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Le contrôle du régulateur en droit européen Par Martine Behar-Touchais Professeur à l’Ecole de Droit de la Sorbonne (Paris 1) Codirectrice de l’Institut.

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1 Le contrôle du régulateur en droit européen Par Martine Behar-Touchais Professeur à l’Ecole de Droit de la Sorbonne (Paris 1) Codirectrice de l’Institut de recherche juridique de la Sorbonne (IRJS- André Tunc) 1

2 Quand une entreprise est lourdement condamnée par une Autorité administrative, il est naturel qu’elle puisse exercer des voies de recours. Mais se pose alors la question de la mesure du contrôle que les juridictions vont exercer sur le régulateur (conçu au sens large) et derrière, la question des droits fondamentaux des entreprises condamnées. On pense bien sûr tout de suite au droit à un procès équitable de l’article 6§1 de la CEDH 2

3 Quid de la Conv. EDHdans l’ordre juridique de l’Union? 3

4 Mais Arrêt Téléfonica (CJUE 10 juillet 2014 aff C-295/12): « Il y a lieu de rappeler que, si, comme le confirme l’article 6, paragraphe 3, TUE, les droits fondamentaux reconnus par la CEDH font partie du droit de l’Union en tant que principes généraux et si l’article 52, paragraphe 3, de la Charte impose de donner aux droits contenus dans celle-ci correspondant à des droits garantis par la CEDH le même sens et la même portée que ceux que leur confère ladite convention, cette dernière ne constitue pas, tant que l’Union n’y a pas adhéré, un instrument juridique formellement intégré à l’ordre juridique de l’Union (voir arrêt Schindler Holding e.a./Commission, EU:C:2013:522, point 32). » (point 41) Les garanties que la CEDH protège sont incorporées au droit de l’UE non seulement à travers le vecteur des principes généraux du droit mais aussi en tant qu’instrument d’interprétation des dispositions de la Charte. 4

5 *** Or, la sanction administrative est répressive (Malgré art 23 § 5 Règlement 1/ 2003 concernant les décisions de la Commission qui précise que : « 5. Les décisions prises en application des paragraphes 1 et 2 n'ont pas un caractère pénal. ») Les critères alternatifs de l’arrêt ENGEL (à savoir, la qualification juridique de la mesure litigieuse en droit national, la nature même de celle-ci, et la nature et le degré de sévérité de la sanction) sont remplis (Cour EDH, Plénière, 8 juin 1976,Engel c. Pays-Bas, Req. n° 5370/72, § 82; (Jussila c. Finlande [GC], no 73053/01, §§ 30 et 31, CEDH 2006-XIII, etZaicevs c. Lettonie, no 65022/01, § 31, CEDH 2007-IX (extraits).Engel c. Pays-Bas, Req. n° 5370/72, § 82; 73053/0165022/01). 5

6 Sanctions répressives hors du noyau dur du droit pénal les amendes infligées par la Commission constitueraient des sanctions pénales au sens de l’article 6 § 1 CEDH (C-489/10, Bonda, pt. 37). Bonda, pt. 37). La CEDH distingue le noyau dur du droit pénal et les autres sanctions répressives: arrêt JUSSILA 23 nov. 2006: la différence entre noyau dur du droit pénal (privation de droits et de libertés) et le reste du droit pénal (sanctions pécuniaires) qui permet un peu plus de souplesse (En FR, Conseil Constit 10 juin 2009 déc. 2009-580DC: une AAI peut prononcer des sanctions pécuniaires pénales ou répressives, mais non une peine privative de droits ou de liberté ) 6

7 CJUE SCHINDLER 18 juillet 2013 (aff des ascenseurs) adopte une position similaire CEDH MENARINI Cour EDH, 2 e Sect. 27 septembre 2011, admet la compatibilité de la procédure administrative concernant l’autorité de la concurrence italienne avec l’article 6 § 1 CEDH (Req. n° 43509/08)Req. n° 43509/08 7

