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L’ART NOUS DETOURNE-T-IL DE LA REALITE ?

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1 L’ART NOUS DETOURNE-T-IL DE LA REALITE ?

2 Introduction Constat : attitude ambivalente vis-à-vis de l’art
Admiration pour l’artiste, sa liberté Inutilité de l’art dans une société marchande, et même art réduit à une marchandise (« marché de l’art »). Définitions : ART : savoir-faire, technique / création d’œuvres belles (18ème siècle, « Beaux-Arts ») Problème : quel est le critère d’une œuvre d’art aujourd’hui ? REALITE : du latin res (chose), ce qui existe effectivement en dehors de notre esprit. Problème : qu’est-ce qui est réel ? Ce que je vois ? Ce que la science découvre ? Exemple de la table scientifique et de la table ordinaire (EDDINGTON). Analyse de la question : « détourner » => éloigne de ce qui est important (« détourner l’attention »), idée de ruse

3 Brancusi vs. EU : à quoi reconnaît-on l’art ?
L’oiseau dans l’espace, 1927 Procès avec les douanes US : est- ce une œuvre d’art ou un objet quelconque ? Victoire de Brancusi Difficulté de déterminer le critère d’une œuvre d’art …

4 Problématique Les œuvres d’art sont des objets réels, au même titre que la nature ou les autres objets fabriqués par l’homme. Mais elles ont la capacité à nous fait voir une autre réalité. Cette autre réalité est-elle chimérique ? Ou la « véritable » réalité ? Question centrale : quels sont les rapports entre art et réalité ?

5 Enjeu L’art nous fait-il accéder à la vérité ?
Enjeux les plus courants : liberté, responsabilité / vérité La place de l’art dans la société Une société peut-elle se passer d’artiste ?

6 Plan L’art, un monde irréel L’art, miroir de la réalité
L’art « voyant » : en quoi la perception artistique diffère-t-elle de la perception ordinaire ?

7 I. L’ART, UN MONDE IRREEL ?

8 1) L’art, une fausse copie de la réalité ?

9 L’art comme mimesis A l’époque de Platon, l’art a pour but l’imitation de la nature (mimésis) : il copie le réel. Ce n’est qu’au 19ème siècle qu’on attribuera à l’art la fonction d’exprimer la subjectivité de l’artiste. A l’époque de Platon, succès de la peinture trompe-l’œil (ZEUXIS peint des raisins picorés par des pigeons) : découverte des ombrés, des modelés … Or, pour donner l’illusion de la réalité, il faut déformer les proportions (exemple de la statue d’Athéna par Phidias : il a faillé avoir un procès pour outrage à la déesse, dont les traits étaient déformés. Placée en hauteur, la statue fut jugée magnifique).

10 Les « trois lits » PLATON, La République, III : l’art imite la nature en reproduisant son apparence en trompe-l’œil ; cette imitation éloigne de la vérité. Opposition monde sensible (apparences fausses) / monde intelligible ou monde des Idées (réalité). Idée : essence des choses, qui existe en dehors de notre esprit. soit 3 lits : l’Idée de lit / le lit de l’artisan / le lit peint par l’artiste. Le lit de l’artisan est une copie de l’Idée de lit Le lit peint est une copie de copie L’art nous éloigne plus de la réalité que l’artisanat !

11 Il faut chasser les artistes de la cité !
PLATON, La République, X : une condamnation célèbre … Pas de distinction nette entre artisans et artistes (technê). Mépris pour les deux métiers. Mais mépris plus grand pour l’artiste, qui risque de pervertir l’âme. La poésie, les arts imitatifs (peinture, sculpture) … Comme l’art éloigne du Vrai, il éloigne aussi du Bien. Il faut chasser les artistes de la cité idéale. Seules quelques formes d’art seront tolérées (musique militaire).

