Coordinateur : Pascal MARTIN Psychosociologie des organisations Équipe d’enseignants : J.-F. DESCHAMPS, L. DUGUE-LAMY, H. FEERTCHAK-GERY, F. LINDENMANN, F. MARTIN, P.MARTIN Coordinateur : Pascal MARTIN
Séance 6 Catégorisation, Stéréotypes, Préjugés, et Discrimination E
I. La catégorisation sociale Définition : Processus par lequel on perçoit les personnes comme appartenant à des groupes ou à des catégories plutôt qu’en tant qu’individus. Pourquoi ? On est continuellement en présence d’une multitude d’informations. Nous avons tendance à structurer le monde physique en regroupant les objets en différentes catégories, par besoin de simplifier notre environnement : Principe d’économie cognitive
La catégorisation sociale Nous catégorisons aussi les objets sociaux: nous avons tendance à structurer notre environnement social en regroupant les individus en catégories sociales. ‘Catégories de base’ = catégories par lesquelles on commence généralement le classement ( en millièmes de secondes): l'âge, le sexe et les origines. Ensuite, nous avons nos sous-catégories.
La catégorisation sociale La catégorisation a trois fonctions essentielles : Une fonction informationnelle : à partir d’un nombre d’informations minimum, nous repérer dans un environnement complexe. + Une fonction d’orientation de l’action : attrait, indifférence ou rejet de tel ou tel objet ou personne. +Une fonction identitaire : Quand je me classe dans une catégorie sociale (eg. étudiant, école de commerce), ça contribue à définir la représentation de moi-même, tant pour moi, que pour les autres.
La catégorisation sociale Conséquence sur notre perception des individus : exagérer les ressemblances dans une même catégorie et les différences entre les catégories ( biais cognitifs). Ces 2 effets sont renforcés lorsqu'il s'agit d'un groupe auquel je n'appartiens pas (« exogroupe » ) Par exemple Alexandra (qui se classe dans la catégorie femme = pas homme) pourrait considérer que les hommes fonctionnent tous de la même façon dans le travail: tous ambitieux et émotionnellement insensibles.
La catégorisation sociale De plus, on observe un biais de l’endogroupe : = tendance à avoir une meilleure opinion à l’égard de son propre groupe (endogroupe) qu’à l’égard des autres groupes. => Ex.
La catégorisation sociale Alexandra Aurélie Pierre Ex: Recrutement: Alexandra aura tendance à se classer dans la même catégorie sociale qu’Aurélie (même sexe, âge, ethnie) plutôt que celle de Pierre. (Alors que Pierre peut avoir plus de compétences) la catégorisation peut amener Alexandra, par un biais d’endogroupe, à favoriser la candidature d’Aurélie.
La catégorisation sociale un biais de l’endogroupe : = tendance à avoir une meilleure opinion à l’égard de son propre groupe (endogroupe) qu’à l’égard des autres groupes. Pourquoi ? Selon la théorie de l’identité sociale, ça contribue à maintenir une bonne Estime de Soi. (Tajfel et al., 1971).
II. Stéréotypes
Les Stéréotypes Expérience de Cohen (1981) Ppts voient un film: une femme dinant avec son mari. V.I.: au Groupe 1: « c’est une serveuse »; au Groupe 2 « …bibliothécaire » Dans la scène filmée, on a mis autant de détails pour chacune des 2 interprétations. Tâche: se rappeler toutes les informations observées. Résultat: ….
Les Stéréotypes Expérience de Cohen (1981) Ppts voient un film: une femme dinant avec son mari. V.I.: au Groupe 1: « c’est une serveuse »; au Groupe 2 « …bibliothécaire » Tâche: se rappeler toutes les informations observées. Résultat: le groupe 1 se rappelle mieux les infos cohérentes avec l’idée de « serveuse » (schéma activé). +: ….se rappellent même des infos non présentées !! télévision, canette de biere ….vs Groupe 2: musique classique, lunettes, verre de vin
Les Stéréotypes Lippman (1922) est le premier qui utilise ce concept qu’il définit comme : « une manière de penser par clichés ». Ex. de catégories de sièges Chaises, tabourets, fauteuils, bancs, etc Stéréotype du fauteuil: 1 assise 1 dossier 2 accoudoirs pietement plus stable que tabouret …donc: les principales caractéristiques de la catégorie ‘Fauteuil’
Les Stéréotypes Leyens (1996): Stéréotypes = croyances* socialement partagées concernant les caractéristiques communes attribuées à un groupe social. * croyance = ne correspond pas forcément à la réalité.
Les Stéréotypes Les stéréotypes ne concernent pas un individu particulier (interchangeable dans la même catégorie), mais un groupe social : « les femmes sont des manipulatrices dans le travail » « les ouvriers sont des feignants », « les commerciaux ne s’intéressent qu’à l’argent»…. Ils peuvent être aussi neutres: « Les comptables sont méticuleux » ou positifs : « les femmes sont intuitives » « les ingénieurs sont intelligents »…..