8 MENARINI l’article 6.1 de la Convention n’interdit pas qu’une autorité administrative prononce une sanction relevant de la matière pénale si un « organe de pleine juridiction » peut en être saisi sur recours. Cela veut dire que cet organe doit disposer du « pouvoir de réformer en tous points, en fait comme en droit, la décision entreprise, rendue par l’organe inférieur ». Le juge « doit notamment avoir compétence pour se pencher sur toutes les questions de fait et de droit pertinentes pour le litige dont il se trouve saisi 8

9 Donc 3 qualités essentielles semble-t-il: -le pouvoir de réformer -en tous points -en fait et en droit 9

10 La Cour rappelle, aussi que seul mérite l’appellation de « tribunal » au sens de l’article 6 § 1 un organe jouissant de la plénitude de juridiction et répondant à une série d’exigences telles que l’indépendance à l’égard de l’exécutif comme des parties en cause (voir, entre autres, les arrêts Ringeisen c. Autriche, 16 juillet 1971, § 95, série A no 13 ; Le Compte, Van Leuven et De Meyere c. Belgique, 23 juin 1981, § 55, série A no 43 ; Belilos c. Suisse, 29 avril 1988, § 64, série A no 132, et surtout l’arrêt Beaumartin c. France, 24 novembre 1994, § 38 et 39, série A no 296 ‑ B). 10

11 On laisse de côté le contrôle du contrôleur Quelle est l’étendue du contrôle qu’exerce la Cour sur l’appréciation du Tribunal au titre de l’exercice de sa compétence de pleine juridiction ? La Cour a rappelé récemment que « ce n’est que dans la mesure où la Cour estimerait que le niveau de la sanction est non seulement inapproprié, mais également excessif, au point d’être disproportionné, qu’il y aurait lieu de constater une erreur de droit commise par le Tribunal, en raison du caractère inapproprié du montant d’une amende » (CJUE, 10 avril 2014, Commission c/ Siemens Österreich e.a. et Siemens Transmission & Distribution e.a. c/ Commission, aff. jtes C-231/11 P à C-233/11 P, pt 111. 11

12 Quid du contrôle par le Trib. UE des décisions de la Commission? L’arrêt MENARINI concerne un recours contre une ANC. Mais indirectement se pose nécessairement la question de savoir si les décisions de la Commission européenne respectent au moins les principes de l’arrêt MENARINI La difficulté tient au fait notamment que sont prévus deux sortes de contrôle des décisions de la Commission: -un contrôle de légalité sur la constatation de l’infraction, qui ne peut conduire qu’à l’annulation de la décision ou au rejet du recours -auquel s’ajoute un contrôle de pleine juridiction sur les amendes qui permet de réformer la décision 12

13 I/ Les décisions de sanctions 13

14 Mais au niveau du tribunal de l’UE, y a-t-il des limites à son pouvoir de pleine juridiction en matière de sanctions? Il faut distinguer entre les limites procédurales qui me paraissent bien fondées (A), et certaines limites substantielles qui peuvent être discutées (B) 14

15 A/Des limites procédurales bien fondées 15

16 Cela n’est pas gênant, puisque les parties auraient pu soulever les moyens permettant un contrôle plus étendu. De même qu’elles peuvent ne pas faire de recours, elles peuvent dans leur recours, limiter leur critiques comme elles l’entendent. Cela n’empêche pas qu’elles ont eu droit à un recours de pleine juridiction b/ Le contrôle de pleine juridiction oblige-t-il à accepter largement les moyens nouveaux? CJUE 21 juin 2014: Deltafina: non (C-578/11 P, pts 74 à 77). 16

17 La question est délicate, car il doit être possible d’imposer aux parties de développer tous leurs moyens devant la Commission. En droit, il nous semble que l’arrêt Menarini n’impose pas la recevabilité des moyens nouveaux. Mais, la question se pose en opportunité: si le recours de pleine juridiction est une garantie du droit à une justice équitable, ne faudrait-il pas ouvrir plus largement les moyens nouveaux dans ce cas (en ce sens AG Mengozzi, concl. Sous l’arrêt de la Cour du 22 janvier 2012, Commission contre Tomkins;, points 41 et 42)? 17