12 Remarque : 2 conceptions de la mimésis
PLATON : l’art imite la nature en reproduisant son apparence en trompe- l’œil Cette imitation éloigne de la vérité ARISTOTE : l’art imite la nature (= produit des œuvres comme la nature les phénomènes naturels) en la prolongeant : « il achève ce qu’elle n’a pu mener à bien » : Il ne s’agit pas d’une conception « réaliste » de l’art ; l’art idéalise la nature Comparaison des couleurs aux éléments (blanc = eau, jaune = terre, rouge = feu, noir = air) ; toute œuvre est un microcosme dans le Cosmos Cette imitation est utile (apprentissage de la vie) et agréable On a tendance à traduire « mimésis » par imitation chez Platon et « représentation » chez Aristote

13 ARISTOTE, La Poétique, IV
Plus d’opposition entre sensible et intelligible comme chez Platon Revalorisation de l’imitation (voir texte du manuel) L’imitation est un besoin naturel, source de plaisir « Nous avons plaisir à regarder les images les plus soignées des choses dont la vue nous est pénible dans la réalité, par exemple les formes d’animaux parfaitement ignobles ou de cadavres » La représentation d’une chose laide peut être belle (nouveauté !) Pourquoi ? « En effet si l’on aime à voir des images, c’est qu’en les regardant on apprend à connaître et on conclut ce qu’est chaque chose comme lorsqu’on dit : « celui-là, c’est lui ». »

14 RAPPEL : ARISTOTE, La Poétique, IV (suite)
Cette « mimesis » ne nous trompe pas, car nous restons capables de faire la différence entre le réel et son image… La « vraisemblance » n’est pas le vrai. Exemple de la tragédie, imitation d’une action noble : le spectateur sait que les scènes ne sont pas vraies Mais elles suscitent de vrais sentiments de terreur et de pitié. Le spectateur peut se libérer de ses passions par procuration : catharsis. En imitant des situations qui ne sauraient être moralement tolérées dans la réalité (crimes, incestes, etc.), la « catharsis » permet l'épuration des passions mauvaises des hommes qui auraient pu menacer l'ordre de la cité. L'art est ainsi salutaire !

15 2) La belle inutilité de l’art …
L’art ne nous détourne-t-il pas de la réalité de par son absence d’utilité ?

16 La Beauté selon Platon Etrangement, ce n’est pas la beauté des œuvres d’art qui est condamnée par PLATON (source de séduction, suggestion), mais leur fausseté. Le Vrai = le Bien = le Beau Pour PLATON, seules les Idées sont belles, non les œuvres d’art. Cf. « Dialectique ascensionnelle de l’âme » dans Le Banquet : l’amour des beaux corps élève l’âme à l’amour des belles âmes, des belles actions, puis à la considération du Beau en soi. La Beauté joue donc un rôle dans l’accès à la Vérité.

17 L’art, une création belle et inutile
L’art n’est pas un travail car il ne satisfait pas un besoin : il est désintéressé. Comme la technique, il requiert un savoir-faire, mais ne se réduit pas à l’application de règles préexistantes. L’art est une création, et non une production. La création exige du génie, et non seulement du talent (KANT= Contrairement au talent, le génie est inexplicable. Il est original et exemplaire. Surtout, l’art produit de belles œuvres. Or, seul ce qui est inutile est beau …

18 Le problème de la relativité de la beauté
On peut définir l’art comme la création de belles œuvres. Un problème apparaît alors : la beauté n’est-elle pas relative à chacun ? Jusqu’au 18ème siècle, la beauté est considérée comme objective : elle est intrinsèque à l’objet beau, et est une question de proportion, de symétrie, d’harmonie, mathématiquement mesurables (le nombre d’or, canon). Au 18ème siècle, la beauté devient une appréciation subjective qui dépend du goût de chacun (HUME). « La beauté n’est pas une qualité inhérente aux choses elles-mêmes, elle existe seulement dans l’esprit qui la contemple et chaque esprit perçoit une beauté différente ». Pourtant, il y a une uniformité naturelle du goût, qui est plus ou moins affiné selon les hommes. KANT pense que la beauté doit être universelle, mais qu’on ne peut pas la définir objectivement. Si je dis « c’est beau » (jugement de goût), je suppose que tout le monde partage cet avis, mais si ce n’est que mon jugement. « Est beau ce qui plaît universellement sans concept ».

