La présentation est en train de télécharger. S'il vous plaît, attendez

La présentation est en train de télécharger. S'il vous plaît, attendez

Pédagogie: des lieux communs … … aux concepts clefs

Présentations similaires


Présentation au sujet: "Pédagogie: des lieux communs … … aux concepts clefs"— Transcription de la présentation:

1 Pédagogie: des lieux communs … … aux concepts clefs
Philippe Meirieu ESF – Paris Mode d'emploi Site de Ph. Meirieu accueil

2 Notes de lecture Hervé Kéradec dans Education et Management
Pascal Bouchard sur le site ToutEduc Pierre Frackowiak sur Educavox.fr François Jarraud pour "Le Café pédagogique" Un clic pour activer chaque lien … Notes de lecture

3 écran précédent visionné
x/y Clic sur la flèche pour quitter Mode d'emploi … Il s'agit de "traces" partielles et partiales … qui se veulent invitation à (re)lire l'Original ! Une transcription exacte du texte original n'est pas toujours respectée… La navigation générale s'effectue via les "puces" au bas de l'écran ou par "enter" pour passer linéairement à la page suivante. La couleur jaune permet de repérer l'endroit où l'on se trouve. Accès à une "table des matières" générale via TM Dans les tables des matières on peut accéder directement aux sous-chapitres en cliquant dans le texte. Lorsqu'il y a une photo, le nom est visible en passant avec la souris et on accède à un lien internet en cliquant sur elle (ou sur l'ellipse ). Lorsque plusieurs écrans concernent un même sous-chapitre, une numérotation s'affiche en haut sur votre droite. Merci de signaler erreurs et bugs repérés, améliorations souhaitées à Vers écran précédent visionné

4 La pédagogie est un sport de combat
Introduction La pédagogie est un sport de combat 1/2 Malgré quelques accalmies médiatiques où leurs adversaires semblent quelque peu s'essouffler, les pédagogues ont toujours le sentiment d'être "au front". Et ils le sont en effet, en permanence. Ils le sont avant tout, parce qu'ils doivent rappeler sans cesse – et d'abord à eux-mêmes – que nul n'est jamais assigné à l'échec ni condamné à l'exclusion, que chacun peut apprendre et grandir, que la transmission de la culture ne peut avoir pour objectif de sélectionner les élites, mais doit permettre à tous d'accéder au plaisir de penser et au pouvoir d'agir. Ils sont ainsi porteurs d'une "insurrection fondatrice" qui les place toujours, plus ou moins, en position de combat et les fait apparaître comme des "empêcheurs d'enseigner en rond !". Mais les pédagogues sont aussi "au front" parce qu'ils prônent aussi – et c'est ce qui agace chez eux – le "respect" de l'élève. S'ils postulent son éducabilité, ils rappellent sans cesse que l'éducation n'est pas une fabrication et que nul ne peut apprendre et grandir à la place de quiconque. Certes, ontologiquement le savoir précède l'apprendre, mais pédagogiquement, le sujet précède le savoir. Ce qui fait apparaître les pédagogues comme des "empêcheurs de simplifier en rond !" Aussi faut-il … refuser la dévotion face à des programmes dont il suffirait de décréter l'importance pour garantir l'acquisition, renoncer à la croyance au pouvoir irrésistible de l'injonction à apprendre, abandonner aussi bien la nostalgie d'un passé idéalisé que l'utopie d'une société idéale où les technologies numériques permettraient à tous les enfants d'être miraculeusement de plain-pied avec les savoirs … C'est pourquoi les pédagogues peuvent s'enorgueillir d'apparaître parfois … comme des "empêcheurs de bêtifier en rond !" Intro p. 5-10

5 2/2 Mais pour être crédibles dans leur entreprise, les pédagogues doivent évidemment donner l'exemple de la rigueur qu'ils prétendent incarner. Car dans les "sports de combat", il n'y a pas de victoire possible sur l'adversaire sans une victoire d'abord sur soi-même ! Dans les "sports de combat", la générosité ne suffit pas et, surtout, elle n'exonère en rien le combattant d'un travail précis et exigeant de préparation. Ainsi le pédagogue, trop souvent emporté par ses convictions, néglige parfois le ciselage du concept au profit du pathétique du discours … Mais il est vrai que celui qui se coltine tous les jours des enfants excités, abîmés ou tout simplement indifférents à ce que l'on est chargé de leur transmettre, ne peut se passer de quelques "lieux communs" pédagogiques pour faire face à l'océan d'indifférence technocratique de son institution... C'est ainsi que ce qu'on nomme habituellement "la pédagogie" peut apparaître comme un fatras idéologique où des mots-valises issus du mouvement de l'Education nouvelle, structurée au début du XXe siècle, permettent toutes les interprétations et ouvrent la porte à toutes les suspicions: "L'élève au centre", n'est-ce pas l'enfant-roi ? "L'enfant actif", n'est-ce pas la totémisation du bricolage au détriment des savoirs élaborés ? L'appel à la "motivations", n'est-ce pas le caprice institutionnalisé ? "L'individualisation", n'est-ce pas l'individualisme ? Et la "personnalisation", l'enfermement dans le donné ? Quant à la "pédagogie du projet", ne confond-elle pas l'école, qui est faite pour apprendre, avec l'atelier ou l'usine qui sont faits pour produire ? C'est pourquoi, sans nier, par ailleurs, une certaine rhétorique pédagogique, le pédagogue doit s'astreindre régulièrement à mettre ces lieux communs à l'épreuve du concept… ce que proposent les chapitres qui suivent ! Intro p. 5-10

6 "On ne sait bien que ce que l'on fait soi-même"
1. Les méthodes actives : du bricolage à l'opération mentale "On ne sait bien que ce que l'on fait soi-même" "On apprend bien qu'en étant actif !" - Nul n'a jamais prétendu le contraire … - et pourtant il y a mille manières d'être actif et le mot ne dit rien de la nature de l'activité requise, ni de celle des situations pédagogiques capables de susciter cette activité ! 1.1. "La méthode active" : travailler en classe 1.2. "L'école active" : une société en miniature 1.3. "La pédagogie active" : être actif pour apprendre 1.4. "Faire agir pour faire apprendre" … oui … mais comment ? p Méthodes actives

7 1.1. "La méthode active" : travailler en classe
1ère chaire "Science de l'éducation" Jules Ferry fait appel à Henri Marion (1883) "Il n'y a qu'une méthode digne de ce nom : c'est la méthode active." (1888) L'inviter à s'engager lui-même Rôle du maître: - Mettre l'esprit de l'élève "en mouvement" - Donner "l'impulsion et l'éveil" nécessaire à son développement Lui proposer de travailler concrètement Alterner: - temps d'exploration, de découvertes ("euristiques") - temps de formalisation (résumés, tableaux, leçons ex cath.) "On ne sait bien que ce que l'on fait soi-même" !!! Simplification !!! entendre – comprendre - appliquer p 1