18 c/ quid si les parties parlent d’annulation, alors qu’elles auraient dû demander la réformation? Dans l’affaire du cartel des stabilisants thermiques, le Tribunal a analysé les moyens des requérantes, que celles-ci aient visé tantôt l’annulation, ou tantôt la réformation de la décision attaquée (Trib. UE, 6 février 2014, AC-Treuhand c/ Commission, T-27/10 ; Elf Aquitaine c/ Commission, T-40/10.) 18

19 B/ Des limites substantielles discutables Il y en avait une qui est en recul. Il s’agit de la limite tenant aux appréciations économiques complexes (a). Mais il y en a une autre qui tient aux limites liées aux lignes directrices de la Commission (b) a) Le recul de la limite du contrôle en cas d’appréciation économique complexe Certes, la Commission a une politique de concurrence, et elle pourrait utiliser ses appréciations économiques complexes pour la mettre en oeuvre Mais, ne pas contrôler les appréciations économiques complexes de la Commission, revient à lui donner un pouvoir discrétionnaire sur des points qui sont souvent essentiels C’est pourquoi cette limite est en recul 19

20 Jusqu’à récemment, certains considéraient que le contrôle n’est pas entier (cf Aude Bouvresse, Le pouvoir discrétionnaire dans l’ordre juridique communautaire » 2010): Le Tribunal examine avant tout la cohérence des critères d’analyse retenus avec les appréciations dégagées à partir de la constatation matérielle des faits Il vérifie au vu de la grille d’analyse des faits si la Commission a suivi ses orientations Mais, ce n’est pas vraiment une substitution de l’appréciation du juge à celle de la Commission 20

21 Affaire C-386/10 P Chalkor AE Epexergasias Metallon contre Commission européenne, CJUE 8 décembre 2011 21

22 22

23 « Le contrôle prévu par les traités des décisions adoptées par la Commission en matière de concurrence implique que le juge de l’Union exerce un contrôle tant de droit que de fait et qu’il ait le pouvoir d’apprécier les preuves, d’annuler la décision attaquée et de modifier le montant des amendes. Il n’apparaît dès lors pas que le contrôle de légalité prévu à l’article 263 TFUE, complété par la compétence de pleine juridiction quant au montant de l’amende, prévue à l’article 31 du règlement nº 1/2003, soit contraire aux exigences du principe de protection juridictionnelle effective figurant à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. » (point 67) 23

24 marge d’appréciation de la Commission L’arrêt Chalkor annonce-t-il un vrai changement sur les appréciations économiques complexes en matière de sanction, ou s’agit-il d’une apparence formelle de contrôle entier? L’arrêt précité parle tout de même de la marge d’appréciation de la Commission, même si ici il ne la qualifie pas de discrétionnaire. 24

25 b) Les limites liées aux lignes directrices lignes directrices de la Commission sur les amendes La Commission est liée par ses lignes directrices et communications (amendes, clémence). C’est en se fondant sur les principes de confiance légitime et d’égalité de traitement, que la Cour impose à la Commission le respect de la soft law qu’elle a elle-même édictée 25

26 par exemple, dans l’affaire C-167/04 P (JCB Service contre Commission ), la Cour de Justice, par arrêt du 21 septembre 2006 a rappelé : « 207 (…) selon la jurisprudence de la Cour, si les lignes directrices ne sauraient être qualifiées de règle de droit à l’observation de laquelle l’administration serait, en tout cas, tenue, elles énoncent toutefois une règle de conduite indicative de la pratique à suivre dont l’administration ne peut s’écarter, dans un cas particulier, sans donner des raisons qui soient compatibles avec le principe d’égalité de traitement (arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C ‑ 189/02 P, C- 202/02 P, C-205/02 P à C-208/02 P et C-213/02 P, Rec. p. I-5425, point 209). 208 En adoptant de telles règles de conduite et en annonçant par leur publication qu’elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, la Commission s’autolimite dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionnée, le cas échéant, au titre d’une violation de principes généraux du droit, tels que l’égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime (arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, précité, point 211). » 26

