Critères de sevrage de la ventilation artificielle Professeur Elisabeth DIOUF Service d’Anesthésie-Réanimation CHU Le Dantec Faculté de Médecine, UCAD - Dakar
Introduction Ventilation artificielle (VA): nombreux patients Réa VA: VMI (intubation ou trachéotomie) et VNI Sevrage de la VM: patients intubés Epreuve sevrage réussie: extubation VNI dans la prise en charge sevrage et extubation Sevrage de la ventilation mécanique (à l’exclusion du nouveau-né et du réveil d’anesthésie). Conf Consensus. (Réanimation 2001;10: 699-705) SARAF, Yamoussoukro 2018
Introduction VM: complications voire surmortalité ↑avec durée intubation Période de sevrage: Véritable « challenge » ↘Durée de VM Réduction morbidité liée à la VM (PNAVM) Réduction probable durée séjour et mortalité hosp Robert D, Richard C. Le sevrage de la ventilation mécanique: un art désormais codifié? Rev Mal Resp 2002,19, 25-6
Introduction Définition: Sevrage Ensemble du processus permettant le passage plus ou moins rapide de la VM à la VS et conduisant à l’extubation Protocole de sevrage: 3 étapes Recherche pré-requis à l’épreuve de VS: critères de sevrabilité Epreuve (test) de VS Période de 48 heures: sevrage réussi ou non Certain patients sevrés de la VM Mais nécessité protection voies aériennes Maintien canule de trachéotomie (troubles déglutition) Rev Mal Resp 2002,19, 25-6
Dres M, Sklar M, Brochard L. Méd. Intensive Réa 2016 Introduction Objectifs de l’épreuve de sevrage Bien évaluer les capacités respiratoires du patient Prévenir les causes d’échec du sevrage ou d’échec de l’extubation Enjeux multiples pour le clinicien Naviguer raisonnablement entre deux risques Séparer trop tôt de VM des patients qui en ont encore besoin Ou garder trop longtemps des patients ventilés et les exposer à des risques accrus Importante activité médicale et paramédicale Dres M, Sklar M, Brochard L. Méd. Intensive Réa 2016 DOI 10.1007/s13546-016-1236-x
Critères de sevrabilité Recherche de prérequis à l’épreuve de VS Première étape du protocole de sevrage Critères de sevrabilité Détection au plus vite afin d’éviter durée de ventilation inutilement prolongée Sevrage VM: Début dès 1er jour de l’intubation Recherche systématique critères de sevrabilité Question (infirmières, ou kinésithérapeutes) Est-ce que le patient est dans un état stable permettant de le séparer du ventilateur ? Thille AW, Brochard L. MAPAR 2007;579-80
Critères de sevrabilité Résolution ou amélioration de la cause initiale ayant motivé l’intubation Critères respiratoires Patient n’est pas hypoxémique : (SpO2 > 92% avec FiO2 ≤ 50 %, PEP< 6 cmH2O) Toux efficace et absence d’encombrement bronchique notable Mrozek S, Jean-Michel Constantin JM. Sevrage de la ventilation mécanique. Conférence d’actualisation SFAR 2012,MAPAR 2007;579-80 Méd. Intensive Réa 2016
Critères de sevrabilité Critères généraux Hémodynamique stable sans ou avec faibles doses d’amines Niveau de sédation garantissant un état de conscience suffisant ou patient sans sédation, réveillable avec réponse cohérente aux ordres simples (Participation active du patient) Réanimation 2001,10,699-705. MAPAR 2007,579-80. SFAR 2012. Pas des critères stricts devant être obligatoirement présents simultanément « Le médecin peut s’affranchir d’un ou plusieurs de ces critères généraux ou respiratoires pour décider de l’épreuve de VS » Boles et al. Eur Respir J 2007,29,1033-56
Test de ventilation spontanée Seconde étape: test ou épreuve de sevrabilité Essai de VS sur tube en T Ou essai VS avec aide inspiratoire 1ère modalité: «VS sur pièce (tube) en T » Déconnecter le patient du ventilateur Ajouter à l’extrémité sonde une « pièce en T » Permet humidification des VAS et éventuellement O2 Intérêt majeur: caractère standardisé de la réalisation Principaux inconvénients: Absence de surveillance des volumes et débits Nécessité d’une surveillance clinique rapprochée Incertitude quant au niveau d’oxygène délivré Méd. Intensive Réa 2016
Test de ventilation spontanée Seconde modalité « VS en aide inspiratoire (AI)» Diminuer le niveau d’assistance Tout en maintenant le patient connecté au ventilateur Principal inconvénient Hétérogénéité des conditions possibles de réalisation Quel niveau d’AI ? Maintien d’une pression télé-expiratoire positive PEEP ? Ce qui limite sa standardisation Avantages Simplicité Connaissance du niveau de FiO2 délivré Surveillance des courbes de volumes et débits MAPAR 2007;579-80.Méd. Intensive Réa 2016
