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Les rapports cliniques sur les demandeurs d’asile traumatisés et la Directive sur les Personnes Vulnérables de la CISR Janet Cleveland, Ph.D. Chercheure.

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1 Les rapports cliniques sur les demandeurs d’asile traumatisés et la Directive sur les Personnes Vulnérables de la CISR Janet Cleveland, Ph.D. Chercheure Chaire de recherche en droit international des migrations Université de Montréal et Centre universitaire de santé McGill

2 Réfugiés et immigrants: distinctions
Immigrants: admission basée sur des critères économiques OU familiaux Réfugiés: individus ayant des raisons sérieuses de craindre la persécution dans leur pays d’origine pour des motifs prévus dans la loi

3 Procédure de demande de statut
Le demandeur d’asile doit démontrer qu’il a droit au statut de réfugié Témoignage à l’audience et documents (incluant le rapport clinique) En cas de rejet, la personne peut demander: La révision judiciaire (Cour fédérale) L’Évaluation de risques avant renvoi (ÉRAR) L’admission pour motifs humanitaires

4 Un réfugié est un individu qui a des motifs sérieux de craindre que s’il était renvoyé dans son pays: Il serait persécuté en raison de: sa race, ethnicité ou langue, ou sa nationalité, ou sa religion, ou son appartenance à un groupe social particulier (ex., sexe, orientation sexuelle, liens familiaux, etc.), ou ses opinions politiques OU 2. Il serait exposé à: un risque de torture, ou un risque à sa vie (excluant les risques ‘naturels’ tels épidémie, famine, soins de santé inadéquats), ou un risque de traitements cruels ou inusités

5 En somme, le demandeur d’asile doit prouver que:
Le renvoi dans son pays d’origine l’exposerait à un risque sérieux de mauvais traitements graves; Il est à risque pour un (ou plusieurs) des motifs prévus dans la loi; Les autorités de son pays refusent ou sont incapable d’assurer sa sécurité; Il ne serait en sécurité nulle part dans son pays d’origine.

6 Motifs de la crainte Crainte de mauvais traitements appréhendés en cas de renvoi au pays d’origine Exception: ‘Raisons impérieuses’ de ne pas retourner, notamment en raison de trauma lié à la torture En pratique, la crainte doit également être fondée sur de mauvais traitements déjà subis - par le demandeur d’asile, ou par un membre de sa famille, ou par d’autres personnes qui lui ressemblent (ex., même groupe ethnique ou parti politique)

7 Importance du rapport clinique pour le bien-être du demandeur d’asile
Obtenir le statut de réfugié est crucial pour son bien-être Absence de statut = incertitude, séparation de sa famille, manque d’intégration sociale, accès limité à des emplois, etc. Une évaluation minutieuse et un rapport bien écrit peuvent augmenter sensiblement les chances d’obtenir le statut de réfugié

8 Deux fonctions principales des rapports cliniques
1. Capacité de témoigner Évaluer l’effet des problèmes cognitifs et psychologiques du demandeur d’asile sur sa capacité de comprendre les procédures et de témoigner de manière cohérente à l’audience Évaluer l’effet des procédures sur la santé mentale du demandeur d’asile Suggérer des adaptations d’ordre procédural 2. Compatibilité entre les symptômes et le récit Évaluer si les symptômes du demandeur d’asile sont compatibles avec les événements traumatiques allégués (fondement de la demande d’asile)

9 Effet des problèmes de santé mentale sur la capacité de témoigner
Dans ce cas spécifique: quels sont les motifs de croire que la confusion, les contradictions, l’évitement, l’absence d’émotion apparente, etc. sont des signes de troubles psychologiques (et non pas de malhonnêteté)? Recommandations: adaptations d’ordre procédural pour réduire la détresse et créer un contexte qui aidera le demandeur d’asile à raconter son histoire

10 Compatibilité entre les symptômes et le récit
Est-ce que les symptômes du demandeur d’asile sont compatibles avec les événements traumatiques allégués? Ici, l’opinion du clinicien touche directement au caractère plausible de la demande d’asile (surtout s’il y a diagnostic de SSPT – qui suppose que la personne a effectivement vécu des expériences gravement traumatiques)

11 Directive sur les Personnes Vulnérables
But : adaptations d’ordre procédural pour les personnes identifiées comme vulnérables par la CISR (1.1) Définition de personne vulnérable Personne dont la capacité de présenter son cas devant la CISR est grandement diminuée (2.1) ou qui a une grande difficulté à composer avec le processus (1.5) Peut également inclure un proche parent qui est très affectée par la situation de la personne vulnérable (2.2)