27 Les pouvoirs de pleine juridiction sont-ils subordonnés à la constatation d’une illégalité? Débat important en droit de l’Union: Le juge ne réexamine pas en fait et en droit la condamnation au paiement de l’amende, comme le ferait une cour d’appel dans une affaire civile. Il doit d’abord constater une illégalité, pour ensuite appliquer ses pouvoirs de pleine juridiction (cf Hubert Legal) Mais ce qui est encore plus grave, c’est qu’il est limité par les pouvoirs discrétionnaires de la Commission 27

28 Part de pouvoir discrétionnaire 28

29 29

30 Quels sont ces domaines? Par exemple:  « Il lui appartient en effet de choisir, dans le cadre de sa large marge d’appréciation, le taux de majoration qu’elle entend appliquer au titre de la durée de l’infraction ». (points 95-96-98)  « Dans le cadre de l’appréciation de la coopération fournie par les membres d’une entente, la Commission bénéficie d'une large marge d'appréciation pour évaluer la qualité et l’utilité de la coopération fournie par une entreprise, notamment par rapport aux contributions d’autres entreprises. Seule une erreur manifeste d’appréciation de la part de la Commission est donc susceptible d’être censurée. La Commission ne saurait pour autant, dans le cadre de ladite appréciation, méconnaître le principe d’égalité de traitement ». (point 105) 30

31 Contrôle de légalité de la décision de sanction (même affaire): 226 Il appartient donc au Tribunal, dans le cadre du contrôle de la légalité de la décision attaquée, de vérifier si la Commission a exercé son pouvoir d’appréciation selon la méthode exposée dans les lignes directrices et dans la communication sur la coopération et, dans la mesure où il devrait constater qu’elle s’en est départie, de vérifier si cet écart est légalement justifié et motivé à suffisance de droit. » 31

32 32

33 Il en résulte que le juge ne pourrait pas appliquer une technique de calcul spécifique de l’amende. En revanche, le juge fixe l’amende au jour où il statue. Il pourra donc prendre en compte des éléments récents, par exemple tenant à la situation financière de l’entreprise 33

34 II/ Les décisions de constatation de l’infraction Article 263 TFUE (ex-article 230 TCE): « La Cour de justice de l'Union européenne contrôle la légalité des actes législatifs, des actes du Conseil, de la Commission et de la Banque centrale européenne, autres que les recommandations et les avis, et des actes du Parlement européen et du Conseil européen destinés à produire des effets juridiques à l'égard des tiers. Elle contrôle aussi la légalité des actes des organes ou organismes de l'Union destinés à produire des effets juridiques à l'égard des tiers. À cet effet, la Cour est compétente pour se prononcer sur les recours pour incompétence, violation des formes substantielles, violation des traités ou de toute règle de droit relative à leur application, ou détournement de pouvoir, formés par un État membre, le Parlement européen, le Conseil ou la Commission. (…) Toute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas, un recours contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d'exécution. … » 34

35 A/ La CJUE affirme que ce contrôle répond aux exigences de l’article 47 de la Charte David Bosco et Thierry de Bovis, dans un dossier sur « la pleine juridiction du juge de l’Union sur les décisions de la Commission » (revue Concurrences) ont montré qu’il n’était pas simple de répondre à la question de savoir si « contrôle de légalité » de l’article 263 TFUE présente ou non les caractéristiques d’un contrôle de pleine juridiction au sens du droit conventionnel et, plus immédiatement, au sens de l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux. 35