8 1.2. "L'école active" : une société en miniature
Kerschensteiner "Ecoles du travail" 1.2. "L'école active" : une société en miniature Adolphe Ferrière opposait "l'école assise" à "l'école active" = pas seulement améliorer le fonctionnement pour apprendre mieux = refonder complètement le système pour apprendre AUTREMENT Abbotsholme Bedales Edouard Claparède -> "Maison des Petits" (Genève – 1913) "Pédagogie active et personnalisée" "Cité idéale" – "Cité apprenante" – "Société en miniature" … Classes -> ateliers Devoirs -> tâches nécessaires au bien commun Obligation d'apprendre -> désir de savoir permanent et contagieux E. Demolins S. Faure P. Robin !!! Danger !!! "l'école active" peut devenir "l'école de l'activité productrice" p 2

9 1.3. "La pédagogie active" : être actif pour apprendre
"L'école active" veut activer la logique productive pour mobiliser les sujets. Mais réussir et comprendre ne relèvent pas de la même logique… On mobilise un groupe d'élèves sur un projet d'avenir Mais on ne s'intéresse à chacun d'eux que sous l'angle de leur passé (en considérant ce qu'ils savent déjà faire) Et non sous l'angle de leur avenir (en considérant ce qu'ils devraient apprendre à faire) Comment rendre l'élève actif - pour qu'il se mobilise sur des activités - pour qu'il effectue à cette occasion des apprentissages réussis Anton Makarenko ("Colonie Gorki" – 1920) introduit la rotation des rôles et des tâches Célestin Freinet ("Colonie Gorki" – 1920) propose - des activités collectives (journal – enquêtes) - des brevets individuels (obligatoires et accessoires) p 3

10 1.4. "Faire agir pour faire apprendre" … oui … mais comment ?
Faire échapper l'apprentissage à l'aléatoire "Etre actif" c'est exercer une "activité mentale" Distinguer entre tâche et objectif Construire des "situations d'apprentissage" qui permettent découverte et appropriation des connaissances Produit -> qualité ? -> performances ? -> anciennes compétences Apprentissages -> acquisitions ? -> progression ? -> nouvelles compétences La véritable activité n'est pas l'activité extérieure, l'activité d'effectuation, c'est l'activité de l'esprit à la poursuite de connaissances (Claparède – 1930) p 4

11 2. La motivation : de l'attentisme à l'exigence
"Cet élève ne réussit pas car il n'est pas motivé." Et si, au contraire, il n'était pas motivé parce que nous ne sommes pas parvenus à le faire réussir ? 2.1. Sortir du cercle vicieux: échec/démotivation 2.2. Attendre l'émergence du désir d'apprendre: une impasse ! 2.3. Détourner un désir existant: le risque de la démagogie 2.4. Susciter le désir d'apprendre: une pédagogie de la culture 2.5. "Susciter le désir d'apprendre" … oui … mais comment ? Motivation p

12 2.1. Sortir du cercle vicieux: échec/démotivation
Organiser le travail plutôt que la discipline Philippe Jeammet, pédopsychiatre, montre le caractère paradoxal de ce qui se passe quand un adolescent accumule les défaites: Il finit par organiser son propre échec … parce que c'est la seule chose qu'il sait vraiment réussir ! Pour briser le cercle vicieux échec/démotivation, il faut arriver à ce "point de bascule" qui permet à un sujet de passer - de la phase d'étayage où l'aide lui est absolument indispensable - à celle de désétayage où l'aide est progressivement supprimée pour que le sujet puisse exercer seul, à sa propre initiative et dans de nouveaux contextes, les opérations mentales vers lesquelles on l'aura conduit. Alterner tps de la découverte - tps de formalisation Mais… il y un "reste" qui résiste… la question du désir… Jerome Bruner est quant à lui convaincu que le rôle de l'adulte est d'être un "médiateur de la culture" dont l'intervention bienveillante et exigeante est absolument nécessaire pour permettre le développement de l'enfant. p 1

13 2.2. Attendre l'émergence du désir d'apprendre: une impasse !
1/2 2.2. Attendre l'émergence du désir d'apprendre: une impasse ! Alexander Neill, à Summerhill, propose une démarche dans laquelle l'éducateur résout le désir d'apprendre de la manière la plus simple du monde: en attendant tranquillement, sans intervenir, qu'il se manifeste spontanément… La "bonté naturelle de l'homme" de J-J Rousseau Ne vaut qu'à "l'état de nature" "Nous décidâmes, ma femme et moi, d'ouvrir une école où nous accorderions aux élèves la liberté d'expression, Pour cela il nous fallait renoncer à toute discipline, toute direction, toute suggestion, toute morale préconçue, toute instruction religieuse quelle qu'elle soit. [Nous avions] une croyance absolue dans le fait que l'enfant n'est pas mauvais mais bon." Cette "bonté naturelle de l'homme" Est inséparable du principe de "perfectibilité" des humains par l'éducation Bruno Bettelheim affirme que "Summerhill est une bonne école " mais reconnaît pourtant que ce n'est pas grâce à la qualité de sa pédagogie. "Neil est un type formidable et on ferait n'importe quoi pour obtenir son estime et son affection". Ainsi, Neill ne pratique l'abstention éducative que pour récupérer en séduction ce qu'il a abandonné en contraintes… p 2

14 pour réussir sans comprendre…
2/2 Hélène Trocmé-Fabre a écrit "Né pour apprendre". Elle y affirme, en s'appuyant sur les "sciences cognitives" que l'enfant serait, en quelque sorte, promis à un développement intellectuel naturel qui lui permettrait d'intégrer l'ensemble des connaissances requises à son éducation, selon une dynamique que nous n'aurions qu'à accompagner de manière bienveillante. L'apprendre apparaît tjs comme une perte de temps … surtout quand quelqu'un peut effectuer la tâche à notre place ! T1 T2 Mais ne confond-on pas ainsi "désir d'apprendre" et "désir de savoir" ? Que l'enfant veuille "savoir" ne fait aucun doute: il veut savoir quelles sont ses origines et comment obtenir satisfaction des adultes qui l'entourent. Il veut savoir comment avoir une bonne note à un exercice ou réussir un examen. Il veut savoir comment se rendre à un rendez-vous avec des amis et utiliser un appareil électronique… mais tout cela, il préfèrerait ne pas avoir à l'apprendre ! Et là est justement tout l'enjeu de la pédagogie scolaire et ce en quoi elle fait rupture avec le "désir naturel de l'enfant": Il s'agit en classe de passer du "désir de savoir" , désir d'efficacité à court terme guider par le souci d'avoir satisfaction au moindre coût, au "désir d'apprendre", qui prend le temps d'explorer l'inconnu, se frotte avec l'étrangeté inévitable des savoirs nouveaux, accepte l'effort sans perspective immédiate de rémunération… afin d'accéder au plaisir, jamais totalement assuré quand on se lance dans l'entreprise, que procure l'intelligibilité des êtres et des choses. Tout le progrès technique consiste à nous permettre de faire l'économie de l'apprentissage… pour réussir sans comprendre… p 2