19 Qu’est-ce que la beauté ?
De même qu’on ne peut pas expliquer la création artistique, on ne peut pas expliquer pourquoi on trouve une œuvre belle. « Est beau ce qui plaît universellement sans concepts » : la particularité du jugement de goût, c’est qu’il doit pouvoir être partageable par tous, alors même qu’on ne peut rapporter la beauté à un concept objectif précis. KANT, Critique de la faculté de juger, § 5: il faut distinguer : Le beau et l’agréable : ce qui est agréable est purement subjectif. La sensation agréable est intéressée : j’ai intérêt à ce que la chose agréable existe. L’agréable est ce qui FAIT PLAISIR. Le sentiment du beau est désintéressé : je peux juger une chose belle, peu importe que la chose : je peux trouver beau un palais, mais préférer habiter dans une simple cabane. Le beau est ce qui PLAIT simplement. Le beau et le bon : le bon a une valeur objective. Le bon est ce qu’on ESTIME, approuve. « On peut dire qu’entre ces trois genres de satisfaction, celle du goût pour le beau est seule une satisfaction désintéressée et libre; en effet, aucun intérêt, ni des sens, ni de la raison, ne contraint l’assentiment ».

20 Le beau est-il toujours inutile ?
L’art est la belle représentation d’une chose, et non la représentation d’une belle chose. L’art « transfigure » des objets laids : BAUDELAIRE (poésie sur des « charognes ») VAN GOGH (représentation de vieux souliers). Pour KANT, la beauté n’est donc pas l’utilité. Théophile GAUTHIER, chef de file du « Parnasse », mouvement de « l’Art pour l’Art », affirme que tout ce qui est utile est laid (préface de Mademoiselle de Maupin). Mais le beau ne peut-il pas être utile ? Le design : le beau « fait vendre » => embellir les objets utilitaires. La beauté ne risque-t-elle pas de séduire, de capter nos esprits ?

21 3) L’art « surréel »

22 La conception romantique de l’art
On peut objecter à Platon sa conception dépassée de l’art : aujourd’hui, l’art exprime les sentiments de l’artiste (conséquence de l’invention de la photographie. 1er daguerréotype en 1838). DELACROIX : l’art ne doit pas être une imitation servile de la réalité, mais une invention de l’imagination (idéalisme) qui dépasse la nature. L’imagination combine des éléments de la réalité extérieurs et des éléments propres à l’intériorité de l’artiste. BAUDELAIRE : la nature n’est qu’un « dictionnaire », dans lequel l’imagination découvre des analogies, ces « rapports intimes et secrets des choses » ou « correspondances ». La peinture de DELACROIX, « c’est l’invisible, l’impalpable, c’est le rêve, c’est les nerfs, c’est l’âme ». Puisque le tableau cesse d’imiter la nature pour exprimer une « nécessité intérieure » (Kandinsky), il n’est plus qu’une surface colorée et DELACROIX observe : « La peinture n’a pas toujours besoin d’un sujet ». L’important, c’est l’impression créée par le tableau, non son sujet. L’art être artificiel, un mensonge « surréel » : le dandy, la mode, le maquillage, les « paradis artificiel »…

23 L’art, un « vrai » mensonge ?
BAUDELAIRE préfère l’illusion, le mensonge : « Je préfère contempler quelques décors de théâtre, où je trouve artistement exprimés et tragiquement concentrés mes rêves les plus chers. Ces choses, parce qu’elles sont fausses, sont infiniment plus près du vrai; tandis que la plupart de nos paysagistes sont des menteurs justement parce qu’ils ont négligé de mentir ». Salon de 1859. Mais nous voyons que l’art risque alors de nous enfermer dans un monde illusoire, artificiel, chimérique. L’artiste devient un marginal, replié sur lui-même, en proie au « spleen » de la mélancolie : « L’artiste ne relève que de lui-même. Il ne promet aux siècles à venir que ses propres œuvres. Il ne cautionne que lui-même. Il meurt sans enfants. Il a été son roi, son prêtre et son Dieu » (BAUDELAIRE).

