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APERÇUS SUR L’HISTOIRE DES PROBABILITÉS Centre François Viète, Université de Nantes, IREM des Pays de La Loire Anne Boyé, Saint-Flour, Août 2010.

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1 APERÇUS SUR L’HISTOIRE DES PROBABILITÉS Centre François Viète, Université de Nantes, IREM des Pays de La Loire Anne Boyé, Saint-Flour, Août 2010

2 Hasard …probabilité … modélisation … Concepts fondateurs de la th é orie des probabilit é s difficiles et d é licats à manier : les math é matiques s ’ y m é langent à la philosophie, aux probl è mes de soci é t é, à la th é ologie parfois, et surtout à la vie quotidienne, de laquelle ils sont tir é s et o ù ils prennent leur sens. Confusion de langage (chance/probabilit é, loi des s é ries/loi des grands nombres, pr é dire/pr é voir, impossible, probable, … ) Connotation plus ou moins magique ou irrationnelle, (le hasard fait bien les choses, je n ’ ai jamais de chance, … ) Difficult é de penser le collectif en lieu et place de l ’ individu

3 Hasard ? Le mot hasard tire son origine indirectement de l'arabe az-zaher (d é à jouer) et d é marre sa carri è re à partir du 12e si è cle, apr è s avoir fait un d é tour par l'espagnol azar. Il d é signait au d é part un jeu de d é s. Alea : mot latin, qui signifie jeu de d é s Chance : vient du mot latin cadere, tomber (ch é ance) Le hasard fait-il partie des m é canismes de la vie ou serait-il tout simplement l ’ expression de nos ignorances ?

4 « Le hasard n ’ est que le nom donn é à notre ignorance ». Emile Borel, Le hasard,1938. « Le hasard seul est à la source de toute nouveaut é, de toute cr é ation dans la biosph è re, le hasard pur, le seul hasard, libert é absolue, mais aveugle ». Jacques Monod, Le hasard et la n é cessit é. 1970.

5 Probabilit é ? Jusqu' à l'axiomatisation en 1933 par Kolmogorov de la th é orie des probabilit é s, une des parties les plus d é licates dans les trait é s de math é matiques de calcul des probabilit é s é tait celle de l'expos é de la d é finition des probabilit é s. La d é finition classique de la probabilit é num é rique, celle que nous donne Lacroix par exemple dans son tr è s p é dagogique Trait é é l é mentaire de calcul des probabilit é s, en 1816 : "La probabilit é math é matique se forme, comme on le voit, en divisant le nombre des chances favorables à l' é v é nement par le nombre total des chances; mais il faut bien faire attention que toutes les chances compar é es soient é galement possibles." Cette d é finition donc, qui, au vocabulaire pr è s, est tr è s souvent propos é e, est-elle acceptable? Que signifie effectivement " é galement possible", sinon de probabilit é é gale? L'on se plonge dans le paradoxe de d é finir la probabilit é par la probabilit é.

6 Jules-Henri Poincar é (1854-1912) « Le seul nom de calcul des probabilit é s est un paradoxe : la probabilit é, oppos é e à la certitude, c'est ce qu'on ne sait pas, et comment peut-on calculer ce que l'on ne conna î t pas? Cependant, beaucoup de savants é minents se sont occup é s de ce calcul, et l'on ne saurait nier que la science n'en ait tir é quelque profit. Comment expliquer cette apparente contradiction? La probabilit é a -t-elle é t é d é finie? Et, si elle peut l'être, comment ose-t-on en raisonner? La d é finition, dira-t-on, est bien simple : La probabilit é d'un é v é nement est le rapport du nombre de cas favorables à cet é v é nement au nombre total de cas possibles,... pourvu que ces cas soient é galement probables. Nous voil à donc r é duits à d é finir le probable par le probable. Comment saurons nous que deux cas possibles sont é galement probables? Sera-ce par une convention? »

7 « La conclusion qui semble r é sulter de tout cela, c'est que le calcul des probabilit é s est une science vaine, qu'il faut se d é fier de cet instinct obscur que nous nommions bon sens et auquel nous demandions de l é gitimer nos conventions. Mais, cette conclusion, nous ne pouvons plus y souscrire; cet instinct obscur, nous ne pouvons nous en passer; sans lui la science serait impossible; sans lui nous ne pourrions ni d é couvrir une loi, ni l'appliquer. » J.H. Poincar é, La science et l'hypoth è se, 1902

8 Sommes-nous condamnés à la définition axiomatique de Kolmogorov ? Comment se pose alors la question de la signification du résultat du calcul pour un objet ou une situation non mathématique ?

9 "Qu'est-ce qu'une possibilit é abstraite, une chance, une probabilit é ?...De quoi les nombres donnent-ils la valeur dans ce domaine? Que repr é sentent des valeurs pour l'exactitude? Peut- on é valuer l'incertitude, faire une th é orie scientifique des erreurs? Deux si è cles d'interrogations dont la richesse et la difficult é, de Pascal à Huygens (du droit au gain à la chance de gagner), de Huygens à Laplace (de la valeur de la chance à l' é valuation de l'incertitude), auraient un pouvoir p é dagogique malheureusement encore tr è s peu utilis é aujourd'hui." Pierre Raymond. De la combinatoire aux probabilit é s.

10 Blaise Pascal (1623-1662) Les origines Acte fondateur du calcul des probabilités : –Lettre de Pascal à Fermat du 29 juillet 1654 (problème du Chevalier de Méré). « Un problème relatif aux jeux de hasard, proposé à un austère janséniste, par un homme du monde, a été à l’origine du calcul des probabilités » Siméon Poisson (1781-1840) Pierre Fermat (1601-1665)

11 «Ainsi, joignant la rigueur des démonstrations de la science à l’incertitude du hasard, et conciliant ces choses en apparence contradictoires, elle (la répartition du hasard dans les jeux qui lui sont soumis), peut, tirant son nom des deux, s’arroger à bon droit ce titre stupéfiant : la Géométrie du hasard ». Blaise Pascal, lettre à Fermat, 1654.

