Salon Petit 1 – Toulouse – 20 mai 2014 Accompagner le développement du jeune enfant, être social : le rôle de l’adulte Marie Paule THOLLON BEHAR Psychologue du développement Petite-enfance-developpement.com
Introduction Une approche développementale Le développement de la communication et du langage Entre étayage et autonomie, le rôle de l’adulte Il y a 10 ans, ouvrage « l’enfant dans le lien social » coordonné par Chantal Zaouche Gaudran et avec la participation de Anne Marie Fontaine, à la suite d’un colloque. Anne Marie Fontaine interviendra sur les relations entre enfants, ainsi que Anne Mouquet. Je vais me centrer sur les interactions enfants – adultes, sans évoquer la dimension éducative que Chantal Zaouche Gaudran va aborder à la fin. Je me situerai dans une approche développementale, sans aborde la question de l’attachement et la dimension affective. Cela peut surprendre… mais je pense que c’est un aspect largement travaillé et c’est très bien. Mais: Deux messages à faire passer sur des points qu’il me paraît important de travailler lorsque l’on s’occupe d’enfants : le développement du langage: pas assez travaillé dans les crèches. Thèse et la question de l’équilibre entre autonomie de l’enfant et étayage de l’adulte, où je vais questionner un dogme, celui de l’autonomie.
Le développement de la communication et du langage Le langage adressé à l’enfant: Dolto Les compétences précoces du tout petit: Reconnaissance de la langue parmi d’autres sons. Reconnaissance de la langue maternelle Catégorisation des sons Etc. Oui mais…. Un enfant n’apprendra pas à parler tout seul! Il y a 20 ans, ma thèse. Peu d’impact dans les crèches. Pourquoi ? parce que l’on avait fait beaucoup de progrès sur le plan du langage adressé aux enfants, à la suite de ce que F.Dolto nous a transmis de l’importance du langage pour le tout petit. Donc, on sait mettre des mots, on explique à l’enfant ce que l’on fait. Or, aujourd’hui, on voit arriver une mode, celle de la langue des signes pour les tout petits, essentiellement pour faciliter leur expression. On se rend donc compte qu’il ne suffit pas de parler aux enfants, il faut aussi les écouter et que ce n’est pas le plus facile et pourtant très important dans le développement de la pensée.
Le développement de la communication et du langage Un langage adapté à l’enfant le « mamanais ». Parentage intuitif. - à partir de 6-7 mois, changement sur les thèmes du discours des mères - énoncés plus courts, mieux articulés, prononcés plus lentement avec des pauses plus longues. La voix est plus élevée, l’intonation accentuée. Vers 1 an : facilitation de l’acquisition des mots nouveaux en les plaçant en fin de phrases, beaucoup de questions. Attention aux phrases trop longues, trop complexes. Toute personne qui s’occupe d’un bébé parle mamanais, même des enfants de 10 – 12 ans. En effet, quand on s’occupe d’un tout petit, on met en œuvre un parentage intuitif, c’est-à-dire une adaptation spontanée à là où en est l’enfant. Les thèmes du discours: on parle davantage de ce que ressent l’enfant avant 7 mois et ensuite davantage de ce qu’il voit, des objets qui l’entourent, des bruits qu’il entend. Les phrases ne sont pas les mêmes, l’intonation, la tonalité. Les mots nouveaux sont placés en fin de phrase: « tu le vois le tracteur? ». Des psychologues travaillant en crèche remarquent que parfois les phrases utilisées par les professionnelles sont très longues, très complexes. Une contradiction entre ce que l’on a entendu de Dolto et le parentage intuitif? On se laisse moins aller à cette intuition parce que l’on a reçu une formation?
Le développement de la communication et du langage Les débuts de la communication intentionnelle: à partir de 8 mois, causalité interpersonnelle. Précurseur la théorie de l’esprit. L’attention conjointe Aux alentours de 8 mois, on voit se manifester une communication intentionnelle, dirigée vers l’adulte. Par exemple, le geste de tendre les bras. En lien avec la causalité interpersonnelle: l’enfant comprend qu’il peut agir sur l’adulte, qu’il peut obtenir son aide et que pour cela, il doit communiquer. La théorie de l’esprit est très à la mode en psycho du dvt. Il s’agit de la capacité à comprendre que l’autre pense autrement que soi. On communique pour expliquer ce que l’on veut à l’autre, qui n’a pas le même point de vue.