15 2.3. Détourner un désir existant: le risque de la démagogie
La plupart des éducateurs se sont essayés à cet exercice qui relève d'une forme d'"évidence pédagogique": détourner un désir qui porte sur des objets sans intérêt scolaire ou intellectuel particulier vers des objets qui méritent, à leurs yeux, d'être désirés. C'est ainsi qu'on manipule habilement "l'intérêt de l'enfant" en passant de "ce qui l'intéresse" à "ce qui est dans son intérêt". "Comment faire aimer les mathématiques à une jeune fille qui aime l'ail ?" Charles Fourier John Dewey souligne qu'il y a une sorte de fuite en avant démagogique à vouloir ainsi artificiellement "rendre les choses intéressantes". Tout le problème, explique-t-il, c'est que nous concevons l'intérêt de l'enfant, d'un côté, et les savoirs à lui enseigner, de l'autre côté, en termes d'extériorité réciproques. Fourier est l'inventeur des PHALANSTERES Un PHALANSTERE est un ensemble de bâtiments à usage communautaire qui se forme par la libre association et par l'accord affectueux de leurs membres. Pour Charles Fourier, les phalanstères formeront le socle d'un nouvel État. Dans sa théorie, « la terre de la Société harmonique sera divisée en trois millions de phalanstères, chacun regroupant 1 500 personnes des trois sexes », (les mineurs, pour Fourier, appartiennent à un troisième sexe, un sexe neutre ou impubère). Le phalanstère est une sorte d'exploitation agricole avec des bâtisses pour le logement et l'amusement, pouvant accueillir 400 familles au milieu d'un domaine de 400 hectares où l'on cultive les fruits et les fleurs avant tout. Fourier décrira à loisir les couloirs chauffés, les grands réfectoires et les chambres agréables. aller vers … Intérêts de l'enfant Savoirs à enseigner rendre intéressants … -> penser la continuité entre le moi et le monde ("continuum expérimental" -> articuler le désir d'apprendre aux expériences de l'enfant p 3

16 2.4. Susciter le désir d'apprendre: une pédagogie de la culture
Attention ! Il ne s'agit pas de la culture-programme, recueil des vestiges périmés dont la connaissance allusive permet de se distinguer dans le champ social ! Il s'agit de la culture comme ensemble de ressources, de modèles et d'œuvres élaborées par des humains pour apprivoiser et penser le monde. Il s'agit des savoirs construits par les hommes et les femmes pour se dégager du chaos matériel et psychique qui caractérise leur venue au monde collective et individuelle. Il s'agit des connaissances fonctionnelles et symboliques qui leur ont permis de s'émanciper de toutes les formes de fatalisme et d'obscurantisme. Il s'agit de l'immense réservoir de ressources dans lequel nous pouvons puiser, tout autant pour résoudre nos problèmes techniques quotidiens que pour donner forme aux inquiétudes et aux espérances qui nous habitent, aux contradictions qui nous taraudent. Il s'agit de ce qui nous relie à notre passé, nous permet d'affronter notre présent et nous donne la matière et la force pour inventer notre avenir. "Pour une pédagogie de l'étonnement" Louis Legrand D & N "Les Sept Savoirs nécessaires à l'éducation du futur" Edgar Morin Seuil- 2000 Entendue ainsi, la culture est la matière même, l'unique matière de l'enseignement scolaire. Ce dernier n'a d'autre objectif, en effet, que de rendre disponible aux petits d'hommes ce qui les aidera à devenir des petits hommes ! p 4

17 exigence, précision, justesse, vérité
2.5. "Susciter le désir d'apprendre" … oui … mais comment ? Au début, il y a toujours une question Une véritable exigence intellectuelle Promesses ? Crédibilité de l'adulte engagée "Enseigner empêche de comprendre ! Jacotot Installer le questionnement "Travaille et tu réussiras !" "Si tu n'écoutes pas, tu ne passeras pas en 6ème, tu n'auras pas le bac, Tu vas gâcher ta vie Et tu finiras chômeur !" Construire une vraie situation de recherche Utiliser sa maîtrise de la discipline pour bien identifier les travaux que les élèves doivent faire pour en acquérir eux-mêmes les concepts, les règles et les modèles. Accompagner les élèves: exigence, précision, justesse, vérité Recentrer les efforts sur les satisfactions intellectuelles de l'apprendre, plutôt que sur l'hypothétique insertion sociale procurée par une scolarité réussie ! 5 p

18 à la pédagogie différenciée
3. L'individualisation : de "l'école sur mesure" à la pédagogie différenciée C'est le triomphe du "moi" et de ses "problèmes", répercutés à l'infini sur l'écran de notre narcissisme. Rien d'étonnant, alors, qu'au rayon des libraires, les ouvrages de pédagogie aient été détrônés par les livres sur le "développement personnel" et qu'en éducation comme en formation "l'individualisation" soit désormais considérée comme le "principe incontournable" de toutes nos institutions … 3.1. "L'école sur mesure" ou "se mesurer à l'école" ? 3.2. L'individualisation en question(s) 3.3. De la gestion technocratique des différences à la péd. diff. 3.4. Différencier la pédagogie … oui … mais comment ? Individua-lisation p

19 3.1. "L'école sur mesure" ou "se mesurer à l'école" ?
"Lorsqu'un tailleur fait un vêtement, il l'ajuste à la taille de son client…" Claparède L'individualisation apparaît […] chez toutes les grandes figures de L'Education nouvelle comme un refus de la maltraitance dont seraient victimes les écoliers, tous assignés au même traitement alors qu'ils sont, bien évidemment, tous différents les uns des autres, même dans la classe la plus "homogène". Plutôt qu'une "école sur mesure", proposer aux enfants de "se mesurer à l'école". Le projet d'une "école sur mesure" est, évidemment, incompatible avec la position traditionnelle des "républicains égalitaristes" – de Robespierre à Jules Ferry – et des "philosophes rationalistes" comme Kant ou, plus récemment, Jacques Muglioni. Pas question de renoncer à une transmission rigoureuse des savoirs devant des élèves qu'on doit supposer capables d'y accéder. Pourtant, cette conception relève plutôt de la pensée magique. Elle ignore que l'enseignement est toujours, de fait, déjà individualisé… Et la proclamation égalitaire postule la possibilité d'une transsubstantiation radicale d'un individu au contact d'une institution… il y a là un déni de l'histoire de la personne… "Prendre l'élève comme il est"… justement pour "ne pas le laisser où il est" … Jacques Muglioni Mais les partisans de "l'école sur mesure" ne peuvent pas, ne doivent pas ignorer l'interpellation de ceux qui rappellent qu'il faut aussi que l'élève "se mesure à l'école" pour pouvoir grandir. p 1

