, par la voie pénale, des combats qui doivent se traiter par la voie politique

17 Le résultat : -surexposition des politiques au risque pénal, spécialement au niveau local du chef d’homicide ou de lésions corporelles involontaires dans le cadre de la gestion des affaires publiques et des lieux et espaces publics -cause d’excuse absolutoire non invocable

18 -tolérance zéro en matière de sécurité -gêne pour d’éventuelles poursuites civiles des collectivités par les victimes -propositions de loi indécentes vers une immunité limitée à l’Etat fédéral, aux régions et aux communautés (principalement) ? compte tenu des immunités politiques à ce niveau sans solution pdv responsabilité à géométrie variable (mandataires, fonctionnaires, juges)

19 D’autres solutions existaient pourtant -responsabilité sans peine ou filtre (exclusion de l’action directe oupoursuites par le procureur général en présence de collectivités politiques) -immunité des organisations d’intérêt public « dont l’objet réel est exclusivement d’ordre politique, syndical, philanthropique, philosophique ou religieux ou qui poursuit exclusivement tout autre but légitime » (324bisCP – organisations criminelles)

20 D’autres solutions existaient pourtant -étendre la cause d’excuse absolutoire aux personnes physiques agissant pour le compte de personnes morales immunisées ou d’entités non visées par la loi, comme les associations de fait pour une interprétation conciliante de la loi en tenant compte de - l’objectif véritable de l’art. 5, al. 4 CP - l’adage societas delinquere potest sed non puniri - le bénéfice de la cause en l’absence de poursuite de la personne morale

2 L’élément moral nécessaire à la condamnation pénale de la personne morale Nathalie Colette-Basecqz Professeur FUNDP - Avocat PROJUCIT

22 PLAN Une logique anthropomorphique Conditions de la responsabilité des personnes morales Les causes de non imputabilité morale La recherche d’un élément moral propre à la personne morale Le concours de responsabilité de la personne morale et de la personne physique

23 1. Une logique anthropomorphique Assimilation de la personne morale à la personne physique Responsabilité autonome Art. 5 du Code pénal : « Toute personne morale est pénalement responsable des infractions qui sont intrinsèquement liées à la réalisation de son objet ou à la défense de ses intérêts, ou de celles dont les faits concrets démontrent qu'elles ont été commises pour son compte. Lorsque la responsabilité de la personne morale est engagée exclusivement en raison de l'intervention d'une personne physique identifiée, seule la personne qui a commis la faute la plus grave peut être condamnée. Si la personne physique identifiée a commis la faute sciemment et volontairement, elle peut être condamnée en même temps que la personne morale responsable. »

24 2. Conditions de la responsabilité pénale des personnes morales Imputabilité matérielle : l'infraction doit être intrinsèquement liée à la réalisation de l'objet de la personne morale (1) ou à la défense de ses intérêts (2), ou les faits concrets doivent démontrer que l’infraction a été commise pour son compte (3) intrinsèquement ↔ occasionnellement Imputabilité morale question de fait laissée à l’appréciation du juge du fond

25 3. Les causes de non imputabilité morale Effet : entraînent l’acquittement Contrainte (art. 71 CP) –physique ou morale –force irrésistible –extérieure Erreur invincible (de fait ou de droit) –Appréciation abstraite par rapport au comportement du bon père de famille placé dans les mêmes circonstances de temps et de lieu

26 Erreur invincible (de fait ou de droit) Illustrations –Corr. Bxl, 8/6/2000 –prévention de vente de marchandises illicites –erreur invincible de la personne morale –motivation : bagout extraordinaire de la personne physique qui a endormi sa méfiance naturelle –Mons, 28/6/2011 (Ghislenghien) –≠ erreur invincible dans le chef de la S.A. FLUXYS (« cette ignorance procède (…) de l'insuffisance et du manque de rigueur de sa surveillance »)

27 4. La recherche d’un élément moral propre à la personne morale Pas de responsabilité pénale sans faute ! Le juge doit vérifier que l’infraction résulte : –soit d’une décision prise sciemment et volontairement par la personne morale –soit d’une omission commise dans le chef de celle-ci Elément moral = état d’esprit coupable requis par l’incrimination légale –faute –dol général (avec connaissance et volonté ou acceptation) –dol spécial