12 Acte fondateur contesté. On ne parlera pas en fait de « calcul des probabilités » avant les traités de Huygens, Leibniz et surtout J. Bernoulli. Ancienneté cependant de l’utilisation du hasard dans l’activité humaine. En particulier les jeux de hasard ; mais aussi tous les essais de « prévision » de l’avenir. « La théorie du hasard est-elle née par hasard ? » Ernest Coumet 1970.

13 Le jeu d’osselets. Gravure du XIX° siècle d’après une peinture sur marbre trouvée à Herculanum Nefertari jouant au Senet contre un adversaire invisible

14 Des précurseurs méconnus ? Liber de ludo aleae, 1526 (publié en 1663) S’intéresse au problème des partis et on trouve dans ce qu’il propose des éléments de ce que sera la démonstration de Pascal. En particulier raisonner à partir du nombre de parties qui manquent et non de celles déjà remportées. Il est proche de la solution mais n’y parvient pas. Sopra le scoperte dei dadi,1613-1623 (publié en 1718). Le « problème du Grand Duc de Toscane ». Jérôme Cardan (1501-1576 ) Galileo Galilei (1564-1642)

15 « Le problème du Grand Duc de Toscane »(résolu par Galilée) On lance trois d é s; il y a autant de cas o ù la somme des trois nombres obtenus est 9, que de cas o ù cette somme vaut 10. Pourtant, en pratique, on a pu observ é que l'on obtient moins souvent 9 que 10. Pourquoi? Pour r é soudre cette é nigme, Galil é e propose de consid é rer que les d é s sont lanc é s successivement, (donc de les diff é rencier), contrairement à la r é alit é du jeu, puisqu'ils sont lanc é s simultan é ment. En effet, le point crucial est que si l'on ne tient pas compte de l'ordre, (si l'on respecte donc le jeu r é el), 9 et 10 peuvent être obtenus chacun de six fa ç ons diff é rentes: 1+2+6=1+3+5=1+4+4=2+2+5=2+3+4=3+3+3=9, et1+3+6=1+4+5=2+2+6=2+3+5=2+4+4=3+3+4=10 mais, ces diff é rentes fa ç ons n'ont pas le même "poids", car 1+3+6 peut être obtenu six fois, 2+2+6 trois fois, et 3+3+3 une seule fois. Si l'on diff é rencie les d é s, on se rend compte que sur 216 jets de d é s possibles, la somme dix peut être obtenue dans 27 cas, et la somme neuf, dans 25 cas seulement.

16 En fait Galilée raisonne sur des dénombrements, sans qu’il soit précisé que les faces sont « équiprobables » (de même « possibilité »), ce qui est implicite au demeurant. On ne parle ni de fréquence ni de probabilité. On devine que la question est posée par le Duc de Toscane afin de fixer des mises équitables mais cet aspect n’apparaît pas.

17 Les débuts « officiels » : la correspondance entre Fermat et Pascal de juillet à octobre 1654. Le problème des partis : Dans un jeu en plusieurs parties, on demande, en cas d’interruption avant la fin, comment il convient de partager les enjeux. La lettre du 29 juillet 1654 de Pascal à Fermat atteste que Fermat a résolu le problème par une méthode qui s’appuie sur les « combinaisons ». Pascal de son côté a « trouvé une méthode plus courte et plus nette. »

18 Deux joueurs (A et B) jouent à un jeu de pur hasard et le premier qui aura gagn é un nombre d é termin é (N) de parties sera d é clar é vainqueur. Mais voil à qu'ils doivent quitter le jeu avant qu'aucun des deux joueurs n'ait atteint le nombre de parties entra î nant la victoire. Comment doivent-ils alors, en se s é parant, partager l'argent qu'ils ont mis au jeu. (Soit la mise totale S)? Pascal qualifiera la m é thode de Fermat de "combinatoire" et la sienne de "g é n é rale". Examinons tr è s bri è vement des é l é ments de ces solutions, dans le cas o ù N vaut 3. Supposons dans un premier temps que A et B ont mis chacun 32 pistoles au jeu et qu'il manque une partie au premier et deux au second. Pascal é crit à Fermat (29 juillet 1654): « Posons que le premier en ait deux et l ’ autre une ; ils jouent maintenant une partie dont le sort est tel que, si le premier la gagne, il gagne tout l ’ argent qui est au jeu, à savoir 64 pistoles ; si l ’ autre la gagne, ils sont deux parties à deux parties, et par cons é quent, s ’ ils veulent se s é parer, il faut qu ’ ils retirent chacun leur mise, savoir 32 pistoles. Consid é rez donc, Monsieur, que si le premier gagne, il lui appartient 64; s'il perd, il lui appartient 32. Donc s'ils veulent ne point hasarder cette partie et se s é parer sans la jouer, le premier doit dire "je suis s û r d'avoir 32 pistoles, car la perte même me les donne; mais pour les 32 autres, peut-être je les aurai, peut-être vous les aurez; le hasard est é gal, partageons donc ces 32 pistoles par la moiti é et me donnez, outre cela mes 32 qui me sont s û res"; il aura donc 48 pistoles et l'autre 16 … »

19 Méthode de Fermat exposée par Pascal (lettre du 24 août 1654). Cette méthode consiste à faire un tableau où l’on écrit successivement et abstraitement tous les cas de gains et pertes possibles jusqu’à la réalisation non pas d’un gain pour un des joueurs, mais de tous les gains possibles. Si a d é signe le fait que A gagne et b le fait que B gagne, le tableau suivant repr é sente toutes les parties possibles. a aA gagne a bA gagne b aA gagne b bB gagne A gagnerait donc trois fois sur quatre et B une fois sur quatre; ce qui donnerait 3/4 de 64 pistoles à A, soit 48 pistoles, et 1/4 de 64 pistoles à B, soit 16 pistoles.

