Martine Alcorta Université Victor Segalen Bordeaux-2 Les « croyances à propos de soi » peuvent-elles expliquer une partie des difficultés scolaires des élèves?
Qu’appelle-t-on « croyances à propos de soi »? Quel est l’impact des « croyances à propos de soi » sur les apprentissages? Les cadres éducatifs ont-ils une influence sur les « croyances à propos de soi »?
Représentations du contexte Représentations de soi
Qu’appelle-t-on « croyances à propos de soi »? Estime de soi Ce qu’une personne se sent capable de faire jugement global qu’une personne a d’elle-même Sentiment de compétence
La valeur qu’un individu s’attribue L’estime de soi est un regard global sur soi qui correspond à un jugement de sa valeur en tant que personne
L’estime de soi se construit, on ne naît pas avec… Certes, ce n’est pas la première fois qu’il reçoit ainsi de son environnement social des représentations le concernant, mais jamais ces représentations n’ont été aussi nombreuses ni n’ont autant porté sur ses capacités et sur son intelligence. L’estime de soi se construit, se déconstruit et se reconstruit au cours des expériences de vie, au fil des interactions avec autrui, par le jeu du miroir social et du regard de l’autre.
La théorie de William James 1842-1910 L'Estime de Soi se construit entre « succès et ambitions »
Réussites effectives Ambitions
Réussites effectives Ambitions
La théorie de Charles Cooley (1864-1929) - Le soi en miroir ou looking glass self 10
L’école installe tout autour de l’enfant des miroirs qui lui renvoient une image très nette de lui-même (Tardif, 1992)
L’école est une source importante de développement de l’estime de soi des élèves Elle peut être une source de valorisation mais aussi une source de dévalorisation
Les nouveaux objectifs d’apprentissage de l’école primaire genevoise (2000) « Scolariser un enfant ne signifie plus seulement lui transmettre des connaissances, mais aussi lui offrir un cadre favorisant le développement des échanges entre enfants, le respect mutuel, la coopération et qui encourage également le désir d’apprendre, l’affirmation en tant que sujet, l’expression des émotions, la confiance en soi et l’estime de soi » 13
Les plus jeunes se survalorisent Les préados (13 ans) et les ados (19-20 ans) présentent meilleure estime de soi que les 15-18 ans
Un concept multidimensionnel Estime de soi globale Estime de soi scolaire Estime de soi sportive Estime de soi apparence physique Estime de soi sociale
Un élève en difficulté se dévalorise-t-il plus lorsqu’il est dans une classe « spéciale » ou dans une classe «normale» ?
« Effet mare aux grenouilles » Frog pond effect
Je suis grande Petite mare
Je suis petite Grande mare
Pourquoi tenir compte de l’estime de soi des élèves à l’école? Que se passe-t-il quand la gratification narcissique ne fonctionne plus? Le travail scolaire est souvent la source essentielle de gratification narcissique des enfants On demande d’abord à un enfant de bien travailler à l’école, le plus souvent même on ne lui demande que ça.
Des stratégies de protection de soi « Ne plus apprendre pour se protéger, préserver son estime de soi »
Comparaisons défavorables Coût Conséquences sur la scolarité Bénéfice Comparaisons défavorables Pas de mise en place de conduites pour progresser Maintien du niveau scolaire actuel ou accentuation des difficultés privilégier les comparaisons avec ceux moins bien lotis que soi Permet d’éviter les comparaisons désavantageuses
Désengagement Conséquences sur la scolarité Coût Bénéfice Baisse voire disparition de la motivation Diminution des performances donc Accentuation de l’échec ne plus accorder d’importance à l’école ou certaines matières Protège de l’échec scolaire
Il y a des élèves qui vont déployer une énergie considérable à éviter la tâche qui leur est proposée même si elle leur est accessible, afin d’éviter un effort intellectuel qui pourtant serait moins coûteux en efforts que l’activité d’évitement
Toute personne confrontée à l’échec réagit pour se protéger de cet échec
mais pas strictement pathologiques non plus, Les stratégies d’autoprotection sont des moyens de se défendre par des voies non véritablement adaptées mais pas strictement pathologiques non plus, préserver sa personnalité en évitant les effondrements dépressifs ou psychotiques
Les représentations de soi Sentiment de compétences
Albert Bandura » La motivation d’une personne, ses états émotifs et de ses actions reposent davantage sur sa représentation de soi que sur ce qu’elle peut réellement «
Beaucoup d’élèves ont des difficultés…… Beaucoup d’élèves ont des difficultés…….non pas parce qu’ils ne sont pas capables mais parce qu’ils pensent qu’ils ne sont pas capables Parce qu’ils pensent ne pas être capables de dépasser les difficultés de l’apprentissage
Le sentiment d’auto-efficacité se définit comme la confiance qu’a un individu dans ses capacités pour faire face à une tâche Il détermine la façon dont il va faire face à cette tâche et le niveau de réussite qu’il va atteindre
. L’auto-efficacité ne se confond pas avec l’estime de soi, cette dernière étant liée au sentiment de sa propre valeur