Enrichir la fonction « catégorisation » Les Stéréotypes Fonction: Enrichir la fonction « catégorisation » = faire des suppositions vis-à-vis d'un individu, concernant ses caractéristiques, avant même de le connaître, sur la simple base de son appartenance à tel groupe social.
Les Stéréotypes Le paradis est l'endroit où - Les Français sont les cuisiniers - Les Italiens sont les amants - Les Anglais sont les policiers - Les Allemands sont les mécaniciens - Et le tout est organisé par les Suisses L'enfer est l'endroit où - Les Anglais sont les cuisiniers - Les Suisses sont les amants - Les Allemands sont les policiers - Les Français sont les mécaniciens - Et le tout est organisé par les Italiens
Les Stéréotypes Formation: Les stéréotypes et les préjugés, comme les normes, font partie de notre héritage culturel. Ils sont transmis par notre entourage familial, les groupes qu’on fréquente, les médias. Par tous processus de socialisation.
Les Stéréotypes
Les Stéréotypes Les stéréotypes influencent la manière dont nous traitons les informations sociales. Tendance: traiter par ajouts/retraits vs. Stéréotype (Ex: un fauteuil …. très confortable; ou instable) Ex: Cohen, 1981: « Serveuse ou Bibliothécaire »: L'attention : on néglige des informations, car le Stéréotype oriente l’attention vers les caractéristiques attendues. La mémorisation : Nous retenons mieux les informations conformes au stéréotype. « Nous retenons ce que nous savons déjà » La perception: les stéréotypes nous amènent à « percevoir » des informations en rapport avec nos croyances, alors que nous ne les avons pas réellement perçues.
Caractéristiques Adjectifs Stéréotypes Autre Effet du Stéréotype: Expérience de Rosenkrantz (USA, vers 1960): Il demande à des hommes et à des femmes d’indiquer si les adjectifs suivants sont plutôt caractéristiques des hommes, des femmes ou bien neutres ? Caractéristiques Adjectifs Evaluations Hommes Evaluations Femmes Sensible F Audacieux H Prudent Courageux
Caractéristiques Adjectifs Stéréotypes Jusque là rien de bien étonnant: les mêmes stéréotypes partagés par les hommes et les femmes. …Mais on leur demande, ensuite, d’évaluer les 4 adjectifs positivement, négativement ( ou neutre): Les femmes, inconsciemment, s’auto-évaluent négativement ! Caractéristiques Adjectifs Evaluations Hommes Evaluations Femmes Sensible - Audacieux + Prudent Courageux
Back up: http://www.youtube.com/watch?v=PZryE2bqwdk III.Les Préjugés http://www.youtube.com/watch?v=s7gymgcQ_3o Back up: http://www.youtube.com/watch?v=PZryE2bqwdk
Préjugé = un sentiment / un jugement Préjugés Préjugé ≠ stéréotype Préjugé = ATTITUDE, généralement négative, comportant une dimension évaluative, à l'égard d’1 ou des membres d'un groupe social, sur la simple base de son (leur) appartenance à cette catégorie. Préjugé = un sentiment / un jugement « ABC »: Cognition: Stéréotype; Affect: préjugé; Behavior: discrimination
2. Composante affective: Les Préjugés Trois composantes dans les préjugés : ( comme dans toute attitude) Composante cognitive : nous permet de catégoriser l’individu dans un groupe et de lui faire correspondre des traits stéréotypés. 2. Composante affective: sentiments que nous éprouvons face à cet individu. 3. Composante comportementale: se réfère à nos tendances comportementales par rapport à cet individu ou à la catégorie tout entière (cf: discrimination).
Les Préjugés http://www.psychologie-sociale.com/index.php?option=com_content&task=view&id=197&Itemid=83 Effet des préjugés Expérimentation de Clark & Clark ( 1947) Les poupées blanches et noires Lesquelles aime-t-on le plus ?
Les Préjugés Les préjugés peuvent aussi provoquer l’autoréalisation de la prophétie : =>
Préjugés: Auto-réalisation de la prophétie, et Recrutement Expérience de Word, Zanna et Cooper (1974). Phase 1: 2 groupes de Ss (blancs) interviewent des candidats (seul à seul). V.I.: pour certains Ss, le candidat est un blanc; pour les autres, c’est un noir (les 2 « candidats » sont des comparses) Les interviews sont filmés, puis évalués par des juges indépendants. Résultat: Pour candidat noir, les interviewers: Langage plus laxiste Comportement plus distancié Interview plus court
Préjugés:Auto-réalisation de la prophétie, et Recrutement (2) Phase 2 = « inversion » 2 groupes de Ss, blancs, sont interviewés comme candidats par 2 Interviewers (comparses) différents selon leur groupe V.I. : pour groupe Expé, l’interviewer se comporte comme l’ont fait en phase 1, les interviewers face à un noir; pour l’autre groupe, comme face à un blanc. L'interaction est filmée, puis évaluée par des juges indépendants. =>
Préjugés:Auto-réalisation de la prophétie, et Recrutement (2) Phase 2 (« inversion ») Ss, blancs, sont interviewés comme candidats par 2 Interviewers (comparses) différents selon leur groupe V.I. : pour groupe Expé, l’interviewer se comporte comme l’ont fait en phase 1, les interviewers face à un noir; pour l’autre groupe, comme face à un blanc. L'interaction est filmée, puis évaluée par des juges indépendants. Résultat: Les candidats traités comme des noirs: Sont moins performants Plus distants Trouvent leur interviewer moins bon Donc: face à un individu stigmatisé, une personne peut, sans s'en rendre compte, adopter une posture qui met son interlocuteur mal à l'aise. Il y a alors de fortes chances pour que le stigmatisé donne une mauvaise image de lui...