24 Importance de la couleur
Débat couleur / dessin : lequel imite mieux la réalité ? Delacroix : la couleur est ce qui exprime le mieux les émotions Puisque le tableau cesse d’imiter la nature pour exprimer une « nécessité intérieure » (Kandinsky), il n’est plus qu’une surface colorée et DELACROIX observe : « La peinture n’a pas toujours besoin d’un sujet ». L’important, c’est l’impression créée par le tableau, non son sujet.

25 La mort de Sardanapale (DELACROIX)

26 La Liberté guidant le peuple (DELACROIX)

27 Conclusion L’art est création d’œuvres belles.
L’art ne satisfait pas un besoin. Le beau est une satisfaction désintéressée et libre. Mais l’art risque de nous éloigner de la réalité. Qu’il soit une imitation de la nature Ou une représentation imaginaire Pourtant, pour Platon, certaines formes d’art peuvent être utiles (la musique militaire, pour l’éducation des jeunes, afin de favoriser le courage). L’art ne doit-il donc pas être mis au service de la société ?

28 Conclusion L’art risque de nous éloigner de la réalité.
Qu’il soit une imitation de la nature Une belle représentation de la nature Ou une représentation imaginaire PASCAL : « Quelle vanité que la peinture, qui attire l’admiration par la ressemblance des choses dont on n’admire point les originaux ! » Mais l’art ne possède-t-il pas une vérité ?

29 II. L’ART, MIROIR DE LA REALITE ?

30 1) L’art, un moyen de connaître le réel

31 Pourquoi l’art doit-il être réaliste ?
L’art est un moyen de connaître la nature. Quelle est l’origine de l’art ? ARISTOTE : besoin naturel d’imitation DIDEROT, Lettre sur les sourds et muets (1751) : Les hommes ont un besoin de communication et, avant l’existence du langage articulé, ils devaient utiliser l’art pour transmettre leur pensée. Les hommes éprouvent aussi le besoin de transformer la nature : l’art est d’abord un travail technique, qui n’apparaît que lorsque les hommes ont dépassé la transformation utilitaire de la nature. L’art témoigne de l’émancipation des hommes vis-à-vis des contraintes naturelles. L’art exprime une époque.

32 L’art plus expressif que le langage
L’art est-il un langage ? L’art peut même exprimer ce que le langage articulé ne peut dire : l’indicible Exemple de Macbeth : « il y a des gestes sublimes que toute l’éloquence oratoire ne rendra jamais » : « La somnambule Macbeth s’avance en silence […] imitant l’action d’une personne qui se lave les mains, comme si les siennes eussent été teintes du sang de son roi qu’elle avait égorgé […] Je ne sais rien de si pathétique en discours ». Une expérience à faire : Aller au théâtre en se bouchant les oreilles pour mieux « entendre » la pièce !

33 L’artiste doit imiter rigoureusement la nature
D’où la nécessité d’être au plus près de la réalité pour l’artiste : DIDEROT, Pensées sur l’interprétation de la nature : « Les productions de l’art seront communes, imparfaites et faibles tant qu’on ne se proposera pas une imitation plus rigoureuse de la nature ». L’artiste doit sortir de son atelier, aller à la rencontre de la vraie vie. Contre l’art frivole : « Maudites pastorales ! » Contre les tableaux indécents du 18ème siècle, qui corrompent les mœurs. Contre le recours à des scènes mythologiques, à des allégories. « Les peintres se jettent dans cette mythologie; ils perdent le goût des événements naturels de la vie, et il ne sort plus de leurs pinceaux que des scènes indécentes, folles extravagantes, idéales, etc. Que m’importent toutes les aventures malhonnêtes de Jupiter ? » Salon de 1765