Le développement de la communication et du langage La communication non verbale: La désignation et autres gestes: quelques exemples. « non », « adieu », « manger », « c’est chaud », « écoute »… une création entre l’enfant et les adultes de l’entourage. Les conduites proto-impératives Les conduites proto-déclaratives
Le développement de la communication et du langage Le rôle dans le développement de la pensée: Compréhension des situations de la vie quotidienne. Connaissances sur les objets. L’accès à la fonction symbolique. Passage graduel des gestes aux mots dans les interactions avec l’adulte. Les gestes aident à la compréhension des situations: exemple le départ. les objets sont qualifiés, commentés par l’adulte: geste « écoute », on entend le train, la cloche etc. Peu à peu, les gestes sont produits en l’absence de l’objet. C’est le passage au symbolique. Il s’agit d’une forme de communication transitoire. Sans doute utilisée par les hommes dans la préhistoire comme première forme de communication précédant le langage. L’adulte introduit l’enfant dans le langage.
La communication dans les pratiques professionnelles Observation de la communication dans une crèche: 50% des tentatives de communication non prises en compte. Les professionnels sous évaluent les compétences communicationnelles des enfants.
La communication dans les pratiques professionnelles Le langage des signes avec les bébés: Un objectif: mieux communiquer pour éviter les pleurs. Proposé aux enfants d’une façon ludique. L’intérêt: une meilleure attention à l’enfant, une diminution des cris et pleurs. Les limites: une utilisation irrégulière par les professionnelles. Impact sur le langage verbal? Une condition: l’implication des parents La langue des signes pour les bébés, une idée qui vient des Etats-Unis, très à la mode A partir de la recherche d’une étudiante puéricultrice, qui a interrogé des professionnelles qui utilisent la lange des signes. La langue des signes est utilisé pour mieux communiquer avec l’enfant, éviter les frustrations. Intérêt: c’est aussi de se recentrer sur la communication avec le tout petit.
La communication dans les pratiques professionnelles Le rôle du contexte dans l’acquisition du langage: Échanger à partir de ce que l’on vit dans l’ici et maintenant. Echanger à partir de ce qui est passé ou de ce qui va se passer = décontextualisation. Richesse des expériences vécues par l’enfant dans la crèche et hors de la crèche. Un exemple: le « pachon pompier », importance de la communication avec les parents. d’où l’importance de ce qui est vécu à la crèche: variété des sollicitations, sorties à l’extérieur pour l’acquisition de nouveaux mots. Exemple de l’apprentissage du nom des fruits et légumes. Parler de ce que l’on a fait ou de ce que l’on va faire: on a fait un gateau ce matin, tout à l’heure, on va aller dehors, on va aller à la médiathèque D’où l’importance des échanges avec les parents, pour comprendre et échanger avec l’enfant sur ce qu’il vit à l’extérieur de la crèche.
Qu’est ce que l’autonomie? Entre étayage et autonomie: le rôle de l’adulte dans les apprentissages de l’enfant Qu’est ce que l’autonomie? Autonomie physique Autonomie affective et relationnelle Autonomie intellectuelle: penser par soi-même. Mais: pour qui l’enfant doit-il être autonome? Pour lui? Pour ses parents? Pour les professionnels? tendre vers l’autonomie Un questionnement sur la notion d’autonomie: - autonomie physique: se mouvoir seul et au-delà agir seul. Manger seul, se lever seul, autonomie de la propreté… Autonomie affective et relationnelle: pouvoir se passer de sa figure d’attachement Autonomie intellectuelle: penser par soi-même, sans être influencé par les idées de l’autre, faire ses propres choix de vie. Pourquoi cette question? Des retours d’une directrice: « comment vous formez les professionnelles, elles ne jouent plus, elles observent ». Ou au retour d’auxiliaires dans un stage « quand un enfant vient vous apporter du café, vous ne le prenez pas, ou alors vous lui dites, je sais que tu fais semblant » J’ai choisi de travailler ce questionnement à partir de l’exemple du jeu libre à partir d’une étude faite auprès d’étudiants EJE.
Le jeu et les apprentissages de l’enfant: Jeu symbolique => Manifestation de la fonction symbolique Jeu d’assemblage, de manipulation, d’expérimentation. Début de la logique: mettre le petit dans le grand, mettre la même chose ensemble Découverte du monde L’enfant est face à des situations problèmes qu’il ne peut résoudre seul.
