LA DYSPLASIE FIBREUSE : APPORT DE L’IMAGERIE H. DALLALI, K. MRAD-DALI, L. MEDIMAGH, I HASNI, m. Ben maitigue*, m. Omezzine**, K TLILI Service d’imagerie médicale *Service de chirurgie orthopédique **Service de chirurgie maxillo-faciale
INTRODUCTION La dysplasie faciale est une affection osseuse congénitale bénigne C’est une anomalie du développement osseux caractérisée par la prolifération intra-osseuse de tissu fibreux avec des degrés variables de Métaplasie Osseuse La forme monostotique est la forme la plus bénigne, elle pose peu de problèmes dans les localisations périphériques, alors que les localisations cranio-faciales et des os plats peuvent être sévères par la compression vasculo-nerveuse qu’elles peuvent engendrer. Les formes polyostotiques posent un problème esthétique et fonctionnel plus sévère et plus préoccupant. L’IMAGERIE en général caractéristique mais parfois atypique et trompeuse ! L’objectif de ce travail est d’illustrer à travers 15 observations l’apport de l’imagerie dans le bilan et la prise en charge de cette maladie.
MATÉRIEL ET MÉTHODES Etude rétrospective de 15 cas colligés aux services d’orthopédie et de chirurgie maxillo- faciale de l’hôpital Sahloul durant la période allant de 2002 à 2010. Tous les patients ont bénéficié de radiographies standard et d’un examen tomodensitométrique, 2 patients sont explorés par une IRM et trois par une scintigraphie osseuse.
RÉSULTATS Il s’agissait de 4 hommes et 11 femmes Patients âgés entre 7 et 76 ans avec une moyenne de 41 ans. Les localisations étaient mono ostotiques dans 12 cas et polyostotique non syndromique dans 1 cas L’atteinte siégeait pour les formes mono ostotiques au niveau au niveau de la face (n=8); intéressant le maxillaire dans 3 cas, la mandibule dans 4 cas, le cadre orbitaire dans 1cas, et la région frontale 1 cas. Les autres localisations sont : tibia (n=2), fémur (n=1), humérus (n=1), cubitus (n=1) et aile iliaque (n=1). pour la forme poly ostotiques , l’atteinte siégeait au niveau des extrémités supérieurs des deux fémurs, la branche ischio-pubienne et le péroné. La prédominance faciale s’explique par l’existence d’un service de chirurgie maxillo-faciale qui draine les malades de tout le centre tunisien. 13 patients étaient opérés, pour doute diagnostique dans 9 cas et à visée esthétique et fonctionnel dans 3 cas.
Fig. 2 : TDM, Verre Dépoli +/- hétérogène Fille de 8 ans : Dysplasie fibreuse de l’extrémité supérieure du fémur droit : Fig.1: Rx Standard : Lésion ostéolytique, métaphyso-diaphysaire, centromédullaire à limites nettes avec liseré périphérique d’ostéo condensation, présentant une matrice calcifiée et contenant par endroit un aspect en verre dépoli ( ) Fig. 2 : TDM, Verre Dépoli +/- hétérogène et condensé, élargissement os. Fig.2
Femme de 20 ans : Dysplasie fibreuse de l’extrémité supérieure de l’humérus droit : Fig.3 : Rx Standard : Lésion mixte, diaphysaire, à limites nettes avec liseré périphérique d’ostéocondensation, présentant une matrice nuageuse, avec par endroit un aspect en verre dépoli Fig. 4 : TDM, Verre Dépoli hétérogène, matrice calcifiée par endroit posant la diagnostic différentiel Fig. 5 : IRM, matrice en hyper signal franc en T2 (fig. 5a), rehaussée par le gadolinium (fig. 5b). Fig.3 Fig. 4a Fig. 4b Fig. 5a Fig. 5b
Femme de 23 ans : Dysplasie fibreuse de l’extrémité supérieure du cubitus droit : fig. 6 : TDM coupes axiales : ostéolyse avec matrice hétérogène dense confluente, résorption endoostéale. Fig.6a Fig.6b
Femme 32 ans : Dysplasie fibreuse mandibulaire : fig Femme 32 ans : Dysplasie fibreuse mandibulaire : fig. 7 : lésion mixte lytique et condensante symphysaire et para symphysaire, soufflant l’os. fig. 7 a fig. 7 c fig. 7 d fig. 7 b
dysplasie ostéo fibreuse de Campanacci Jeune homme de 17ans : Forme atypique: Dysplasie fibreuse du tibia gauche : Fig. 8: Rx standard : lésion mixte corticale ave des zones ostéolytiques nodulaire avec liseré d’ostéoslérose épais. Fig. 9: TDM axial : lésions corticales en Verre Dépoli Fig. 9a Diagnostics différentiels: Fibrome non ossifiant Adamantinome dysplasie ostéo fibreuse de Campanacci Fig. 9b Fig. 8
Fig. 10a Fig. 10b Fig. 10c Homme de 34 ans, tuméfaction maxillaire : Fig. 10 : lésion ostéocondensante des parois antéro-externe, postéro latérale et du bord alvéolaire du sinus maxillaire droit réduisant sa lumière faisant saillie dans le plancher orbitaire avec matrice typiquement en verre dépoli.