Les expériences antérieures sentiment de compétences Réussites antérieures Echecs antérieurs sentiment de compétences Les expériences de réussite renforcent le SAE alors que celles de l’échec le diminuent
Observation d’autrui dont on juge les capacités semblables En milieu scolaire, se voir donner en modèle un élève jugé supérieur à soi est peu aidant pour celui réussissant mal ou avec difficulté sentiment de compétences Voir une telle personne réussir Voir une telle personne échouer Cela peut même générer des émotions négatives comme la honte, l’envie, la frustration et le découragement Sentiment de compétence
sentiment de compétences Commentaires d’une personne à qui on reconnait l’expertise dans la matière sentiment de compétences À la petite enfance, les parents ont le pouvoir de persuasion le plus fort. Dès l’entrée à l’école les enseignants partagent ce pouvoir et deviennent rapidement plus crédibles Positifs Négatifs sentiment de compétences
Etats physiologiques et émotionnels stress faible Les états émotionnels provoqués par une situation d’examen sont perçus différemment selon le SAE de l’élève sentiment de compétences élevé sentiment de compétences faible stress important
Les conséquences comportementales seront différentes : Selon le sentiment de compétence, les échecs ne sont pas attribués aux mêmes causes et le ressenti émotionnel ne sera pas le même Les conséquences comportementales seront différentes : la culpabilité provoque plus facilement une remise au travail que la honte qui déclenche plutôt des comportements de fuite ou d’évitement Si échecs sont attribués à ses capacités, il est probable que l’élève ressentira affects comme la honte, le déshonneur, humiliation Si échecs attribués à manque d’efforts il ressentira plutôt de la culpabilité, regrets, remords
Ces enfants en manque d’affirmation vivent la difficulté et l’échec comme une menace de leur intégrité et ils se sentent complètement dépassés par les événements. A force d’être confrontés à des attentes qui dépassent de loin leur potentiel, ces enfants finissent par baisser les bras
Cette impression constante d’être submergé par les difficultés risque de provoquer un sentiment d’impuissance, de démotivation et du même coup de dévalorisation…
Qu’appelle-t-on « croyances à propos de soi »? Quel est l’impact des « croyances à propos de soi » sur les apprentissages? Les cadres éducatifs ont-ils une influence sur les « croyances à propos de soi »?
Comment varie l’estime de soi des élèves avec la réussite ou l’échec scolaires?
Performances scolaires Estime de soi
Stratégies de protection de soi Estime de soi Survie psychique Stratégies de protection de soi
Etude menée sur des adolescents sept ans après leur entrée en sixième L’apparence physique Les relations avec les pairs La confiance en soi
Les garçons ont une meilleure estime de soi que les filles A l’adolescence, les filles donnent plus d’importance à l’apparence physique et sont plus insatisfaites de leur corps Les garçons ont une meilleure estime de soi que les filles L’effet du genre
Pas d’effet de la situation socio-culturelle de la famille A 18 ans les jeunes s’émancipent des parents et leur estime de soi moins sensible aux jugements des parents Pas d’effet de la situation socio-culturelle de la famille Mais effet de la nature des relations avec les parents
Effet de la situation scolaire sur l’estime de soi Situations scolaires diverses allant de la filière scientifique à la sortie précoce en passant par filière professionnelle Effet de la situation scolaire sur l’estime de soi Pour les garçons le degré d’estime de soi sociale et physique fonctionne en sens inverse du niveau de valorisation de la filière Pour les filles La différence s’observe au niveau de la confiance en soi supérieure chez les apprenties Résultats qui confirment bien l’effet « mare aux grenouilles »
Les filles se sous estiment en maths et se surestiment en Français Le Français est le seul domaine où les filles manifestent une estime de soi supérieure aux garçons
Peu d’effet du redoublement sur l’estime de soi au lycée
Les effets de l’origine culturelle Les jeunes originaires du Maghreb et Afrique noire ont une estime de soi plus élevée dans le domaine du social et apparence physique Les effets de l’origine culturelle Les jeunes dont les parents sont originaires de l’Asie du sud est ont une estime plus faible dans apparence physique et une plus faible confiance en soi
Estime de soi et degré de satisfaction dans son établissement Plus le jeune est satisfait de son établissement et plus son estime de soi est élevé Plus les jeunes estiment leur établissement sélectif plus leur confiance en soi diminue
Degré de confiance en soi et réussite au bac Meilleure réussite au bac chez les jeunes ayant la confiance en soi la plus élevée Deux fois plus marquée chez les filles Réussite au bac plus faible si estime de soi physique élevée Réussite au bac plus faible Quand estime sociale forte 51
A quoi sert un sentiment élevé de compétences ?
