La sociologie des marchés : Une vue d’ensemble et quelques carottages Pierre FRANCOIS 27 janvier 2012
Une naissance par capillarité Le marché comme objet fondateur de la sociologie : l’exemple de « L’essai sur quelques catégories de la sociologie compréhensive » de Weber (1913). Le grand partage ( ). Une naissance fortuite ? L’innovation méthodologique ? L’exemple de Getting a job. Au frontières des objets : l’organisation et son environnement, les professions et leur service (Karpik, 1989).
La sociologie contre l’économie ? Les marchés concrets vs. une théorie formelle. Insérer l’économie dans le social ; Les marchés et leur morale : le marché de l’assurance vie (Zelizer, 1979). Les marchés et leur structure : le marché de la confection à New York (Uzzi, 1997). Le spectre étendu des méthodes sociologiques : de l’ethnographie des places de marché à l’analyse de réseau et aux modélisations des stratégies concurrentielles.
Le marché de la mort Un marché incertain : Une situation exceptionnelle et traumatique ; Une dépense importante ; Des enjeux anthropologiques lourds. Guider le consommateur en le canalisant : comment les croquemorts se font-ils concurrence ? Les stratégies concurrentielles reposent sur la récupération du corps le plus en amont possible de sa circulation, car la circulation du cadavre est fortement contrainte ; La construction de monopoles ponctuels – ou pourquoi les funérailles son si chères.
Les marchés d’option McKenzie, Donald et Yuval Millo, 2003, "Constructing a market: the historical sociology of a financial derivatives exchange", American journal of sociology, 109 (1), p Des marchés céréaliers aux marchés financiers : le lobbying politique et la fin de la proscription. La formule de Black et Scholes et son destin : Du refus à l’adoption ; La crise de 1987 et l’apprentissage de la prudence.
Les règles du jeu et la crise de 2008 La crise de 2008, fille de la dérégulation : Le nouvel espace des produits dérivés. La fin du Glass-Steagal Act et le retour des banques d’investissement ; Comprendre la crise de 2008 suppose donc de comprendre pourquoi on changé les règles du jeu.
Ce qui fonde les règles, et pourquoi elles changent (1) Derrière les règles du jeu d’un marché, des groupes qui les défendent. Les « élites des affaires », de 1945 aux années 1970 (Useem, 1984) – l’inner cirle, modération et régulation : Un groupe conservateur, mais… …très fortement cohésif : participation aux mêmes associations et aux mêmes structures para-gouvernementales… …et relativement modéré : une inscription internationale et un intérêt pour l’économie entendue comme un tout, compte tenu des pressions conjuguées de l’Etat, du monde du travail, relativement forts sur la période ; de la finance, réduite à un rôle congru d’intermédiation.
Ce qui fonde les règles, et pourquoi elles changent (2) Comment les trois piliers de la modération disparurent : L’Etat : De l’accroissement des besoins de financement de l’Etat (la guerre du Vietnam, la Grande société de Johnson) au retrait de l’Etat des années Reagan. Le mouvement syndical : frappé par la crise des années 1970, il se concentre sur le secteur public. La finance : le déclin des banques commerciales, la renaissance des banques d’affaire et le développement des fonds d’investissement.
Ce qui fonde les règles, et pourquoi elles changent (3) Les nouvelles élites économiques, ou la fin de la modération : Le inner circle ancienne manière : des CEOs, désormais sous pression des marchés financiers ; Les nouveaux leaders du monde économique : les investisseurs financiers. Si l’on s’en tient à l’indicateur des conseils d’administration, le nouvel inner circle est aussi cohésif que le précédent ; Mais la cohésion hors du monde des affaires (associations, politique, etc.) est beaucoup plus faible ; Les intérêts défendus sont beaucoup plus étroits : au sommet de son pouvoir, l’élite économique ne défend plus le business dans son ensemble, mais les intérêts spécifiques d’une caste restreinte.