Test de ventilation spontanée Seconde modalité « VS en aide inspiratoire (AI)» Niveau minimum d’AI de 6-7 cmH2O Pour contrebalancer le travail respiratoire résistif Jusqu’à 10-15 cmH2O si filtre échangeur de chaleur et d’humidité chez des patients difficiles à sevrer (BPCO) PEP pas indispensable mais peut être utile pour favoriser déclenchement cycle inspiratoire si PEPi Peut masquer une dysfonction VG sous-jacente et augmenter le risque d’échec de l’extubation Méd. Intensive Réa 2016. Eur Respir J 2007; 29: 1033–1056
Comparaison des deux modalités de réalisation de l’épreuve de VS
Test de ventilation spontanée Quel test de VS? Pas de différence nette de sensibilité entre les 2 pour dépister l’échec de sevrage Méta-analyse Ladeira et al Cochrane Database of Systematic Reviews 2014 Pièce en T vs AI sans: pas de résultats significatifs sur les critères de jugement clinique Sevrage simple: AI semblait associée avec un meilleur taux de succès d’épreuve de ventilation spontanée Deux techniques peuvent être employées Faciliter la plus simple à mettre en œuvreMAPAR 2007;579-80 Mais: Protocole - Stratégie
Impact du type d’épreuve de sevrage sur le succès de l’extubation
Test de ventilation spontanée Durée: 30 à 120 minutes (pathologie respiratoire ou sevrage plus difficile) Tolérance de l’épreuve de VS Critères cliniques (Dyspnée, FR, Vt expiré (en AI), signes cliniques d’IRespA, SpO2, PA, FC, conscience, confort) Voire gazométriques Rev Mal Resp 2002,19, 25-6
Test de ventilation spontanée Tolérance de l’épreuve de VS Examen du patient au cours de l’EVS: tolérance clinique Absence d’augmentation de la FR 35/mn d’une désaturation inférieure à 90 % d’une augmentation de FC 140/mn d’une augmentation de PA 180 mmHg et enfin d’une agitation Autorise l’extubation Dres M et al. Approche diagnostique de l’échec de l’épreuve de ventilation spontanée au cours du processus de sevrage de la ventilation mécanique. Réanimation (2014) 23:37-47
Test de ventilation spontanée Tolérance de l’épreuve de VS Si épreuve de sevrabilité réussie Envisager extubation dans suites immédiates Eliminer FDR spécifiques d’échec d’extubation (Inefficacité toux, encombrement bronchique, Troubles de déglutition, FDR d’obstruction des VAS) Protocole scrupuleusement suivi Cliniciens tendance à retarder l’extubation (SFAR 2012)
Test de ventilation spontanée Critères d’échec d’une épreuve de sevrage Si échec de l’épreuve de sevrabilité Signes d’intolérance en cours d’épreuve Patient rapidement replacé sous assistance ventilatoire Reventilé jusqu’au lendemain? avec les paramètres initiaux Analyse systématique des causes d’échec avant d’envisager une nouvelle EVS Signes d’intolérance: désaturation, agitation, instabilité HDN, épuisement, sueurs … Réanimation (2014) 23:37-47
Critères d’échec d’une épreuve de ventilation spontanée
Classification selon l’issue du sevrage Succès du sevrage de la VM Extubation et absence de recours à un support ventilatoire dans les 48h suivant l’extubation Echec du sevrage de la VM: une des 3 propositions Echec du test de sevrage (30-120mn) Ou nécessité de réintubation et/ou d’utilisation d’un support ventilatoire dans les 48h après extubation Ou décès dans les 48h suivant l’extubation Catégorie intermédiaire appelée « sevrage en progression » pour patients extubés mais nécessitant VNI SFAR 2012
Causes d’échec de sevrage Divers mécanismes physiopathologiques, parfois intriqués Causes d’échec de l’EVS: Ventilatoires Diminution capacité respiratoire Augmentation charge de travail Cardiaque Insuffisance cardiaque gauche Mécaniques Oedème laryngé Encombrement Neuromusculaire Neuromyopathies Acquises en Réanimation Réanimation (2014) 23:37-47
Causes d’échec de sevrage Principales causes des échecs de l'extubation en réanimation adulte (SFAR 2012) Obstruction des VAS (oedème, inflammation, ulcération, granulome...) Sécrétions abondantes/encombrement bronchique/troubles de déglutition/toux inefficace Troubles de conscience/encéphalopathie Dysfonction cardiaque (ischémie, oedème pulm) Atélectasie Hypoxémie Paralysie ou dysfonction diaphragmatique Autres : sepsis, reprise chirurgicale, hémorragie digestive, surcharge hydro-sodée...