12 Défintion de la vulnérabilité (suite)
La vulnérabilité peut être due: au fait d’avoir été victime ou témoin de torture, de génocide ou d’autres formes graves de mauvais traitements (incluant la persécution des femmes en raison de leur sexe) à la maladie mentale ou physique ou à un handicap à l’âge (mineurs, personnes âgées) (1.5, 2.1) Seuls les cas particulièrement sévères seront considérés comme vulnérables (2.3)

13 Prouver la vulnérabilité
De préférence: rapport détaillé élaboré par un expert suite à une évaluation approfondie (2.4, 8.1) Rapport portant sur “la difficulté particulière qu’éprouve la personne à composer avec le processus d’audience, et notamment sa capacité de témoigner avec cohérence” (8.1)

14 Difficultés et adaptations
La vulnérabilité d’une personne peut: affecter sa mémoire, son comportement et sa capacité de relater des événements pertinents affecter la cohérence de son témoignage l’amener à craindre les personnes en autorité l’amener à être réticente ou incapable de parler de ses expériences (4.1) Les adaptations procédurales devraient aider à atténuer ou surmonter ces difficultés (4.1)

15 Adaptations - exemples
Priorité (ou délai) pour l’audience (9.1) Permettre à l’avocat du demandeur à procéder en premier (4.2d) Créer un contexte plus informel (4.2c) Sexe des participants à l’audience (4.2f) “Permettre toute autre adaptation d’ordre procédural raisonnable dans les circonstances” (4.2h) En interrogeant le demandeur, la CISR “s’efforce d’éviter de causer un traumatisme ou un nouveau traumatisme à une personne vulnérable” (10.1) Voir Guide de formation CISR concernant les victimes de torture

16 Recommandations procédurales
Consulter l’avocat pour savoir quelles recommandations seraient utiles Ne pas recommander que la CISR évite de questionner le demandeur sur l’ensemble des événements traumatiques Préférable d’identifier des points spécifiques particulièrement sensibles qui doivent être abordés avec un tact et une circonspection particuliers, et de recommander des mesures telles que permettre à l’avocat du demandeur de procéder en premier

17 Contenu du rapport d’expert
8.3 Le rapport d’expert devrait mentionner: a) la qualification et l’expérience particulières du professionnel, qui indiquent une expertise pertinente par rapport à la condition particulière de la personne vulnérable; b) les questions qui ont été posées à l’expert par la personne qui a demandé le rapport d’expert; c) le fondement factuel sur lequel s’appuie l’avis de l’expert; d) la méthodologie utilisée par l’expert pour évaluer la personne, notamment si une entrevue a été tenue ou non, le nombre et la durée des entrevues, si des tests ont été administrés ou non, et, dans l’affirmative, la nature de ces tests et la signification de leurs résultats;

18 Contenu du rapport d’expert (suite)
e) des précisions à savoir si la personne suit un traitement, et, dans l’affirmative, la nature du traitement, et s’il permet de contrôler la condition de la personne vulnérable; f) des précisions à savoir si l’expert procédant à l’évaluation traitait également la personne au moment de la production de son rapport; g) l’avis de l’expert concernant la condition de la personne et sa capacité à participer au processus d’audience, y compris toute adaptation d’ordre procédural qu’il pourrait recommander ainsi que les motifs de cette recommandation.

19 Rapports d’experts - limites
8.4 Les experts ne devraient pas présenter d’avis sur des questions qui relèvent de la compétence exclusive du décideur, notamment le bien-fondé du cas de la personne concernée. 8.5 L’avis d’un expert ne constitue pas en lui-même une preuve de la véracité des renseignements sur lesquels il repose. Le poids accordé au rapport est notamment fonction de la crédibilité des faits sous-jacents à l’appui de l’allégation de vulnérabilité.

20 Critiques de la CISR sur les rapports d’experts
Rapports stéréotypés (‘coupé-collé’) Empiéter sur la juridiction de la CISR (ex., se prononcer sur le bien-fondé de la demande d’asile) Rapports basés uniquement sur la parole du demandeur d’asile Dans un tel cas, si le commissaire ne trouve pas le demandeur d’asile crédible, il peut ignorer le rapport DONC Appuyez votre opinion sur les symptômes spécifiques de l’individu Limitez-vous à votre domaine d’expertise clinique Mettez l’accent sur les faits observés Expliquez pourquoi vous croyez que les symptômes sont compatibles avec le récit du demandeur d’asile

21 Preuve d’experts - admissibilité
Règle générale: la preuve d’opinion est inadmissible. La preuve d’experts est une exception à cette règle, mais seulement si: L’expert a les qualifications pertinentes; L’opinion est basée sur un examen approfondi du demandeur d’asile; Les faits sur lesquels s’appuie l’opinion sont crédibles; L’opinion relève du domaine d’expertise du clinicien