garçon de 7 ans dysplasie fibreuse poly ostotique non syndromique Fig garçon de 7 ans dysplasie fibreuse poly ostotique non syndromique Fig. 11: lésions multiples mixtes avec une matrice nuageuse siégeant au niveau des extrémités supérieurs des deux fémurs, la branche ischio-pubienne droite et le péroné avec fracture incomplète ( ) sur la lésion fémorale droite ayant nécessité une prise en charge chirurgicale Fig. 11a Fig. 11c Fig. 11b
DISCUSSION La dysplasie fibreuse est une affection rare. Etiologie inconnue , ni Héréditaire, ni Familiale. Adolescents et Adultes jeunes +++ Pas de prédominance sexuelle. Signes cliniques : Asymptomatique (découverte fortuite) Douleur (sensibilité locale exagérée) / Fracture Tuméfaction / Déformation – Signes Neurologiques Différentes formes : MONOSTOTIQUE (70 à 80%) POLYOSTOTIQUE (20 à 30%); isolée ou syndromique Syndrome de MAC CUNE-ALBRIGHT (2 à 3%): Triade: Dysplasie fibreuse + Tâches cutanées café au lait + Endocrinopathies ) Syndrome de MAZABRAUD (dysplasie fibreuse et Myxomes Musculaires)
Fréquence : relativement rare : 0,8 à 1 % des TOP 7 % des TOB La forme monostotique : six fois plus fréquente que la forme polyostotique Fréquence sous estimée : formes latentes, surtout monostotiques Âge : 75 % à 85 % des cas, avant l'âge de 30 ans. Monostotique : découverte est fortuite polyostotique : enfance 2/3 symptomatiques avant 10 ans Sexe : Légère prédominance féminine Sex-ratio de 1,2 pour 1.
Répartition des lésions osseuses Fémur (36 %), le tibia (19 %), le crâne (17 %) et les côtes (10 %). Plus ou moins étendues sur un os, de 1 à 30 cm. Mains, pieds, ceinture scapulaire et rachis sont rarement touchés. Formes étendues souvent unilatérales ou à prédominance unilatérale Formes monoméliques ou en rayon (mains et pieds) 25 % des formes polyostotiques ont au moins la moitié du squelette atteint.
Clinique Asymptomatiques Douleur mécanique Tuméfaction. Fissures ou fractures (environ 80 % des formes polyostotiques Déformations (polyostotiques) Augmentation du volume, incurvation, inégalité de longueur des membres, Déformation thoracique par atteinte costale, Déformation crânio-faciale à prédominance unilatérale Des signes neurologiques : crâne, rachis, Sensibilité locale exagérée Signes extra osseux : Taches « café au lait » : 1/3 des formes polyostotiques, nappes à contours irréguliers au niveau du Tronc à contours escarpés Moins nombreuses et plus foncées que les taches de la neurofibromatose , unilatérales, du côté de l'atteinte osseuse.
Troubles endocriniens : Entrant dans le cadre du syndrome d'Albright « Osteitis Fibrosa Disseminata » Troubles pigmentaires, Anomalies endocriniennes Puberté précoce chez la fille Hyperthyroïdie, hyperparathyroïdie, acromégalie, rachitisme vitamino- résistant, maladie de cushing, diabète Dysfonctionnement hypothalamo-hypophysaire. Adénomatose endocrinienne multiple avec développement autonome d'hyperfonctionnements glandulaires Rachitisme hypo phosphatémique , ostéomalacie Résection d'une forme monostotique = la guérison la possibilité d'une hormone sécrétée par la lésion osseuse Myxomes : rares , formes polyostotiques, siège intramusculaire, souvent multiples. Syndrome de Mazabraud IRM +++.