20 3.2. L'individualisation en question(s)
1/2 3.2. L'individualisation en question(s) Helen Parkhurst pense qu'il faut diminuer la part des "cours" au profit du "travail personnel" qu'elle juge plus efficace et plus respectueux des élèves qui peuvent se responsabiliser et mener à bien des travaux à leur rythme . Elle met au point le "plan Dalton" pour "réconcilier l'enseignement et l'apprentissage", l'école traditionnelle sacrifiant systématiquement le 2ème au profit du 1er. Carleton Washburne propose le "plan Winnetka" pour individualiser l'enseignement. William Killpatrick voit un vrai danger dans ces propositions: la taylorisation de l'enseignement et la parcellisation des tâches. Sa "méthode des projets" vise la construction de "collectifs apprenants". Célestin Freinet structure sa classe sur des projets collectifs (correspondance, journaux…) tout en introduisant des temps de travail individualisés (boîtes enseignantes, fichiers autocorrectifs, brevets…) p 2

21 Sur quoi faire porter l'individualisation :
2/2 Sur quoi faire porter l'individualisation : les objectifs ou les parcours ? On ne peut individualiser des objectifs que dans la mesure où ces derniers constituent des étapes intermédiaires pour atteindre un résultat final identique pour tous. Comment individualiser les parcours : en modulant le rythme ou en adaptant les méthodes ? Le rythme, le temps n'est pas le seul facteur déterminant en matière d'apprentissage ! Les "styles cognitifs", les "profils pédagogiques", les "stratégies d'apprentissage" Sont à prendre en compte ! L'individualisation des méthodes implique-t-elle de n'utiliser que des méthodes individuelles ? Pierre Faure instaure "l'enseignement personnalisé et communautaire": Chaque élève possède un plan de travail mais en utilisant une multitude de ressources et de dispositifs qui incluent le travail de groupe et les exposés collectifs. Faut-il individualiser les méthodes de manière définitive pour chaque sujet ou au contraire lui permettre d'en découvrir sans cesse de nouvelles ? Doit-on construire l'entreprise pédagogique à partir d'une connaissance préalable d'un sujet considéré comme un "donné"… ou bien permettre au sujet tel qu'il est, avec son histoire et ses caractéristiques singulières, de se dépasser et de s'émanciper ? Cf. chap. suivant p 2

22 1/2 3.3. De la gestion technocratique des différences à la pédagogie différenciée Les classifications ne sont que des outils pour éviter l'éparpillement du travail Même s'ils ont bien souvent hésité à souligner leurs diversités, de peur de faire le jeu de leurs adversaires communs, les promoteurs de l'individualisation se sont très vite distingués par la façon dont ils articulaient psychologie et pédagogie. Certes, tous croient indispensable de connaître l'enfant de manière générale aussi bien que singulière por pouvoir lui proposer des situations d'apprentissage adaptées. Mais … Pour les uns, il s'agit de poser un "diagnostique" en recherchant la "nature" de l'individu … afin d'intervenir de manière strictement adaptée à ses besoins Pour les autres, il s'agit de prendre des informations permettant d'engager l'action … mais sans préempter pour la suite du travail ni, a fortiori, obérer l'avenir du sujet Maurice Debesse Henri Bouchet -> connaissance a priori du sujet -> caractéristiques définitives -> destin de l'individu scellé -> prélever des indices partiels -> approximation inévitable de l'intervention -> possibilité de nouvelles dynamiques p 3

23 dans un collectif structurant
2/2 Ce qui fait problème c'est l'institutionnalisation d'une vision naturaliste et figée de l'individualisation, principe qui se voit ériger en système Il faut préférer à la gestion technologique des différences, une pédagogie différenciée articulant activités de groupe et travail individualisé dans un collectif structurant Mode de fonctionnement: - détecter les dysfonctionnements - dériver ceux qui dysfonctionnent pour des traitements standardisés Garantir un cadre et formuler un projet fédérateur: les sujets savent où ils sont et ce qu'on attend d'eux, collectivement et individuellement Effets: - dévitalisation des collectifs sociaux - exclusion des "écarts à la norme" vers des "dispositifs spécialisés" En fonction de qu'on sait des personnes et des ressources pédagogiques à disposition: proposer des activités mobilisatrices Enjeux: - fragmentation du tissu social - montée des individualismes - disparition de toute institution collective - juxtaposition de services individualisés Au fur et à mesure des réussites / décrochages: ajuster les propositions non pour "réparer" un passé, mais pour se projeter vers l'avenir… pour permettre aux élèves de changer car l'existence même d'un changement peut déverrouiller la fatalité. p 3

24 3.4. Différencier la pédagogie … oui … mais comment ?
Conjuguer le collectif et chaque personne Associer diff. successive et diff. simultanée Transférer le pilotage au sujet lui-même "L'école inclusive" Danièle Zay Une méthode unique est tjs sélective La différenciation doit aussi développer l'autonomie du sujet Le maître DOIT différencier ses approches (exposés collectifs, travaux indiv. etc.) Groupes d'élèves suffisamment proches pour pouvoir communiquer entre eux et s'engager dans des apprentissages communs ET suffisamment différents pour pouvoir s'enrichir les uns les autres Favoriser l'auto-évaluation MAIS TOUJOURS une part d'aléatoire … Stimuler la métacognition -> je comprends ce que je fais -> je comprends comment je fais -> je sais comment faire mieux Le maître doit être capable de diversifier les situations pour réguler les apprentissages Former à l'auto-régulation p 4

25 de l'expression spontanée à l'élaboration de contraintes
4. Le respect de l'enfant : de l'expression spontanée à l'élaboration de contraintes Les adversaires de la "pédagogie nouvelle" raillent volontiers les pédagogues pour leur naïveté: ils les accusent de s'émerveiller béatement du "génie enfantin" … En réalité, et même si les pédagogues sont infiniment plus nuancés, ce lieu commun de la 2créativité enfantine" constitue bien une des pierres de touche de la "vulgate pédagogique progressiste". 4.1. Enfant créateur OU culte des préalables ? 4.2. Pédagogie "de la spontanéité" OU "des préalables" ? Tout faire en ne faisant rien ! 4.3. "Droit à l'expression" ET "droit à l'éducation" 4.4. Rendre possible la pensée … oui … mais comment ? p Respect de l'enfant