28 Incohérence dans les TP de la loi : vérification de cet élément moral au niveau du comportement adopté par une catégorie particulière de personnes, soit celles qui occupent une place dirigeante au sein de la personne morale –« Dans le cas d’infractions non intentionnelles, il devra être démontré qu’elles ont eu connaissance du risque de réalisation de l’infraction et ont négligé de prendre les mesures pour éviter celle-ci. Si la loi requiert un dol général ou spécial comme élément constitutif, il sera nécessaire d’établir que celui-ci est également présent dans le chef des instances dirigeantes » –ferait plutôt penser à une responsabilité dérivée ? –le cercle des personnes physiques qui peuvent engager la responsabilité pénale des personnes morales est extrêmement large ↔ renvoi au comportement adopté par les organes de direction pour apprécier l’élément moral de la personne morale

29 Examen de la jurisprudence Motivation assez peu développée en fait Parfois confusion entre l’imputabilité matérielle et l’imputabilité morale de l’infraction Pas de distinction claire entre l’intention coupable et la faute Difficile de trouver un élément moral propre à la personne morale au sein des petites entreprises Illustrations pour lésions corporelles involontaires : acquittement de la personne morale (« aucun défaut de prévoyance ou de précaution en relation avec les blessures encourues (…) ne peut lui être personnellement imputée ») –Corr. Huy, 10/7/2008 : accident d’hélitreuillage –Corr. Nivelles, 13/9/2007 : abattage d’un arbre par des ouvriers travaillant pour un club de golf

30 Recherche des éléments de preuve de l’élément moral de la personne morale Où les trouver ? dans le comportement d’une personne physique identifiée (qu’elle soit l’organe de la personne morale, un dirigeant, un préposé ou encore un tiers) dans les caractéristiques de la personne morale elle- même (culture d’entreprise, organisation interne déficiente, restrictions budgétaires déraisonnables, absence de mesures de sécurité, formation insuffisante du personnel, caractère répétitif des infractions, …)

31 Difficultés quant à la recherche d’un dol dans le chef de la personne morale poursuivie du chef d’une infraction intentionnelle Constat dans la jurisprudence : le dol est souvent déduit du comportement intentionnel adopté par les instances dirigeantes Mais c’est plus souvent en matière d’infractions non intentionnelles (notamment en droit social, en droit de l’environnement, …) que la personne morale voit sa responsabilité pénale engagée

32 Illustrations Mons, 28/6/2011 (Ghislenghien) : une organisation interne déficiente, un manque de formation ou d'encadrement de son personnel, et/ou des restrictions budgétaires déraisonnables décidées par la personne morale –les infractions sont imputables à FLUXYS « car elles sont caractéristiques dans son chef d'une négligence consciente ou inconsciente dans son organisation interne et dans l'encadrement et la formation de son personnel, négligence ayant porté préjudice à l'intégrité physique ou psychique et aux biens de multiples personnes dont les intérêts sont protégés par le droit pénal, alors que la prévenue aurait pu prévenir ces conséquences en adoptant une attitude prudente et diligente, comme l'aurait fait une personne physique ou morale normalement prudente et diligente placée dans les mêmes circonstances »

33 Corr. Liège, 20 septembre 2004 (explosion en 2002 à Cockerill-Sambre) : pas de responsabilité pénale de la personne morale –« l’accident a été la résultante de fautes d’importance variable accumulées dans le chef de personnes physiques identifiables qui ont d’ailleurs négligé, de manière délibérée pour certains, les consignes de sécurité en vigueur à la cokerie » –« la société Cokerill-Sambre est évidemment soucieuse de générer un profit (…) ; cette affirmation ne peut, cependant, conduire le tribunal à conclure qu’automatiquement, dans un tel type d’entreprise, les règles de sécurité sont bafouées sans que cette affirmation ne repose sur des éléments précis et concrets qui n’apparaissent pas dans le présent dossier »

34 5. Le concours de responsabilités de la personne morale et de la personne physique A. Les conditions du concours de responsabilités la personne morale est exclusivement responsable en raison de l’intervention d’une personne physique identifiée –« exclusivement » : terme contradictoire –si la personne physique n’est pas identifiée, la personne morale peut être condamnée même si elle a commis la faute la moins grave trois conditions : –infractions identiques –une personne physique doit avoir été identifiée –un lien entre les agissements de cette personne physique et l’engagement de la responsabilité pénale de la personne morale

35 B. Les infractions commises sciemment et volontairement 1.Un cumul facultatif de condamnations pénales –« si la personne physique identifiée a commis la faute sciemment et volontairement, elle peut être condamnée en même temps que la personne morale responsable » –pour toutes les infractions, tant intentionnelles que celles commises par imprudence (référence au comportement concret de la personne physique) 2. Quelques illustrations jurisprudentielles –Droit pénal social : –obstacle à la surveillance en refusant de fournir les documents sociaux réclamés par l’inspecteur social –omission de payer la rémunération due à un travailleur –Droit pénal environnemental : –Non-assainissement d’un site