Biologie Pas de syndrome inflammatoire. Bilan phosphocalcique normal. Parfois augmentation des phosphatases alcalines (si importante , hyperparathyroïdie associée) Chaque endocrinopathie est susceptible d’induire des troubles spécifiques
Radiographies :Aspects typiques Topographie : diaphyse, métaphyse Aspect en verre dépoli : typique mais non pathognomonique plage de minéralisation de la moelle osseuse, homogène, légèrement condensée, généralement à limites nettes, ou plus rarement se raccordant progressivement à l'os normal et à la corticale La présence d'un liseré périphérique condensant bien limité sur ses deux versants est caractéristique des lésions fibreuses. L'association à un aspect en verre dépoli est quasi pathognomonique Origine centromédullaire, parfois excentrée, Principalement diaphysaire Exceptionnellement corticale ou para-ostéale.
Radiographies : Aspects moins typiques Aspect « SOUFFLE » +++ Déformation et Hypertrophie Os Multiples Lésions séparées /Os normal ++ Calcifications (10%) (Fémur proximal Erosion des corticales Trabéculation interne de densité variable Images en nuages de fumée parfois (liées à des kystes et des îlots cartilagineux) Pas d'apposition périostée, Pas de rupture corticale Pas d'extension dans les parties molles (en dehors des fractures).
Scintigraphie dérivés phosphatés marqués au 99mTc. hyperfixation marquée rechercher d'autres atteintes dans les formes apparemment uniques. absence de fixation nette ne permet pas d'éliminer le diagnostic.
Tomodensitométrie La sémiologie radiologique est la même, mais le scanner a pour avantage de délimiter nettement les lésions (Crâne, Face, Rachis, Fracture, Transformation Maligne…) Meilleure appréciation du type et de l’extension des lésions intégralité ou amincissement cortical +/- résorption endostéale densités (fonction composants os/fibreux, calcifications) absence d’extension aux parties molles guider une biopsie à visée diagnostique.
IRM contours bien limités sur toutes les séquences. siège intra médullaire. Aspect dépend du degré de différenciation de DF: Iso ou Hypo signal homogène en T1 signal variable en T2 : Hypo signal très évocateur mais moins fréquent Hyper signal (Tissu Métaboliquement Actif, composante Kystique, composante cartilagineuse) Signal Hétérogène (Calcifications, Travées os minéralisées…) Rehaussement après Gadolinium VARIABLE : Modéré à intense ( DF vascularisée) Global le + svt et Homogène en fonction des composantes Histologiques Liseré périphérique Hypo signal franc sur toutes les séquences très caractéristique ! « ring sign »
IRM Septas en hyper signal T2. Foyers hémorragiques en hyper signal T1 et T2 Extension des lésions en intra médullaire +++ absence d'atteinte des parties molles en cas de doute diagnostique. T1 T2 T1 + Gado T1+Gado plus intense queT2, pole distal en coup de sabre
Aspects radiologiques particuliers : Selon la localisation CRÂNE et FACE Frontal > Sphénoïde > Ethmoïde > Maxillaire Occipital et Temporal + rarement Formes Lytiques (20 à 30%) Formes Condensantes (20 à 30%) Formes Mixtes (40 à 50%) +++ CÔTES Localisation très fréquente ! Aspect soufflé ++, lytique, cloisonné ou en Verre Dépoli, Fusiforme limité par une coque périostée fine RACHIS localisation très rare dans DF Monostotique, touchant essentiellement le corps vertébral , arc postérieur encore plus rare! Diagnostics différentiels : Kyste Anévrismal Osseux Ostéoblastome
Aspects Moins Typiques Condensation en volutes de fumée, en flamme de bougie Disparition de la limite entre corticale et médullaire Lésions à coque périostée fine et continue (en dehors des fractures, responsables d'une augmentation de volume de l'os atteint et d'un trouble de la tubulation Absence de l'anneau périphérique de condensation Les lésions peuvent être uniquement lytiques, bordées ou non par un liseré de sclérose Calcifications de type cartilagineux : 10 % des cas, Disséminées, De petite taille , Prédominent au centre de la lésion. Se voient surtout dans les localisations de l'extrémité supérieure du fémur. Coulées transparentes, perpendiculaires au cartilage de conjugaison, donnant aux métaphyses un aspect strié ≈ maladie d'ollier
Formes Atypiques : en fonction de la localisation dans l’os: Normalement intra-médullaire, +/- excentrée, classiquement jamais corticale ! Diagnostics différentiels : Fibrome non ossifiant Adamantinome Aspect Pseudo-malin Rupture Corticale + Extension aux parties molles
Complications Déformations Et Fractures Pathologiques Complications les plus fréquentes Nécessitent une étude radiographique simple, voire tomodensitométrique avec reconstructions bi- et tridimensionnelles Elles siègent préférentiellement au niveau du fémur, du tibia, du pelvis et des côtes. Dégénérescence Maligne Fréquente dans le SMCA : 4 % des cas. Dégénérescence sarcomateuse : formes monostotiques rare (0,4 à 1 %) fémur et le crâne. Après radiothérapie locale. de la douleur, tuméfaction des parties molles. modification de l'aspect radiologique zones lytiques, appositions périostées, rupture corticale, envahissement des parties molles. Histologique : ostéosarcome (54 %), un fibrosarcome (30 % des cas), ou chondrosarcome (16 %).