34 François BOUCHER et le « rococo » : le triomphe de Vénus

35 Portrait de Mme de Pompadour

36 DIDEROT, critique de BOUCHER
« Je ne sais que dire de cet homme-ci. La dégradation du goût, de la composition, des caractères, de l’expression, du dessin, a suivi pas à pas la dépravation des mœurs », Salon de 1765 BOUCHER dénature la nature.

37 La peinture de CHARDIN La peinture doit devenir populaire, et ne pas rester l’apanage d’une élite (c’est pourquoi Diderot écrit des critiques d’art) Diderot aime la peinture de CHARDIN La Raie dépouillée, exposée au Salon de 1763 : A LIRE : « L’objet est dégoûtant, mais c’est la chair même du poisson, c’est sa peau, c’est son sang; l’aspect même de la chose n’affecterait pas autrement […] On m’a dit que Greuze montant au Salon et apercevant le morceau de Chardin que je viens de décrire, le regarda en poussant un profond soupir. Cet éloge est plus court et vaut mieux que le mien ».

38 Raie dépouillée CHARDIN
Chardin transforme la laideur et la crudité d’une raie en œuvre d’art belle.

39 La pourvoyeuse CHARDIN
Autre toile célèbre de Chardin Le tableau représente une scène de la vie quotidienne des paysans.

40 Le paradoxe de l’imitation
PARADOXE : pour mieux représenter la réalité, l’art doit en sélectionner les aspects les plus frappants, les plus singuliers. L’œuvre d’art est semblable au réel, mais n’est pas lui. Paradoxe du comédien : le comédien représente mieux une émotion qu’il n’éprouve pas.

41 2) La fonction morale de l’art

42 Art et morale Sujet de BAC : Peut-on dire d’une œuvre d’art qu’elle est immorale ? Pour Diderot, l’art doit éduquer à la morale : fonction didactique La beauté, pour DIDEROT, est inséparable de la morale : « l’œuvre est belle parce qu’elle concourt « à nous toucher, à nous instruire, à nous corriger et à nous inviter à la vertu ». Goût pour la peinture édifiante de Greuze. Une critique de l’art : ROUSSEAU, Lettre à d’Alembert : le théâtre incite aux vices (contrairement à la fête qui réunit les hommes). Contre la construction d’un théâtre à Genève.

43 La piété filiale GREUZE
Tableau admiré par Diderot

44 3) La fonction politique de l’art

45 Art et politique Le pouvoir politique a souvent utilisé l’art afin de renforcer son influence sur les esprits. Les portraits de roi, l’art baroque (contre-Réforme) L’image possède un pouvoir de persuasion qui dépasse l’argumentation rationnelle. Pour DIDEROT, l’art doit servir à développer les valeurs républicaines. L’artiste joue un rôle politique : « Désigner au poète tragique les vertus nationales à prêcher. Désigner au poète comique les ridicules nationaux à peindre. »

46 Le serment des trois Horaces DAVID
Exaltation des valeurs républicaines (grandeur de Rome) Préfigure le « Serment du jeu de Paume ».

47 L’art instrumentalisé ?
Pour Diderot, l’artiste est en charge de la moralisation de la nation. Représenter avec réalisme les paysages de France, c’est donner au peuple à connaître et à aimer sa patrie. Mais inversement, l’art ne peut-il pas aussi être une puissance critique de la société ou du pouvoir ? Ionesco, Rhinocéros, le « cavalier bleu », le pop art … Mais soumettre l’art à des fins politiques, n’est-ce pas dangereux ? L’art a souvent été utilisé par les totalitarismes pour servir leur propagande (exemple de l’art nazi). L’art devient alors un manipulateur des consciences. N’y a-t-il pas alors une profonde dénaturation de l’art ? Ne devrait-on pas dire, avec Adorno, que « la fonction d’une œuvre d’art dans un monde totalement fonctionnel est son absence de fonction » ? L’œuvre d’art n’est-elle pas utile parce qu’elle est justement inutile ? L’art ne doit-il pas rester étranger à toute logique utilitaire ?