26 1/2 4.1. Entre le postulat de "l'enfant créateur" et le culte des préalables Comme presque toujours dans les débats pédagogiques, on assiste ici à une étonnante bataille d'évidences… Enthousiasme de ceux qui promeuvent le "respect de l'enfant" Le rappel à l'ordre de ceux qui dénoncent "l'abstention pédagogique" Exaltation de l'expression libre de toute entrave dégagée des pressions à la norme Affirmation qu'aucune expression n'est possible sans outils linguistiques, sans codes culturels Priorité à l'expression spontanée Acquisition préalable de techniques D'un côté comme de l'autre, on prétend qu'il faut revenir aux "fondamentaux" qui renvoient … … à l'authenticité du sujet qui exprime ce qu'il vit, ressent et cherche à transmettre … à la maîtrise d'outils sans lesquels rien ne peut être ni construit ni communiqué p 1

27 Préserver ce qui est neuf et révolutionnaire dans chaque enfant
2/2 "Pédagogie de l'expression spontanée" contre "pédagogie des préalables", le débat n'en finit pas ! Soumis à l'injonction de se détourner d'eux-mêmes pour se consacrer à l'acquisition de techniques standardisées dont ils ne perçoivent pas le sens, les enfants renoncent vite à toute velléité d'expression personnelle. Le "génie enfantin" n'explose que dans quelques fugitives fulgurances et est vite enfoui sous les clichés qu'impose très tôt la fréquentation des institutions sociales et des industries de programmes. Préserver ce qui est neuf et révolutionnaire dans chaque enfant Hannah Arendt L'impératif de la maîtrise préalable de techniques élaborées décourage toute parole authentique qui risque l'humiliation. La spontanéité créatrice n'est pas équitablement répartie dans le champ social (cf. Bourdieu). La "scolastique" dénoncée par Freinet est à l'œuvre: l'enfant est amené à produire un travail qui n'a aucun lien perceptible avec son existence et ses préoccupations. L'absence de toute contrainte ne favorise nullement l'expression personnelle: au contraire, sans maîtrise d'outils linguistiques et de techniques élaborées, un élève est condamné à bredouiller quelques expressions et à improviser quelques gestes approximatifs, sans pouvoir accéder à une forme symbolique stabilisée … Ne pas abandonner nos enfants à eux-mêmes dans une pédagogie de la spontanéité Hannah Arendt Alors que l'école prétendait enseigner une expression exigeante, elle promeut … une exigence sans expression… et une expression sans exigence ! Il n'est pas possible de commencer par brider la liberté en prétendant la former ! Une exigence de "forme" permet d'accéder à une parole forte, dégagée de scories conjoncturelles … p 1

28 "Aide-moi à faire tout seul !"
1/2 4.2. Au-delà de l'opposition entre pédagogie de la spontanéité et pédagogie des préalables : "Tout faire en ne faisant rien !" Pas question de laisser l'élève à ses truismes". Il faut l'en sortir pour faire naître un jugement rénovateur…" Germaine Tortel Très sensible à la dimension créatrice de l'enfant, mais également très soucieuse de faire de l'école maternelle une véritable école, avec des apprentissages bien identifiés, Germaine Tortel mit au point une méthode dans laquelle elle donna une place de choix la création artistique en général et aux arts plastiques en particulier. S'il est une pédagogue qui n'a cessé de proclamer, tout à la fois, sa confiance en l'enfant ainsi que l'impérieuse nécessité de sa "libération" et de "l'expansion de sa personnalité", c'est bien Maria Montessori, réalisant ainsi sa célèbre injonction: "Aide-moi à faire tout seul !" L'adulte "doit savoir clairement que son devoir est de guider, même si l'exercice individuel est toujours l'œuvre de l'enfant lui-même. " Maria Montessori Critiquant le caractère artificiel de la "méthode Montessori", Célestin Freinet préfère sa "méthode naturelle" où l'enfant est placé dans des situations et face à des objets beaucoup moins précontraints. Il plaide néanmoins avec fermeté pour le "matérialisme pédagogique", il exige que "les intentions passent dans les actes". Et Jean-Jacques Rousseau écrira dans l'Emile: "Jeune instituteur, je vous prêche un art difficile, c'est de gouverner sans préceptes et de tout faire en ne faisant rien." p 2

29 Articuler dans le même temps (et non successivement)
2/2 Articuler dans le même temps (et non successivement) ... l'exogène … et l'endogène La dissymétrie entre l'éducateur et l'éduqué est irréductible On apprend bien que ce que l'on a appris soi-même L'exigence de la transmission L'exigence de l'appropriation C'est l'adulte qui éduque et enseigne C'est l'enfant qui grandit et apprend L'enfant ne peut décider de ce qu'il doit apprendre, sinon c'est qu'il serait déjà éduqué … … mais l'enfant doit l'apprendre par lui-même, pour que cet apprentissage fasse de lui un sujet "Tout faire … … en ne faisant rien !" La pédagogie peut être considérée comme une entreprise difficile mais essentielle, "d'équilibration majorante" comme aurait dit Piaget, par laquelle l'adulte invente des situations pour tenir ensemble les deux bouts de la chaîne. p 2

30 4.3. Articuler "droit à l'expression" ET "devoir d'éducation"
1/2 4.3. Articuler "droit à l'expression" ET "devoir d'éducation" dans un même acte Quand Janusz Korczak décide d'ouvrir "La Maison des orphelins" à Varsovie, il ne se doute pas des déconvenues qu'il va subir. Il va apprendre que les enfants ne sont jamais ce qu'on voudrait qu'ils soient, qu'il vaut mieux ne pas trop les idéaliser si on veut les faire progresser, que les bons sentiments n'apportent guère de solutions, que la punition engendre, le plus souvent, dissimulation ou fuite en avant dans la provocation, que se résigner à l'injustice pour éviter un désordre est une tentation permanente, que l'exclusion signe l'échec de l'éducateur et de l'éducation… et que, pourtant, face aux pires difficultés, on n'a pas le droit de se résigner ! Jusqu'au jour où il installe un "tableau d'affichage" qui lui permet de formuler à l'avance toutes les consignes par écrit; puis il devient un véritable outil pour tous, adultes et enfants, où sont affichés des communiqués, demandes, avertissements… Puis il met en place la boîte aux lettres "Ecris-le moi et nous verrons", dispositif précieux puisque les enfants apprennent grâce à lui: 1. A attendre une réponse au lieu de l'exiger sur-le-champ et à n'importe quel moment 2. A faire la part des choses: distinguer parmi leurs vœux, leurs peines, leurs doutes, ce qui est important de ce qui ne l'est pas 3. A réfléchir, à motiver une action, une décision 4. A avoir de la volonté: il faut vouloir pour savoir p 3 Jusqu'au jour où il installe un 2tableau d'affichage" qui lui permet de formuler à l'avance toutes les consignes par écrit; puis il devient un véritable outil pour tous, adultes et enfants, où sont affichés des communiqués, demandes, avertissements…

