Intervenante en approche intégrée du genre « Le genre », c’est quoi? « Le genre, pourquoi » ? AG de Touiza Solidarité-Marseille-28 juin 2014 Béatrice Borghino Intervenante en approche intégrée du genre France- Algérie Cf. article plus complet et détaillé de l’auteure sur: http://www.genreenaction.net/spip.php?article7373

C’est une façon de dire et de concevoir que les « différences » entre les femmes et les hommes ne vont pas toutes de soi! Dans chaque individu, il y a des différences biologiques ET des différences sociales. DONC: Sexe =//= Genre Et penser aux femmes =//= ne suffit pas pour faire de l’approche de genre… Si les premières, relatives au « sexe » sont incontournables, celles relatives au « genre » sont des constructions sociales, organisées, de plus, selon un principe de hiérarchie et d’inégalité. toutes les sociétés, et groupes sociaux, ont leur propre état de construction des répartitions de rôles, fonctions, interdits, droits et etc…attachées à chaque sexe.

C’est un processus, localisé, à accompagner… L’état de cette construction bouge, et a bougé, avec les modifications des réalités extérieures qui l’entourent (ex: pensez à ce que faisaient les grands parents par rapport aux nouvelles générations, en matière de genre…mais il peut y avoir aussi des régressions ….) L’approche de genre consiste en l’analyse du rapport social h/f, tel qu’il se présente dans une situation donnée, en vue d’aller vers plus d’égalité des droits et des possibles, au bénéfice des 2 sexes, tout en tenant compte bien sûr des contextes... C’est un processus, localisé, à accompagner… Pour Amartya Sen (économiste indien), « choisir sa vie » (pour 1 personne ou un groupe) est un des facteurs déterminants du sentiment de “bien être”.

Pourquoi faire « du genre »? Non, ce n’est pas une nouvelle mode ! C’est gagner en efficacité du projet - n’importe quel projet- parce ce que cela consiste à prendre en compte, en profondeur, ce qui concerne les personnes, hommes et femmes, à qui s’adresse un projet. A partir de là, cela permet de mieux le mener à bien

L’approche de genre possède sa méthodologie et ses propres outils. Elle permet, dans chaque situation, devant chaque action de terrain ou de mise en place d’un dispositif, ou face à toute politique publique, ou projet, de se demander systématiquement : I°- A quelles réalités j’ai affaire, côté femmes et côté hommes ? Quelles sont les différences de conditions, de besoins, de problèmes (et/ou d’atouts), de stéréotypes,de pouvoirs, de ressources … entre les deux publics, féminin et masculin, par rapport à mon projet de travail ? C’est une analyse différenciée selon les sexes (ADS). Autrement dit, c’est réaliser un diagnostic sexué et genré de la situation sur laquelle je me propose d’intervenir.

Quelques autres concepts-outils de l’approche de genre: Pour faire ce diagnostic sexué et genré, un certain nombre d’outils opérationnels de l’analyse de genre peuvent me permettre d’y parvenir. Je vais juste en citer quelques uns pour en donner une idée : 1°) La division sexuée du travail entre hommes et femmes et la théorie des trois rôles : autrement dit, qui fait quoi dans les trois sphères : du travail reproductif et familial, du travail productif et des activités communautaires/collectives. Un exemple tiré du Rapport de l’atelier de planification stratégique sur la lutte contre la désertification, Ain Benkhellil 1er et 2 avril 2006, Naâma- Algérie, est présenté dans l’article en ligne dont je parlais en démarrant.