48 III. L’ART, REVELATEUR DE LA REALITE
Paul KLEE ( ) : « non rendre le visible, mais rendre visible »

49 1) L’art, manifestation de la réalité

50 La vérité des apparences
HEGEL, dans l’Esthétique, s’oppose à PLATON qui condamne l’art car il produit des apparences. Or, l’apparence révèle l’essence pour HEGEL : « L’apparence est essentielle à l’essence » « L’apparence est nécessaire au fond qu’elle manifeste, et est aussi essentielle que lui. La vérité ne serait pas si elle ne paraissait ou plutôt n’apparaissait pas à elle-même aussi bien qu’à l’esprit en général ».

51 L’art, un besoin de l’esprit
Pourquoi les hommes créent-ils des œuvres d’art ? HEGEL y voit un besoin de l’esprit. L’homme prend conscience de lui-même par la réflexion mais aussi en transformant la nature, qui lui renvoie une image extérieure, « objective » de lui-même. Le plaisir de l’enfant à « admirer les ronds qui se forment dans l’eau » lorsqu’il y jette des pierres est lié au spectacle de sa propre activité.

52 La spiritualisation du sensible
L’art est manifestation d’un contenu spirituel. C’est pourquoi le beau artistique est supérieur au beau naturel. « Du point de vue formel, n’importe quelle mauvaise idée qui passe par la tête d’un homme est néanmoins plus élevée que n’importe quelle production de la nature, car elle possède toujours spiritualité et liberté ». Critique de l’art comme « imitation de la nature » : « Au lieu de louer des œuvres d’art parce que même des pigeons ou des singes s’y sont laissé tromper, il faudrait plutôt blâmer ceux qui croient avoir porté bien haut l’art, alors qu’il ne savent lui donner comme fin suprême qu’une fin si médiocre ». L’art ne produit qu’un point de vue : il ne pourra jamais imiter la nature. Il sera « comme un ver qui s’efforce en rampant d’imiter un éléphant ». « Quand l’art s’en tient au but formel de la stricte imitation, il ne nous donne, à la place du réel et du vivant que la caricature de la vie ». Ce qui compte dans l’art, c’est l’expression des émotions éprouvées devant la nature.

53 Exemple du portrait L’art du portrait montre l’importance du caractère spirituel dans l’ : il représente un « visage façonné par l’esprit ». Un portrait peut-être très ressemblant mais insignifiant.

54 L’art, un « sensible abstrait »
Par un travail d’abstraction, l’artiste dépouille la réalité sensible de tout ce qu’elle contient de matérialité concrète pour n’en retenir que la « pure apparence ». Repère – CONCRET / ABSTRAIT : ce qui est abstrait a été séparé de ce qui est concret (ce qui est donné dans l’expérience comme un tout indissociable). « L’art crée un royaume d’ombres », et les œuvres d’art sont des « ombres sensibles ». Cette abstraction est une idéalisation qui ne conserve rien de la matérialité de la chose (cf. notion MATIERE ET ESPRIT). L’art est un triomphe sur l’éphémère : il fixe des apparences fugitives, que nous n’apercevons pas dans la réalité. L’art nous ouvre à une réflexion philosophique sur le réel.