Les Préjugés Taylor et Sears identifient 5 étapes dans l’autoréalisation de la prophétie : 1. La personne A acquiert un préjugé à propos de la personne B Alexandre croit que Marie est incapable de négocier avec un client agressif car c’est une femme 2. La personne A agit en fonction de ce préjugé Alexandre contacte un client difficile, qui fait partie de leur portefeuille client à tous les deux, sans demander à Marie si elle se sent capable de négocier avec lui
Les Préjugés 3. B modifie son comportement en fonction de celui de A Lors du rendez-vous, Marie n’intervient pas, elle regarde et écoute Alexandre négocier avec le client 4. A voit son préjugé confirmé par le comportement de B Alexandre considère que le fait que Marie n’intervienne pas est une confirmation de plus que les femmes ne sont pas de bonnes négociatrices 5. B en vient à accepter les préjugés de la personne A comme une description objective de la réalité Puisque Alexandre gère les clients difficiles sans elle, sans lui demander son avis, Marie considère alors qu’elle n’est pas douée dans ce domaine
IV. Discrimination La discrimination est un comportement: qui se manifeste par différentes formes, allant du simple évitement aux actes les plus violents, en passant par tous les actes d'exclusion, de mise à l'écart. Elle peut être également positive.
La discrimination Comment s’explique la discrimination ? 1. Les conflits entre des groupes sociaux : La discrimination résulterait d'une situation de conflit entre des groupes sociaux pour des ressources limitées : les groupes sociaux ont des intérêts communs incompatibles (compétition). ……../……
La discrimination Comment s’explique la discrimination ? La frustration génère l’agression et créé des boucs émissaires
La discrimination Comment s’explique la discrimination ? 2. Théorie de l‘Identité Sociale (Tajfel, 1981) : La discrimination peut se manifester en dehors de tout conflit sans même que les individus se connaissent. Nous avons une tendance naturelle à diviser l'humanité : NOUS et EUX. Pour nous définir, nous utilisons nos groupes d'appartenance. Faire une différence entre "mon groupe" et "un autre groupe" permet de construire mon identité : moyen de construction identitaire, de différenciation soi/autrui. Cf. Expérience de Sherif (1961) : « The Robbers Cave » => -
Le Conflit Inter-Groupes L’expérience de Sherif (1951) 22 Garçons de 11 ans, classe moyenne, colonie de vacances (Robbers’ cave State Park) Semaine 1: 2 groupes aléatoires A et B, vivant séparément => « Eagles » & « Rattlers » Semaine 2: jeux inter-groupes, avec des prix (base-ball, tug-of-war)
Sherif: Robbers’ cave State park Semaine 2: jeux inter-groupes, avec des prix (base-ball, tug-of-war) dénigrement, « noms d’oiseaux » se brulent leurs drapeaux s’accusent de tricher attaquent le pavillon de l’autre groupe, et détruisent le mobilier stockent des pierres pour s’attaquer vol des prix bagarres inter-groupes : haine inter-groupe les psys interviennent pour arrêter l’évolution.
Sherif: Robbers’ cave State park Semaine 3: Les psys cherchent à réconcilier les 2 groupes: Bien plus difficile !! Vantent les mérites des membres de l’autre groupe: NOK Contacts sans compétition (repas, spectacle): NOK : nouvelles bagarres ! Situations insolubles sans coopération (dépanner réserve d’eau; louer un film) OK = Objectifs « super-ordinate » Stéréotypes négatifs diminuent; comportements prosociaux reviennent.
Conflits Inter-Groupes 4 Explications Conflit d’intérêts NB: « Effet de discontinuité » (Shopler & Insko, 1992) = Les groupes sont plus influencés par la concurrence que les individus (cf Effet « Pensée de groupe » -rappel infra-) La Menace Ressentie: Des intérêts Des normes et valeurs Anxiété inter-groupe Stéréotypes négatifs 3) …
Le Conflit Inter-groupes 3) Identité Le rejet des autres groupes permet de renforcer: le sentiment d’appartenance groupale. son identité son estime de soi. 4) Automatisme instinctif (Psychologie évolutionniste) « Nous » vs « les autres ».
Préjugé/ Stéréotype et Discrimination : Synthèse Préjugé/ Stéréotype et Discrimination : Femmes - + Stéréotype : une idée/une croyance : « Les femmes sont moins impliquées que les hommes dans le travail » Préjugé : un sentiment / un jugement : attitude vis-à-vis des femmes Discrimination : un acte/un comportement : « Je n’embauche jamais de femmes pour des postes de management »