Classification selon la difficulté du sevrage Sevrage simple : Succès du test de sevrage et de l’extubation dès la première tentative ¾ des patients de réanimation Chez certains patients test plus tôt Pour la majorité des patients: sevrage ventilatoire progressif de plusieurs jours pas nécessaire Intérêt épreuve de VS théoriquement discutable car patients à faible risque d’échec Med Intens et réa 2017
Classification selon la difficulté du sevrage Sevrage difficile Nécessité jusqu’à 3 tests de sevrage ou jusqu’à 7 jours après 1er test pour le succès du sevrage de la VM Sevrage prolongé ou « très difficile » Nécessité d’au moins 3 tests de sevrage ou de plus de 7 jours après le 1er test Patients avec multiples échecs aux tests de sevrage Trachéotomie pour la plupart Durée de ventilation plus ou moins longue SFAR 2012
Classification selon la difficulté du sevrage Pour groupes 2et 3 (environ 30%) Enjeu de l’épreuve de VS majeur Patients avec probabilités d’échec plus élevées Et à un risque d’échec d’extubation plus important Durée du sevrage influence le pronostic Sevrage simple ou sans test : mortalité 10 % 2 autres gpes: mortalité en réanimation 25% Epreuve de VS surtout utile si population à risque d’échec SFAR 2012, Med Intens et Réa 2017
Protocoles de sevrage Différents aspects du sevrage Meilleure mise en œuvre dans le cadre de protocoles de soins Formalisés Adaptés localement Validés par l’ensemble de l’équipe de réanimation Protocoles de sevrage/extubation Axés sur l’évaluation quotidienne de la sevrabilité dès que possible Associés à protocole sédation/désédation Désédation aussi idéalement évaluée au quotidien SFAR 2012, Med Intens et Réa 2017
Protocoles de sevrage Réduction durée du sevrage et délai d’extubation Sans ↗ incidence des réintubations Notamment si dédiés au personnel soignant (kinésithérapeutes, infirmières) Intérêt de ces protocoles variable Selon niveau de qualité des soins des services Et implication de l’équipe dans le processus de sevrage/extubation SFAR 2012
Protocoles de sevrage Kinésithérapie respiratoire reste essentielle au cours du processus de sevrage/extubation En particulier chez patient BPCO Intérêt réhabilitation physique précoce Pour autonomiser les patients et réduire la durée de VM SFAR 2012, Med Intens et Réa 2017
Place de la ventilation non invasive Durant ces dernières années VNI Alternative à l’intubation endotrachéale chez de nombreux patients en IRespA Principaux effets bénéfiques ↘Durée de séjour, de la morbidité et de la mortalité par rapport VM invasive Certaines données récentes VNI pourrait s’avérer bénéfique lors du sevrage de la VM Place dans le sevrage de la VM lors de 3 situations différentes en excluant le contexte postopératoire SFAR 2012, Med Intens et Réa 2017
Place de la ventilation non invasive VNI, Modalité de sevrage alternative Objectif: raccourcir la durée de VMI (intubation) chez des patients présentant des difficultés de sevrage VNI préventive ou prophylactique Objectif: éviter la réintubation pour prévenir la survenue d’une IRespA post-extubation chez des patients à risques d’échec d’extubation SFAR 2012, Rev Mal Resp 2002,19, 25-6
Place de la ventilation non invasive VNI curative ou de sauvetage Objectif: traiter une IRespA post-extubation au décours immédiat d’une extubation souvent programmée VNI appliquée à la période post-extubation Réponse conceptuelle aux besoins des cliniciens face aux difficultés de sevrage/extubation, voire aux risques de réintubation, chez des populations à risques telle que BPCO Rev Mal Resp 2002,19, 25-6. SFAR 2012,
Place de la ventilation non invasive Fig. Place de la VNI au cours de l’assistance ventilatoire post-extubation Rev Mal Resp 2002,19, 25-6
Quel mode ventilatoire après échec de l’épreuve de sevrage Si échec du test de sevrage en VS Choix mode ventilatoire adapté pour poursuivre sevrage Maintien d’une balance favorable entre la capacité et la charge du système respiratoire Eviter l’atrophie du muscle diaphragmatique et aider au processus de sevrage VSAI (pressure support ventilation, PSV) Mode ventilatoire le plus simple et le plus adapté Recommandée par dernière conférence de consensus européenne comme mode de sevrage après échec du premier test de sevrage (sevrage difficile). Boles et al. Eur Respir J 2007,29,1033-56
Quel mode ventilatoire après échec de l’épreuve de sevrage Nouveaux modes ventilatoires Objectif: améliorer les interactions patient-machine et raccourcir la durée du sevrage ventilatoire Burns KE, Lellouche F, Lessard MR. Automating the weaning process with advanced closed-loop systems. Intensive Care Med 2008;34:1757-65.
Conclusion Sevrage VM: Envisagé dès la mise sous VM Recherche des critères de sevrabilité quotidienne Examen pluriquotidien du patient du patient Association critères de sevrabilité Et test de VS systématique (Tube en T ou VSAI) Suivi d’une extubation si test est un succès. Protocolisation du sevrage Permet ↘ durée de VM et complications en réa Peut réduire risque de ré-intubation Protocoles adaptés, validés Formation personnel paramédical et médical
Je vous remercie pour votre aimable attention