55 Exemple de la peinture hollandaise
La peinture hollandaise illustre cette spiritualisation du sensible. Pourtant, elle semble réaliste, et même superficielle (vie quotidienne). « Mais, ce qui nous attire dans ces contenus, dit HEGEL, quand ils sont représentés par l’art, c’est justement cette apparence et cette manifestation des objets, en tant qu’œuvres de l’esprit qui fait subir au monde matériel, extérieur et sensible, une transformation en profondeur ». « Au lieu d’une laine, d’une d’une soie réelles, de cheveux, de verres, de viandes et de métaux réels, nous ne voyons en effet que des couleurs ». « L’apparence créée par l’esprit est donc, à côté de la prosaïque réalité existante, un miracle d’idéalité ».

56 Jan STEEN, « Ainsi gagné, ainsi dépensé » (1661)

57 L’art n’est pas la science
Même si l’art manifeste la réalité, il n’est pas la science : l’art s’attache à l’individualité des choses, alors que la science porte sur l’universel. HEGEL a aussi distingué l’art du désir, rapport intéressé aux choses (consommation). L’art est un intermédiaire entre les sens et la pensée. L’art est « manifestation sensible de l’idée ». Mais une telle représentation de l’idée est impossible (elle perd son contenu spirituel). L’art n’est pas encore la pensée pure, car elle présente le spirituel dans une forme non conceptuelle, encore sensible. C’est la philosophie qui y parviendra. Entre l’art et la philosophie, il y a la religion qui exprime encore de manière sensible un contenu spirituel.

58 Le mouvement de l’art L’art est d’abord symbolique : la forme sensible domine le contenu spirituel (simple allusion). C’est l’art égyptien. Puis classique : équilibre du spirituel et du sensible. L’art atteint sa perfection. Exemple : la sculpture grecque (Dieux sous forme humaine); la statue antique montre une vie spirituelle impersonnelle et objective, l’esprit prenant conscience de lui-même. Elle est tout homme sans être aucun homme particulier. Elle exprime une sérénité qui n’est jamais troublée par la subjectivité des passions. Puis romantique : le spirituel excède la forme sensible. Mais l’art est appelé à être dépassé, par la religion puis par la philosophie. Il n’est pas l’expression la plus haute de l’esprit. Il est pour nous une chose du passé.

59 L’art n’est pas l’expression la plus haute de l’esprit
L’art a perdu son pouvoir sur nous : « L’œuvre d’art est donc incapable de satisfaire notre ultime besoin d’absolu. De nos jours on ne vénère plus une œuvre d’art, et notre attitude à l’égard des créations de l’art est beaucoup plus froide et réfléchie. » Alors qu’avant, les œuvres d’art étaient « l’expression la plus élevée de l’Idée ». « Nous ne voyons plus en lui quelque chose qui ne saurait être dépassé, la manifestation intime de l’Absolu, nous le soumettons à l’analyse de notre pensée. » C’est pourquoi « la science de l’art [esthétique] est donc bien plus un besoin à notre époque que dans un temps où l’art donnait par lui-même, en tant qu’art, pleine satisfaction ».

60 2) L’artiste voyant Pourquoi les artistes sont-ils souvent visionnaires ?

61 Une meilleure perception du réel
L’art ne nous permet-il pas de mieux voir les choses ? Est-il vraiment dépassé ? BERGSON, dans « la perception du changement » (La Pensée et le Mouvant), définit les artistes comme « des hommes dont la fonction est de nous faire voir ce que nous n’apercevons pas naturellement ». Même, les artistes modifient notre façon de voir la réalité. Par exemple, les brouillards de TURNER – ces « dissolving views », visions brillantes et évanouissantes, à opposer à « la vision pâle et décolorée que nous avons habituellement des choses ». Si nous aimons ses toiles, c’est parce que nous avions déjà perçu quelque chose de ce qu’il nous montre. « Mais nous avions perçu sans apercevoir ». « Le peintre l’a isolée; il l’a si bien fixée sur la toile que, désormais, nous ne pourrons nous empêcher d’apercevoir dans la réalité ce qu’il y a vu lui-même ». La peinture nous révèle un aspect du monde que nous reconnaissons, mais que nous ne percevons que confusément ordinairement : la peinture nous permet alors de mieux voir les choses. Mais les artistes ne nous font-ils pas partager leurs états d’âme plutôt que la réalité ?