36 l’arrêt Otis e.a., (C-199/11), point 56 : ‘‘(…) le droit de l’Union prévoit un système de contrôle juridictionnel des décisions de la Commission relatives aux procédures d’application de l’article 101 TFUE qui offre toutes les garanties requises par l’article 47 de la Charte Point 57: A cet égard, il importe de constater que la décision de la Commission peut être soumise à un contrôle de légalité….’’ 36

37 CJUE, 10 juillet 2014, C 295/12 P, Telefonica 37

38 B) Le contrôle de légalité au sens du TFUE est-il un contrôle de pleine juridiction au sens de la jurisprudence de la CEDH? 38

39 1/ le contrôle de légalité ne permet pas de réformer Le tribunal peut annuler la décision totalement ou partiellement, mais ne peut substituer sa propre décision à celle de la Commission. A priori, ce n’est donc pas conforme à la lettre de l’arrêt MENARINI. Personnellement, je trouve que c’est respectueux des droits fondamentaux. C’est même plus favorable aux entreprises qu’un pouvoir de réformation. L’important c’est que l’entreprise ne sera pas condamnée sur la base d’une décision irrégulière 39

40 2/ Le tribunal n’a pas le pouvoir d’apprécier « en tous points » la décision Mais le juge de l’Union n’a pas le pouvoir de réformer « en tous points » On retrouve la question des appréciations économiques complexes, pour lesquelles la Commission dispose d’une marge d’appréciation en matière économique ou technique (ex: appréciation du marché…) Dans ces domaines, le juge de l’UE fera certes des vérifications, mais ne reviendra pas sur cette appréciation économique. 40

41 Arrêt AALBORG PORTLAND E.A. / COMMISSION CJCE (cinquième chambre) 7 janvier 2004 ( affaires jointes C-204/00 P, C- 205/00 P, C-211/00 P, C-213/00 P, C-217/00 P et C-219/00 P ) « le contrôle que les juridictions communautaires exercent sur les appréciations économiques complexes faites par la Commission se limite nécessairement à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, ainsi que de l'exactitude matérielle des faits, de l'absence d'erreur manifeste d'appréciation et de détournement de pouvoir » (voir, notamment, arrêts du 11 juillet 1985, Remia e.a./Commission, 42/84, Rec.p. 2545, point 34, ainsi que BAT et Reynolds/Commission, précité, point 62). 41

42 Autre Ex d’appréciation économique complexe: CJCE 28 mai 1998, Deere c/ Commission, C-7/95 P, Rec.p. I-3111, pt 34. « il y a lieu de rappeler la jurisprudence de la Cour (voir, notamment, arrêts du 11 juillet 1985, Remia e.a./Commission, 42/84, Rec. p. 2545, point 34, et du 17 novembre 1987, BAT et Reynolds/Commission, 142/84 et 156/84, Rec. p. 4487, point 62) selon laquelle, si le juge communautaire exerce de manière générale un entier contrôle sur le point de savoir si les conditions d'application de l'article 85, paragraphe 1, du traité se trouvent ou non réunies, le contrôle qu'il exerce sur les appréciations économiques complexes faites par la Commission se limite nécessairement à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, ainsi que de l'exactitude matérielle des faits, de l'absence d'erreur manifeste d'appréciation et de détournement de pouvoir. » 42

43 Exemple d’appréciation complexe technique: E.g. arrêt du 17 septembre 2007, Microsoft c/ Commission, T-201/04, Rec.p. II-3601, pt 88 « De même, pour autant que la décision de la Commission soit le résultat d'appréciations techniques complexes, celles-ci font en principe l'objet d'un contrôle juridictionnel limité, qui implique que le juge communautaire ne saurait substituer son appréciation des éléments de fait à celle de la Commission [voir, en ce qui concerne une décision prise à l'issue d'appréciations complexes relevant du domaine médico- pharmacologique, ordonnance du président de la Cour du 11 avril 2001, Commission/Trenker, C-459/00 P(R), Rec. p. I-2823, points 82 et 83; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 21 janvier 1999, Upjohn, C-120/97, Rec. p. I-223, point 34 et la jurisprudence citée, et arrêts du Tribunal du 3 juillet 2002, A. Menarini/Commission, T-179/00, Rec. p. II-2879, points 44 et 45, et du 11 septembre 2002, Pfizer Animal Health/Conseil, T-13/99, Rec. p. II-3305, point 323] » 43