d’auto-efficacité élevé Sentiment Se découragent moins facilement Font davantage d’efforts Persévèrent plus face à la difficulté
d’auto-efficacité élevé Sentiment Demandent de l’aide en cas de difficultés Gèrent leur stress et anxiété Ont des stratégies d’auto-régulation
Le biais positif des plus jeunes
Des exceptions à la règle Dès le début de l’élémentaire, certains élèves présentent au contraire un biais négatif Prévalence : Entre 20% et 25% des élèves d’une recherche
L’illusion d’incompétence Biais négatif L’illusion d’incompétence Décalage marqué, négatif, entre les capacités ou le potentiel réel de l’élève et l’évaluation qu’il en fait
Conséquences Ennui devant l'apprentissage des matières scolaires Curiosité et intérêt moindres Passivité en classe et engagement faible Évitement des travaux présentant des défis
Conséquences Anxiété plus élevée devant l'évaluation Persévérance et autonomie moindres Peu de plaisir, de fierté et de satisfaction de soi Attentes de rendement et rendement effectivement plus faibles
a PLUS LONG TERME…. Difficulté d’orientation de carrière Abandon scolaire prématuré Isolement social
Qu’appelle-t-on « croyances à propos de soi »? Quel est l’impact des « croyances à propos de soi » sur les apprentissages? Les cadres éducatifs ont-ils une influence sur les « croyances à propos de soi »?
Remotiver par la mise en réussite Comment créer des cadres d’apprentissage où la confrontation à la difficulté crée de l’émulation plutôt que du découragement? Ainsi, des exigences trop en décalage avec le potentiel des élèves ne constituent plus des défis stimulants qui apprendraient aux enfants à dépasser des obstacles.
Quels leviers d’action?
Notation et naturalisation de l’échec « avoir un zéro » « être nul »
Remettre les compteurs à zéro Echec scolaire Remettre les compteurs à zéro Difficultés ordinaires
Je suis encore dans le connu en confiance Evaluation sommative Evaluation formative Je suis encore dans le connu en confiance Je suis confronté à la difficulté, l’inconnu, le non sens J’ai résolu le problème, rapproché un domaine inconnu de moi
Evaluation Reconnaître les progrès individuels même si ils sont en dessous de la moyenne Prendre en compte les progrès réalisés dans la note Offrir des activités différentes Evaluer lorsque l’élève se sent prêt Décourager la compétition Dénaturaliser l’échec
Envisager des regroupements dynamiques qui évoluent sur une année? HUMOUR
CLIMAT MOTIVATIONNEL DE LA CLASSE Sarrazin, Tessier, Trouillaud (2006) Climat motivationnel instauré par l’enseignant et implication des élèves en classe : l’état des recherches, Revue française de pédagoge, n°157, Octobre-novemb-décembre 2006, 147-177 Reeve, Deci et Ryan, 2004; Sarrazin et al. 2006
Typologie des climats Climat d’autonomie Climat permissif Climat contrôlant Climat chaotique
Typologie des climats Climat d’autonomie encourage travail de groupe encourage plus que ne critique Un prof à l’écoute laisse du temps accepte les émotions négatives
Typologie des climats Climat permissif Grande liberté action
Typologie des climats Climat d’autonomie Climat permissif Liberté dans un cadre où les Limites sont négociées Entre élèves et enseignants Typologie des climats Climat d’autonomie Climat permissif Liberté sans structuration qui donne du Sens et direction aux apprentissages
Typologie des climats Climat contrôlant Mettre la pression installe compétition Enseignement directif
Contraignant mais sans structure Typologie des climats Climat chaotique Contraignant mais sans structure
Qu’est-ce qu’un environnement soutenant l’autonomie? Réduire la pression exercée sur le sujet, l’encourager à initier les actions pour lui-même en les fondants sur ses propres motifs et valeurs Les résultats montrent que « la qualité motivationnelle » d’un élève dépend en grande partie de la relation élève-professeur et du climat motivationnel instauré dans la classe par l’enseignant
Un élève en situation d’échec est un élève privé du plaisir narcissique de la brillance groupale