62 Pourquoi des artistes ? « Quel est l’objet de l’art ? Si la réalité venait frapper directement nos sens et notre conscience, si nous pouvions entrer en communication immédiate avec les choses et avec nous-mêmes je crois bien que l’art serait inutile, ou plutôt que nous serions tous artistes, car notre âme vibrerait alors continuellement à l’unisson de la nature ». BERGSON, Le Rire. Les artistes sont là parce que nous ne voyons pas la réalité telle qu’elle est vraiment. Pourquoi ? Notre perception quotidienne est organisée en fonction de l’action, de nos besoins et de nos intérêts : elle est donc incomplète. Nous ne percevons dans les choses que ce qui peut nous servir. Nous ne saisissons pas la singularité des choses. Il y a ordinairement un voile entre notre conscience et la réalité. « Et ce ne sont pas seulement les objets extérieurs, ce sont aussi nos propres états d’âmes qui se dérobent à nous dans ce qu’ils ont d’intime, de personnel, d’originalement vécu ».

63 L’art contre les conventions
L’art nous arrache à cette approche utilitaire du réel. Il écarte les conventions socialement utiles qui s’interposent entre la réalité et nous. « Les symboles pratiquement utiles, les généralités conventionnellement et socialement acceptées ». L’art implique un détachement à l’égard des intérêts pratiques. L’art voit mieux la réalité de la science, qui n’a qu’un point de vue utilitaire sur la réalité. Pour BERGSON, l’intelligence a un but pratique. La science ne perçoit pas toutes les nuances de la réalité, sa singularité. Mais la perception artistique repose sur un seul sens qui se sera davantage détaché du besoin : vue, ouïe … D’où la diversité des arts. Les artistes sont d’ailleurs des êtres « distraits », marginaux, dans leur monde.

64 3) Le paradoxe de l’artiste « distrait »
Comment les artistes peuvent être à la fois des marginaux et des visionnaires ?

65 Dépasser l’opposition réalisme / idéalisme
BAUDELAIRE : idéaliste => L’art nous montre un monde idéal DIDEROT : l’art doit représenter fidèlement la réalité (ce qui ne signifie pas qu’il doit la recopier servilement). Or, BERGSON pense que cette opposition est stérile, car « c’est à force d’idéalité seulement qu’on reprend contact avec la réalité ». Cf. l’artiste pour Freud : un névrosé qui reprend contact avec la réalité grâce à l’art. L’art vise à « nous mettre face à face avec la réalité même ». Il est donc réaliste. Mais il est aussi idéaliste : il dépasse la réalité quotidienne, constituée seulement de représentations utiles de la réalité. L’artiste révèle une réalité idéale. « Le réalisme est dans l’œuvre quand l’idéalisme est dans l’âme ». « C’est à force d’idéalité seulement qu’on reprend contact avec la réalité ».

66 Détachement et liberté
Les artistes ont une qualité de détachement : « Quand ils regardent une chose, ils la voient pour elle, et non plus pour eux. Ils ne perçoivent plus simplement en vue d’agir; ils perçoivent pour percevoir, – pour rien, pour le plaisir. » in « la perception du changement », La Pensée et le Mouvant. Les artistes nous enseignent la liberté : le détachement à l’égard de soi et du monde. Convergence de l’art et de la philosophie : « Le rôle de la philosophie ne serait-il pas ici de nous amener à une perception plus complète de la réalité par un certain déplacement de notre attention ? » La philosophie requiert une conversion de l’attention (de ce qui est utile à ce qui ne sert à rien).

67 Conclusion C’est précisément parce que l’art détourne notre regard de la réalité telle que nous la percevons ordinairement qu’il nous montre ce que nous avions obscurément senti, la réalité dans toute sa singularité.


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