20 Roberval sera choqu é par la mani è re de Fermat car elle fait intervenir des parties fictives. D è s que A gagne, en effet, le jeu doit en principe s'arrêter. Donc, les parties a a et a b devraient se r é duire à "a". Pascal va d é fendre cette m é thode, d'une part parce qu'elle donne le même r é sultat que la sienne, mais en arguant de plus que les joueurs peuvent s'astreindre à jouer toutes les parties "puisque cette convention ne change en aucune mani è re leur condition." Cette fa ç on de proc é der s'applique à tous les cas de deux joueurs, Pascal indiquant au passage des fa ç ons plus rapides de conna î tre le nombre de "combinaisons" que de les é crire toutes.

21 Cette difficult é r é elle, de faire intervenir du fictif (en fait pour faire appara î tre une é quiprobabilit é, c ’ est à dire des chances é gales pour tous les cas même si ce n ’ est pas dit explicitement) à laquelle se heurtaient Roberval puis Pascal, se retrouvera un si è cle et demi plus tard, dans l'article croix ou pile é crit par D'Alembert dans l'Encyclop é die(1795).

22 Le problème des parties « fictives » pour obtenir de l’équiprobabilité CROIX OU PILE Ce jeu, qui est tr è s connu, & qui n ’ a pas besoin de d é finition, nous fournira les r é flexions suivantes. On demande combien il y a à parier qu ’ on am è nera croix en jouant deux coups cons é cutifs. La r é ponse qu ’ on trouvera dans les auteurs, & suivant les principes ordinaires, est celle-ci. Il y a quatre combinaisons :Premier coup : Deuxi è me coup : CroixCroix Pile Croix Croix Pile Pile De ces quatre combinaisons, une seule fait perdre & trois font gagner ; il y a donc 3 contre 1 à parier en faveur du joueur qui jette la pi è ce. S ’ il pariait en trois coups, on trouveroit huit combinaisons, dont une seule fait perdre, & sept font gagner ; ainsi, il y aurait 7 contre 1 à parier. Cependant cela est-il bien exact ? Car, pour ne prendre ici que le cas de deux coups, ne faut-il pas r é duire à une les deux combinaisons qui donnent croix au premier coup ? Car, d è s qu ’ une fois croix est venu, le jeu est fini, & le second coup est compt é pour rien. Ainsi, il n ’ y a proprement que trois combinaisons de possibles : Croix, premier coup ; Pile, Croix, premier & second coup ; Pile, pile, premier & second coup. Donc il n ’ y a que 2 contre 1 à parier. De même, dans le cas de trois coups, on trouvera : Croix Pile, croix Pile, pile, croix Pile, pile, pile Donc il n ’ y a que 3 contre 1 à parier. Ceci est digne, ce me semble, de l ’ attention des calculateurs, & irait à r é former bien des r è gles unanimement re ç ues sur les jeux de hasard. Extrait de l ’ Article “ Croix ou Pile ” é crit pour l ’ Encyclop é die par D ’ ALEMBERT

23 Revenons à Pascal; il ne s'arrêtera pas l à. Et c'est sans doute à l'annexe au Trait é du triangle arithm é tique: "Usage du triangle arithm é tique pour d é terminer les partis qu'on doit faire entre deux joueurs qui jouent plusieurs parties" qu'il voulait donner le titre "stup é fiant" de "G é om é trie du hasard". Il s'agit en fait pour Pascal, et c'est la premi è re fois, de d é finir le concept de l'esp é rance de gain. Pascal fait l' é tude du cas g é n é ral des partis à faire dans toutes les situations initiales possibles, en faisant un « raisonnements par r é currence ». Il é tablit que pour un nombre de parties donn é es, on peut remonter d ’é tape en é tape jusqu ’à la valeur de la premi è re partie, et la valeur de cette premi è re partie ob é it ensuite à une progression r é guli è re pour trouver la valeur de toutes les autres. C ’ est le triangle arithm é tique qui va lui servir de table et qui lui donnera les valeurs de toutes les parties à partir de la premi è re. Il n ’ a pas cependant r é ussi à formuler tout à fait correctement sa r é currence. Et il s ’ assure que son proc é d é fonctionne en le v é rifiant sur quelques cas

24 Ce traité ouvre la voie à l’idée de quantification de l’incertain même si le calcul des chances jusqu’ici est un calcul quantitatif de juste prix pour le risque encouru. Tandis que la probabilité était un concept philosophique qualitatif. Il n’y a pas de probabilité. C’est le concept d’espérance de gain qui est en jeu. « Tout joueur hasarde avec certitude pour gagner avec incertitude, sans pécher contre la raison ». C’est une aide à la décision, en forme de pari.

25 D’autres assureront le glissement vers la superposition des deux problématiques, calcul quantitatif de chance et concept qualitatif de probabilité, en élargissant à d’autres domaines, par exemple Arnaud (Logique de Port Royal, ), ou Leibniz. « Ce raisonnement ne conclut rien de ce qu’on doit croire, mais seulement sur ce qu’on doit faire » écrira Leibniz. « Ces réflexions sur les jeux de hasard paraissent petites, et elles le sont en effet, si on en demeure là ; mais on peut les faire servir à des choses plus importantes ; et le principal usage qu’on en doit tirer est de nous rendre plus raisonnables dans nos espérances et dans nos craintes. » La logique ou l’art de penser, 1662, Antoine Arnaud et Pierre Nicole.