44 Personnellement, je ne suis pas convaincue que le juge ne devrait pas contrôler (au moins le trib. UE) (Par analogie avec le droit français, le pouvoir souverain des juges du fond a au moins un degré de contrôle) D’ailleurs, la tendance est à l’accroissement du contrôle même dans ces hypothèses complexes économiquement ou techniquement 44

45 CJUE, 10 juillet 2014, C 295/12 P, préc., pt 54. Telefonica la Cour a jugé que « le contrôle de légalité instauré à l’article 263 du TFUE implique que le juge de l’Union exerce un contrôle, tant de droit que de fait, des arguments invoqués par les requérantes à l’encontre de la décision litigieuse et qu’il ait le pouvoir d’apprécier les preuves, d’annuler ladite décision et de modifier le montant des amendes ….. dans les domaines donnant lieu à des appréciations économiques complexes, la Commission dispose d’une marge d’appréciation en matière économique », cependant, « cela n’implique pas que le juge de l’Union doive s’abstenir de contrôler l’interprétation, par la Commission, de données de nature économique. En effet, le juge de l’Union doit, notamment, non seulement vérifier l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer les conclusions qui en sont tirées ». 45

46 Est-ce un entier contrôle? oui pour JPh. Christienne Mais réserves: la marge d’appréciation de la Commission demeure affirmée. Le mot discrétionnaire disparaît, mais on a l’impression qu’il disparaît pour respecter formellement l’arrêt Menarini. Pourtant, ne reste-t-il pas un zeste d’appréciation discrétionnaire de certains éléments économiques, sur lesquels le tribunal ne reviendra pas par ce contrôle certes approfondi, mais non total? 46

47 A mon sens, c’est là une difficulté. Ne faut-il pas au moins qu’il y ait une possibilité de réexamen complet, sans que des parties de décision de la Commission soient soumises à sa seule appréciation. L’arrêt Menarini sauve la décision de l’AA en matière répressive, parce qu’elle fait l’objet d’un contrôle de pleine juridiction. A quoi cela servirait-il si la juridiction ne peut pas tout contrôler? C’est ce point qui me paraît très important. Il n’y a pas de raison d’admettre qu’une AA puisse se prononcer en matière répressive, si la juridiction ne contrôle que certains points de sa décision, alors que la condamnation résulte du tout. 47

48 Conclusion 1/Finalement, je ne suis pas sûre que la différence faite entre légalité et pleine juridiction au sens du TFUE, ait des conséquences si néfastes pour les droits fondamentaux: -dans les deux cas, il y a un examen en fait et en droit -le fait que le tribunal pourra réformer la sanction, et seulement annuler la décision sur l’admission de l’infraction, ne me paraît pas nuire aux droits fondamentaux, puisque dans les deux cas, l’entreprise ne sera pas condamnée dans les termes d’une décision irrégulière. 48

49 2/En revanche, dans les deux cas, le fait d’admettre qu’une partie de la décision de la Commission, certes de plus en plus restreinte, ne fera pas l’objet d’un contrôle approfondi parce qu’elle est complexe en matière économique ou technique, ou parce qu’il existe un zeste de pouvoir discrétionnaire en matière d’amendes, pourrait être contraire au recours de pleine juridiction au sens de la CEDH. Ne faudrait-il pas qu’un tel contrôle complet puisse avoir lieu, au moins une fois (devant le tribunal), avec comme seule limite les moyens des parties ? Des zestes de pouvoir discrétionnaire de l’AA se justifient-ils quand il s’agit de condamner une entreprise à des sanctions répressives? 49


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