En Français, le vocable « politique », recouvre plusieurs définitions, plus ou moins stabilisées En anglais : plus précis polity politics policy
Polity Le champ social dominé par des conflits d’intérêts régulés par les pouvoirs C’est un espace de résolution des conflits et d’arbitrage des intérêts divergents de la société: l’instance préposée au maintien de la cohésion sociale. Max Weber : la politique, c’est l’instance qui permet le vivre ensemble et la résolution des conflits d’intérêts inhérents à la vie en société. Le politique = un ensemble de forces institutionnalisées qui interagissent (dans ce que l’on peut appeler le champ politique). Pour Pierre Favre, « le politique concerne les fonctions de coordination des activités, de résolution des conflits, de hiérarchisation des objectifs que requiert l’existence de la société. La politique est l’activité de ceux qui assurent ou veulent assurer ces fonctions. Le politique est ainsi l’objet de la politique. »
Politics « La politique » est plus contingente que « le politique » «La politique» = l’ensemble des activités, des interactions et des relations sociales qui se développent et se structurent au sein de l’espace autonome de la lutte pour la conquête et l’exercice du pouvoir. La politique renvoie à la lutte concurrentielle pour la répartition du pouvoir. Parfois dévalorisée (la lutte pour le pouvoir, l’intrigue, les rapports de force…) La « vie politique », la compétition politique, les dimensions partisanes, le jeu de la concurrence entre partis, la lutte entre ceux qui font de la politique leur « métier ». La scène sur laquelle s’affrontent, sous les yeux du public et des citoyens (par médias interposés) une série d’acteurs pour la conquête et l’exercice du pouvoir.
Policy « Une politique » ou « les politiques » (publiques) : des formes d’action finalisées et leurs moyens visant à résoudre « un problème » ou à satisfaire des « demandes » On désigne par « policy » l’action concrète des pouvoirs publics dans divers secteurs de l’action publique (l’économie, la culture, le tourisme, l’environnement…) ou dans l’action gouvernementale au sens large (les discours de « politique générale » des Premiers ministres)
La science politique et ces trois sphères La distinction entre polity / politics / policy est analytiquement intéressante et importante Elle renvoie à des domaines d’intérêts, à des objets d’analyse et à des approches différentes; elle correspond à des spécialités et des compétences différentes à l’intérieur de la discipline Mais il faut toujours se méfier des distinctions trop cloisonantes. C’est davantage les intersections, les zones de recouvrement et les interactions entre ces trois domaines et approches qui font la science politique d’aujourd’hui !
Il n’y a pas de policy without politics
Il n’y a pas de politics sans policy
Il n’y a pas de policy ou de politics sans polity
Mais alors, comment repére t’on un « objet politique », voire un « objet de la science politique » ? (1) Une vielle question : quel est l’objet de la science politique ? De très nombreuses réponses et essais de définition (voir le tableau qu’en fait Pierre Favre dans l’Atelier du politiste) Utile rappel : cette question ne semble pas obséder les disciplines des sciences de la nature; toute tentative de découpage spécialisé des « objets » des « disciplines » scientifiques se heurte au caractère un peu conventionnel et historiquement daté des contours « disciplinaires »
Mais alors, comment repére t’on un « objet politique », voire un « objet de la science politique » ? (2) Pierre Favre : la question de l’objet de la science politique…n’a pas de sens…. …mais cela ne veut surtout pas dire que la science politique n’a pas d’objets…. !
Mais alors, comment repére t’on un « objet politique », voire un « objet de la science politique » ? (3) Le faux problème c’est celui de vouloir isoler un objet unique, central et parfaitement délimité de la science politique Quitte à être un peu caricatural : c’était un peu la position de la science politique des années 1950, « à la Burdeau » (bien que Burdeau soit plus complexe comme l’a utilement rappelé Jean Leca), lorsque la science politique c’est l’étude du « Pouvoir » et de « l’Etat » La vraie réponse : « ce que l’on récuse, comme étant un effort sans fin et condamné par avance, c’est la recherche d’un objet central, qui par nature serait étudié par la science politique » (Pierre Favre)
Mais alors, comment repére t’on un « objet politique », voire un « objet de la science politique » ? (4) Une distinction peut nous permettre d’avancer un peu : des « objets donnés » et des « objets conquis » « Objets donnés » : semblent ‘naturellement dévolus’ à la science politique (le vote, l’abstention par exemple), mais peuvent parfaitement être analysés par d’autres disciplines et approches (par exemple l’anthropologie) Faire attention : l’épistémologie nous apprend qu’aucun objet de science n’est véritablement « donné » « L’objet donné » est en fait construit socialement : le vote n’a pas toujours été organisé comme aujourd’hui et n’a pas toujours le même sens qu’aujourd’hui
Mais alors, comment repére t’on un « objet politique », voire un « objet de la science politique » ? (5) « Objets non donnés » : l’Etat, la légitimité, le système des partis, l’idéologie, l’opinion, etc… Personne ne les a jamais vus ou rencontrés : ils n’ont pas d’existence matérielle; pour accéder à des observations et les analyser, il faut les découper : les « grands corps de l’Etat », l’inspection des Finances, la doctrine de tel penseur, etc…
Mais alors, comment repére t’on un « objet politique », voire un « objet de la science politique » ? (6) « Objets conquis » : des objets qui n’étaient pas dans l’orbite de la science politique et qui l’ont progressivement intégré Le
Mais alors, comment repére t’on un « objet politique », voire un « objet de la science politique » ? (7) Tout ceci nous amène à une question transversale : que l’objet d’étude soit « donné », « non-donné » ou « conquis », comment repère t’on le politique ou la politique dans ces objets ? Texte de Jean Leca (1973). Au fait, qui est Jean Leca ?
Le « repérage du politique »