26 Christiann Huygens (1629-1695) G. W. Leibniz (1644-1716) Jacques Bernoulli (1654- 1705)

27 1654 : Christian Huygens vient à Angers recevoir son doctorat de l’université protestante. Séjourne à Paris quelques mois.Est informé du problème des partis et des travaux des français. 1656 : écrit à Van Schooten qu’il a un manuscrit sur les jeux de hasard. 1657 : De rationiciis in aleae ludo. (Du calcul dans les jeux de hasard). Premier traité pédagogique où il définit la « valeur de la chance », traduit en latin par « expectatio » d’où « espérance ». Appliquera ce concept d’espérance au calcul de « l’espérance de vie ». Question posée par son frère Louis : « jusqu’à quel âge doit vivre naturellement un enfant aussitôt qu’il est conçu ? » « Il faut savoir d’ailleurs qu’il y a déjà un certain temps que quelques-uns des plus célèbres mathématiciens de toute la France se sont occupés de ce genre de calcul, afin que personne ne m’attribue l’honneur de la première invention. »

28 Il donne deux d é finitions: "La chance qu'un joueur a de gagner ou de perdre a une valeur d é termin é e". "Dans un jeu la chance qu'on a de gagner quelque chose a une valeur telle que si on poss è de cette valeur on peut se procurer la même chance par un jeu é quitable, c'est à dire par un jeu qui ne vise au d é triment de personne." Puis deux propositions : Proposition 1: "Avoir des chances é gales d'obtenir a ou b me vaut " Proposition 2: "Avoir p chances d'obtenir a et q chances d'obtenir b, les chances é tant é quivalentes, me vaut. » Son petit trait é se termine par cinq probl è mes. Trois sont r é solus et deux laiss é s au lecteur.

29 Leibniz élargit le champ du calcul des probabilités à tous les domaines : moraux, sociaux, techniques, … 1666 : De Arte combinatoria, étend les opérations logiques aux propositions certaines, aux propositions incertaines, liées à des événements passés incomplètement connus ou aléatoires avec des degrés de crédibilité sur une échelle de 0 à 1. Il énonce des critères qui rendent une hypothèse plus probable qu’une autre. « Il y a une science qui nous gouverne dans les incertitudes même pour d é couvrir de quel côt é la plus grande apparence se trouve. Mais il est é tonnant qu ’ elle est presque inconnue et que les logiciens n ’ ont pas examin é les degr é s de probabilit é ou de vraisemblance qu ’ il y a dans les conjectures ou preuves, qui ont pourtant leur estimation aussi assur é e que les nombres. Cette estimation nous peut et doit servir non pas pour venir à une certitude, ce qui est impossible, mais pour agir le plus raisonnablement qu ’ il se peut sur les faits ou connaissances qui nous sont donn é es. » Leibniz, Opuscules et oeuvres, é dit é par Louis Couturat.

30 Jacques Bernoulli né à Bâle l’année de la correspondance entre Pascal et Fermat. Commence à répondre aux problèmes de jeux de dés posés par Huygens dès 1685. Fait intervenir des séries infinies. A sa mort en 1705, son « grand ouvrage » n’est pas terminé. Il ne sera publié qu’en 1713, par son neveu Nicolas Bernoulli. "L'auteur a divis é cette oeuvre en quatre parties. La premi è re contient le Trait é de l'illustre Huygens, De rationiciis in aleae ludo, avec des notes, trait é que mon oncle a jug é devoir être mis en tête de son ouvrage, car on y trouve les premiers é l é ments de l'art de conjecturer. La deuxi è me partie embrasse la th é orie des permutations et des combinaisons, th é orie absolument n é cessaire pour mesurer les probabilit é s; dans la troisi è me partie il en a d é velopp é les applications aux divers tirages au sort et jeux de hasard. Quant à la quatri è me partie par laquelle il aurait voulu montrer l'application et le rapport des parties pr é c é dentes aux affaires morales et é conomiques, afflig é depuis longtemps d'une mauvaise sant é et enfin pr é venu par la mort elle-même, il l'a laiss é e inachev é e."

31 Ars conjectandi - Jacques Bernoulli-1713 Quatrième partie : l’Art de conjecturer traitant de l’usage et de la doctrine précédente aux affaires civiles, morales et économiques. En particulier, énonce et démontre « la loi des grands nombres ». (appellation de Poisson en 1857). Pour répondre au problème des cas où on ne peut déterminer la probabilité « a priori » d’un événement. Il s’agit d’appliquer le calcul « des probabilités » au monde réel qui nous entoure. Le programme de Leibniz en quelque sorte.

32 Probabilité [... ] Ce qui par r é v é lation, raison, sensation, exp é rience, t é moignage de nos propres yeux ou autrement est tellement é vident que nous ne pouvons aucunement douter de son existence pr é sente ou future jouit d'une certitude totale et absolue. Tout le reste acquiert dans nos esprits une mesure moins parfaite, plus ou moins grande, selon que les probabilit é s sont plus ou moins nombreuses qui nous persuadent qu'une chose est, sera ou a é t é. La probabilit é est en effet un degr é de la certitude et en diff è re comme la partie diff è re du tout. É videmment si la certitude int é grale et absolue, que nous d é signons par la lettre a ou par l'unit é 1, est constitu é e de - supposons par exemple - cinq probabilit é s ou parties dont trois militent pour qu ’ un é v é nement existe ou se produise, les autres s'y opposant : nous dirons que cet é v é nement a a, ou 1 de certitude. Ce qui est certain et indubitable, nous disons que nous le savons ou que nous le comprenons ; tout le reste nous le conjecturons ou le pr é sumons.

33 « Conjecturer quelque chose, c ’ est mesurer sa probabilit é : l ’ art de conjecturer ou la stochastique se d é finit pour nous comme l ’ art de mesurer aussi exactement que possible les probabilit é s des choses. Le but est que dans nos jugements et dans nos actions nous puissions toujours choisir ou suivre le parti que nous aurons d é couvert comme meilleur, pr é f é rable, plus s û r ou mieux r é fl é chi. C ’ est en cela seulement que r é side la sagesse du philosophe et toute la sagacit é du politique. »

34 Est-ce toujours aussi simple ? On a montr é dans le chapitre pr é c é dent comment, d ’ apr è s les nombres de cas dans lesquels peuvent exister ou ne pas exister les arguments en faveur de n ’ importe quelle chose, dans lesquels ils peuvent r é v é ler ou ne pas r é v é ler, ou même r é v é ler le contraire, les forces de ce qui prouve de ces arguments et les probabilit é s des choses qui leur sont proportionnelles peuvent être d é duites et estim é es par le calcul. On en est venu à ce point que pour former selon les r è gles des conjectures sur n ’ importe quelle chose il est seulement requis d ’ une part que les nombres de cas soient soigneusement d é termin é s, et d ’ autre part que soit d é fini combien les uns peuvent arriver plus facilement que les autres. Mais c ’ est ici enfin que surgit une difficult é, nous semble-t-il: cela peut se voir à peine dan quelques tr è s rares cas et ne se produit presque pas en dehors des jeux de hasard que leur premiers inventeurs ont pris soin d ’ organiser en vue de se m é nager l ’é quit é, de telle sorte que fussent assur é s et connus les nombres de cas qui doivent entra î ner le gain ou la perte, et de telle sorte que tous ces cas puissent arriver avec une é gale facilit é.