31 2/2 Nous retrouvons là une dimension anthropologique fondamentale de l'écriture: - soulager la mémoire - laisser une trace pérenne - avoir un "objet de travail" modifiable et amendable pour en améliorer forme et contenu Korczak inventera encore d'autres dispositifs qu'il nomme "les belles contraintes" (bagarres avec des points, tribunal des enfants, vitrine des objets trouvés, journal de l'établissement, etc.) mais tous renvoient toujours à la même finalité: desserrer l'étau entre la pulsion et le passage à l'acte pour permettre, dans cet espace intermédiaire, de "surseoir", de réfléchir… Contre l'immédiateté du "tout – tout de suite", Korczak n'a de cesse de rendre possible la réflexion pour permettre à un sujet d'apprendre et de grandir. Il ne cherche ni à censurer, ni à abolir l'expression immédiate, comme tentent de le faire les éducateurs "autoritaristes" qu'il condamne, pas plus qu'il ne la totémise , comme sont tentés de le faire les adultes adeptes du spontanéisme. Ainsi, Korczak œuvre pour permettre à chaque enfant et à chaque adolescent d'accéder à la liberté de penser. p 3 Jusqu'au jour où il installe un 2tableau d'affichage" qui lui permet de formuler à l'avance toutes les consignes par écrit; puis il devient un véritable outil pour tous, adultes et enfants, où sont affichés des communiqués, demandes, avertissements…

32 4.4. Rendre possible la pensée … oui … mais comment ?
L'éducation, qu'elle soit familiale, scolaire ou sociale, requiert le sursis au passage à l'acte et la mise à distance de la pulsion L'activité éducative doit être suffisamment ritualisée pour permettre à l'enfant et à l'adolescent de se développer C'est ainsi – et ainsi seulement – émerger le travail de la pensée, se développer une pensée réfléchie Les cadres doivent être à la fois structurants et signifiants Introduire des régularités dans le flux de la vie psychique par des rituels qui étayent les comportements personnels en les inscrivant dans un cadre qui crée la configuration physique et la disposition psychique nécessaires à leur réussite. Mettre en place des dispositifs tels que "le Conseil" : "J'écoute qui parle, je demande la parole, je ne me moque pas" Mais "l'exercice" reste la matrice de l'école, incarnant le travail lent, patient et continu de l'amélioration. Sans oublier le "brouillon" qui n'est pas un déchet mais occasion de peaufiner, et la notation qui permet un travail réflexif sur la durée pour progresser… résister au zapping ! Trop de classes et d'établissements semblent indifférents à la structuration symbolique de l'espace et du temps… - > conditions matérielles: architecture, décoration, etc. -> réflexion approfondie et continue sur les programmes -> rituels de "passage", de "mise en position mentale", … p 4

33 5. L'éducation à la liberté : de l'abstention éducative
à l'imputation Parce qu'ils se veulent des "insurgés" contre toute maltraitance faites à l'enfance, les pédagogues se retrouvent facilement dans le camp des défenseurs de "l'enfant victime" et ne consentent à la sanction que du bout des lèvres, quand ils ne peuvent faire autrement et lui retrouvent quelques valeurs éducatives… Ils participent ainsi à la création d'un lieu commun: le primat absulu de la compréhension bienveillante sur la considération de la responsabilité du sujet. 5.1. Le dilemme: entre déterminisme et libre arbitre 5.2. Anticiper l'enfant comme sujet: un impératif 5.3. Respecter l'enfance et comprendre l'enfant: une nécessité 5.4. Permettre l'émergence du sujet et former à la liberté 5.5. "Former à la liberté" … oui … mais comment ? p Education à la liberté

34 5.1. Le dilemme: entre déterminisme et libre arbitre
1/2 5.1. Le dilemme: entre déterminisme et libre arbitre Tant que l'on reste au niveau des principes, 2 postures sont possibles lors de "situations conflictuelles" avec un enfant ou un adolescent : L'éducateur peut considérer l'enfant comme déterminé par l'ensemble des influences qui s'exercent sur lui et l'absoudre de toute responsabilité. L'éducateur peut postuler l'existence d'une liberté irréductible à toutes les influencent qui s'exercent sur le sujet. Il développe alors une écoute bienveillante et tente d'intervenir en amont –par une action sociale et politique- sur les causes de son comportement. Il considère alors que le sujet est toujours capable d'y résister et n'hésite pas un instant à le sanctionner. Ces 2 postures éducatives renvoient à des positions philosophiques bien identifiées : Déterminisme plus ou moins revu et corrigé par les "sciences humaines" Libre arbitre de la philosophie classique plus ou moins revisitée par une "morale de la responsabilité" Respecter l'enfant impose avant tout de comprendre la situation de l'enfant et ne pas brutaliser un psychisme en construction, sans possession des moyens de s'automiser Affirmer l'existence d'une liberté même dans les pires situations personnelles et sociales et supposer qu'il y a possible résistance de l'enfant p 1

35 2/2 Ces 2 positions engendrent, l'une et l'autre,
des postures tout aussi légitimes que dangereuses ! La "posture compréhensive" est légitime parce qu'il serait absurde d'abolir par décret les situations concrètes différenciées, avec leur cortège d'accidents psychologiques et de réalités sociologiques souvent dramatiques que subissent les sujets. La "posture moraliste" est légitime parce que son volontarisme peut précisément arracher le sujet à ses déterminismes et faire advenir précisément ce que vise la démarche éducative: la capacité de décider librement et de faire mentir ainsi les pronostics psycho/sociologiques Cependant, la "posture compréhensive" Peut facilement basculer dans un compas-sionnisme aussi bienveillant qu'inefficace Cependant, la "posture moraliste" Peut devenir un appel aussi pathétique que vain au "redressement moral" Comment sortir de l'impasse ? En faisant face clairement à la contradiction, comme le préconisait Pascal, plutôt qu'en choisissant arbitrairement un des 2 termes ou –pire peut-être ! – en alternant des postures contraires au gré des circonstances car "ni la contradiction n'est marque de fausseté, ni l'incontradiction n'est marque de vérité." Pensées Sous dir. L. Brunschvicg Flammarion – 1993 p.384 p 1