Entre étayage et autonomie: le rôle de l’adulte Le jeu libre: Une enquête auprès d’étudiants EJE en fin de formation Méthode: 50 étudiants interrogés par questionnaire (choix d’une attitude parmi plusieurs dans une situation donnée, affirmations vrai-faux, origine des idées).
Entre étayage et autonomie: le rôle de l’adulte Lors d’une activité de construction : Vous proposez aux enfants une caisse avec des duplos : 1 Vous posez la caisse, vous vous asseyez et vous observez ce que font les enfants 2 Vous sortez les duplos avec eux et vous proposez de faire une construction 3 Vous sortez les duplos avec eux, vous faites un modèle et vous le montrez aux enfants Attitude 1: observation Attitude 2: sollicitante (en référence à Bruner) Attitude 3: directive
Entre étayage et autonomie: le rôle de l’adulte Réponse en pourcentage Choisie Rejetée observation 70 14 sollicitation 32 6 directive 2 66
LES AFFIRMATIONS VRAI - FAUX Entre étayage et autonomie: le rôle de l’adulte LES AFFIRMATIONS VRAI - FAUX « la meilleure attitude quand on met une activité libre en place est le retrait et l’observation »: 80% de vrai « la prévention des difficultés de développement lorsqu’un enfant n’a pas des conditions favorables chez lui »: Massivement, c’est le retrait qui est mis en avant, donc l’enfant doit être autonome dans le jeu libre. J’ai mis cette réponse pour l’opposer à la précédente. Pense t-on vraiment que si l’on ne sollicite pas plus l’enfant, on va prévenir les difficultés de développement? À mettre en lien avec l’intervention de Chantal Zaouche Gaudron. D’où viennent ces idées? Essentiellement des lieux de stage, beaucoup plus que des cours. Donc, vous êtes très écoutées quand vous accueillez des stagiaires. Vous avez une grande influence sur les élèves ou étudiants. Pour aller plus loin, comment se fait-il que le terrain provoque de telles réponses?
Repères théoriques Entre étayage et autonomie: le rôle de l’adulte Une dimension socio-culturelle: Vygotski - la zone de développement proximal: L’enfant progresse dans une zone qui se situe entre ce qu’il sait faire seul et ce qu’il est capable de faire avec l’aide de l’adulte. Bruner - les interactions de tutelle: L’enfant est immature. Un tuteur accompagne l’activité du novice dans une situation – problème. Une autre façon d’aborder les choses est de se dire que l’enfant ne grandit pas tout seul, qu’il grandit parce qu’il a des tuteurs qui étayent son développement.
Entre étayage et autonomie: le rôle de l’adulte Les interactions de tutelle: - enrôlement dans la tâche - maintien de l’orientation - contrôle de la frustration - démonstration Exemple: les puzzles = une adaptation spontanée aux compétences de l’enfant qui favorise de nouvelles compétences. On retrouve le parentage intuitif
Entre étayage et autonomie: le rôle de l’adulte Le jeu accompagné Autonomie ou étayage? Le jeu = un support à la construction de la pensée, à l’acquisition du langage et à la socialisation. Accompagnement Etayage Autonomie Il s’agit donc de trouver un équilibre entre étayage et accompagné et s’autoriser à être parfois dans le jeu accompagné. C’est particulièrement important parce que le jeu est essentiel dans le développement de l’enfant.
La démarche de projet L’équipe est placée face à des choix éducatifs et pédagogiques qui se travaillent en équipe. Importance de la compétence réflexive des professionnels. Une démarche qui doit faciliter les échanges avec les parents et une bonne communication sur les pratiques éducatives. Le projet: de l’obligation à l’intériorisation. Compétences réflexives: prendre le temps de questionner ensemble ses pratiques, de s’alimenter (comme aujourd’hui), de mettre par écrit. Pour faciliter les échanges avec les parents.
En conclusion Retrouver le temps et le plaisir de communiquer et de jouer avec les enfants pour que tous les enfants soient accompagnés dans leur développement. Soutenir le processus de construction de la pensée pour faire grandir des sujets capables de réfléchir et d’avoir un regard critique. Pour qu’ils deviennent des êtres sociaux pensants!
Merci pour votre attention Petite-enfance-developpement.com