35 En effet lorsqu ’ il s ’ agit de tous les autres r é sultats, d é pendant pour la plupart soit de l ’ oeuvre de la nature soit de l ’ arbitre des hommes, cela n ’ a pas du tout lieu. Ainsi, par exemple,(...) qui donc parmi les mortels d é finira le nombre de maladies, qui sont autant de cas, qui ont le pouvoir d ’ envahir les innombrables parties du corps humain à l ’ âge qu ’ on voudra, et qui ont le pouvoir de nous apporter la mort? Qui d é finira combien est plus facile à celle-ci qu ’à celle-l à, la peste ou l ’ hydropisie, l ’ hydropisie ou la fi è vre, d ’ an é antir un homme, en sorte qu ’à partir de l à puisse être form é e une conjecture sur un é tat futur de vie ou de mort? Qui encore recensera les cas innombrables de changements auxquels l ’ air est soumis chaque jour, en sorte qu ’ on puisse à partir de l à conjecturer ce que sera son é tat apr è s un mois, sans parler d ’ une ann é e Car des faits d é pendent de causes tout à fait cach é es, et destin é es de plus par l ’ innombrable vari é t é des assemblages à se jouer é ternellement de notre recherche: il serait donc absolument d ’ un insens é de vouloir conna î tre quelque chose à cette mati è re.

36 A posteriori, a priori Mais à la v é rit é s ’ offre à nous un autre chemin pour obtenir ce que nous cherchons. Ce qu ’ il n ’ est pas donn é d ’ obtenir a priori l ’ est du moins a posteriori, c ’ est à dire qu ’ il sera possible de l ’ extraire en observant l ’ issue de nombreux exemples semblables; car on doit pr é sumer que, par la suite, chaque fait peut arriver et ne pas arriver dans le même nombre de cas qu ’ il avait constat é auparavant, dans un é tat de choses semblables, qu ’ il arrivait ou n ’ arrivait pas. »

37 Cette mani è re empirique de d é terminer par exp é rience les nombres des cas n ’ est ni neuve ni insolite. (...). C ’ est la même que tous observent constamment dans la pratique quotidienne. Enfin, il ne peut é chapper à personne que, pour juger par ce moyen de quelque é v é nement, il ne suffirait pas d ’ avoir fait choix d ’ une ou deux exp é riences, mais qu ’ il serait requis une grande quantit é d ’ exp é riences: tout être des plus stupides, par je ne sais quel instinct naturel, par lui-même et sans le guide d ’ aucun enseignement (chose absolument admirable) tient pour é vident que, plus on aura recueilli de nombreuses observations de ce genre, moins grand sera le danger de s ’é carter du but. Or, bien que cela soit naturellement connu de tous, la d é monstration qui permet de le tirer des principes de l ’ art n ’ est pas du tout r é pandue, et par suite il nous incombe d ’ en traiter à cet endroit, endroit o ù cependant j ’ estimerais que je ferais trop peu si je m ’ en tenais à d é montrer seulement ce que personne n ’ ignore.

38 Je suppose que, dans une urne, à ton insu soient plac é es trois mille pierres blanches et deux mille pierres noires ; je suppose, que pour conna î tre leurs nombres par exp é rience, tu tires une pierre apr è s l ’ autre (en repla ç ant cependant chaque fois la pierre que tu as tir é e avant de choisir la suivante pour que le nombre des pierres ne diminue pas dans l'urne) ; tu observes combien de fois sort une pierre blanche et combien de fois une noire. On demande si tu peux le faire tant de fois qu'il devienne dix fois, cent fois, mille fois, etc.., plus probable (c ’ est- à -dire qu ’ il devienne moralement certain) que le nombre de fois o ù tu choisis une pierre blanche et le nombre de fois o ù tu choisis une pierre noire soient dans ce même rapport sesquialt è re o ù se complaisent à être entre eux les nombres de pierres ou de cas, plutôt que dans tout autre rapport diff é rent de celui-ci. Car si cela ne se produisait pas, j'avoue que c'en serait fait de notre effort pour rechercher exp é rimentalement le nombre de cas. Mais si nous l'obtenons et si nous acqu é rons enfin par ce moyen la certitude morale (et je montrerai dans le chapitre suivant que cela aussi se produit r é ellement), nous aurons trouv é a posteriori les nombres de cas presque comme s'ils nous é taient connus a priori. Le mod è le de l ’ urne

39 Ceci constitue en quelque sorte ce qui deviendra la loi « faible » des grands nombres : Il est tr è s peu probable que, si l ’ on fait un nombre suffisant d ’ exp é riences, la fr é quence d ’ apparition d ’ un é v é nement s ’é carte notablement de sa probabilit é. « Les choses de toutes natures sont soumises à une loi universelle qu ’ on peut appeler la loi des grands nombres. » Sim é on-Denis Poisson (1781-1840) en 1837. « J ’ estime cette invention bien davantage que si j ’ avais livr é la quadrature même du cercle, car si celle-ci é tait effectivement trouv é e, son utilit é serait peu consid é rable. »

40 Il a inventé l’intervalle de confiance, mais il n’a résolu que partiellement le problème qu’il s’était fixé : connaître la probabilité inconnue. C’est-à-dire le problème inverse, connaître le rapport théorique connaissant la fréquence expérimentale. Ce sera l’œuvre des successeurs. Soit A un é v é nement de probabilit é p, pour une é preuve donn é e. On r é p è te n fois l ’é preuve (dans les mêmes conditions, de fa ç on ind é pendante), et on note F n la fr é quence de r é alisation de A dans ces n é preuves. Alors, pour toute valeur  comprise entre 0 et 1 et tout  >0, on peut trouver n 0 assez grand tel que si n > n 0 on ait :. Ce qui signifie que la suite des variables al é atoires F n tend « en probabilit é » vers p.