36 5.2. Anticiper l'enfant comme un sujet: un impératif
1/2 5.2. Anticiper l'enfant comme un sujet: un impératif Pour bien comprendre la "posture moraliste" dans son caractère radicalement impératif, il faut revenir à Descartes qui distingue plusieurs "degrés de liberté". Au plus bas, la "liberté d'indifférence" où le sujet est mis en demeure de choisir entre 2 options sans qu'aucun désir ne prévale, ni qu'il soit engagé dans le moindre raisonnement. S'il veut échapper à l'immobilité, sont choix ne peut être qu'aléatoire et sa liberté s'apparente ici plutôt à un caprice. La liberté doit pouvoir s'exercer aussi dans des situations où nous savons ce que nous devons faire: c'est la "volonté éclairée" quand la connaissance, loin d'atténuer la liberté, la renforce et l'accomplit. Mais comment peut-on être libre si tout nous invite, y compris l'exercice de notre jugement, à prendre la "bonne décision" ? Justement non, répond Descartes, car la forme supérieure d'exercice de la liberté réside précisément dans la suspension du jugement, la capacité de refuser l'évidence au nom de l'exercice de la raison critique Ainsi, quelle que soit la force des influences que nous subissons, quelle que soit la puissance des déterminismes dans lesquels nous sommes enserrés, nous conservons la possibilité de dire "non" et, si nous disons "oui", nous le faisons donc librement. p 2

37 2/2 Aussi étonnante et étrangère soit-elle à nos modes de pensée, la posture de Descartes peut apparaître légitime en éducation: en effet, dans la mesure où la tâche de l'éducateur est de contribuer à l'émergence de la liberté de l'autre, son devoir n'est-il pas de lui imposer systématiquement la responsabilité de ses actes, au nom du fait qu'en dépit de toutes les influences qu'il subit, il pouvait faire autrement. "L'indépendance que nous sentons en nous suffit pour rendre nos actions louables ou blâmables." Descartes Bien sûr … … nous pouvons argumenter qu'enfant ou un adolescent en formation n'est pas encore un sujet autonome et qu'il n'est donc pas vraiment capable de résister aux influences qu'il subit … … nous pouvons utiliser toutes les justifications possibles que nous offrent les scien-ces humaines et les travaux qui insistent sur la reproduction sociales des inégalités … Mais … … c'est oublier le statut même des recherches en sciences humaines: les données des-criptives qu'elles nous proposent ne peuvent nullement dicter ce qui doit arriver … … ni, a fortiori, nous interdire de faire mentir leurs constats ! "Il faut que la raison se considère même comme l'auteur de ses propres principes à l'exclusion de toute influence étrangère." Kant Que les enfants soient empêchés d'apprendre et de penser par leur histoire personnelle et sociale est une chose; que nous ne puissions pas pour autant faire appel à leur liberté pour leur permettre d'apprendre et de penser en est une autre … Comment aider un enfant à s'émanciper du donné si ce n'est en supposant l'existence de ce qu'on veut faire émerger ? p 2

38 5.3. Respecter l'enfance et comprendre l'enfant: une nécessité
La philosophie classique fixe un idéal éducatif légitime et ambitieux, parfaitement entendable et particulièrement respectable… mais pourtant, nous résistons … Comment exiger, en effet, d'un être en formation ce qu'on exige d'un adulte ? Les défenseurs des droits de l'enfant ne cessent de plaider son "inachèvement" et de demander qu'on sursoie au couperet de sanctions injustes parce qu'appliquées in abstracto sur des sujets fragiles à qui l'on n'a pas encore donné les moyens d'échapper à l'histoire dont ils sont pétris. Un des apports théoriques de Thierry est sa définition du refus de parvenir. qui a exercé une grande influence notamment sur Marcel Martinet et sur les auteurs du courant de la littérature prolétarienne. Ne bascule-t-on pas dans le rêve d'un enfant parfait, une sorte de "sujet philosophique" que nul n'aurait jamais rencontré lorsque l'on veut traiter comme également "libres" des enfants accidentés vivant dans des milieux sociaux défavorisés et des enfants privilégiés sans problèmes personnel et matériel particuliers ? La posture philosophique rencontre toujours la résistance d'enfants concrets que l'on ne peut se contenter de décréter "sujets de raison" en espérant simplement que cela leur permettra miraculeusement de le devenir. C'est ce que nous apprend Albert Thierry dans L'Homme en proie aux enfants, lui qui croyait n'avoir qu'à allumer une étincelle pour faire s'enflammer des consciences et qui doit composer avec "le torrent des inclinaisons naturelles"… p 3

39 5.4. Permettre l'émergence du sujet ET former à la liberté
Fernand Deligny a créé en 1948 "La Grande Cordée" pour proposer une alternative à l'approche paternaliste de la "sauvegarde de l'enfance. S'il s'en prend vigoureusement à l'approche compassionnelle des difficultés des jeunes, il est néanmoins sévère envers les "redresseurs d'enfants". Ainsi, tout au long de Graine de crapule, il nous transmet une ligne de passage qui échappe à l'oscillation entre le pansement compassionnel et le dressage autoritaire. Deligny sait que les sanctions systématiques ne font guère avancer les choses et détournent du véritable travail éducatif: "T'interdire de les punir t'obligera à les occuper !" Deligny sait aussi que la seule écoute empathique des difficultés des enfants ne les fait pas progresser et conduit l'éducateur vers bien des déconvenues: "Trop se pencher sur eux, c'est la meilleure position pour recevoir un coup de pied au derrière !" La compassion fataliste dissout le sujet en lui quand nous devrions l'interpeller pour lui permettre de se mobiliser. Le jugement brutal envers "l'enfant coupable" suscite le repli et l'entêtement dans un comportement qui devient finalement une revendication identitaire. L'imputation ! Voilà le point critique qui fait basculer l'éducateur de la position idéologique dans l'action pédagogique. Il doit aider le jeune à s'imputer progressivement ses propres mots, ses comportements, ses choix … pour pouvoir "se faire œuvre de lui-même" (Pestalozzi). p 4

40 5.5. "Former à la liberté" … oui … mais comment ?
La liberté est difficile à assumer et néanmoins… "nous sommes condamnés à être libres." Sartre Pour se construire, un enfant a besoin d'être … … entendu sans être forcément approuvé … accompagné dans sa recherche de liberté … sanctionné en reconnaissance de sa responsabilité C'est l'écoute de l'adulte qui fait exister l'enfant Echec ? Faute ? Difficulté ? Impasse ? -> aider à s'interroger Sanctionner c'est d'abord reconnaître la responsabilité d'un sujet Cela lui permet de transformer "l'ordre épisodique en ordre logique", son rapport au monde et à lui-même. Il se ressaisit ainsi de la temporalité et lui donne sens La métacognition permet cela: -> repenser le contexte -> explorer les occasions ratées -> identifier les possibles futurs Sanctionner, c'est féliciter, c'est faire un signe, c'est marquer une étape, c'est permettre à un sujet de s'imputer ses propres actes, reconnaître sa liberté ! L'écoute de l'adulte s'organise avec l'empathie, la congruence et la considération positive inconditionnelle "L'imagination morale" déverrouille le destin, permet la réflexion, ouvre à la décision C'est pourquoi, quand la sanction est négative, elle doit aussi avoir cette caractéristique fondatrice: un appel à grandir ! p 5