36 C. Les infractions commises par imprudence 1.Une exemption de peine pour la personne qui a commis la faute la moins grave –cause d’excuse absolutoire dans le chef de la personne qui a commis la faute la moins grave (la culpabilité demeure …) –choix de la personne à condamner en fonction du critère de la gravité de la faute –absence de critères clairs dans la loi : problème au regard du principe de légalité –notion de fait laissée à l’appréciation du juge –si le législateur a cherché à faire du cumul des condamnations pénales l’exception, la pratique des cours et tribunaux laisserait apparaître le constat inverse …

37 2.Quelques illustrations jurisprudentielles –Motivations parfois très sommaires –Critère de causalité –Au bénéfice de la personne physique : –Pol. Nivelles, 15/9/2004 (accident ferroviaire de Pécrot) : la faute de la S.N.C.B. était plus grave que celle des personnes physiques poursuivies –Bruxelles, 3/11/2004 (manquements à la tenue des documents sociaux dans un restaurant) –Corr. Tongres, 16/11/2006 (décès d’un patient suite à une mauvaise déglutition) –Corr. Bruges, 2/5/2005 (patiente retrouvée morte dans le local) –Au bénéfice de la personne morale : –Corr. Eupen, 28/11/2007 (non-communication de l’identité d’un conducteur ayant commis un excès de vitesse au volant du véhicule de société)

38 3.Des questions restant en suspens à propos de la comparaison des fautes … –Quid si plusieurs personnes physiques identifiées ont commis une faute engageant la responsabilité pénale de la personne morale ? TP muets ; question controversée … –Quid si fautes de gravité identique entre personnes physique et morale ? 4.Quant à l’application de la cause d’excuse absolutoire par les juridictions d’instruction –Art. 128 CICR –Malaise : les juridictions d’instruction ne statuent pas au fond, à l’exception de l’internement et de la suspension du prononcé … –Caractère provisoire des décisions de non-lieu –Autorité moins étendue –Cass., 9/3/2004 : « la contestation concernant l’existence ou non d’une cause d’excuse absolutoire est étrangère à la recevabilité de l’action publique et n’est pas soumise à l’une des dispositions autorisant l’inculpé à interjeter appel »

39 D. Les enjeux de la poursuite concomitante de la personne morale et de la personne physique Opportunité des poursuites : le parquet peut poursuivre la personne physique et la personne morale mais le juge devra choisir qui il condamne Extinction de l’action publique dans le chef de l’une des deux personnes à la suite d’une transaction ou d’une amende administrative, ou encore du décès de la personne physique ; suspension du prononcé décidée par la juridiction d’instruction à l’égard d’une seule de ces personnes (physique ou morale) Si l’autre personne n’est pas à la cause, cela n’empêche pas la personne qui serait seule poursuivie, de plaider l’excuse absolutoire

40 Cass., 9/11/2004 : « ni l’article 5, alinéa 2 du Code pénal (…), ni le principe du droit à un procès équitable ne requièrent l’exercice de poursuites simultanées contre la personne physique identifiée et la personne morale » ; « l’absence de la personne physique identifiée ne fait pas obstacle à l’application normale des règles de la preuve en matière répressive selon lesquelles, eu égard à la présomption d’innocence, le ministère public et, le cas échéant, la partie civile, ont la charge de la preuve et tout doute profite à l’accusé, le juge statuant seulement sur la base des éléments qui lui ont été régulièrement transmis et que les parties ont pu contredire »

41 Conclusions Le principe de légalité et de prévisibilité de la loi pénale est malmené Une réforme de la loi est vivement souhaitée … !

3 Expériences pratiques des auditorats Nathalie Hautenne Substitut à l’auditorat du travail Namur - Dinant PROJUCIT

Questions - réponses PROJUCIT

4 La responsabilité pénale des personnes morales en cas d’infractions à la législation sur le bien-être au travail François Lagasse Juge au tribunal du travail Namur - Dinant PROJUCIT

5 La responsabilité pénale des personnes morales en cas d’infractions environnementales et économiques Patrick Carolus Substitut du procureur général CA Bxl Prof. inv. HE Fr.Ferrer PROJUCIT

6 Le mandataire ad hoc. Les attentes du législateur confrontées aux enjeux de la pratique Marc Preumont Chargé de cours ULB - Avocat PROJUCIT

7 Vers une réforme de la responsabilité pénale des personnes morales ? Eric de Formanoir de la Cazerie Substitut général CT Bxl PROJUCIT

Questions – réponses et envoi PROJUCIT