41 Abraham De Moivre (1667-1754) Thomas Bayes (1702-1761) Pierre Simon Laplace (1749-1827)

42 Autour de la loi des grands nombres et de la modélisation du hasard Abraham de Moivre (1667-1754) commence vers 1709 ses travaux en théorie des probabilités. Il se base sur le livre de Huygens. 1711 : De mensura sortis. Porte sur les jeux mais traitement purement mathématique. Utilise les développements du « binôme » et des développements en séries entières. Définit le degré de probabilité à partir du nombre de cas également faciles.

43 De Moivre - Doctrine of chances - 1718,1738,1756 Dans la lignée de Bernoulli, mais méthodes différentes. Il investit dans le calcul des probabilités les idées du calcul infinitésimal. Il donne une approximation des coefficients binomiaux pour n très grand grâce à la formule de Stirling (et Moivre) pour approcher n! pour n très grand. Donne une expression plus complète du théorème de J. Bernoulli sur les épreuves répétées, avec une estimation de la loi de l’écart entre probabilité a priori et probabilité a posteriori. Il établit que, ce qui sera nommé plus tard (par Karl Pearson fin du XIX°s. ) la loi normale, est une approximation de ce que nous nommons la loi binomiale, pour n très grand.

44 « De ce qui a été dit il suit que le Hasard perturbe très peu les événements qui dans leur institution naturelle sont amenés à se produire ou non, suivant une certaine loi déterminée. » « Bien que le Hasard produise des irrégularités, cependant avec l’avancement du temps, ces irrégularités n’auront aucune proportion avec le retour de l’ordre qui résulte naturellement du DESSEIN ORIGINEL. » The doctrine of chances va rester Le traité en calcul des probabilités jusqu’à la parution de La Théorie analytique des probabilités de Laplace en 1812.

45 Les progrès de la connaissance Interrogations philosophiques sur le hasard qui font à la fois la richesse et la difficulté du calcul des probabilités. Mais un des premiers espoirs, une des premières convictions est que ce calcul va faire progresser la connaissance, le jugement, la sagesse.

46 "Cette exposition montrera toute l'utilit é de cette science; on verra qu'aucun de nos int é rêts individuels ou publics ne lui est é tranger, qu'il n'en est aucun sur lequel elle ne donne des id é es les plus pr é cises, des connaissances les plus certaines: on verra combien, si cette science é tait plus r é pandue, plus cultiv é e, elle contribuerait, et au bonheur et au perfectionnement de l'esp è ce humaine." Condorcet (extrait du projet reformulé de mathématique sociale 1795) » Condorcet (1743-1794)

47 Une connaissance qui permet d’avoir un jugement « plus sain » ? "Lorsqu' à la loterie de France un num é ro n'est pas sorti depuis longtemps, la foule s'empresse de le couvrir de mises. Elle juge que le num é ro, rest é longtemps sans sortir, doit au prochain tirage, sortir de pr é f é rence aux autres. Une erreur aussi commune me para î t tenir à une illusion, par laquelle on se reporte involontairement aux origines des é v é nements. (...) Une illusion semblable persuade à beaucoup de monde que l'on peut gagner s û rement à la loterie, en pla ç ant chaque fois sur un même num é ro, jusqu' à sa sortie, une mise dont le produit surpasse la somme de toutes les mises. Par une illusion contraire aux pr é c é dentes, on cherche dans les tirages pass é s, les num é ros le plus souvent sortis, pour en former des combinaisons sur lesquelles on croit placer sa mise avec avantage. Mais vu la mani è re dont le m é lange des num é ros se fait à la loterie, le pass é ne doit avoir sur l'avenir aucune influence. les sorties plus fr é quentes d'un num é ro ne sont que des anomalies du hasard: j'en ai soumis plusieurs au calcul, et j'ai constamment trouv é qu'elles é taient renferm é es dans les limites que la supposition d'une é gale possibilit é de sortie de tous les num é ros permet d'admettre sans invraisemblance.(...) Un des grands avantages du calcul des probabilit é s est d'apprendre à se d é fier des premiers aper ç us. Comme on reconna î t qu'ils trompent souvent, lorsqu'on peut les soumettre au calcul; on doit en conclure que sur d'autres objets, il ne faut s'y livrer qu'avec une circonspection extrême. » Laplace (Th é orie analytique des probabilit é s, 1812)

48 Problème du risque acceptable. Voici ce que rapporte par exemple J.Bertrand (1822-1900): "L'inoculation, avant la vaccine, é tait, contre la variole, le meilleur parti qu'on put prendre ; mais un inocul é sur 200 mourait des suites de l'op é ration. Quelques uns h é sitaient ; Daniel Bernoulli, g é om è tre impassible, calculait doctement la vie moyenne, la trouvait accrue de trois ans et d é clarait par syllogisme l'inoculation bienfaisante. D'Alembert, toujours hostile à la th é orie du jeu, qu'il n'a jamais comprise, repoussait avec grande raison cette fois l'application qu'on voulait en faire : je suppose, dit-il, que la vie moyenne d'un homme de trente ans soit trente autres ann é es et qu'il puisse raisonnablement esp é rer de vivre encore trente ans en s'abandonnant à la nature et en ne se faisant pas inoculer. Je suppose ensuite qu'en se soumettant à l'op é ration, la vie moyenne soit de trente quatre ans. Ne semble-t-il pas que, pour appr é cier l'avantage de l'inoculation, il ne suffit pas de comparer la vie moyenne de trente quatre ans à la vie moyenne de trente, mais le risque de 1 sur 200 auquel on s'expose de mourir dans un mois, par l'inoculation, à l'avantage é loign é de vivre quatre ans de plus au bout de soixante ans?"