Le moindre doute clinique (augmentation des douleurs, tuméfaction rapidement évolutive) ou radiologique (lyse osseuse extensive rapide, envahissement des parties molles rapide) doit conduire à la réalisation d'une biopsie. La tomodensitométrie et surtout l'IRM sont utiles au diagnostic et au bilan d'extension.
Complications Neurologique L'hypertrophie osseuse peut engendrer des compressions neurologiques de siège divers canaux optiques diminution rapide de l'acuité visuelle. Un bilan tomodensitométrique et IRM permettra d'analyser respectivement les modifications osseuses et le retentissement sur les nerfs optiques. ORL atteinte auditive par sténose du conduit auditif interne l'hypertrophie osseuse peut retentir directement sur moyenne Un scanner en coupes fines millimétriques dans les plans axial et coronal permet une étude lésionnelle adaptée. complications à type de sinusites répétées peuvent également nécessiter une étude TDM à but diagnostique et pré thérapeutique Esthétiques déformations post fracturaires visibles notamment au niveau des os longs dysmorphies faciales majeures L'étude tomodensitométrique en fenêtres osseuses avec reconstructions bi et surtout tridimensionnelles est alors extrêmement utile au bilan pré thérapeutique.
Diagnostics Différentiels Formes monostotiques kyste anévrismal (qui peut être un mode évolutif), kyste osseux (liseré périphérique épais en faveur de la dysplasie fibreuse ; pas ou peu de fixation scintigraphique dans le kyste osseux) infarctus osseux. Le liseré périphérique, lorsqu’il est présent, est moins épais. L’infarctus présente une forme en « carte de géographie » dont la densité TDM et le signal IRM sont habituellement de type graisseux. Enchondrome Le fibrome ossifiant et dysplasie ostéofibreuse de Campanacci Ostéomyélite granulome éosinophile (les localisations peuvent être multiples mais présentent des contours moins nets et sans liseré de sclérose ostéosarcome intramédullaire de bas grade devant des lésions lytiques, métaphysoépiphysaire Généralement : limites souvent floues, de liseré de sclérose et corticale détruite Diagnostic parfois difficile d'autant que les aspects histologiques sont proches. Formes poly osseuses Elles sont en général plus faciles à reconnaître le diagnostic d'hyperparathyroïdie ne se pose guère. La neurofibromatose peut être difficile à différencier quand il existe des localisations aux os longs. l'enchondromatose (la présence de foyers cartilagineux donnant un aspect strié aux métaphyses ou des images en « pop corn » peut faire confondre la dysplasie fibreuse avec la maladie d'Ollier d'autant que la localisation aux os longs est classique, celle au crâne est rare), la maladie de Paget
Conclusion Le diagnostique de la dysplasie fibreuse dans les formes typiques se base sur les RADIOGRAPHIES STANDARD Il est important de reconnaître les lésions simples pour éviter des bilans coûteux, inutiles et anxiogènes. Il est PRIMORDIAL de bien connaître les caractéristiques des DP pour aisément démasquer les lésions plus agressives ayant un aspect pseudo-malin. La TDM et L’IRM ne sont pas justifiées pour toutes les tumeurs bénignes qu’en cas de difficulté diagnostique ou opératoire TDM et IRM sont utiles dans les formes atypiques, dans les localisations anatomiques complexes telles que le Crâne, Rachis et dans les formes compliquées. Formes polyostotiques = Diagnostic plus facile compte-tenu des localisations multiples. Ne pas méconnaître les associations rares telles que: - Sd Mac Cune-Albright - Sd Mazabraud Biopsie : en cas de tumeur osseuse atypique