2°) Les statistiques doivent être ventilées par sexe (et croisées avec d’autres catégories pertinentes : âge, statut familial, nombre et âge des enfants, la formation ou les savoirs faires et etc…(pour les F comme pour les H) Un exemple …..pour réfléchir Dans une zone marocaine, où il va falloir agir contre l’exclusion et le non emploi, un organisme a réalisé les statistiques suivantes: - 67 personnes de moins de 30 ans - 27 personnes de 30 à 45 ans - 12 personnes de plus de 45 ans - 19 sont analphabètes - 64 n’ont suivi que l’école coranique - 12 ont terminé l’école primaire - 11 ont fait quelques années d’école primaire - 5 ont fait quelques années de collège ou lycées - 10 poursuivent encore leurs études (dont 1 seul à l’université)

(Cf. Un exemple en Algérie, Naâma toujours, dans l’article cité) 3°) L’analyse de l’accès et du contrôle des ressources et des bénéfices Autrement dit : Qui dispose de quelles ressources ? Des ressources en capital, mais aussi en propriété de la terre, en temps (très important en analyse de genre), en mobilité (idem), en savoirs faire ou qualifications, et etc… Qui contrôle l’accès à ces ressources ? Qui décide de l’affectation ou de l’utilisation des bénéfices des ressources ou de ce que va apporter l’action ? (Cf. Un exemple en Algérie, Naâma toujours, dans l’article cité)

genre dans le Douar de Bougraâ (Maroc) 4°) Le système de prise de décision dans le groupe considéré Ou : qui décide de quoi ? Autre partie importante d’un diagnostic de zone…vu que tout projet amène/provoque des changements sociaux Un exemple est donné, toujours dans le même article cité, à partir d’une analyse de genre dans le Douar de Bougraâ (Maroc)

II°- Après le diagnostic (il doit être complété bien sûr par d’autres outils de travail, selon ce qui est pertinent, en vue de l’action à mener) Il faudra se demander alors comment parvenir à réaliser le projet que l’on a prévu, en tenant compte de : - ce que l’on a récolté comme éléments d’analyse genrée de la situation de départ - des objectifs visés par le projet ET, ET - en tenant compte de ce que le diagnostic aura fait ressortir comme obstacles ou résistances à prévoir… - …mais aussi comme potentialités et appuis possibles sur des arguments, des énergies et des forces locales.

L’approche de genre comme stratégie des institutionnels…après tout un travail associatif et militant… Depuis 1995, à la 4° Conférence mondiale sur les femmes, à Beijing, le mainstreaming du genre a été décidé comme méthodologie à adopter par les différentes instances internationales (ONU, UE, BM, bailleurs internationaux divers...) et instances nationales de la plupart des pays, partout dans le monde. La faisabilité s’en est construite peu à peu. Certains pays du Maghreb, notamment le Maroc, y sont très avancés du point de vue des directives données nationalement et de la formation des acteurs/actrices.

En France: Le MAE… Cette institution a publié à plusieurs reprises ses engagements et sa volonté dans ce sens. En reprenant les textes les plus récents: En 2007, publication du DOS Genre (Document d’Orientation Stratégique en matière de genre) du MAE, Cf. http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/genre_COSP_DEC_2007.pdf En 2012, première évaluation de l’application de ce document et des réformes à instituer pour une meilleure mise en œuvre de la démarche. Cf. http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/Rapport_d_evaluation_genre_et_dev_cle87f23a.pdf

…et l’AFD (Agence Française pour le développement) La prise en compte du genre dans les interventions fait partie des orientations de l'AFD : cf. http://www.afd.fr/home/AFD/developpement-durable/DD-et-operations/droits-humains-genre-developpement/genre-et-developpement Désormais dans tous ses appels à projet, la question de la prise en compte du genre est mentionnée comme un des chapitres particuliers à renseigner et elle sert à « noter » le projet. L’AFD a annoncé sa volonté d’augmenter, d’année en année, le % de projets prenant en compte le genre, dans les projets qu’elle soutiendrait.

Merci de votre attention Mais, au-delà des préoccupations matérielles et stratégiques….. Le « genre » pourrait s’illustrer par cet adage: « Une main toute seule ne peut pas applaudir. Il en faut au moins deux » Alors, pourquoi faire « du genre »? - Pour des raisons d’efficacité - Pour des raisons matérielles et stratégiques - Pour des raisons d’éthique et de conception du monde. Merci de votre attention Béatrice Borghino