49 C'est ainsi que Buffon (1707-1788), introduisait en 1777, dans son Essai d'arithm é tique morale, "des r è gles pour estimer les rapports de vraisemblance, les degr é s de probabilit é, le poids des t é moignages, l'influence des hasards, l'inconv é nient des risques et juger en même temps de la valeur r é elle de nos craintes et de nos esp é rances." Il rapporte alors la mesure de toute esp é rance et de toute crainte à celle de "la crainte de la mort", car c'est "celle qui affecte le plus l'homme en g é n é ral". Il estime qu'il y a 10189 à parier contre 1 qu'un homme de 56 ans vivra plus d'un jour (apr è s consultation des tables de d é c è s de plusieurs paroisses.) Par cons é quent "toute probabilit é é gale ou plus petite doit être regard é e comme nulle, et toute crainte ou toute esp é rance qui se trouve au dessous de ne doit ni nous affecter, ni même nous occuper un seul instant le coeur ou la tête."

50 Le problème de la validité des modèles ou probabilité des causes Problème posé par Thomas Bayes (1702-1761) Essai en vue de résoudre un problème de la doctrine des chances (publié en 1763). Analyser les causes supposées inconnues à partir d’événements observés. (« probabilité conditionnelle »). Bayes sent les difficultés et les dérapages possibles. Il ne publie pas sa méthode. "On ne manque donc point de motifs suffisants pour appuyer la l é gitimit é des conclusions du pass é à l'avenir, et c'est en cela que consiste le pouvoir de l'analogie; mais n'est-il pas arriv é qu'en se livrant trop à ce pouvoir, les savants, aussi bien que le vulgaire, soient tomb é s dans l'erreur, et aient hasard é des assertions pr é matur é es? cependant ils ne pouvaient suivre d'autres voies pour d é couvrir la v é rit é.(...) L'hypoth è se qui explique compl è tement un grand nombre de faits n'est donc que probable, et le calcul appr é cie le degr é de confiance qu'elle m é rite. (...)Cette application conduira toujours à des r é sultats utiles, ou maintiendra dans ce doute salutaire, qui pr é vient les erreurs dangereuses, lorsqu'on la fera avec circonspection, c'est à dire en distinguant avec soin les faits, afin d' é viter de rapporter à toutes ce qui ne convient qu' à quelques unes, de rendre g é n é rales des conclusions qui ne sont vraies qu'entre certaines limites. » Sylvestre Fran ç ois Lacroix (Trait é é l é mentaire de calcul des probabilit é s, 1815)

51 Le problème du déterminisme Déjà sous la plume de J. Bernoulli. "Le contingent (tant ce qui est libre - qui est soumis à l'arbitre d'une cr é ature raisonnable - que le fortuit ou l'accidentel - qui d é pend du hasard ou de la chance) est ce qui pourrait ne pas être, ne pas advenir ou ne pas avoir é t é ; il rel è ve d'une puissance lointaine, et non pas prochaine, car la contingence n'exclut pas toujours toute n é cessit é, ni même les causes secondes; je le montre par des exemples. »

52 Appuyé par Laplace : « Tous les é v é nements, ceux mêmes qui par leur petitesse semblent ne pas tenir aux grandes lois de la nature, en sont une suite aussi n é cessaire que les r é volutions du soleil. Dans l ’ ignorance des liens qui les unissent au syst è me entier de l ’ univers, on les a fait d é pendre des causes finales, ou du hasard, suivant qu ’ ils arrivaient et se succ é daient avec r é gularit é, ou sans ordre apparent; mais ces causes imaginaires ont é t é successivement recul é es avec les bornes de nos connaissances, et disparaissent enti è rement devant la saine philosophie, qui ne voit en elles que l ’ expression de l ’ ignorance o ù nous sommes des v é ritables causes. Les é v é nements actuels ont avec les pr é c é dents une liaison fond é e sur le principe é vident, qu ’ une chose ne peut commencer d ’ être, sans une cause qui la produise. (...) Une intelligence qui pour un instant donn é conna î trait toutes les forces dont la nature est anim é e et la situation respective des êtres qui la composent, si d ’ ailleurs elle é tait assez vaste pour soumettre ces donn é es à l ’ analyse, embrasserait dans la même formule les mouvements des plus grands corps de l ’ univers et ceux du plus l é ger atome : rien ne serait incertain pour elle, et l ’ avenir, comme le pass é, seraient pr é sents à ses yeux. (... ). (Essai philosophique sur les probabilit é s 1814) Pierre Simon Laplace (1749-1827)

53 Définition « laplacienne » de la probabilité : « la probabilité d’un événement est le rapport du nombre de cas qui lui sont favorables, au nombre de cas possibles, lorsque rien ne porte à croire que l’un de ces cas doit arriver plutôt que les autres, ce qui les rend pour nous également possibles. La juste appréciation de ces cas divers est un des points les plus délicats de l’analyse des hasards. Si tous les cas ne sont pas également possibles, on déterminera leurs possibilités respectives et alors la probabilité de l’événement sera la somme des probabilités de chaque cas favorable. » Traité analytique des probabilités, P. S. Laplace.1812 « Les explications que j’ai données sur le double sens du mot probabilité, qui tantôt se rapporte à une certaine mesure de nos connaissances, et tantôt à une mesure de la possibilité des choses, indépendamment de la connaissance que nous en avons, me semblent propres à résoudre les difficultés qui ont rendu suspectes à de bons esprits toute la théorie de la probabilité mathématique. » Antoine Augustin Cournot (1801-1877), Exposition de la théorie des chances et des probabilités, 1843.

54 La fin d’une époque ? Les résultats de Poisson particulièrement suscitent indignation et critiques de la part de beaucoup de mathématiciens et de philosophes. Au milieu du XIX° siècle, on commence à faire la distinction entre la théorie et les applications du calcul des probabilités. Apparaît la distinction entre probabilité objective (celle liée à l’approche fréquentiste), et probabilité subjective.