22 Démontrer ses qualifications
L’expert doit démontrer qu’il a les qualifications et l’expérience “qui indiquent une expertise pertinente par rapport à la condition particulière de la personne vulnérable” (8.3a) Donc, mentionnez: Votre poste actuel; Vos diplômes universitaires et toute autre formation pertinente; Votre expérience clinique pertinente; Votre expérience avec des réfugiés, des survivants de torture, viol ou autres types de violence organisée, ou avec des personnes de la même communauté culturelle que le demandeur; Vos publications pertinentes

23 Qualité de l’évaluation clinique
8.3 d) [Le rapport doit spécifier] la méthodologie utilisée par l’expert pour évaluer la personne, notamment si une entrevue a été tenue ou non, le nombre et la durée des entrevues, si des tests ont été administrés ou non, et, dans l’affirmative, la nature de ces tests et la signification de leurs résultats

24 Le fondement factuel du rapport
Le fondement factuel du rapport = les faits sur lesquels le clinicien appuie son opinion, incluant: Le comportement et d’autres signes observés par le clinicien; Les sympômes rapportés par le demandeur d’asile; Les résultats de tests (si des tests ont été réalisés); Les événements traumatiques allégués et d’autres antécédents rapportés par le demandeur d’asile Certains de ces faits relèvent du domaine d’expertise du clinicien, d’autres non

25 Fondement factuel - types
Faits relevant de l’expertise du clinicien a) Signes directement observés (ex., larmes, confusion) Spécifier le contexte (ex., le demandeur tremble lorsqu’il décrit l’événement traumatique) b) Symptômes rapportés par le demandeur (ex., insomnie, cauchemars, flashbacks) Expliquer la vraisemblance clinique (cohérence avec les signes observés, le tableau clinique typique, etc. ) c) Résultats de tests La description par le clinicien de signes qu’il a observés constitue une preuve factuelle qui ne peut être ignorée par la CISR Mais: la crédibilité des symptômes rapportés par le demandeur dépend en partie de la crédibilité générale du demandeur, en partie de la vraisemblance clinique.

26 Fondement factuel - types
2. Faits sur lesquels le clinicien a peu ou pas d’expertise Le récit du demandeur d’asile - Le clinicien n’a aucune expertise sur la vraisemblance du récit du demandeur d’asile (ex., conditions dans le pays d’origine) - Le clinicien a une certaine expertise sur la compatibilité entre les symptômes et le trauma allégué Il faut expliquer le fondement clinique de cette opinion (ex., ces symptômes correspondent au séquelles typiques du type d’événement allégué)

27 Comment rapporter le récit du demandeur
Obtenir le Formulaire de renseignements personnels (ou PIF) pour ne pas contredire la version du demandeur d’asile pour identifier les enjeux pertinents Lorsque vous résumez le récit du demandeur d’asile Inclure assez de détails pour justifier votre opinion sur la compatibilité entre les symptômes et les antécédents allégués; Mais ÉVITER d’inclure trop de détails (ex., les dates des événements et tout autre fait qui n’est pas essentiel pour fonder votre opinion)

28 Opinion Diagnostic: expertise exclusive du clinicien
Diagnostic de SSPT: opinion sur l’existence des événements traumatiques Signes observés par le clinicien: preuve factuelle Compatibilité entre les symptômes et les antécédents traumatiques allégués “Les symptômes sont compatibles avec…” ET NON PAS “Les symptômes sont dûs à …”

29 Opinion sur la sincérité
ÉVITER d’écrire: [X] est une personne honnête, ou [X] devrait être accepté comme réfugié MAIS vous pouvez écrire (par exemple): “J’ai d’autant plus confiance à mon diagnostic parce que je trouve que [X] a relaté les faits qu’il a vécus avec beaucoup de sincérité et d’ouverture”, ou “ [X] a répondu à mes questions de manière très honnête et directe, ce qui confirme mon impression que ses symptômes sont compatibles avec les faits traumatiques allégués”

30 Effet du renvoi au pays d’origine
Peut être pertinent d’écrire qu’à votre avis professionnel, le renvoi du demandeur à son pays d’origine serait préjudiciable à sa santé mentale ou physique

31 Prédictions : comportement à l’audience
Décrire les comportements pertinents observés au cours de l’évaluation, tels que la confusion, l’incohérence, l’absence d’affect, etc. Expliquer pourquoi vous croyez que ceci est imputable aux événements traumatiques ou aux problèmes cognitifs ou psychologiques de l’individu (plutôt qu’à la malhonnêteté) Faire le lien entre vos prédictions et les caractéristiques particulières de cet individu Soyez très prudents dans vos prédictions du comportement probable lors de l’audience CISR – une prédiction érronnée mine votre crédibilité Expliquez la difficulté de prédire comment chaque individu réagira dans différents contextes


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