41 La pédagogie n'est pas un luxe
Conclusion La pédagogie n'est pas un luxe 1/2 En 1921, à l'occasion de la fondation de la Ligue internationale pour l'Education nouvelle, Adolphe Ferrière rédige une charte qui résume, en 30 points, les principales caractéristiques des "Ecoules nouvelles": on y trouve, à côté de considérations qui apparaissent aujourd'hui très datées, des principes qui sont devenus tout à fait banals, comme la "coéducation des sexes" et, surtout, un ensemble d'affirmations qui constituent largement encore la vulgate idéologique de "la bien-pensance pédago": L'Ecole nouvelle … … s'appuie sur les données de la psychologie de l'enfant et sur les besoins de son corps et de son esprit, … établit son programme sur les intérêts spontanés des enfants, … recourt à l'activité personnelle de l'enfant et au travail collectif, … forme une république scolaire: l'assemblée générale prend les décisions importantes concernant la vie de l'école, … est fondée sur la collaboration effective de chacun à la bonne marche du tout, … organise l'apprentissage de l'entraide sociale et de la solidarité. Ainsi, un siècle et demi après la publication de L'Emile et Du contrat social, 122 ans après l'expérience de Pestalozzi à Stans, environ 30 ans après la 1ère "new school" à Abbotsholme, quelques années après la 1ère Guerre mondiale, convergent à Calais une aspiration politique et un projet éducatif: il s'agit de construire une société nouvelle grâce à une éducation respectueuse de tous et de chacun. Et malgré toutes les divergences qui ont pu apparaître, la vulgate du congrès de Calais a survécu parce que les principes de Ferrière constituent sans doute une formulation historiquement pertinente et idéologiquement acceptable de ce que Daniel Hameline nomme "l'insurrection pédagogique". p Concl

42 Au regard des enjeux, la pédagogie n'est vraiment pas un luxe !
2/2 * Daniel Hameline, Courants et contre-courants dans la pédagogie contemporaine, ESF, 200, p. 93 et p. 95 Ainsi, c'est dans "l'insurrection pédagogique", que les éducateurs vont puiser leur énergie et trouver leur identité à la fois: "Il est impossible d'éduquer sans croire, sans espérer, c'est-à-dire sans s'indigner de l'état dans lequel se trouve aujourd'hui le bien le plus précieux de l'humanité, son enfance, vouée aux nuisances de toutes sortes, à la stupidité, à l'incurie de l'espèce malfaisante que nous sommes." Et c'est bien là que s'origine toute entreprise pédagogique: "contre la fatalité des dons, celle des favorisés, celle des violents, elle est une indignation tranquille." * Elle nous rappelle inlassablement, malgré ses bégaiements théoriques et les errances de ses partisans, que nous ne pouvons éduquer que munis d'un viatique aussi simple dans sa formulation que complexe dans sa mise en œuvre: Tout sujet peut apprendre et grandir Nul ne peut contraindre un sujet à apprendre et grandir Nous n'avons jamais fini d'inventer des situations qui permettent à chaque sujet d'apprendre et de grandir Mais pour cela, encore faut-il que les pédagogues prennent le temps de l'analyse et travaillent rigoureusement sur le contenu de leurs propositions. Il faut que les militants et les chercheurs s'efforcent de dissiper les équivoques, de lever les confusions, de regarder ce que, précisément, ils sont en train de dire et de faire. Impossible de laisser simplement les "pédagogies nouvelles" à l'estime, en oubliant qu'elles compensent bien souvent leurs insuffisances théoriques par le charisme de leurs promoteurs et le dévouement de leurs zélateurs ! Pour ce faire, il y a urgence à replacer l'histoire de la pédagogie et la réflexion pédagogique au cœur des "sciences de l'éducation". Au regard des enjeux, la pédagogie n'est vraiment pas un luxe ! p Concl

43 1. Méthodes actives 5. Education 2. Motivation à la liberté
Quitter 1.1. "La méthode active" Intro 1.2. "L'école active" La pédagogie est un sport de combat La pédagogie n'est pas un luxe ! 1. Méthodes actives 1.3. "La pédagogie active" Concl Des lieux communs aux concepts clefs 2.1. Sortir du cercle vicieux 5.5. Former à la liberté 1.4. "Faire agir pour faire apprendre" 2.2. Attendre … ? 5.4. Emergence du sujet 5. Education à la liberté 2. Motivation 5.3. Respecter l'enfant 2.3. Détourner un désir existant 5.2. L'enfant -> sujet ! 2.4. Vers une pédagogie de la culture 5.1. Déterminisme ? Libre arbitre ? 2.5. Susciter le désir d'apprendre 3. Individua- lisation 4. Respect de l'enfant 3.1. "L'école sur mesure" ou "se mesurer à l'école" ?… 4.4. Rendre possible la pensée 4.3. Expression + Education 3.2. L'individualisation en "?" Réflexions d'un pédagogue 4.2. Tout faire en ne faisant rien 3.3. De gestion tech. des diff. à pédagogie différ. 4.1. Enfant créateur ? .. Culte des préalables ? 3.4. Différencier la pédagogie TM

44 EDUCABILITE LIBERTE Une exigence fondatrice Un principe à respecter
Deux principes contradictoires … à tenir pourtant ensemble ! EDUCABILITE LIBERTE Une exigence fondatrice Un principe à respecter Danger ! Manipulation, volonté de briser la résistance de l'autre Danger ! Abstention éducative, résignation Réflexions d'un pédagogque Educabilité - Liberté

45 FORMALISATION FINALISATION
Deux principes contradictoires … à tenir pourtant ensemble ! FORMALISATION FINALISATION Une exigence fondatrice qui spécifie l'école Un principe sans lequel les activités "tournent à vide" Danger ! Formalisation et perte de sens Danger ! Marginalisation des apprentissages Réflexions d'un pédagogque Formalisation-Finalisation

46 Réflexions d'un pédagogue Les fondamentaux L'acte pédagogique
La formation des enseignants Une série d'entretiens avec Philippe Meirieu La manière d'enseigner Le pédagogue chercheur L'élève au cœur du système Educabilité et liberté Education et répression Accès: clic sur le thème choisi Laïcité et liberté Pour se former, nourrir des débats, compléter des documents divers (cours de pédagogie, cours de philosophie de l'éducation)... : dix modules vidéo de trois à cinq minutes sur dix thématiques fondamentales La coopération parents/profs franceTVéducation Philippe Meirieu ESF – Paris

47 Merci de signaler erreurs et bugs repérés, améliorations souhaitées à
Fin Vous pouvez … … quitter la présentation en cliquant sur la flèche en haut sur votre gauche ou en pressant sur la touche "Enter" … choisir l'une des parties en cliquant sur la puce correspondante Merci de signaler erreurs et bugs repérés, améliorations souhaitées à p


Télécharger ppt "Pédagogie: des lieux communs … … aux concepts clefs"

Présentations similaires


Annonces Google