55 Logique et probabilité : un premier pas Georges Boole, An investigation of the laws of thought, on which are founded the mathematical theories of logic and probabilities, 1854. « Elles (la logique et la théorie des probabilités) nous renseignent sur la manière dont le langage et le nombre servent d’instruments aux procédures de raisonnement ; elles nous révèlent, jusqu’à un certain point, les rapports qui existent entre les différentes facultés de notre intellect ; elles exposent ce qui, dans les domaines de la connaissance déductive et de la connaissance du probable, constitue les critères essentiels de vérité et de validité, qui ne nous viennent pas de l’extérieur mais trouvent leur fondement au plus profond des facultés humaines. Dévoiler les lois et relations cachées de ces importantes facultés de la pensée qui nous permettent d’atteindre et de bien connaître le domaine qui dépasse la connaissance purement perceptive que nous avons du monde et de nous mêmes, est un but que l’on n’a pas besoin de faire valoir devant un esprit rationnel. »

56 La « physique du hasard » James Clerk Maxwell (1831-1879) 1859 : J. C. Maxwell veut expliquer la pression et la viscosité des gaz par les mouvements des particules. Ne connaissant pas les positions et les vitesses avec précision, il considère qu’elles sont réparties au hasard. Il aboutit, grâce au calcul des probabilités, au calcul de la pression et de la viscosité. Calcul confirmé par l’expérience. Premier succès de « la physique du hasard ».

57 1872 : Ludwig Boltzmann postule qu’un gaz évolue spontanément de la situation la moins probable vers la situation la plus probable, qui est une répartition « équilibrée des molécules ». Idée d’un déterminisme fondé sur le hasard ; sorte de déterminisme statistique ; renonciation au déterminisme individuel CH. Ruhla, 1989 : « On passe du hasard par ignorance au hasard par conviction. » t 0 t 1 t 2 t 3

58 Le hasard est-il dans l’ignorance des hommes ou dans la nature des choses ? Questions des XIX°, XX° et XXI° siècle. « Dieu ne joue pas aux dés ». Albert Einstein (1879-1955). (A propos de la mécanique quantique).(contre le principe d’incertitude de Heisenberg, 1926) Chaos, indéterminisme, hasard, désordre, liberté, … Les derniers acquis scientifiques n’ont pas radicalement modifié la nature de ces questions.

59 "Une fois de plus c'est la notion g é n é rale de hasard qui est en jeu. Une d é finition de ce concept en termes empiriques soul è ve une foule de probl è mes presque inextricables. On peut certes recourir à une d é finition é liminant tous les probl è mes, une d é finition abstraite et axiomatique qui vide les concepts de leur contenu et les rend inoffensifs. L'axiomatique est tout à fait capable de r é aliser ce genre de miracle. C'est en effet un point de vue axiomatique qui a é t é introduit dans le calcul des probabilit é s au d é but des ann é es 1930 par les math é maticiens sovi é tiques Alesandr Iakovl é vitch Khintchin (1894-1959) et Andr éï Nikola ïé vitcth Kolmogorov (1903-1987). Il a connu depuis un immense d é veloppement. Comme dans d'autres domaines, il s'est impos é comme moyen de sortir des difficult é s logiques pos é es par les approches classiques. (...) Encore une fois c'est dans le cadre de la math é matisation des sciences morales, sociales et é conomiques, que se pose la question du rôle des probabilit é s et de la dialectique entre vision objectiviste et vision subjectiviste du hasard. (...) Dans cette perspective, les approches objectivistes, comme l'axiomatique, conduisent tout simplement à nier ou à sous estimer la valeur probabilistes des sciences non physiques. » Giorgio Israel (La math é matisation du r é el, 1996)

60 « une mesure de probabilités est un outil mathématique qui n’a pas pour but d’expliquer une expérience, mais de la décrire et de décrire au mieux ses effets. Ainsi, le jeu de Pile ou Face produit des suites de P et F qui ont les propriétés déduites de la Loi des Grands Nombres pour les suites d’évènements indépendants. Et c’est ce qui importe au spécialiste de la théorie des probabilités : impossible de savoir si Dieu existe et s’Il joue aux dés ; par contre, on sait, rationnellement et rigoureusement depuis Kolmogorov, démontrer des théorèmes qui décrivent bien les caractéristiques observées de certains phénomènes complexes. » Denis Talay, (Une introduction au travail génial d’axiomatisation des probabilités dû à Kolmogorov, avril 2010).

61 Wendelin Werner (1968 - ) Médaille Fields 2006 Hilda Geiringer (1893-1973)

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64 « Je mets au rang des illusions l' application que Leibniz et Daniel Bernoulli ont faite du calcul des probabilit é s, à la sommation des s é ries. (...). Leibniz toujours conduit par une m é taphysique singuli è re et tr è s d é li é e, consid é ra que la suite, plus un, moins un, plus un, etc... devient l ’ unit é ou z é ro, suivant que l ’ on s ’ arrête à un nombre de termes impair ou pair; et comme dans l ’ infini, il n ’ y a aucune raison de pr é f é rer le nombre pair à l ’ impair, on doit, suivant les r è gles des probabilit é s, prendre la moiti é des r é sultats relatifs à ces deux nombres, et qui sont z é ro et l ’ unit é ; ce qui donne 1/2 pour la valeur de la s é rie.(...) » (Laplace note un peu plus loin qu ’ en d é veloppant en s é ries une certaine fraction, il serait possible de montrer que la somme pr é c é demment propos é e serait aussi 2/3.) « Les r è gles des probabilit é s donneraient donc alors un faux r é sultat; ce qui prouve combien il serait dangereux d ’ employer de semblables raisonnements, surtout dans les sciences math é matiques, que la rigueur de leurs proc é d é s doit é minemment distinguer. » Laplace,Th é orie analytique des probabilit é s, 1812.


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